31 août 2012

Débats en bref


Ne rien entendre, ne rien voir et ne rien dire,
gage de sagesse et de bonheur **

Ne me demandez pas le score, je ne sais même pas à quoi ils jouent !
:o)

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Se battre pour des illusions ne les rend que plus réelles.
~ Alan Cohen

Se battre pour la paix c’est comme crier pour avoir le silence.
~ Auteur inconnu

Quel que soit ton degré de cynisme, ce ne sera jamais suffisant pour être à niveau.
~ Lily Tomlin 

Si le vote changeait quoi que ce soit, on le rendrait illégal.
~ Emma Goldman

Il n'est pas dans la nature de la politique de faire en sorte que les meilleurs hommes soient élus. Les meilleurs hommes ne veulent pas gouverner leurs semblables.
~ George McDonald

Little things please little minds. 
~ A. Bailey

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** Les trois singes s’appellent Kikazaru (le sourd), Mizaru (l’aveugle) et Iwazaru (le muet).

Symbolique  

«Je n’entends pas ce qu’il ne faut pas entendre» :
Cela signifie qu’il ne faut pas interpréter la parole d’autrui ni entendre uniquement ce que l’on souhaite entendre. Il faut être discret et n’accepter que la parole certifiée et vérifiée (en opposé à croire les ouï-dire, les commérages…).

«Je ne vois pas ce qu’il ne faut pas voir» :
Cela signifie qu’il ne faut pas chercher à voir ce que l’on souhaite mais ce qui est. Il faut éviter les suppositions, et ne pas violer l’intimité ou le secret (en opposé à l’interprétation, au voyeurisme, à la curiosité…)

«Je ne dis pas ce qu’il ne faut pas dire» :
Cela  signifie que notre parole doit être irréprochable. Il ne faut exprimer que ce qui est sur et utile en le faisait de façon claire et sans interprétation (en opposé au mensonge et à la calomnie…).

Françoise David : sincérité

Ce que tu fais parle plus fort que ce que tu dis.  
~ Albert Schweitzer

Il m’arrive de commenter les politiques de nos gouvernements, mais rarement les politiciens eux-mêmes, à moins d’avoir quelque chose de positif à souligner, comme ce fut le cas au décès de Jack Layton. Aujourd’hui, je me permets un second commentaire favorable. 

À mon avis, Madame David fait preuve de droiture. Ni hypocrisie ni arrogance chez cette femme. J’ai un préjugé favorable parce que j’ai assisté à plusieurs de ses conférences quand elle était présidente de la Fédération des femmes du Québec. Je sais que sa première préoccupation est d'améliorer la condition humaine, par tous les moyens possibles.

En tout cas, je lui dis bravo pour sa performance au panel des chefs. Que perdrions-nous à changer radicalement pour du nouveau? Il me semble que Québec Solidaire est peut-être le parti qui rejoint le plus cette vision de Bertrand Picard – voyez les citations ci-après.

Note : je ne suis membre d’aucun parti politique, mais j’écoute, j’observe et je ressens.


Bertrand Picard, de par sa façon de voir la vie, inspire à ne pas craindre le nouveau et à penser autrement. Et, il prêche par l’exemple!

Florilège de citations 

- Notre peur viscérale du doute et de l’inconnu est à l’origine de la plupart de nos problèmes. L'aventure n'est pas forcément un acte spectaculaire, mais plutôt un acte «extraordinaire», c'est-à-dire quelque chose qui nous pousse hors de notre façon habituelle de penser et de nous comporter. Quelque chose qui nous oblige à sortir du caisson de nos certitudes dans lequel nous agissons et réagissons de façon automatique. L'aventure est un état d'esprit vis-à-vis de l'inconnu, une façon de concevoir notre existence comme un champ expérimental dans lequel nous sommes obligés de développer nos ressources intérieures, de gravir le chemin de l'évolution personnelle et d'assimiler les valeurs éthiques et spirituelles dont nous avons besoin comme compagnons de voyage.

- Passer les certitudes par dessus bord pour être ouvert et permettre que d’autres réponses arrivent, d’autres solutions, d’autres stratégies. Et cela passe par un moment de doute, d’interrogation.
      Il ne faut pas remplacer une certitude par une nouvelle certitude car sinon on ne sera jamais assez adaptatif pour le futur. On doit remplacer les certitudes par des moments de doute profond où on ne sait pas quoi faire et où forcément on a l’esprit qui s’ouvre pour recevoir quelque chose, pour écouter les autres, pour réfléchir, pour parfois envisager l’inverse de ce qu’on a toujours cru.
      Cela rend possible une gymnastique mentale qui permet de trouver des solutions auxquelles personne d’autre n’a pu penser jusque là. Il nous faut un turn around des certitudes pour les transformer en ouverture.

- Il ne s'agit pas de convaincre (dès que l'on veut convaincre on est dans un conflit) mais de motiver [d'exciter la motivation des gens].

- J'ai voulu aller chercher d'autres idées dans le souffle du vent pour essayer de mieux marcher sur cette Terre, dans mon rôle de médecin et d'être humain. (...)

