Sachant
que les politiciens ne prennent des décisions qu’en faveur des intérêts
privés nous devrons encore subir des déclarations
contradictoires du genre «nous avons l’intention de réduire les GES tout en poursuivant
l’exploitation gazière/pétrolière du sud au nord du Québec». Le Quotient
Environnemental de nos génies en herbe est si bas, que je parie qu’ils ne
savent même pas ce que veut dire «Roundup» et néonicotinoïdes. Sinon il y a
longtemps qu’ils les auraient totalement interdits.
Une cartomenteuse disait à un client :
– Jusqu’à
l’âge de quarante ans, vous vivrez dans la misère et la solitude.
– Et
après?
– Vous
y serez habitué!
Ma foi, c’est ce que vit notre pauvre Dr Couillard :
«Je n’ai pas un sou à l’extérieur du
Québec. J’en ai à peine assez pour mes prochaines années», a-t-il déclaré.
Tout est relatif...
Tout est relatif...
Philippe
Couillard possède des avoirs nets de 441 919 $. De plus, il est propriétaire
avec sa conjointe d’une résidence à Saint-Félicien, au Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Sa participation à 50 % dans cette demeure vaut 245 000 $. Sa conjointe,
Suzanne Pilote, a déclaré des avoirs nets de 1,009 million de dollars en date
du 31 décembre 2017. Outre la propriété conjointe de la résidence de
Saint-Félicien, elle possède un condominium à Québec (103 500 $), un immeuble
locatif à Roberval (175 000 $) et une résidence secondaire à Mashteuiatsh (110
000 $). S’il ne divorce pas, son épouse peut lui éviter le CHSLD et lui assurer
une retraite dorée.
Quant à François
Legault (chef de la CAQ) ses actifs financiers sont évalués à 9,966 millions de
dollars et il possède une propriété évaluée à plus de 4,5 millions de dollars. Il
serait étonnant qu’il finisse ses jours dans un des CHSLD de luxe qu’il se propose de
faire construire.
Source des données financières :
Bref,
nous n’avons pas fini d’entendre des paradoxes à grimper dans les rideaux.
«Vous avez besoin d’une dizaine de concepts
opérationnels, c’est-à-dire de mots qui ne veulent strictement rien dire mais
qui donnent l’impression de dire quelque chose. Là, je vous ai préparé une
communication avec 17 mots, c’est pour les besoins du spectacle, c’est énorme.
Vous n’avez jamais, jamais, besoin de ça, vous n’êtes pas là pour faire passer
le maire pour un imbécile. Lui, il utilise à tout casser 5 mots, 6 mots : vie
associative, partenariat... Le préfet, s’il est là, utilise deux mots :
république, sécurité...» ~ Franck Lepage (Langue
de bois)
À voir ou
revoir :
Amusez-vous
avec des amis à imiter Franck Lepage. Inscrivez une vingtaine de mots (v. liste
ci-après) sur des cartons, pigez au hasard et brodez un mini discours électoral
à tour de rôle. Des heures de plaisir.
Le dictionnaire
politique recèle quantité d’expressions-clé, que l’économiste Ianik Marcil appelle
métaphores et trompe-l’œil. Quelques exemples (ordre alphabétique) :
acceptabilité
sociale; angoisse fiscale; ascenseur social; assainir les finances; austérité;
bulle spéculative; capital humain; changement; citoyen corporatif, classe moyenne;
création de richesse; crises économiques; croissance; déficit zéro;
délocalisations / relocalisations; équilibre budgétaire; externalités
négatives; fiscalité créative; fleurons de l’économie; gratuité; gestion de l’offre;
inflation; influenceurs; libre-échange; loi de l’offre et de la demande;
mobilité de la main-d’œuvre; modernisation de l’État; optimisation fiscale;
partenariat public-privé; payeur de taxes; solidaires; valeurs; vraies
affaires; zone de turbulence.
«... les
détournements du discours économique et politique masquent les rapports de
pouvoir en jeu et les conséquences néfastes de notre activité économique. Des
stratégies rhétoriques sont sciemment utilisées par les détenteurs de pouvoir
afin d’enfumer la population et éviter qu’elle puisse imaginer possible un
monde différent. Le recours à ces stratégies ne résulte pas d’un vaste complot ourdi
par les politiciens, les grands patrons et les dirigeants des organisations
internationales : elles sont nécessaires à la perpétuation du statu quo et assurent la pérennisation
du rôle social de tous et de toutes. Nommer le réel en modifie notre perception
et, ce faisant, oriente les choix que nous faisons pour le transformer ou le
laisser en l’état.» (Ianik Marcil, Avant-propos, p. 7)
Source :
Les passagers clandestins, Métaphores
et trompe-l’œil de l’économie, Éditions Somme toute, 2016. Un livre à étudier pendant
les quatre prochaines années...
~~~
Peu
«Tournoyer.
