25 février 2022

L’impassible tyran

«La violence est le dernier refuge de l’incompétent.» ~ Isaac Asimov, écrivain russe naturalisé américain (1920-1992) 

Image : Serge Chapleau / La Presse, 24 février 2022. [Ndlr : Le rôle de Dark Vader va comme un gant à ce criminel de guerre!]  

«La bêtise ne dépasse jamais les bornes, où qu’elle pose le pied, là est son territoire.» ~ Stanislaw Jerzy Lec,  écrivain polonais (1909-1966)

L’Occident craint la Russie et la Russie craint l’OTAN

Aujourd’hui il y a eu une escalade de sanctions contre la Russie. Mais, Vladimir Poutine a un ami très puissant appelé Xi Jinping; ce dernier a assuré qu’il le sortirait d’une impasse économique si c’était nécessaire – entre tyrans, on se comprend! Si vos amis ukrainiens ne reçoivent pas vos messages, consolez-vous car Xi Jinping les a tous lus lui!

Observons-nous un conflit de longue durée en phase terminale? Une obsession incurable de conquête du despote moscovite?

En tout cas, les Allemands, les Français et les Espagnols qui avaient repoussé l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN en 2008 à Bucarest ont une  bonne part de responsabilité; et Angela Merkel et Barack Obama (encouragé par Merkel) furent les principaux responsables de ce refus.

De sorte que le p’tit Poutine, ainsi à l’abri d’éventuelles représailles de l’OTAN, a pu s’amener avec son artillerie lourde et ses bombardiers pour affirmer sa tutelle sur l’Ukraine : «Make Russia Great Again». Il a même déjà déclaré que l’Ukraine n’avait jamais été un vrai pays. Je suis convaincue qu’en Ukraine, le nombre de vrais Ukrainiens dépasse largement celui des vrais Russes.

Parmi les États qui avaient refusé l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, plusieurs dépendent des Russes pour leurs réserves en énergies fossiles. Ouvrir la porte à l’Ukraine pouvait être considéré comme une attaque directe contre Moscou. Il est vraisemblable qu'ils aient subi des pressions et du chantage de la part de Poutine. Alors, aujourd’hui quand on voit la cohorte des pays membres de l’OTAN multiplier les sanctions pour montrer leur indignation, on se permet de douter. D’autant plus que le pétrole passera toujours avant la vie des gens, n’est-ce pas?  

De quoi est capable cet ancien espion du KGB devenu un dictateur expansionniste et hégémonique? Les Ukrainiens risquent de se retrouver devant un régime communiste totalitaire, un gouvernement fantoche très expérimenté dans la persécution, l’emprisonnement, la torture, l’empoisonnement et l’assassinat des opposants à la Russie, devant un État anti-démocratique, raciste, homophobe, et ainsi de suite. C’est triste et révoltant. J’ai peur pour ce peuple pris en otage par un psychopathe.

L’histoire ne se répète pas, elle continue – relisez comment la Seconde Guerre mondiale (39-45) a commencé. Tout le monde regardait, mais personne ne faisait rien.

«Un vrai ennemi ne te laisse jamais tomber.» ~ Stanislaw Jerzy Lec 

17 février 2022

La colline parlementaire n’est pas un parking pour poids-lourds

Que faire des mastodontes stationnés à Ottawa? Réponse des décideurs : «La plupart de nos problèmes n’ont pas de solution, ou bien les solutions sont pires que les problèmes eux-mêmes.» (Ashleigh Brilliant)  

«Une foule, c'est quoi? c'est rien, des pécores inoffensives si on leur cause yeux dans les yeux. Mais mis ensemble, presque collés les uns sur les autres, dans l'odeur des corps, de la transpiration, des haleines, la contemplation des visages, à l'affût du moindre mot, juste ou pas, ça devient de la dynamite, une machine infernale, une soupière à vapeur prête à péter à la gueule si jamais on la touche.» (Philippe Claudel / Les âmes grises, Stock, 2003)

L’usage de la Loi sur les mesures d’urgence doit être avalisé par la Chambre des Communes et le Sénat. Le débat débute aujourd’hui (17.02.2021) :  

Même si le débat s'annonce long et houleux, l'issue du vote ne fait aucun doute aux Communes. Contrairement au Parti conservateur et au Bloc québécois, le Nouveau Parti démocratique a déjà annoncé qu'il votera avec le gouvernement pour la délégation de pouvoirs supplémentaires aux forces de l'ordre.

     Cependant, rien n'est joué à la Chambre haute, où les sénateurs disposent généralement d'une plus grande indépendance que leurs collègues députés.