- Le ballon avance avec le vent, sans capacité propre à se diriger. L'être humain est poussé par les événements de sa vie, prisonnier de son destin. Pourtant, de même que le ballon peut changer d'altitude pour chercher une couche atmosphérique qui lui fera prendre une autre trajectoire, l'être humain peut s'élever sur le plan philosophique et spirituel et redevenir responsable du cours de son existence.

- Puisqu'on ne peut pas changer le caractère de l'être humain, essayons de composer avec son fonctionnement.


- Quand j'ai pris cette photo, la vitre était givrée à cause de l'humidité de la nuit, et de l’autre coté se trouvait le soleil levant. Vous voyez que de l’autre coté de la glace, il y a l’inconnu, ce qui est non-évident, ce qui ne se voit pas pour les gens qui n’osent pas traverser le rideau de glace. Il y a tant de gens qui préfèrent souffrir dans la glace qu’ils connaissent plutôt que de prendre le risque d’aller à travers la glace pour voir ce qu’il y a de l’autre coté. Et je pense que c’est l’un des problèmes principaux de nos sociétés. Pour beaucoup de gens, le questionnement, l’inconnu et le doute sont dangereux et ils considèrent que nous devons éviter le changement et tout garder sous contrôle. Mais l’inconnu fait partie de la vie. Et dans ce sens, le ballon est une magnifique métaphore.

~ Bertrand Piccard, psychiatre et psychothérapeute… et aventurier!
Site officiel : http://www.bertrandpiccard.com/fr/conference.php

À lire avant de voter…

Petit cours d'autodéfense intellectuelle
Normand Baillargeon *  
Éditions Lux, collection de Liberté, 2005

Petit cours d'autodéfense intellectuelle, est une initiation à la pensée critique. Normand Baillargeon souhaite que les citoyens accèdent «à une information riche, plurielle, qui leur permet de comprendre le monde et d'en débattre». Scepticisme et pensée critique marquent ce livre qui explique l'origine et les actions des médias actuels et des firmes de relations publiques. Aussi, Petit cours d'autodéfense intellectuelle détaille les stratégies pour éviter de nous faire berner. «Dans le langage, des mots permettent de vider la proposition de son sens et de sa substance», explique Normand Baillargeon à propos des mots «fouines». Jusqu'à présent, les commentaires et les questions, souvent complexes, que lui acheminent les lecteurs le motivent. (Radio-Canada) 

Sur Babelio
http://www.babelio.com/livres/Baillargeon-Petit-cours-dautodefense-intellectuelle/2175

Description 
Rédigé dans une langue claire et accessible, cet ouvrage, illustré par Charb, constitue une véritable initiation à la pensée critique, plus que jamais indispensable à quiconque veut assurer son autodéfense intellectuelle. On y trouvera d'abord un large survol des outils fondamentaux que doit maîtriser tout penseur critique : le langage, la logique, la rhétorique, les nombres, les probabilités, la statistique, etc. ; ceux-ci sont ensuite appliqués à la justification des croyances dans trois domaines cruciaux : l'expérience personnelle, la science et les médias. «Si nous avions un vrai système d'éducation, on y donnerait des cours d'autodéfense intellectuelle.» (Noam Chomsky)

Commentaires : 

Par Luniver, le 22 juillet 2011
À lire au moins une fois ! Ce livre est très accessible, chaque point théorique est illustré par un exemple concret et réaliste (ou même tiré de faits réels)
Difficile après avoir lu cet ouvrage de voir un débat politique, une analyse d'expert ou une publicité de la même manière qu'auparavant.

Par baloo, le 05 octobre 2011
Tout au long de la journée, nous sommes exposés à un flot continu d'informations : Télé, radio, internet, presse écrite ... L'auteur de l'ouvrage répertorie toutes les techniques destinées à manipuler ou provoquer une confusion chez le destinataire de ces informations. Ce livre est donc ciblé sur les techniques de manipulation provenant d'entreprises, gouvernements, lobbys... la communication "officielle".
L'ouvrage est découpé en quatre grandes parties :
- le langage
- les mathématiques (probabilités, statistiques, représentations graphiques) (niveau requis pour comprendre cette partie : baccalauréat)
- l'influence de l'expérience personnelle (perception, souvenir, jugement).
- les médias.
Chaque technique est expliquée, et illustrée. J'ai été surpris d'une telle panoplie d'outils mis à la disposition des manipulateurs. Il est fort dommage que l'initiation à la pensée critique ne soit pas une discipline inscrite dans les programmes scolaires.

Par zeroproject, le 08 novembre 2011
Une véritable bible. Rien de plus. Rien de moins. En posant le livre, on sait que le soir-même, on va dormir, beaucoup, mais alors beaucoup, moins con! On devrait davantage nous mettre un tel livre en lecture obligatoire à l'école plutôt que du Zola ou Baudelaire.

Par unpeudeau, le 26 août 2011
Le seul livre qui rende aux matraques l'importance qui leur revient!
Le livre qu'on devrait acheter à la douzaine pour distribuer autour de soi : il ne bouscule pas les idées reçues il offre au lecteur les lunettes nécessaires pour choisir d'adopter ou non les idées qu'on lui propose - des petits outils tous simples à la portée de tous comme y disent ! à lire et à garder dans un petit coin de sa cervelle.

