25 février 2020

La boulimie pétrolière : un trouble obsessionnel durable

Mégaprojet pétrolier annulé

Rappelons que Teck Resources est une entreprise minière canadienne spécialisée dans l'extraction, la transformation et la distribution du plomb, du zinc et du charbon. En juillet 2009, la compagnie avait accepté une offre d'investissement de 1,74 milliard CAD de la firme chinoise China Investment Corporation. La Chine ne cesse de multiplier les partenariats financiers dans tous les domaines, sur tous les continents (1), et le Canada est sur sa route.


Projet Teck Frontier : «L’argument économique l’a emporté»
Hélène Baril / La Presse Affaires, 25 février 2020

«L’argument économique l’a emporté. Les prix actuels et prévisibles du pétrole brut font en sorte que l’investissement de 20,6 milliards dans un nouveau site de production de pétrole bitumineux n’aurait pas été rentable. À plus long terme, rien ne permet de croire que les prix du brut vont revenir à des niveaux assez élevés pour rentabiliser les nouveaux projets dans les sables bitumineux. C’est un des pétroles les plus chers au monde.» (Jean-Thomas Bernard, spécialiste en énergie et professeur à l’Université d’Ottawa)  

D’autres projets énergétiques controversés

Coastal GasLink : le projet de pipeline de TC Energy veut relier Dawson Creek à Kitimat, en Colombie-Britannique, sur une distance de 670 kilomètres pour alimenter les installations de liquéfaction de gaz naturel de LNG Canada. C’est ce projet qui est à l’origine des blocages ferroviaires partout au pays actuellement.

LNG Canada : la coentreprise formée de Shell, Petronas, PetroChina, Mitsubishi et Kogas veut construire des installations de stockage et de liquéfaction de gaz naturel à Kitimat pour l’exporter en Asie. Il s’agit d’un investissement estimé à 40 milliards, le plus important investissement privé de l’histoire du Canada.

Trans Mountain : l’expansion de l’oléoduc Trans Mountain vise à ouvrir de nouveaux marchés en Asie pour le pétrole canadien. Racheté par le gouvernement fédéral en 2018, le projet est maintenant estimé à 12,6 milliards, ce qui représente un bond de 70 % depuis trois ans.

Énergie Saguenay : un consortium formé d’investisseurs américains veut construire des installations de liquéfaction de gaz naturel à Saguenay, au Québec. Le projet prévoit la construction d’un gazoduc de 750 kilomètres pour acheminer le gaz naturel de la frontière de l’Ontario jusqu’à Saguenay. Les installations de stockage et de liquéfaction ainsi que le gazoduc nécessiteraient des investissements de 14 milliards.
[Ndlr : le gaz sera acheminé non seulement vers les États-Unis, mais aussi vers l’Asie et l’Europe.]


Même si Teck Resources évoque diverses raisons pour abandonner son mégaprojet d’exploitation des sables bitumineux en Alberta, en réalité le vent de récession qui plane en est sûrement la principale raison – ceux qui la créent en connaissent les jalons.
   Bien sûr, le chef conservateur Andrew Scheer et le premier ministre albertain Jason Kenney versent des larmes de pétrole sur la poule aux œufs noirs et fustigent le cabinet Trudeau. L’Alberta menace de sortir de la fédération – étant un copié-collé du Texas la province pourrait devenir le 51e état des États-Unis d’Amérique.
   Quoiqu’il advienne, le désistement de Teck Resources est une bonne nouvelle... pour l’environnement. La production de pétrole bitumineux n’est-elle pas suffisamment colossale en Alberta pour qu’on songe à lever le pied de la pédale à gaz? Ce qui ne signifie pas de «cesser» radicalement toute production, mais plutôt de se limiter à l’essentiel.
   Ce projet insensé, dont le site se trouve à quelques kilomètres du Parc national de Wood Buffalo, avait été approuvé par le gouvernement fédéral. «Songer à éventrer la terre et créer une mine dont la taille fait la moitié de la ville d’Edmonton, c’est un crime contre la nature.» ~ Alice Rigney, militante  environnementale originaire de Fort Chipewyan

Le projet tel qu’évalué en juillet 2019 :

Le projet Frontier dans l'intérêt public malgré ses effets négatifs, juge la commission d'examen
Stéphanie Rousseau, ICI Alberta 25 juillet 2019

Le mégaprojet minier Frontier dans les sables bitumineux est dans l’intérêt public, malgré ses effets négatifs sur l’environnement et les communautés autochtones, selon la commission d'examen chargée d'étudier le projet.