     D'ailleurs, plusieurs d'entre eux, comme Julie Miville-Dechêne et Clément Gignac, ont partagé leurs réserves avec Radio-Canada mercredi. «C'est de voir si on ne va pas prendre un canon pour tuer une mouche», a lancé pour sa part le sénateur conservateur Pierre-Hugues Boisvenu. [...]

     En faisant le point sur les divers fronts, [los du point de presse de mercredi] le ministre Mendicino a rappelé que 13 personnes avaient été arrêtées en début de semaine à Coutts, en Alberta, dont 4 sont maintenant accusées de complot pour assassinat de policier.

     Il a aussi rappelé la saisie d’armes à feu, de munitions, de gilets pare-balles, de chargeurs à haute capacité et d'une machette appartenant aux manifestants albertains.

     «La saisie des munitions et les arrestations évoquent le caractère criminel sous-jacent des occupations», a-t-il estimé. "Loin des médias sociaux et des caméras de télévision, il y avait une réelle criminalité sous-jacente. Le danger était concret.»

     Le ministre a ajouté que les manifestations avaient des liens avec une organisation d’extrême droite dont les leaders, basés à Ottawa, souhaitent imposer leurs propres valeurs au détriment de la démocratie. «C’est un groupe organisé, agile, expérimenté, qui est animé par une idéologie extrémiste», a-t-il mentionné.

     Cela étant dit, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) agira de façon «responsable et proportionnelle» pour mettre fin de manière pacifique aux barrages, a-t-il assuré.

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1862718/blocages-convois-cammionneurs-motion-parlement

Caricature : Serge Chapleau «Les enfants des blocages» / La Presse 17.02.2022

Il y aurait une centaine d’enfants qui vivent dans les camions, car les manifestants les utilisent comme protection contre les opérations de démantèlement policières. Odieux! À l'image du niveau d’inconscience de ces abrutis! 

Aux dernières nouvelles, Tamara Lich, une licheuse de fonds hors du commun, est prête à jouer les martyrs, c’est-à-dire à être emprisonnée pour la cause. On va pleurer... Dans une vidéo du 16 février, la main sur le cœur, elle remercie les camionneurs en pleurant de gratitude. Ils vont sûrement la canoniser, la prenant pour un instrument de «la main de Dieu».

Évidemment la plupart des conservateurs soutiennent les camionneurs – ouvertement ou à la dérobée.  

«Convoi de la liberté» : le bordel se poursuit à Ottawa comme si de rien n’était / Des enfants sont utilisés comme des boucliers

Journal de Montréal 12 février 2022

Les citoyens de la capitale n’en peuvent plus de l’occupation des camionneurs et du bruit persistant

     Pendant que les autorités sortaient l’artillerie lourde afin de tenter de chasser les manifestants du pont Ambassador, à Windsor, samedi, la fête a continué de plus belle sous l’œil impassible des policiers dans les rues d’Ottawa paralysées par les poids lourds.

     Une ambiance de carnaval d’hiver régnait au centre-ville parmi les camions immobilisés, alors que des milliers de personnes étaient venues se joindre au mouvement de contestation des mesures sanitaires qui dure depuis maintenant 16 jours. 

     Bien à leur aise, des protestataires du Québec se prélassaient même dans un spa gonflable avec une vue imprenable sur le parlement canadien. L’importante foule rendait difficiles les déplacements à pied sur la rue Wellington.

     Et, comme les fins de semaine précédentes, les enfants étaient nombreux aux côtés de leurs parents.

     En soirée, des feux d’artifice ont éclaté dans le ciel pendant que de la musique jouait à tue-tête. Malgré une injonction, les klaxons se faisaient entendre bruyamment.

Pour l’image

«Surtout le week-end, les organisateurs essaient de projeter une image qu’ils ne sont pas dangereux», rappelle Charles Bordeleau, ex-chef du Service de police d’Ottawa.

     Cette atmosphère surréelle contrastait avec celle qu’il y avait aux alentours du pont Ambassador, à Windsor, où les camionneurs entravent la circulation depuis lundi.

     Après une injonction accordée la veille pour expulser les manifestants, un grand déploiement de policiers a commencé à les repousser au petit matin.

     «C’est là qu’on voit que l’économie est plus importante que la qualité de vie des citoyens», lance une résidente d’Ottawa qui a refusé de se nommer par crainte pour sa sécurité.