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Vous aimerez peut-être :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2012/05/einstein-le-rebelle.html 

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Son dernier ouvrage :
L'arche de Socrate
Petit bestiaire philosophique
Éditions ADEN, juin 2012

De l'âne de Buridan au zèbre de Drestke, les animaux surgissent depuis toujours dans la pensée et les écrits des philosophes, comme dans ceux des romanciers, des fabulistes, des poètes.

Normand Baillargeon entreprend ici un premier repérage de la présence animale dans l'univers philosophique. On y découvre comment, tout au long de l'histoire des idées, des animaux ont servi de support ou d'inspiration à bon nombre de questions philosophiques sur la nature humaine, le droit des animaux, le déterminisme ou, plus récemment, la mécanique quantique.

Dans ce petit bestiaire, le chat de Schrödinger côtoie les poulets de Singer, le scarabée de Wittgenstein et une trentaine d'autres animaux au cœur d'un parcours à la fois ludique et didactique.

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Vous aimerez peut-être le libellé «Zoofriendly» : 70 articles pour une perception différente des animaux…

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* Normand Baillargeon est professeur en sciences de l'éducation à l'Université du Québec à Montréal (UQAM), essayiste, sceptique, militant libertaire, chroniqueur et collaborateur de différentes revues alternatives. Depuis 2011, il anime avec Xavier Brouillette la chronique De la philo derrière les gros titres, dans le cadre de l'émission Dessine-moi un Dimanche, animée par Franco Nuovo à Radio-Canada.

Son site est inactif depuis 2010, mais on peut toujours y lire ses articles http://nbaillargeon.blogspot.ca/

30 août 2012

Vous êtes chanceux si...

Si vous vous êtes levé ce matin
Plus en santé que malade
Vous êtes plus chanceux 
Que le million d’humains
Qui ne survivra pas cette semaine
À cause de la maladie

Si vous n’avez jamais vécu
Les horreurs de la guerre
La torture et l’agonie de l’emprisonnement
Ni les abominables affres de la faim et de la soif
Vous êtes plus chanceux que les
500 millions d’humains dont c’est le quotidien

Si vous avez de la nourriture dans le frigo  
Des vêtements sur le dos
Un toit au-dessus de la tête
Vous êtes plus riche que 75%
De la population mondiale

Si vous avez de l’argent en banque
Des billets et des cartes de débit dans vos poches
Vous êtes au top du 8% d’humains
Les plus riches du monde
Si vous vivez dans le grand luxe
Vous faites partie du 1%...

Si vous ne faites pas partie
Des 2,5 millions d’humains
Brutalisés, bafoués, violentés
Vendus comme esclaves et cobayes
Pour la prostitution, le travail forcé,
La recherche médicale, etc.    
Vous êtes vraiment chanceux

Enfin, si vous pouvez lire ce message
Vous êtes plus chanceux
Que les 3 milliards d’humains
Qui ne savent ni lire ni écrire

Auteur inconnu

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Steve McCurry

Les clichés de l’iconique photographe Steve McCurry racontent le voyage humain à travers la guerre, la famille, l’amour, la souffrance, les épreuves, la culture et la foi religieuse.

Ses photos sont si belles et saisissantes qu'on oublie parfois le drame sous-jacent.
Ici, c'est impossible...
McCurry parcourt la planète sans relâche pour photographier ces mondes parallèles auxquels nous avons peu ou pas accès.

Vous pouvez voir quelques photographies de son exposition «Wall to Wall» de septembre 2012 – à couper le souffle!
Site : http://stevemccurry.com/  
Blog : http://stevemccurry.wordpress.com/  

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LECTURE COMPLÉMENTAIRE

HOMO ECONOMICUS 
Prophète (égaré) des temps nouveaux
Daniel Cohen
Albin Michel, septembre 2012

Description :

La société devient de plus en plus compétitive. Un monde néo-darwinien où les plus faibles sont éliminés et soumis au mépris des vainqueurs est en train de s'imposer.

Dans les entreprises comme dans les couples, les indicateurs de bien-être reculent. Car la compétition sans la coopération ne fonctionne pas.

Pour l’économiste Daniel Cohen, rien n'est inéluctable dans ces évolutions. Mais à l'heure où des milliards d'humains se pressent aux portes d'un modèle occidental défaillant, il y a urgence à repenser le rapport entre la quête du bonheur individuel et la marche des sociétés.

Prolongeant les réflexions de son précédent livre, La Prospérité du Vice, l'auteur nous entraîne de la Rome antique au Pékin d’aujourd’hui en passant par l’Amérique, dressant une vaste carte des plaisirs et des peines du monde contemporain.

Un essai aussi provocateur qu’intelligent.

L'Homo economicus enferme la nature humaine dans un monde privé d'idéal et, au final, inefficace, soutient Cohen.