Jusqu'à se perdre. Une question lève d’anciennes erreurs ou d’autres questions
et ainsi de suite jusqu’à ce qu’au-dedans ne reste qu’une poussière épaisse,
jaune, sale. Savoir, culture, titres... si peu de poids que cela devient vite éboulis
de masques, politesse de langue, orgueil creux... Milliers de livres : amas.
Les vérités sont offertes, les expériences, les circuits de l’esprit : on
coupe, on se sert, et à force on se perd parmi les équilibres possibles, mal :
difficile de trier, de mêler. Systèmes complexes, brillants, s’entrechoquant. Armures,
plus ou moins durables, élégantes, pratiques, personnalisées... Ne pas être nu,
voilà l’essentiel, semble-t-il.»
~ Antoine
Emaz, C’est, Deyrolle, 1992, p.24
~~~
(1) La
dramaturgie sociale selon le sociologue et linguiste Erving Goffman* : «Notre
personnalité n’est pas un phénomène interne, mais la somme des différents «masques» que nous portons tout au long de
notre vie. La vie sociale est une sorte de théâtre où les individus sont des
acteurs qui endossent des rôles, différents selon qu'ils sont au travail, dans
une soirée mondaine ou dans l'intimité du foyer. Le but du jeu est de faire
bonne figure et de permettre à chacun de garder la face.»
Photo :
Madinin’Art, Critiques culturelles de Martinique
Métaphore théâtrale
La présentation de soi (in La
Mise en scène de la vie quotidienne)
Goffman,
dans La présentation de soi, envisage la vie sociale comme une «scène» (région
où se déroule la représentation), avec ses acteurs, son public et ses
«coulisses» (l'espace où les acteurs peuvent contredire l'impression donnée
dans la représentation).
Il nomme «façade» différents éléments avec
lesquels l'acteur peut jouer, tel le «décor», mais aussi la «façade personnelle»
(signes distinctifs, statut, habits, mimiques, sexe, gestes, etc.). Les acteurs
se mettent en scène, offrant à leur public l'image qu'ils se donnent. Ils
peuvent avoir plusieurs rôles, sans qu'il y en ait un plus «vrai» que l'autre,
et prendre leur distance vis-à-vis d'eux, jouant sur la dose de respect à la
règle qu'ils jugent nécessaire ou adéquat.
Les acteurs en représentation construisent
une définition commune de la situation. Une «fausse note» est une rupture dans
cette définition, à la suite d'une gaffe ou d'un impair commis par un ou
plusieurs acteurs. Cela produit une représentation contradictoire, une remise
en question de la réalité commune, causant un malaise général. Pour éviter ces
impairs, des techniques de protection, aussi appelé «tact», sont mises en
œuvre, comme les «échanges réparateurs» telles les excuses ritualisées, les «aveuglements
par délicatesse», etc.
Stigmate (in Stigmate. Les usages sociaux
des handicaps)
La «stigmatisation»
d'un individu intervient, pour Goffman, lorsqu'il présente une variante
relative par rapport aux modèles offerts par son proche environnement, un
attribut singulier qui modifie ses relations avec autrui et en vient à le
disqualifier en situation d'interaction. «Cet attribut constitue un écart par
rapport aux attentes normatives des autres à propos de son identité». Chaque
individu est plus ou moins stigmatisé en fonction des circonstances, mais
certains le sont plus que d'autres : tous peuvent être placés sur un «continuum».
Les stigmates sont d'une grande diversité, s'appliquant aussi bien à la
psychologie individuelle qu'aux relations sociales d'une personne donnée :
parmi eux, le passé des individus, les handicaps, les tares de caractère,
l'homosexualité, l'appartenance à un groupe donné, etc.
Goffman classe ces stigmates dans deux
catégories différentes : les stigmates «visibles» et «invisibles». Les premiers
caractérisent les attributs physiques et les traits de personnalité directement
apparents lors du contact social, les seconds regroupent toutes les facettes de
l'individu difficilement décelables lors d'un contact visuel avec celui-ci.
L'acteur va donc tout mettre en œuvre afin de cacher ce stigmate ou en tout cas
d'éviter qu'il ne constitue un malaise chez son public. Goffman nomme «contacts
mixtes» les interactions à risques entre normaux et stigmatisés. Le risque de
«fausse note» y est théoriquement plus élevé. L'auteur met toutefois en garde ses lecteurs
contre le risque de prendre trop au sérieux cette métaphore.
Métaphore du rituel (in Les
rites d’interaction)
La «face»
est le terme employé par Goffman pour désigner «la valeur sociale positive
qu'une personne revendique effectivement à travers une ligne d'action que les
autres supposent qu'elle a adoptée au cours d'un contact particulier», explique
Goffman dans Les Rites d'interaction. En interaction avec d'autres, la règle
fondamentale que doit respecter tout individu est de «préserver sa face et
celle de ses partenaires». C'est la condition de possibilité de toute
interaction, car la face est essentielle, sacrée en un sens. Différentes
stratégies individuelles de «figuration» viennent garantir le respect de sa
face et celle d'autrui, évitant de les compromettre : il s'agit de ce que l'on
appelle le «tact», les règles de savoir-vivre ou encore la diplomatie. Des
échanges réparateurs viennent rétablir l'ordre lorsqu'un incident a eu lieu :
le(s) fautif(s) s'excuse(nt), le public lui pardonne, afin de retrouver un
équilibre.