Exaspérés

Des centaines d’Ottaviens exaspérés, voire apeurés par la présence du convoi, ont organisé une marche samedi après-midi pour exprimer leur ras-le-bol. Ils n’ont pas voulu s’approcher du centre-ville, de peur que ça dégénère.

     «Il y a des groupes radicaux qui contrôlent l’organisation. Et ils violent les lois sans conséquence, lance Natalia, qui n’a voulu donner que son prénom. C’est inacceptable.»

     Pour sa part, Ling ne se sent plus en sécurité dans son propre quartier : «Je cours pour aller faire l’épicerie. Quand je porte un masque, des gens me crient : “Enlève ça!”» déplore-t-elle.

Des enfants sont utilisés comme boucliers 

La présence d’une centaine d’enfants qui vivent au cœur du convoi pour la liberté est une stratégie délibérée qui a pour but de compliquer le démantèlement de l’occupation d’Ottawa, selon des experts.

     «Amener des enfants, c’est purement stratégique pour soigner leur image et adoucir la situation. Et ça complique les options d’opérations policières», explique André Gélinas, policier retraité de la Ville de Montréal.

    Plus tôt cette semaine, le Service de police d’Ottawa estimait qu’environ 25 % des camionneurs ont des enfants à bord, pour un total d’environ une centaine. La Société de l’aide à l’enfance d’Ottawa a d’ailleurs reçu plusieurs signalements.

Week-ends familiaux

Samedi après-midi, des jeux gonflables avaient été prévus pour eux. Une tente munie de chaufferettes a été montée pour les réchauffer, où l’on distribuait aussi des livres à colorier.

     Un peu plus loin, une clown gardait un œil sur une dizaine d’entre eux qui s’amusaient dans des modules en plastique à quelques mètres des poids lourds.

     En plus de s’en servir pour polir leur image, ceux qui paralysent Ottawa depuis 16 jours utilisent les enfants comme boucliers humains, estime André Gélinas.

     Leur simple présence empêche les policiers d’utiliser la force pour démanteler l’occupation, explique le sergent-détective en précisant qu’il s’agit d’une stratégie bien connue.

Complexe d’intervenir

«Utiliser la force, des gaz dispersants ou des grenades assourdissantes en leur présence devient bien plus complexe. Les conséquences peuvent être bien plus sérieuses pour leur santé notamment», explique-t-il.

     «C’est une tactique utilisée et ça démontre jusqu’où [les camionneurs] sont prêts à aller pour frustrer et déranger notre communauté», renchérit Charles Bordeleau, ex-chef du Service de police d’Ottawa. 

     Plusieurs citoyens d’Ottawa présents à une contre-manifestation y voyaient une stratégie totalement inacceptable.

https://www.journaldemontreal.com/2022/02/12/convoi-de-la-liberte-une-journee-comme-les-autres-malgre-le-decret-a-ottawa

Des journalistes et chroniqueurs doutaient de la provenance étrangère de financement pour le «Convoi de la liberté».

La majorité des dons du «convoi de la liberté» viennent de l’étranger

Anne-Marie Provost et Sandrine Vieira / Le Devoir 15 février 2022

L’identité des milliers de personnes ayant fait un don au mouvement du «Convoi de la liberté», qui proteste contre la vaccination obligatoire et les mesures sanitaires au Canada, a fait l’objet d’une fuite. Une compilation effectuée par Le Devoir montre que la majorité des donateurs proviennent de l’extérieur du pays.

     Plus de 8 millions de dollars US, soit plus de 10 millions en dollars canadiens, avaient été récoltés sur la plateforme de sociofinancement chrétienne GiveSendGo. Le groupe Distributed Denial of Secrets (DDoS) a divulgué la liste des donateurs, dimanche en soirée. L’imposant fichier réunit les noms des 92 844 donateurs, leur adresse courriel, leur pays, leur code postal, le montant du don ainsi que la date.

Selon une analyse des données réalisée par Le Devoir, la majorité des dons proviennent des États-Unis, pour un total de 51 600. En comparaison, un peu plus de 36 000 dons viennent du Canada. Notons qu’il est impossible de vérifier l’exactitude des informations contenues dans le fichier piraté.

     Les donateurs canadiens ont toutefois été plus généreux : leurs dons totalisent 4 311 287 $US, contre 3 626 224 $US en provenance des États-Unis. Le don le plus généreux des États-Unis se chiffre à 90 000 $US.

     Le donateur canadien le plus généreux a quant à lui fait un don de 75 000 $US. Brad Howland, président de Easy-Kleen Pressure Systems au Nouveau-Brunswick, a confirmé avoir octroyé ce montant dans une déclaration à différents médias.