Vaticailleries ou politicailleries

Aucune différence…


Le livre Sa Sainteté, les documents secrets de Benoît XVI par Gianluigi Nuzzi, avec ses nombreux documents évoquant de hauts faits de «corruption » et de «malversations » au Saint-Siège, des scandales sexuels chez les Légionnaires du Christ, des négociations avec les intégristes, etc., vient démolir les illusions que certains pourraient encore entretenir au sujet du pouvoir religieux. (Maintenant disponible en français; des chroniqueurs ont trouvé que l’ouvrage se lisait comme un suspense…) 

Qu’il soit religieux ou laïc, un État est un État. Ce qui me surprend, c’est qu’on s’imagine que le Vatican puisse fonctionner autrement que n’importe quel autre gouvernement – est-ce dû à cette naïve foi aveugle qui fait en sorte qu’on croit le Pape infaillible et le clergé au-dessus de tout soupçon?

En résumé :
http://www.lavoixdunord.fr/france-monde/quels-secrets-cache-le-vatican-ia0b0n500848
ou
http://www.lefigaro.fr/international/2012/05/27/01003-20120527ARTFIG00228-ce-que-cache-l-arrestation-du-majordome-du-pape.php

Je visite de temps à autre Rémy de Gourmont (1858-1915), un penseur dont j’apprécie la lucidité, et comme par hasard je suis tombée sur ce qui suit.

L'irréligion au moyen âge
(11.01.1910)

On se fait généralement une mauvaise idée du moyen âge, qui d'ailleurs fut une époque vaste, diverse, contradictoire et propre à justifier toutes les opinions. En ce qui concerne la religion, par exemple, on se représente volontiers nos aïeux courbés sous le joug de l'Eglise et obéissant sans résistance aux caprices de sa tyrannie. Or, la religion du moyen âge se compose de deux éléments, une foi intense dans le mystère religieux, un mépris sans borne pour le prêtre et le moine. Quand il veut représenter un avare, un glouton, le moyen âge prend généralement un prêtre ; mais s'il lui faut un homme capable de contenir tous les vices, il ne manque pas de prendre un moine. A partir du treizième siècle, quand l'influence de saint Bernard ne se fait plus sentir, quand les ordres religieux, multipliés à l'infini, sont déjà en décadence, le moine apparaît vraiment dans la littérature et dans l'art, comme la bête puante au moyen âge. Mais tout le clergé, jusqu'au pape, participe à ce dégoût qui va souvent jusqu'à l'anticléricalisme, jusqu'à l'irréligion. Les prêtres et les imagiers se partagent la besogne.
      C'est d'abord, sans parler des invectives contre Rome, inspirées par la guerre des Albigeois, Thibaut de Champagne. Il déteste les moines, les maudit pour avoir enlevé au monde, comme il le dit, joie, consolation et paix ; pour lui ce sont des bandits qui dépouillent l'homme de tout bonheur, comme les voleurs le dépouillent de sa bourse. Poète, épris de la beauté et des plaisirs qui en découlent, il ne peut voir sans colère et sans honte ces mendiants abjects, qui s'en vont prêchant le renoncement, dont ils donnent mal l'exemple. Rutebeuf dans le même temps se répand en discours plaisants et satiriques contre tous les ordres religieux qu'il énumère complaisamment. Il note l'orgueil des Dominicains, la saleté des Carmes et des Cordeliers, l'avarice des Cisterciens. Comme il raille bien les béguines, alors récemment introduites à Paris ! On disait que leur couvent était le lieu de plaisance des Carmes et qu'un passage secret faisait communiquer les deux maisons. Les béguines (je transpose en français moderne), 
      Qui larges robes ont
      Dessous leurs robes font
      Ce que pas ne vous dis.
      Papelard et béguines
      Du siècle sont la honte.


Telle est la liberté de langage d'un poète parisien au dix-huitième siècle [sic] ; tels sont et son amour et son respect pour les communautés religieuses. Rutebeuf, il avait la foi solide, n'en est pas moins bon chrétien, mais il aimerait assez à envoyer à tous les diables la racaille monacale et une bonne partie du clergé. Les Carmes avaient une réputation effroyable de paillardise ; ils étaient fort redoutés dans les maisons où ils s'introduisaient sous prétexte de demander l'aumône. Jusqu'à la Révolution, l'injure, « Fils de Carme ! » courut les rues.
      Je ne parlerai guère des fabliaux qui sont assez connus et d'ailleurs d'une crudité de langage qui s'oppose à ce qu'on y cherche des exemples. Faut-il raconter l'histoire de ce curé qui n'échappa au sort d'Abélard qu'en tirant quarante écus de son escarcelle ? Ou suivre dans leurs pérégrinations cette troupe de Cordeliers qui a enlevé une jolie fille, l'a habillée en moinillon, et mène ainsi joyeuse vie, jusqu'à ce qu'une honnête dame découvre la supercherie et les invective de belle manière ? Laissons ces folles histoires qui ne visaient qu'à amuser le public. Voici le roman de Renart où la satire va prendre une âpreté extrême contre l'Eglise. Les pèlerinages y sont bafoués : 

      Qui bon y va mauvais revient. 