«Même si nous estimons que le projet aura des effets négatifs importants et qu’il y aura des effets cumulatifs sur certaines composantes environnementales et communautés autochtones, nous considérons que ces effets se justifient et que le projet Frontier est dans l’intérêt public», indique un résumé de la décision de la commission d’examen conjoint formée de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale et l'Agence de réglementation de l’énergie de l’Alberta.
   La commission justifie son évaluation environnementale par les retombées économiques et la création d'emplois liées à ce projet.
   Le rapport note que le projet «devrait créer 7000 emplois pendant la construction et jusqu’à 2500 emplois pendant la durée de vie de la mine, soit 41 ans».
   La mine devrait en outre susciter des retombées de «plus de 70 milliards de dollars» pour les trois ordres de gouvernement.

Un mégaprojet minier

Le projet de mine Frontier est proposé par l’entreprise de Colombie-Britannique Teck Resources. Son coût est estimé à plus de 20 milliards de dollars.
   Devant produire 260 000 barils de bitume par jour, il comprend deux mines à ciel ouvert, une usine de préparation du minerai, une usine de traitement du bitume, des installations de préparation et de gestion des résidus, des aires d’élimination et de stockage des résidus, une prise d’eau fluviale, un aérodrome et un campement pour les travailleurs.

Photo : David Dodge / The Pembina Institute. Wood Buffalo National Park.

Un parc à protéger

Il sera situé à quelques kilomètres du parc national de Wood Buffalo, alors que l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) évalue actuellement si le parc doit être placé sur sa liste des sites en péril.
   L’organisme international a donné jusqu’en 2020 au Canada pour prouver qu’il en fait assez pour protéger ce site unique, après avoir jugé insuffisant le plan présenté par le gouvernement de Justin Trudeau.
   Dans le résumé de son rapport, la commission juge que la mine «ne devrait pas avoir d’effets mesurables sur le débit ou le niveau d’eau dans le delta des rivières de la Paix et Athabasca» et que les changements climatiques auront «des effets négatifs beaucoup plus importants sur le parc national».
   Selon la commission, «Frontier sera aussi un grand émetteur de gaz à effet de serre» et produira l'équivalent de 4 millions de tonnes de CO2 par année, mais elle n'établit aucun lien direct entre ces émissions et les changements climatiques.

Impacts environnementaux majeurs et irréversibles

Photo: Iron Mountain Daily News / Operation Migration. Whooping cranes, an endangered and federally protected species, stand nearly five feet tall and have a wingspan of about 7.5 feet. Le parc national Wood Buffalo est le dernier endroit où les grues blanches se reproduisent naturellement. Il accueille aussi un des plus grands troupeaux de bisons.

Le projet «est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants sur les milieux humides, les forêts anciennes, la biodiversité et les espèces en périls dépendantes des milieux humides et des forêts anciennes», indique le rapport, qui précise que les lynx, les caribous des bois et la harde de bisons du lac Ronald seront touchés.
   «La commission reconnaît que le caribou des bois est en déclin dans l’ensemble de son aire de répartition», souligne le rapport, en ajoutant que «le projet a le potentiel d’apporter une contribution supplémentaire aux effets cumulatifs importants déjà existants». Pour diminuer l’impact du projet sur cette espèce menacée, la commission demande à Teck Resources de finaliser un plan d'atténuation et de surveillance.
   La perte de plus de 14 000 hectares de milieux humides est un effet de grande ampleur et irréversible, le projet aura des effets cumulatifs négatifs importants sur les milieux humides de la région.

