À entendre
les incongruités lancées quotidiennement par le premier-ministre Legault et ses
ministres, toute personne dotée d’un minimum d’intelligence et de lucidité peut
en conclure qu’ils se ridiculisent à chaque fois qu’ils ouvrent la bouche. Ces obsédés
de l’économie ont un coffre-fort en béton dans la cage thoracique au lieu d’un cœur.
Les caquistes sont une preuve qu’il n’est pas utile d’être intelligent et compétent
pour gouverner – Trump l’a d’ailleurs
amplement démontré...
Jacques Nadeau / Le Devoir. Des policiers ont remis une contravention à Albert
Lord parce qu’il ne respectait pas le couvre-feu.
«Au moins neuf contraventions de 1550 $ ont
été données à des itinérants pour non-respect du couvre-feu dans la grande
région de Montréal, selon un décompte fait par la Clinique juridique
itinérante (CJI). Et celles-ci, qui ne représentent que la pointe de l’iceberg
selon les organismes communautaires, ne seront pas annulées par le jugement,
selon le directeur général de la CJI. Les itinérants devront donc les
contester.
«Je me suis senti insulté de recevoir une
contravention pour être dans la rue le soir. Si j’avais un toit, une maison où
aller, j’irais avec plaisir, mais je vis dans la rue, que voulez-vous que je
fasse?»
Albert Lord, 63 ans, est itinérant depuis
qu’il a perdu son appartement il y a cinq ans. La semaine dernière, vers
minuit, il quêtait dans la rue à Lachine, à la recherche d’un coin tranquille
pour dormir. «J’étais trop loin et trop
fatigué pour me rendre dans une ressource d’hébergement», raconte l’homme
derrière son masque bleu, qu’il porte sous le nez.» ...
Des contraventions, David Chapman en a vu
depuis qu’il travaille avec les itinérants. «J’ai une boîte pleine de tickets
au sous-sol», lance-t-il en haussant les épaules.
Il fouille dans la poche de son manteau et
sort trois contraventions qu’il étale sur la table. «Les gens ici vivent au
jour le jour, ils ne savent pas où ils vont manger, s’ils vont être en mesure
de trouver un endroit pour se réchauffer et pour dormir. Ils ont des
traumatismes qu’ils doivent porter au quotidien et les contraventions viennent
ajouter à leur lourd fardeau.» Donald Tremblay, directeur général de la Clinique
juridique itinérante a contesté devant les tribunaux la légalité du décret qui
impose un couvre-feu aux personnes itinérantes. La juge Chantal Masse de la
Cour supérieure lui a donné raison mardi soir et suspendu la distribution de
contraventions aux personnes itinérantes. Québec a par la suite annoncé qu’il
exempterait les personnes itinérantes du décret.» ~ Jessica Nadeau / Le Devoir
https://www.ledevoir.com/societe/594156/au-moins-neuf-sans-abri-ont-recu-une-amende-avant-l-exemption
«Comment avait-on pu penser à
imposer un couvre-feu à des personnes sans domicile fixe? Donc, incapables de
rester «chez eux» de 20 h à 5 h? Ces personnes parmi les plus pauvres et
les plus poquées de notre société couraient en plus le risque d’écoper
d’amendes salées. ... Les itinérants n’avaient pas besoin de couvre-feu. Encore
moins des larmes de crocodile de la Ville et des gouvernements. Ils ont besoin
de logements. Ils ont besoin de soins. Ils ont besoin d’humanité. ... Dans son
ordonnance de sauvegarde, les mots de la juge Masse frappent fort. Une telle
mesure portait atteinte à leurs droits à
la vie, à la liberté et à la sécurité. Contraire aux principes de la justice
fondamentale, son effet était discriminatoire et disproportionné, et le
préjudice causé, irréparable. Cet épisode est un puissant révélateur. Il
nous montre un manque étonnant de sensibilité au gouvernement...» ~ Josée
Legault / Journal de Montréal
https://www.journaldemontreal.com/2021/01/28/sans-abri-un-gros-manque-de-sensibilite
Journal LeRevoir «Ainsi, il
aura fallu le jugement d’un tribunal pour que le gouvernement Legault comprenne
que des personnes sans domicile fixe ne doivent pas faire l’objet
d’interpellations ni de contraventions faute de se trouver à leur adresse à 22
ou 23 h sous un régime de couvre-feu. Cela semblait une évidence, mais sait-on
jamais. On observera à cet égard combien
les politiques de droits de la personne, si souvent dévaluées et même
discréditées par de nombreux partisans et maîtres à penser de ce gouvernement
et de ses politiques d’affirmation nationale, prennent ici tout leur sens. ...