     Emerveillé de la fourberie et de la renarderie de Renart, le pape en fait son conseiller intime et nul n'aura richesses et dignités s'il ne fait preuve de renarderie. Voilà pourquoi le clergé est si mauvais : tous, pape, cardinaux, prêtres, clercs, moines de toute robe sont également corrompus et également hypocrites. Cela dépasse évidemment la satire ; pour arriver à l'irréligion, car à quoi bon une religion si tout le clergé est infâme ? Voici le roman de la Rose et le ton s'accentue encore. C'est de ce roman qu'est sorti Tartufe, mais il s'appelle, en langue du dix-huitième [sic] siècle, Faux-Semblant. Ce personnage fait tous les métiers, mais surtout celui de moine mendiant. De la bêtise et de la peur des gens, il s'est enrichi « à planté » ; il fait le saint ermite, prêche abstinence, mais il a eu soin d'abord de se remplir la panse de bons morceaux et de bons vins, « comme il appartient à qui est d'église ». On lui demande s'il travaille et il répond avec cynisme : « De travailler, qu'ais-je besoin ? On a trop grand'peine à travailler. J'aime mieux prier devant les gens et m'envelopper du manteau de papelardie. » On ne saurait mieux peindre l'Eglise enseignant les vertus qu'elle ne pratique pas et montrer la vanité d'une morale qui n'est faite que pour duper les sots. Guyot, autre poète satirique du même temps, vitupère férocement prêtres, évêques et cardinaux ; les uns, dit-il, sont usuriers, les autres sont larrons, et tous pleins de luxure. Guyot méprise tous les moines, qu'il connaît, qu'il a vus et bien observés, mais surtout les abbés et les prieurs de Cluny et de Citeaux « qui boivent bon clairet, se gorgent de belles viandes et de gros poissons » pendant qu'à leur porte les pauvres meurent de faim.
      L'auteur inconnu d'Aucassin et Nicolette va plus loin encore. Il attaque tranquillement les dogmes et avoue pour le bonheur du paradis et les tourments de l'enfer un parfait mépris. Ce petit poème, moitié en prose et moitié en vers, on appelait cela une chante-fable, est toujours du treizième siècle, qu'on nous représente comme un siècle de foi immaculée. « En paradis, qu'ai-je à faire ? dit Aucassin. Je n'y veux entrer sans Nicolette, ma très douce amie que j'aime tant. En paradis vont les vieux prêtres, les estropiés et les manchots, qui jour et nuit sont accroupis devant les autels, et ceux à vieilles capes usées et vieilles défroques, qui meurent de faim et de mésaise. Ceux-là vont en paradis, où je n'ai rien à faire. Mais je veux aller en enfer, car en enfer vont les beaux clercs et les beaux chevaliers qui sont morts au tournoi ou à la guerre, et les bons écuyers et les francs hommes. Et là vont les belles femmes courtoises qui ont deux amis ou trois avec leur baron. Et là va l'or et l'argent et le vair et le gris, et là vont harpeurs et jongleurs, et les rois du siècle. Avec ceux-là je veux aller, mais que j'aie avec moi Nicolette, ma douce amie. » Voilà la vraie irréligion, il semble bien, et qui bafoue la croyance même sur laquelle est bâtie la morale chrétienne. Dès le treizième siècle, il y a donc des incrédules en France. Le moyen âge, qui a construit les cathédrales, a eu, lui aussi, ses libertins. Ce n'étaient pas non plus des chrétiens bien fervents, ceux qui, à la même époque, parodiaient la vie des saints, tournaient en ridicule la piété et les miracles, écrivaient, pour égayer le peuple, la vie de saint Tortu, de saint Oignon ou de saint Gourdin. Mais on parodiait bien la messe, et avec le concours même du clergé et dans le sanctuaire même des églises !
      A ces témoignages écrits, M. Camille Enlart, le savant archéologue, vient de joindre, dans les deux derniers numéros du Mercure de France, ceux de la statuaire et ceux de l'imagerie : l'Eglise et la religion ne sont pas mieux traitées par les artistes que par les poètes et les lettrés. C'est d'abord dans les représentations peintes ou sculptées du jugement dernier que l'artiste exerce sa verve satirique. Généralement, il met en enfer le pape, les évêques et les moines, et cette exécution des chefs de sa religion ne devait pas être sans troubler le peuple et lui enlever un peu de sa confiance dans les prêtres. Dès le douzième siècle, on voit dans les sculptures des églises des ânes et des figures grotesques parodier, affublés d'ornements sacerdotaux, les cérémonies liturgiques. A Saint-Saturnin, de Toulouse, c'est maître Renart, vêtu en prêtre et prêchant les poules ; en d'autres églises, il est devenu évêque et il s'adresse à toute la basse-cour, oies, canards, poules et poussins. A la cathédrale de Strasbourg, c'est le cerf qui dit la messe et tous les animaux organisent une procession. Les miniatures des manuscrits représentent des scènes analogues, et même les livres de dévotion, ceux qu'on emportait à l'église pour suivre les offices ; c'était une moquerie universelle. Les Heures de Jean de Berri nous montrent des évêques affublés de coiffures en forme de soufflets, tandis que ce sont des porcs qui ont reçu la mitre épiscopale ; un porcelet vêtu en moine distribue l'eau bénite ; plus loin, un vrai moine donne sa bénédiction à Renart occupé à étrangler un coq. On ne peut représenter plus élégamment les exactions et les meurtres des gens de guerre, toujours absous, moyennant finances ou partage de butin, par les gens d'église. Je ne parlerai pas des danses macabres, trop connues, où la satire est générale, où le clergé est confondu avec le peuple, dans sa marche récalcitrante vers la mort, qui fauche au hasard. Je ne parlerai pas surtout des figures de prêtres ou de moines, étrangement obscènes, que l'on voit encore sculptées en beaucoup d'églises, restes de celles que l'on a détruites, quand on a pu. Leur cynisme dépasse les limites de notre sensibilité.
      Si fort qu'était le clergé, si puissants qu'étaient les moines, ils ne purent s'opposer à la divulgation du mépris qu'ils inspiraient, et ils durent en accueillir la preuve jusque dans leurs églises, jusque dans leurs monastères. On dit que, sûrs de leur pouvoir, ils en riaient eux-mêmes. Il est du moins certain que s'ils aperçurent la satire sous la bouffonnerie, ils ne virent pas l'irréligion sous la satire. Cela les mena tout doucement à Luther et à Calvin, à la férule protestante sous laquelle il n'est plus permis de rire. L'irréligion est devenue philosophique, elle n'en a pas moins ses racines dans les grossières et cruelles satires du moyen âge, qui fut plus clairvoyant, plus hardi et plus libre d'esprit qu'on ne croit communément.