Suite :

https://www.ledevoir.com/societe/674535/convoi-des-camionneurs-la-majorite-des-donateurs-sont-de-l-etranger

8 février 2022

De Bergen à Poilievre

Les camionneurs m’agacent. En particulier les brutes qui polluent les villes au bruit des klaxons tonitruants et au diésel délétère. On voit à quel point certains abrutis méprisent les gens qu’ils perturbent. Ils ne tiennent aucun compte des droits individuels et collectifs. De quelle libârté s’agit-il?

Photo : france.rt

La chef par intérim du parti conservateur du Canada  m’agace aussi. Une fanatique plus à droite que la droite, et plutôt rétrograde semble-t-il. Anti avortement, anti contrôle des armes à feu, homophobe, et j’en passe. Pas étonnant de la voir porter une casquette MAGA. Méfions-nous des admirateurs de QAnon et Donald Trump (1).

Photo : Bergen / MAGA

Dommage que le leader de l'opposition officielle (PCC) Gérard Deltell ait quitté son poste, c’est peut-être le seul conservateur qui ne prend pas l'ouverture d'esprit pour une fracture du crâne!

Caricature : Graeme MacKay / 03.02.2022

Candice Bergen feint un changement de ton à l’ombre de ses déclarations récentes

Marie Vastel à Ottawa / Le Devoir 4 février 2022

La toute nouvelle cheffe intérimaire du Parti conservateur du Canada, Candice Bergen, a voulu présenter un visage plus conciliant au lendemain de son élection. Mais son appui public au convoi de camionneurs qui occupe le centre-ville d’Ottawa et celui de membres de son caucus ont rapidement rattrapé les conservateurs.

     Le ton était calme, les propos posés, pour la première période de questions de la cheffe Bergen. La successeure par intérim d’Erin O’Toole – lequel a été destitué par son caucus mercredi – a reproché au premier ministre Justin Trudeau de ne pas avoir de plan de sortie de crise pour convaincre les manifestants de quitter Ottawa. «Nous parlons d’une impasse sur la colline du Parlement. Nous devons avoir des solutions. Il faut qu’il y ait une main tendue : où est-elle?» a répété Candice Bergen sans jamais hausser le ton.

     En début de semaine, toutefois, le discours était tout autre. Mme Bergen a publié sur Twitter des clichés la mettant en scène aux côtés de camionneurs et de manifestants de sa province. «Ils méritent d’être entendus et ils méritent d’être respectés», écrivait la députée manitobaine.

     Plusieurs conservateurs ont eux aussi appuyé le convoi, et ce, malgré quelques drapeaux aux croix gammées et une occupation qui s’étire. Certains élus estiment que les manifestants ont livré leur message et qu’ils devraient maintenant partir, mais ils ne s’offusquent pas que Mme Bergen leur ait offert un soutien si enthousiaste.

     Le ton de Mme Bergen contrastait mercredi avec ses propos tenus aux Communes lundi. Elle avait alors appelé le premier ministre à rencontrer les manifestants, affirmé que tous condamnent «les gestes de haine et de destruction commis dans toute manifestation» et cité comme exemples «le déboulonnement de la statue de sir John A. [Macdonald]» ou encore «des drapeaux du Hezbollah ou des drapeaux nazis».

     Le ministre des Relations Couronne-Autochtones, Marc Miller, a qualifié cette comparaison de «ridicule» et de «complètement obscène».

     La nouvelle cheffe intérimaire se serait opposée lundi à ce que le Parti conservateur invite les manifestants à plier bagage, selon un courriel adressé à ses collègues et dont le Globe and Mail a obtenu copie. Cette possibilité aurait de nouveau été discutée jeudi, mais aucune décision n’aurait été prise, selon les informations du Devoir.

     Mme Bergen n’est pas la seule à s’être attiré les critiques. Trois élus conservateurs et l’unique sénatrice du parti en Saskatchewan se sont aussi fait prendre en photo avec un camionneur près du parlement mercredi soir. Le maire d’Ottawa, Jim Watson, les a aussitôt accusés sur Twitter de «faire l’éloge de cette activité illégale» qui soumet les résidents du centre-ville au harcèlement de manifestants et au bruit de klaxons incessant depuis maintenant une semaine.