Conséquences sur les peuples autochtones

Le rapport mentionne aussi que les peuples autochtones de la région perdront des terres qu'ils utilisent pour leurs activités traditionnelles et qu’il «n’est pas certain que les groupes autochtones rétabliront les activités d’usage traditionnel sur les terres remises en état après une interruption sur plusieurs générations et vu la perte de liens culturels avec ces terres».
   Le rapport note toutefois que «tous les groupes autochtones qui seraient touchés de façon importante par le projet Frontier ont signé des ententes avec Teck».
   Le gouvernement fédéral doit donner son approbation en vertu de la Loi sur les pêches et de la Loi sur la protection de la navigation.
   La ministre fédérale de l’environnement, Catherine McKenna, doit déterminer si le projet est susceptible de causer des dommages environnementaux négatifs importants, malgré les mesures d'atténuation exigées.
   Si tel est le cas, il appartiendra au cabinet fédéral de décider si ces effets sont justifiés dans les circonstances. La décision d’Ottawa doit être rendue en février.
   Les groupes environnementaux ont déjà souligné que la mine est difficile à concilier avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Canada.


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(1) Les Chinois étant à la fois investisseurs et fournisseurs, si une contrainte comme le COVID-19 perturbe la chaîne de production, d’approvisionnement et de distribution, le monde entier écope; les marchés financiers paniquent car cette crise atteint plusieurs domaines : industriel, manufacturier, touristique, etc. Empêcher un virus de se propager est aussi puéril qu’empêcher l’eau de couler entre nos doigts... Un virus est 100 fois plus gros qu’une bactérie, néanmoins, l’un et l’autre sont incontrôlables en raison de leur taille; si l’humain est perméable, ils feront le tour de la planète...

Chine : mirages et fantasmes sur la nouvelle route de la soie
Philippe Rochot / Reportages pour mémoire

«La méthode chinoise consiste à établir des jalons tels que des grandes réalisations tout au long des itinéraires des anciennes «routes de la soie», puis de joindre ces points d’ancrage et étendre ainsi son influence. Détail important : les traités signés avec les états prévoient que la Chine reste propriétaire des infrastructures installées dans les pays amis et peut intervenir pour les protéger en cas de problèmes. On appelle ça «l’ingérence sécuritaire» mais d’autres y verront une violation possible de la souveraineté nationale. L’objectif inavoué de Pékin est le même qu’en mer de Chine où l’Empire rouge avance ses pions sur les différents ilots revendiqués par le Vietnam, les Philippines ou Taiwan. Il s’agit d’étendre la domination économique et de «protéger» les terres conquises.
   Xi Jinping habille cette initiative d’un discours poétique et historique, celui de la main tendue et de l’amitié entre les peuples, destiné à étouffer toute contestation, rappelant qu’il y a plus de 2000 ans, «un émissaire de la dynastie des Hans chargé d’une mission de paix fut envoyé en Asie centrale, inaugurant ainsi les échanges amicaux avec ces peuples de l’ouest».
   Aujourd’hui, la route a bien sûr changé d’aspect. Elle est aussi maritime. Il faut pouvoir gagner l’Europe par les océans et surtout sécuriser cet itinéraire menacé par l’instabilité autour des ilots de la mer de Chine ou les risques de piraterie dans le détroit de Malacca, le golfe d’Aden ou le détroit d’Ormuz... L’empire de Xi Jinping se voit assez bien devenir le gendarme qui va sécuriser cet itinéraire. Ça n’est pas de l’expansionnisme nous dit-on à Pékin mais simplement une nécessité de protéger le commerce. Personne ne songe d’ailleurs à s’opposer aux «offres» de la Chine.


Les chiffres de la présence chinoise dans le monde parlent d’eux-mêmes. En 1980 on comptait 250 000 Chinois installés en dehors des frontières de l’empire rouge. En 2016 ils étaient 50 millions auxquels on peut ajouter plus de 100 millions de touristes... Le devoir du régime est donc de les soutenir, de défendre leurs intérêts et leur sécurité.»