REMY DE GOURMONT  

Compilation des textes de Rémy De Gourmont réalisée par Mikaël Lugan http://www.remydegourmont.org/de_rg/autres_ecrits/revues/depechedetoulouse/notice.htm   
Vous aimerez peut-être «Les théories de l’évolution» du même auteur :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2010/10/levolution.html

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COMMENTAIRE

Tout cela nous met sous le nez notre légendaire crédulité. Par contre, nous n’en sommes peut-être pas entièrement responsables puisqu’on ne cesse de nous cacher la vérité. On veut faire le ménage? Il faut d’abor être capable de voir la poussière…

29 août 2012

Mieux vaut en rire...

À la fin comme au début...  
 
«Le plus triste dans tout ça Joe, c’est que dans 70 ans nous ferons la même chose, nous serons encore chauves, édentés, et nous porterons des couches!»
 
 

28 août 2012

Pour changer d’air !

Preuve qu’on peut transformer de l’ancien avantageusement. 

Irrésistible. En tout cas, ces virtuoses ont l’air de royalement s’amuser, surveillez leurs petits sourires complices... Attaboy!

Album : The Goat Rodeo Sessions  
Performeurs : Yo-yo Ma, Stuart Duncan, Edgar Meyer, Chris Thile




Pour étudier la musique, nous devons apprendre les règles. Pour créer de la musique, nous devons les enfreindre.
~ Nadia Bélanger
 
La musique nous aide à construire nos vies spirituelles, nous apaise, nous console, nous redonne de la joie, nous rend allègre, nous fait danser, chanter.
~ Éric-Emmanuel Schmitt

There are only two things worth aiming for, good music and a clean conscience.
~ Paul Hindemith

One good thing about music, when it hits you, you feel no pain.
~ Bob Marley

23 août 2012

La voie de la paix


Picasso : Le visage de la paix XI 

La voie de la paix ne postule pas que Dieu doit être un pacifiste. Le fossé entre le pacifiste et belliciste appartient à notre psychologie, non pas à la nature de Dieu. L’on peut surmonter la schizophrénie divine en prenant conscience de certaines vérités spirituelles et s’y accrocher.

Dieu n'est pas une personne.
Nous ne pouvons pas déchiffrer son esprit.
L'essence de Dieu est conscience.

La conscience peut être utilisée indifféremment pour la violence ou pour la paix; le choix nous appartient. Lorsqu’elle s’élargit, la conscience humaine choisit la non-violence parce qu’elle est compatible avec l’amour.

Si ces principes sont valides, alors Dieu n'a pas à s’immiscer  dans les affaires humaines. Il représente la pure essence de la vie et de l'amour. Pour résoudre mon angoisse personnelle vis-à-vis de la guerre, je dois transformer ma conscience jusqu'à ce que la violence ne soit plus un choix. Cet argument nous est maintenant familier. Des millions de personnes le comprennent.

Deepak Chopra

Vous aimerez peut-être :
http://artdanstout.blogspot.ca/2012/08/la-paix-un-choix.html

19 août 2012

Chasseurs dans le ciel

Photographe: Léo Caillard
Adresse du site à la fin du message 
Hier après-midi, ma mère et moi profitions du soleil et de la douceur de la brise sur la terrasse du foyer d’hébergement. Un bruit assourdissant, puissant, que dis-je, tonitruant! venu du ciel nous a fait sursauter. Levant les yeux nous avons aperçu deux avions de chasse (F-18 ou F-35?) qui fendaient l’air à très basse altitude. Ma mère, âgée de 92 ans, paniquait : «Qu’est-ce que c’est, sommes-nous en guerre?» Je l’ai rassurée en lui répondant : «Pas encore pour l'instant». Mais quand on voit ces engins-là patrouiller le ciel… 

De retour chez moi, j’ai fouillé Internet pour trouver la raison de cette vision funeste. J’ai trouvé ce qui suit : «À Montréal et en région, si vous voyez des avions militaires dans le ciel, ils s’entrainent! C'est normal, pas de panique.» Comme c’est rassurant! L’article mentionnait par ailleurs qu’il y aura à Montréal un «Festival culturel militaire» du 31 aout au 3 septembre 2012. Quelle coïncidence étonnante, juste avant le jour des élections.