     L’une des députés, Rosemarie Falk, a rétorqué qu’elle «rejette la thèse que des élus ne doivent pas rencontrer, par exemple, des Saskatchewanais qui ont traversé le pays pour être ici afin de porter leur message qu’ils veulent pouvoir travailler».

https://www.ledevoir.com/politique/canada/669822/parti-conservateur-du-canada-changement-de-ton-au-parti-conservateur

Bref, Candice Bergen ouvre largement la voie au candidat d’extrême droite Pierre Poilievre, qui a lui aussi fermement appuyé le «convoi de la liberté» qui paralyse la capitale fédérale. Un populiste libertarien? Les anciens du clan Harper se réjouissent de sa candidature. Il sera intéressant de surveiller les chevaux dans leur course au leadership.

ICI Radio-Canada nouvelle : Le député Pierre Poilievre a annoncé qu’il se lance dans la course à la direction du Parti conservateur du Canada. Il en a fait l’annonce dans une vidéo diffusée sur Twitter samedi.

     M. Poilievre, qui est député de la circonscription ontarienne de Carleton depuis 2015, espère ainsi succéder à Erin O’Toole, qui a été démis de ses fonctions mercredi.

     Il a été remplacé par Candice Bergen, qui occupe la fonction de cheffe intérimaire de l’opposition officielle à Ottawa.

     Il souhaite «faire du Canada le pays le plus libre au monde», ajoutant que les citoyens devraient avoir «la liberté d’élever [leurs] enfants avec [leurs] propres valeurs», et de faire leurs «propres choix en matière de santé et de vaccination».

     Le candidat à la chefferie conservatrice estime que «ceux qui ont le pouvoir, les gouvernements, les médias contrôlés par l’État, les groupes d’intérêts, les grosses corporations, vont se battre pour le garder».

     S’il est élu, M. Poilievre dit vouloir faire du Canada «un pays où le gouvernement est le serviteur, et où les citoyens sont les maîtres».

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1860087/parti-conservateur-leadership-pierre-poilievre

Photo : Pierre Poilievre

Poilievre s’est démarqué en 2020 en publiant une pétition à saveur complotiste contre Justin Trudeau. Interprétant à sa guise une déclaration du premier ministre il en profité pour afficher sa profonde aversion envers lui et son gouverment.

Une théorie du complot s’infiltre dans les rangs des conservateurs

Boris Proulx à Ottawa / Le Devoir 21 novembre 2020

La crainte d’une prise de pouvoir imposée par une «grande réinitialisation» de l’économie après la COVID-19, menée par nul autre que Justin Trudeau, sort des coins sombres du Web pour se tailler une place au sein du Parti conservateur du Canada.

     «Les Canadiens doivent se défendre contre les élites mondiales qui se nourrissent des peurs et du désespoir des gens dans le but d’imposer leur prise de pouvoir» : telle est l’invitation lancée par le député conservateur d’Ottawa Pierre Poilievre à une pétition visant à «arrêter la grande réinitialisation».

     En moins de 72 heures d’existence, la pétition hébergée sur le site Web de M. Poilievre comptait 80 000 noms.

     L’indignation tire son origine de propos tenus par Justin Trudeau lors d’un discours à l’ONU, récemment réapparu sur les réseaux sociaux et dans les médias d’extrême droite en ligne. Le premier ministre parle de «l’occasion d’une réinitialisation» (reset), une expression qui rappelle le titre d’un sommet du Forum économique mondial, prévu en janvier, sur une reprise économique plus juste, durable et résiliente après la pandémie. En début de semaine, le seul parti à s’être scandalisé de ce discours était le Parti populaire du Canada de Maxime Bernier.

     Le chef de l’opposition à Ottawa, Erin O’Toole, n’a pas endossé la pétition du député Poilievre. Questionné à ce sujet, son bureau réfère à une vidéo mise en ligne mercredi dans laquelle le chef conservateur commente lui aussi les propos de M. Trudeau.

     «Justin Trudeau et les libéraux veulent utiliser la pandémie pour faire une expérimentation massive et risquée afin de refaire l’économie. Ce n’est pas le moment de «réimaginer» l’économie […] une fois que la pandémie sera derrière nous, nous devrons rebâtir le plus rapidement possible.»

     Selon le politologue spécialiste du mouvement conservateur, Frédéric Boily, Erin O’Toole «est encore en train de chercher ses repères» sur la question de la mondialisation.

     «Depuis longtemps, on accorde un pouvoir démesuré à ces organisations [comme le Forum économique mondial], analyse le professeur à l’Université de l’Alberta. Autrefois, l’idée que les grands de ce monde se réunissaient pour tout décider, c’était plutôt du côté de la gauche ou de l’extrême gauche, mais on voit maintenant un transfert vers la droite ou l’extrême droite.»