22 février 2020

Qui est à côté de la track?

L’opposition au gazoduc Coastal GasLink par la communauté autochtone Wetʼsuwetʼen est à mon avis légitime. Mais, les chefs héréditaires ont-ils le droit de protéger ce territoire non cédé contre l’invasion industrielle? Une grande question dont la réponse fédérale et provinciale est : l’impératif économique prime toujours sur le bon sens et l’environnement.

Caricature : André-Philippe Côté / Le Soleil, 20 juin 2019

À lire :
Les blocus, ça marche  
Patrick Lagacé / La presse, 21 février 2020

Pas mêlant, je comprends tout le monde. Je comprends tout le monde dans cette affaire de blocus ferroviaires. Enfin, presque tout le monde.
   D’abord, je comprends les autochtones. Je les comprends de voir l’injustice partout. On ne compte plus les commissions d’enquête qui ont recensé la dépossession des peuples autochtones, dépossession culturelle, géographique, économique, autonomiste.
   Je comprends aussi les ministres qui s’inquiètent, les chefs d’entreprise qui tapent du pied, les employés en ta**** parce qu’ils ont reçu un avis de mise à pied.
  

Pour ma part, je suis convaincue de la bonne foi des manifestants qui supportent cette communauté. Néanmoins, les blocages ferroviaires à la Extinction Rebellion sont contre productifs. Premièrement, ils suscitent la colère des citoyens pénalisés, et deuxièmement, de par un effet pervers, ils servent l’industrie pétrolière et gazière.

On peut donc douter de l’efficacité de ces actions et se demander à qui elles profitent en réalité.

Pour mieux comprendre le fonctionnement du mouvement Extinction Rebellion, je vous suggère une critique en trois parties rédigée par Kim Hill, une activiste néozélandaise.

Je cite :

Le mouvement Extinction Rebellion (XR) s’est déployé à travers le monde, des millions de personnes défilant dans les rues afin de demander aux gouvernements qu’ils s’occupent du réchauffement climatique et, plus généralement, de la crise écologique.

Cependant, la nature de ce qu’il demande n’est pas claire, et mérite un examen approfondi. Notamment en raison de cette longue histoire de puissants intérêts gouvernementaux ou industriels apportant leur soutien à des mouvements sociaux dans l’unique but de réorienter ou d’orienter leur action afin qu’elle rejoigne leurs propres objectifs. Extinction Rebellion ne fait pas exception.

Avec la vie sur Terre en jeu, chaque décision déterminant le fonctionnement de nos sociétés doit être scrupuleusement étudiée. Les actions ont des conséquences, et au point où nous en sommes, le moindre faux pas peut être catastrophique. Le sentiment selon lequel ces problèmes ont été suffisamment discutés et qu’il est maintenant temps de passer à l’action directe est compréhensible. Cependant, sans objectifs clairs et sans un plan pour les atteindre, nos actions risquent plutôt de faire empirer la situation.
   L’extinction des espèces et le changement climatique font partie des nombreuses conséquences désastreuses que génère la société industrielle. Vouloir agir pour mettre fin à la destruction du monde naturel est admirable. Cependant, se rebeller contre les effets sans confronter directement les systèmes économiques et politiques qui les produisent revient à traiter les symptômes plutôt que la maladie. Cela ne fonctionnera pas. S’attaquer à un seul aspect du système, sans prendre en compte les interconnexions industrielles et les structures de gouvernance ne peut qu’aboutir à un empirement de la situation.

La neutralité carbone, ça n’existe pas. Il n’existe aucun moyen de «dé-brûler» des énergies fossiles. Cette demande, ce concept, ne vise pas à mettre un terme à l’extraction et à la combustion de carburants fossiles, mais à permettre à l’industrie du pétrole et du gaz de continuer, au motif que quelque technologie non existante rendrait tout cela acceptable. XR (Extinction Rebellion) ne spécifie pas comment ils prévoient d’atteindre cet objectif.