Quoiqu’il en soit,  on pourrait facilement penser qu’il s’agit d’une campagne promotionnelle, espérons qu'elle soit moins barbare que Stars Earn Stripes sur NBC…   
«Stars Earn Stripes n'est pas un simple boot camp pour perdre des kilos en trop. C'est une authentique simulation de guerre, avec explosions et salves de mitraillette à l'appui. Les concurrents utilisent de véritables munitions, dit-on, pour se mettre dans l'ambiance d'une opération militaire, avec l'objectif avoué de rendre hommage aux soldats américains postés à l'étranger. La pub de Stars Earn Stripes a d'ailleurs toutes les allures d'une campagne de recrutement pour les forces armées américaines. () Les journalistes américains n'ont pour la plupart pas été très tendres à l'égard de ce condensé de patriotisme dégoulinant. Mais ils se sont davantage interrogés sur la dispute entre NBC et le clan Osbourne que sur les conséquences de la diffusion d'une émission qui fait aussi ouvertement l'apologie du conflit armé (sous prétexte de célébrer la bravoure et le dépassement de soi). À chacun ses priorités. Hier, une autre fusillade a fait trois morts et autant de blessés dans un campus universitaire du Texas. Mais cela, évidemment, n'a rien à voir.»
~ Marc Cassivi, La Presse
http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/marc-cassivi/201208/14/01-4564872-jeux-de-guerre.php

COMMENTAIRE

J’aime bien l’expression «culture» militaire – comme si la guerre était un jeu virtuel!

* Le côté positif de ma recherche de F-18 est que j’ai découvert un photographe talentueux et très original. Ses mixages de réalité et de virtuel sont spectaculaires et certains ne manquent pas d’humour.
À visiter! http://www.leocaillard.com/

Art Games – description de Léo Caillard :
Ce travail récent est une recherche autour de la question numérique. Actuellement, tout devient peu à peu «digital , presque «virtuel», que ce soit dans les domaines de la musique, des informations, de l’art… S’est alors posé à moi la question du devenir du musée dans le futur. Restera-t-il quelque chose de ces millions de mégaoctets d’informations que nous stockons? Dans 10 ans? Dans 500 ans? Confronter l’esthétique du musée du Louvre, et de ses œuvres d’art ancien, avec le design ultra minimaliste des produits Apple est un moyen de questionner le spectateur autour de ce nouveau rapport à l’image que nous tendons à adopter.

Exemple :

17 août 2012

Fables d’appoint

…pouvant s’appliquer au domaine politique

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Le bruit ne prouve rien. Souvent lorsqu’une poule vient juste de pondre un œuf elle caquète comme si elle avait pondu un astéroïde.
~ Mark Twain


Tableau par Emma Ekwell, 1838-1930

Fabuliste : Jean-Pierre Claris de Florian* 

Le château de cartes 

Un bon mari, sa femme, et deux jolis enfants,
coulaient en paix leurs jours dans le simple hermitage
où, paisibles comme eux, vécurent leurs parents.
Ces époux, partageant les doux soins du ménage,
cultivaient leur jardin, recueillaient leurs moissons,
et le soir, dans l'été soupant sous le feuillage,
dans l'hiver devant leurs tisons,
ils prêchaient à leurs fils la vertu, la sagesse,
leur parlaient du bonheur qu'ils procurent toujours :
le père par un conte égayait ses discours,
la mère par une caresse.
L'ainé de ces enfants, né grave, studieux,
lisait et méditait sans cesse;
le cadet, vif, léger, mais plein de gentillesse,
sautait, riait toujours, ne se plaisait qu'aux jeux.
Un soir, selon l'usage, à côté de leur père,
assis près d'une table où s'appuyait la mère,
l'ainé lisait Rollin; le cadet, peu soigneux
d'apprendre les hauts faits des romains ou des parthes,
employait tout son art, toutes ses facultés,
à joindre, à soutenir par les quatre côtés
un fragile château de cartes.
Il n'en respirait pas d'attention, de peur.
Tout-à-coup voici le lecteur
qui s'interrompt : papa, dit-il, daigne m'instruire
pourquoi certains guerriers sont nommés conquérants,
et d'autres fondateurs d'empire :
ces deux noms sont-ils différents?
Le père méditait une réponse sage,
lorsque son fils cadet, transporté de plaisir, 
après tant de travail, d'avoir pu parvenir
à placer son second étage,
s'écrie : il est fini! Son frère murmurant
se fâche, et d'un seul coup détruit son long ouvrage;
et voilà le cadet pleurant.
Mon fils, répond alors le père,
le fondateur, c'est votre frère,
et vous êtes le conquérant.