Théorie du complot?

Pour le premier ministre Justin Trudeau, ces critiques de la «réinitialisation» représentent des théories de la conspiration.

     «À travers le monde, des gens cherchent des raisons et des solutions qui, des fois, sont des théories du complot. Si des députés conservateurs veulent se concentrer sur des théories de conspiration et du complot, ils peuvent évidemment. Nous allons nous concentrer sur les Canadiens.»

     M. Trudeau a précisé sa pensée sur la réinitialisation. Il indique qu’on doit «s’ajuster pour mieux aider tout le monde» et «s’améliorer en tant que pays» durant la pandémie, par exemple sur le thème des changements climatiques. «Oui, c’est un moment pour réfléchir à comment bâtir un monde encore meilleur que celui dont on a hérité de nos parents. C’est toujours ce que je fais.»

     Le député de Carleton, Pierre Poilievre, n’a pas retourné les appels du Devoir. Dans un échange de tweets avec une journaliste parlementaire, il nie propager de fausses informations. Avec en guise de preuves des propos hors contexte du premier ministre et des publications du Forum économique mondial, M. Poilievre conclut que Justin Trudeau instrumentalise la pandémie pour «imposer son programme idéologique risqué» et «menacer le mode de vie des gens.»

https://www.ledevoir.com/politique/canada/590193/une-theorie-du-complot-s-infiltre-dans-les-rangs-des-conservateurs

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(1) À la suite de l’élection de Donald Trump en 2016 je trouvais hallucinant qu’un pays de cette envergure se ridiculise au point de laisser la responsabilité de la destinée de sa population à un ignoble goujat, menteur, macho notoire et belliqueux qui gérait la nation à coups de tweets haineux, racistes et injurieux et d’âneries dignes du préscolaire... À mon avis ce type aurait dû être interné dans un asile psychiatrique.

     Mais pourquoi les Républicains avaient-ils présenté ce lugubre bouffon comme candidat à la présidence? Ils ne le connaissaient pas du tout? «Des agressions sexuelles? Pas à notre connaissance... nous n’avons reçu aucune plainte à ce propos», disaient-ils. «De la fraude fiscale? Voyons! Nous n’en savions rien! Ne nous demandez pas où est passé l’argent, nous n’en avons aucune idée!»  

     Il y avait de quoi douter du QI des représentants républicains. Quant aux électeurs qui ont réélu Trump en 2020 parce qu’ils n’avaient rien compris, un seul commentaire : «le cerveau est comme un forfait Internet, c’pas tout l’monde qui a la haute vitesse illimitée!»

     Trump a sans doute souffert d’une sinistrose aiguë après sa défaite. Cet état d’esprit favorise les ruminations. Dans son cas, c’était la certitude d’un complot contre lui – il croyait que les résultats avaient été truqués.

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Est-ce- possible!

Les trumpistes de Québec et d’Ottawa

Loïc Tassé / Journal de Montréal

Les trumpistes sont ceux qui croient que les gouvernements, les médias et les élites de toutes sortes masquent la vérité et manipulent la population. Ils croient aussi que leurs positions libertariennes minoritaires sont majoritaires.

     Sur cette base, ils s’estiment justifiés de mener des révolutions violentes pour faire triompher leurs idées.

     Aussi quelques centaines de personnes assiègent-elles Ottawa avec la prétention de renverser les décisions de politiques sanitaires d’un gouvernement légitimement élu.

     La même pseudo-logique anime les contestataires qui se sont massés à Québec.

     Trump a d’ailleurs reconnu la paternité de ces mouvements en qualifiant Justin Trudeau de «fou d’extrême gauche». Trudeau a bien des défauts, mais il n’est ni fou ni d’extrême gauche.

-- Article très instructif, sachant que les Canadiens tout comme les Américains pourraient se faire prendre au jeu :

https://www.journaldemontreal.com/2022/02/07/les-trumpistes-de-quebec-et-dottawa

Poilievre s'approprie ce genre de discours mot pour mot :  

Les théories complotistes reposent toutes sur les mêmes scénarios et les mêmes schémas : elles sont latentes, mais prennent de l’ampleur en période de crise ou à l’occasion d’un événement dramatique; elles sont propagées par des marginaux ou des intellectuels déclassés; elles postulent l’existence de forces occultes qui se sont développées au sein de l’élite et qui fomentent une ou des conspirations ayant pour objet le contrôle des esprits ou la dictature; et elles appellent à la résistance contre ces puissances maléfiques qui menacent l’enchantement du monde.