Dans toute interaction, un certain niveau
d'engagement est requis, ainsi qu'un soutien à l'engagement des autres. Cet
«engagement» peut être défini par le maintien d'une attention intellectuelle et
affective pour l'objet officiel de l'interaction. Il n'est pas facile à
maintenir, mais si c'est le cas, l'interaction est joyeuse, elle marche.
En 1979, Goffman dégage la notion
d'«hyper-ritualisation» dans un article sur les photos de mode, expliquant
qu'un ensemble de publicités de mode manifeste une structure sous-jacente
commune. Les stéréotypes publicitaires renseignent sur des stéréotypes tirés de
la vie réelle. Les notions de standardisation, d'exagération et de
simplification qui caractérisent les rites en général se retrouvent dans les
poses des clichés de mode.
Métaphore cinématographique (in Les
Cadres de l’expérience)
L'ouvrage
Les Cadres de l'expérience ne se limite pas aux interactions, mais traite de
l'expérience. Goffman emprunte la notion de cadre à l'anthropologue Gregory
Bateson. Toute expérience, toute activité sociale, se prête, selon lui, à
plusieurs versions, ou cadrages. Ceux-ci entretiennent des rapports les uns
avec les autres. Ils fixent la représentation de la réalité, orientant les
perceptions, et influencent l'engagement et les conduites. Normalement, ils
passent inaperçus et sont partagés par toutes les personnes en présence.
Erving
Goffman distingue :
– Les cadres primaires. «Est primaire un
cadre qui nous permet, dans une situation donnée, d'accorder un sens à tel ou tel
de ces aspects, lequel autrement serait dépourvu de signification». Parmi eux,
les cadres naturels impliquent l'action de forces ou de lois de la nature et
les cadres sociaux sont le fait d'actions ou d'intentions humaines.
– Les cadres transformés, s'ils sont
«modalisés» sont des transformations qui ne se cachent pas. Par contre, s'ils
résultent d'efforts délibérés destinés à désorienter l'activité d'un individu
ou d'un ensemble d'individus sans que ceux-ci s'en rendent compte, on parlera
de «fabrication». Celle-ci peut être bénigne ou abusive.
Ces
transformations et modalisations de cadre peuvent se superposer les unes aux
autres : on parle alors de premier, deuxième, etc., «degré». Certains cadrages
présentent des «ambiguïtés», la signification de la situation étant peu claire,
le comportement à adapter à leur égard étant difficile à prévoir. Des «erreurs»
de cadrage, c'est-à-dire des malentendus, peuvent également survenir : «le
cadrage semble clair, mais il oriente néanmoins les perceptions et
comportements des personnes dans un sens qui se révèle par la suite reposer sur
des prémisses fausses». On appelle rupture de cadre le moment, souvent pénible,
où l'individu se rend compte qu'il a perçu la situation de manière erronée : la
culture même de nos croyances s'en trouve subitement bouleversée.
* Erving
Goffman est né le 11 juin 1922 à Mannville, Alberta, Canada et mort le 19 novembre
1982 à Philadelphie en Pennsylvanie. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, dont :
La Mise en scène de la vie quotidienne
(1973); Stigmate. Les usages sociaux des
handicaps (1963); Les Rites d’interaction (1974); Les Cadres de l’expérience (1974); L’Arrangement des sexes (1979); Façons
de parler (1981)
Citations
«Il va de
soi que, par définition, nous pensons qu'une personne ayant un stigmate n'est
pas tout à fait humaine. Partant de ce postulat, nous pratiquons toutes sortes
de discriminations, par lesquelles nous réduisons efficacement, même si c'est
souvent inconsciemment, les chances de cette personne. Afin d'expliquer son
infériorité et de justifier qu'elle représente un danger, nous bâtissons une
théorie, une idéologie du stigmate, qui sert aussi parfois à rationaliser une
animosité fondée sur d'autres différences, de classe, par exemple.»
~ Erving Goffman (Stigmate)
~ Erving Goffman (Stigmate)
«Dans
toutes les sociétés, le classement initial selon le sexe est au commencement
d'un processus durable de triage, par lequel les membres des deux classes sont
soumis à une socialisation différentielle. Dès le début, les personnes classées
dans le groupe mâle et celles qui le sont dans l'autre groupe se voient
attribuer un traitement différent, acquièrent une expérience différente, vont
bénéficier ou souffrir d'attentes différentes.»
~ Erving
Goffman (L'arrangement des sexes)
«La
nature la plus profonde de l’individu est à fleur de peau : la peau des autres.»
~ Erving
Goffman