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Le Roi et les deux bergers

Certain monarque un jour déplorait sa misère,
et se lamentait d'être roi :
quel pénible métier ! Disait-il : sur la terre
est-il un seul mortel contredit comme moi?
Je voudrais vivre en paix, on me force à la guerre;
je chéris mes sujets, et je mets des impôts;
j'aime la vérité, l'on me trompe sans cesse;
mon peuple est accablé de maux;
je suis consumé de tristesse;
partout je cherche des avis,
je prends tous les moyens, inutile est ma peine;
plus j'en fais, moins je réussis.
Notre monarque alors aperçoit dans la plaine
un troupeau de moutons maigres, de près tondus,
des brebis sans agneaux, des agneaux sans leurs mères,
dispersés, bêlants, éperdus,
et des béliers sans force errant dans les bruyères.
Leur conducteur Guillot allait, venait, courait,
tantôt à ce mouton qui gagne la forêt,
tantôt à cet agneau qui demeure derrière,
puis à sa brebis la plus chère;
et, tandis qu'il est d'un côté,
un loup prend un mouton qu'il emporte bien vite.
Le berger court, l'agneau qu'il quitte
par une louve est emporté.
Guillot tout haletant s'arrête,
s'arrache les cheveux, ne sait plus où courir,
et, de son poing frappant sa tête,
il demande au ciel de mourir.
Voilà bien ma fidèle image!
s'écria le monarque; et les pauvres bergers,
comme nous autres rois, entourés de dangers,
n'ont pas un plus doux esclavage;
cela console un peu. Comme il disait ces mots,
il découvre en un pré le plus beau des troupeaux,
des moutons gras, nombreux, pouvant marcher à peine,
tant leur riche toison les gêne,
des béliers grands et fiers, tous en ordre paissants,
des brebis fléchissant sous le poids de la laine,
et de qui la mamelle pleine
fait accourir de loin les agneaux bondissants.  
Leur berger, mollement étendu sous un hêtre,
faisait des vers pour son Iris,
les chantait doucement aux échos attendris,
et puis répétait l'air sur son hautbois champêtre.
Le roi tout étonné disait : ce beau troupeau
sera bientôt détruit : les loups ne craignent guère
les pasteurs amoureux qui chantent leur bergère;
on les écarte mal avec un chalumeau.  
Ah ! Comme je rirais...! Dans l'instant le loup passe,
comme pour lui faire plaisir :
mais à peine il parait, que, prompt à le saisir,
un chien s'élance et le terrasse.
Au bruit qu'ils font en combattant,
deux moutons effrayés s'écartent dans la plaine;
un autre chien part, les ramène,
et pour rétablir l'ordre il suffit d'un instant.
Le berger voyait tout, couché dessus l'herbette,
et ne quittait pas sa musette.
Alors le roi presque en courroux
lui dit : comment fais-tu? Les bois sont pleins de loups,
tes moutons gras et beaux sont au nombre de mille;
et, sans en être moins tranquille,
dans cet heureux état toi seul tu les maintiens!
Sire, dit le berger, la chose est fort facile;
tout mon secret consiste à choisir de bons chiens

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Les deux voyageurs

Le compère Thomas et son ami Lubin
allaient à pied tous deux à la ville prochaine.
Thomas trouve sur son chemin
une bourse de louis pleine;
il l'empoche aussitôt. Lubin, d'un air content,  
lui dit : pour nous la bonne aubaine!
Non, répond Thomas froidement,
pour nous n'est pas bien dit, pour moi c'est différent.
Lubin ne souffle plus; mais, en quittant la plaine,
ils trouvent des voleurs cachés au bois voisin.
Thomas tremblant, et non sans cause,
dit : nous sommes perdus! Non, lui répond Lubin,
nous n'est pas le vrai mot, mais toi, c'est autre chose.
Cela dit, il s'échappe à travers les taillis.
Immobile de peur, Thomas est bientôt pris,
il tire la bourse et la donne.
Qui ne songe qu'à soi quand sa fortune est bonne
dans le malheur n'a point d'amis.

* Autre fable et biographie :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2011/01/florianet.html

16 août 2012

Comment peser

… le pour et le contre?  
Je trouve assez étrange qu’on associe encore peuples et gouvernements, comme des inséparables. Et ça me dérange royalement qu'on mette tout le monde dans le même panier.

Par exemple on blâme les «Américains» d'être comme-ci et comme-ça, à l’image de leur pouvoir politique; et l’on ne sélectionne et ne montre que des agissements qui reflètent le système politique en question.

J’ai beaucoup d’amis américains et je fréquente de nombreux sites web US qui contredisent totalement tous ces préjugés en quelque sorte racistes. Les Américains ne sont ni mieux ni pire que les Canadiens, les Français, les Espagnols, etcetera. Les Italiens et les Grecs sont-ils satisfaits de leurs gouvernements? Pas plus que les autres peuples.

Prenons par exemple un pays se trouvant sous le joug d’une dictature. Pouvons-nous dire que la population a choisi ce système politique? Bien sûr que non.

C’est la même chose en démocratie. Nous savons que les votes s’achètent, depuis que le vote existe. Si quelqu’un n’a ni gite ni nourriture et qu’on lui en offre, moyennant son vote, que fera-t-il? Il votera en faveur du donateur. Qui agirait autrement?

Facile de dire «allez voter!». Mais pour qui voter lorsque le représentant que nous aimerions voir aux commandes n’existe même pas?

Encore une fois on essaiera de voter pour le moins pire…

Bonne réflexion!

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Vous aimerez paut-être :
Faites comme la cigale
http://artdanstout.blogspot.ca/2012/08/faites-comme-la-cigale.html