     De plus, à l’instar des gnostiques du IVe siècle, qui se percevaient comme une minorité ayant perçu l’étincelle divine, les complotistes croient faire partie d’une élite éclairée, quoique méprisée, qui a déchiffré le réel au-delà des apparences et possède ainsi une connaissance qui les rend plus sagaces que la majorité.

     La pensée complotiste a pour fonction, au moyen de l’invention d’une machination qui n’existe que dans l’imaginaire, d’organiser un contre-complot visant à mobiliser les masses dans le but de détruire les forces conspiratrices et de rétablir l’enchantement, perturbé ou menaçant de l’être par ces «maîtres du monde sans scrupule».

     En ce sens, il ne devrait surprendre personne que la plupart des complotistes militent dans des mouvements ou des partis marginaux qui prônent des «révolutions» visant à sauver ou à rétablir un ordre enchanté qui n’a jamais existé. Forme d’esprit critique dévoyé, la pensée conspirationniste est «une sublimation du religieux sous une forme sécularisée».

     Les Américains doivent se tenir prêts, insiste QAnon, pour la riposte de Donald Trump [en 2024], une «tempête» imminente qui, à coups d’arrestations, fera tomber la machination et rendra le pouvoir au peuple.

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PRINCIPE DE BASE

«La conciliation entre les convictions personnelles, morales ou religieuses et la politique est aussi vieille que le monde. Mais, depuis un demi-siècle au moins, un principe s’est imposé : les politiciens ne doivent pas gouverner en fonction de leurs croyances morales ou religieuses, si sincères peuvent-elles être, mais en fonction de l’intérêt de tous les citoyens.

   Les lois ne changeront pas, mais un député pourrait forcer le Parlement à tenir un débat sur un projet de loi restreignant l’accès à l’avortement ou donnant une nouvelle définition de ce qu’est un fœtus. Le seul fait de tenir un tel débat serait considéré comme une grande victoire pro-vie.» (Michel C. Auger, Radio-Canada)

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Comme des animaux blessés, ils deviennent de jour en jour plus désespérés et dangereux  

Le mouvement évangélique

[J’ignore le nom de l’auteur de l’article]

Les stratèges de l’Ouest comptent sur les fermiers et les pro-pétrole, des croyants et militants passionnés qui fournissent de loin le plus gros des troupes. Les croyances religieuses des conservateurs chrétiens structurent très largement leur pensée politique.

Dépassant largement les prises de position concrètes que l’on peut imaginer contre l’avortement ou en faveur d’écoles confessionnelles, la Christian Worldview est au cœur d’un ensemble d’attitudes politiques centrées sur la responsabilité individuelle, qui les pousse à tenir des propos hostiles à l’action gouvernementale et à faire confiance au libre-échange comme régulateur. Les chrétiens doivent s’opposer résolument à l’humanisme laïc (secular humanism) qui prédomine dans les sociétés modernes pluralistes. Le chrétien évangéliste, se définissant comme «nouveau chrétien» (born-again) (Stephen Harper en est un), cherche à mettre ses actions en conformité avec sa doctrine. En prônant une baisse de l’aide de l’État envers les particuliers, il pense que les individus laissés seuls, pourront mieux se réaliser. Il souhaite les voir quitter un état de dépendance entretenu par des aides bien intentionnées mais aux effets pervers. Le conservateur Brad Trost est radical dans sa critique de l’État providence, et ne craint pas d’affirmer que la pauvreté est la juste récompense divine du péché de la paresse.

     Bien que statistiquement peu nombreux, les adeptes de la mouvance évangélique au Canada n’en représentent pas moins un poids politique certain, car ils comptent sur des personnes plus convaincues et mobilisées par rapport au reste de la population. «Ils sont en croisade!», lance André Gagné, professeur titulaire au Département d’études théologiques à l’Université Concordia.

     Pour arriver à ses fins, la droite religieuse au Canada constitue des lobbys politico-religieux assez puissants pour attirer l’attention des députés et des ministres. C’est à cette adresse que loge par exemple l’organisme RightNow et son agenda pro-vie. «Nous sommes un groupe de stratèges passionnés qui comprend la nécessité de campagnes politiques efficaces qui donnent des résultats. Nous sommes inclusifs, nous sommes diversifiés et nous sommes ici pour gagner», peut-on lire sur son site Web.

     Une autre coalition de mouvements chrétiens, TheCry, est également très active. Fondée par Faytene Grasseschi, figure très connue dans le monde évangélique, elle organise des 24 heures de prières à Ottawa afin que le Canada puisse être dirigé par des ministres et des députés dévoués à Dieu.