La nation ordinaire de la CAQ n’est pas méchante, ni intolérante, ni raciste,
on y fait valoir la convivialité et souvent même la compassion, un mot plein de
bonté et de bienveillance dans la bouche du premier ministre, et riche de tout
un héritage canadien-français. Seulement, cette
compassion a des degrés, elle devient moins spontanée et un peu moins
bienveillante quand il s’agit de citoyens ou d’aspirants citoyens pas tout à
fait «moyens» ou «ordinaires». Il ne faut pas exagérer dans la compassion :
c’est aller un peu vite que de l’étendre
à des personnes étranges et délabrées qui traînent dans la rue ou à des
laveuses de planchers venues d’ailleurs pour aider dans les CHLSD – et
c’est bien regrettable si elles échappent aux normes nécessaires à l’imposition
d’un couvre-feu ou à l’obtention d’un statut de résidentes. Non, ce n’est pas
vraiment de la méchanceté, c’est juste cette même «insensibilité» avec laquelle on a vu plusieurs
politiques du ministre Jolin-Barrette concernant les immigrants et les étudiants
étrangers.» ~ Pierre Nepveu / Le Devoir
https://www.ledevoir.com/opinion/libre-opinion/594235/une-nation-bien-ordinaire
Je glisse, tu glisses, il glisse...
«L’appel lancé par un François Legault qui,
surfant sur un monticule de neige, invitait les internautes à partager sur les
réseaux sociaux des photos joyeuses de leur quotidien pandémique a vite été
entendu par ses ministres. C’est ainsi qu’on a pu voir Lionel Carmant
danser devant son imposante baie vitrée, Jean-François Roberge jouer de la
guitare sur son divan en cuir devant une immense fenêtre, Sonia LeBel repeindre
un meuble et poser dans son habit de ski, André Lamontagne jouer d’un piano à
queue dans un salon somptueux, Geneviève Guilbault faire une marche avec sa
poussette luxueuse, dans une rue bordée de constructions neuves. «Tous ensemble
pour aller mieux», écrivaient-ils, apparemment sans se douter que ça pourrait
mal passer.
Comment,
en effet, ne pas être insulté de voir la prise en charge de la santé mentale
être réduite à une affaire de petites joies quotidiennes, alors qu’il ne se
passe pas une semaine sans qu’on rapporte de nouveaux signes alarmants d’une
explosion de la détresse – aggravation des troubles alimentaires, de la
dépression, de l’anxiété, des problèmes de consommation? Sans qu’on déplore
l’accès déficient aux services de soutien et l’insuffisance des ressources
distribuées dans l’urgence pour pallier des carences connues depuis longtemps?
Sans verser dans le dolorisme, disons qu’on
accueillerait mieux ce bouquet d’images positives si l’on ne proposait pas que
ça, et si la dernière année n’avait pas été, précisément, une année sans
images. Une année marquée par la mise en sourdine de tout ce qu’on a abandonné
dans les marges. Des marges qui, en fait, se sont drôlement élargies, au point
où, par «marge», il faut comprendre :
tout ce qui s’éloigne d’un niveau de vie où, pour «garder le moral» et «aller
mieux», il suffit de se tourner vers des biens, des loisirs et des espaces
d’évasion que l’on chérit. Même
l’accès salvateur à la nature n’est pas distribué également, c’est même une
évidence. Parlez-en aux familles confinées dans leurs logements trop petits et
trop chers – parce que la pandémie a tout perturbé, sauf la spéculation
immobilière – ou aux sans-abri autochtones arrachés au territoire qu’on laisse
mourir dans la rue.
Ces images ne témoignent pas seulement d’un
accès privilégié au divertissement en ces temps difficiles. Elles s’ajoutent à
une fresque qui dépeint quelque chose comme une «idée caquiste de la vie bonne», esquissée à travers le discours
gouvernemental depuis le début de la pandémie. Ce discours sur les
petits-plaisirs-malgré-la-pandémie s’articule autour d’éléments très précis,
d’un conservatisme assumé, exaltant les
bonheurs de la domesticité et les joies de la consommation dans l’espace privé.
Cette parade est le reflet d’une vision de la société où le rayon de la
solidarité se limite à la sphère domestique et aux liens de sang, où la notion
d’effort collectif rime avec obéissance et autosuffisance plus qu’avec partage
et équité. Une parade qui ignore le manque
éprouvé par ceux qui n’accèdent pas aux loisirs dispendieux ou aux jouissances
de la propriété. Et, à force, cette omission finit par avoir l’air
délibérée. Voilà ce qui choque. ~ Aurélie Lanctôt / Le Devoir
https://www.ledevoir.com/opinion/chroniques/594222/coronavirus-ensemble-avec-qui