     TheCry n’est pas le seul mouvement à prier et à militer pour l’avènement d’un gouvernement chrétien à Ottawa. Créée en 2005, la National House of Prayer a constitué au fil des ans un vaste réseau de croyants partout au Canada. La National House of Prayer assistait à la période de questions et, du haut de la tribune réservée au public, priait pour les députés et les ministres.

     Le professeur André Gagné s’intéresse également à la coalition qui se fait appeler The West Coast Christian Accord qui s’est formée en 2018. Composée de pasteurs évangéliques de partout au Canada, elle leur propose de signer une «déclaration de foi concernant l’autorité des Écritures sur l’identité de genre et la sexualité humaine».

      «Ma première réaction serait de penser que les chrétiens de droite motivés par leurs croyances sont trop minoritaires au sein de la société canadienne pour avoir une influence forte dans d'autres régions du Canada», croit pour sa part Andrew Ives. Il soutient toutefois qu’il est «incontestable» que les chrétiens évangéliques cherchent à convertir d'autres [individus] et qu’il s’agit là d’un «élément fondamental de leur foi». «C'est sûr que certains chrétiens évangéliques voudraient infiltrer des partis politiques et que, par affinité, ils viseraient le Parti conservateur et le Parti populaire du Canada, affirme-t-il. On peut noter qu'un mouvement de chrétiens antiavortement était actif au sein du Parti libéral dans les années 1990. Il est incontestable que les chrétiens évangéliques œuvrent pour transformer la société»

     Le documentariste Jon Kalina, réalisateur du documentaire de 2014 intitulé La droite religieuse au Canada, souligne dans une entrevue accordée à Présence que ces mouvements chrétiens sont comme des lobbys. «Ils ne sont pas disparus il y a cinq ans, dit-il. Ils existent, tout comme d’autres lobbys au Canada. Nous pouvons discuter de leur véritable influence, mais une chose est certaine c’est qu’il y a bel et bien un lobby religieux au Canada

     Même si sous le régime de Justin Trudeau la droite religieuse n’a pas beaucoup d’influence, Jon Kalina croit qu’il faut se demander quel accès au gouvernement elle aura sous d’autres premiers ministres. Il rappelle la présence dans plusieurs pays de ces mouvements qui se sentent obligés d’influencer les gouvernements en place. «Pour eux c’est une question de moralité, de vérité.»

     Le documentariste ne croit pas cependant que la droite religieuse canadienne possède autant de pouvoir que celle des États-Unis. «Pourtant, elle a une influence. Pour des raisons liées à l’histoire du Canada, on n’a pas tendance à parler de cette réalité parce que cela ne fait pas très canadien de discuter de l’influence de la religion sur les affaires du pays. Toutefois c’est important d’en parler, surtout si ces groupes de pression ont de l’influence sur les politiques internationales et nationales.»

     M. Gagné soutient aussi que la droite chrétienne favorise une perspective biblique et met en avant «des politiques ancrées dans la perspective que la bible est plus valable que la science». Le mariage de personnes de même sexe, l’avortement, les identités de genre, les droits LGBTQ+ et la liberté religieuse sont au cœur des inquiétudes de cette droite, explique-t-il.

     Les groupes de la droite chrétienne ont pris de l’ampleur dans le paysage politique de certains pays, souligne-t-il. Aux États-Unis, 80 % des évangélistes blancs ont voté pour Donald Trump. Parallèlement, au Brésil, 70 % des évangélistes du pays ont voté pour Jair Bolsonaro. M. Gagné constate que certains groupes de la droite chrétienne aux États-Unis ont milité pour faire avancer des lois inspirées du nationalisme chrétien par l’intermédiaire du  projet Blitz. Ainsi, depuis 2017, des motions du projet Blitz forcent des écoles publiques à afficher sur leurs murs la devise «In God we Trust».

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«À part le NPD, qui a appris à aimer les victoires morales, il n’y a pas de parti qui aime perdre. Depuis un demi-siècle, presque tous les chefs qui ont perdu une élection ont aussi perdu leur poste peu après. Mais au Parti conservateur, la défaite s’accompagne presque toujours d’un coup de volant vers la droite. Et celui qui va suivre le congédiement d’Erin O’Toole risque d’être plus prononcé que de coutume.» (Michel C. Auger / La Presse 3 février 2022) 

https://www.lapresse.ca/debats/chroniques/2022-02-03/parti-conservateur-du-canada/un-autre-tour-de-volant-vers-la-droite.php