L’objectif de neutralité carbone est soutenu par plus de 100 entreprises et lobbies dans une lettre au gouvernement du Royaume-Uni, stipulant : «Nous voyons la menace que le changement climatique constitue pour nos affaires et nos investissements, ainsi que les opportunités économiques significatives que présente un investissement précoce dans le développement de nouveaux services et marchandises faibles en carbone». Parmi ces entreprises, on retrouve Shell, Nestlé et Unilever. Shell qui a causé des milliers de fuites de pétrole et de déversements toxiques au Nigéria et à travers le monde, a exécuté des manifestants, détient 60 % du projet de pétrole de sable d’Athabasca en Alberta, et a l’intention de continuer à extraire du pétrole pendant très longtemps. Nestlé qui profite de la contamination de l’eau en vendant des bouteilles d’eau, tout en épuisant les aquifères mondiaux. Unilever qui est responsable d’avoir rasé des forêts tropicales pour de l’huile de palme et du papier, déversé des tonnes de mercure en Inde, et engrangé des milliards en promouvant de la malbouffe emballée dans du plastique ainsi que des produits de consommation inutiles aux populations les plus pauvres du monde. Toutes ces entreprises défendent le libre marché et la privatisation des biens publics, exploitent les travailleurs et ignorent les lois environnementales dans les pays pauvres [et parfois aussi dans les pays riches, NdT]. 
   Leur lettre est claire, ces industriels cherchent simplement à profiter de cette crise, non pas à mettre un terme aux destructions et aux dégradations dont ils sont responsables.
   L'industrie du nucléaire considère également la campagne pour la neutralité carbone comme une source de réjouissance. Même la fracturation est considérée comme compatible avec cet objectif.

La FAQ d’Extinction Rebellion stipule : «Au final, nous faisons cela car il s’agit de la chose juste à faire, quels que soient les résultats. Ce qui signifie que même si nous espérons pouvoir sauver quelque chose de la vie sur Terre, nous essayons d’agir en fonction de ce qui est juste (éthique de la vertu) plutôt que ce qui pourrait fonctionner (éthique utilitariste)
   Il n’y a donc pas d’objectif, et ils ne se demandent pas si leurs actions ont une chance d’être efficaces. En bref, il s’agit d’une manière d’exprimer ses préoccupations, sans changer quoi que ce soit. Comparez la citation ci-dessus avec celle-ci, que l’on doit à Stratfor, une entreprise de consultance qui conseille gouvernements et entreprises sur la meilleure façon de réprimer les mouvements sociaux :
   «La plupart des autorités toléreront un certain niveau d’activisme, en considérant qu’il s’agit d’un moyen de faire retomber la pression. Elles permettent ainsi aux protestataires de trouver un peu d’apaisement, en les laissant croire qu’ils font une différence – aussi longtemps que les protestataires ne représentent pas une menace. Mais à mesure que les mouvements de contestation prendront de l’ampleur, les autorités agiront plus agressivement pour neutraliser les organisateurs.»
   Les dirigeants d’Extinction Rebellion ont étudié les mouvements sociaux, et doivent donc être bien au courant de cette stratégie. C’est comme si leur Rébellion avait intentionnellement été créée pour être inefficace.
   La décision d’organiser les plus grandes manifestations possibles, dans l’intention, supposément, de perturber le quotidien des affaires ... a démontré leur capacité à créer du spectacle plutôt qu’à s’engager dans des actions ciblées et décisives.

Selon un article publié par Klaus Schwab, le fondateur et président du Forum économique mondial de Davos, sur le site internet du Forum : «Le Forum économique mondial fournit une plate-forme pour aider les 1000 principales entreprises du monde à façonner un meilleur futur». Je ne veux vraiment pas imaginer quel genre de futur un millier d’entreprises multinationales pourraient concevoir si elles s’y mettaient ensemble. Mais je n’ai même pas à le faire, puisqu’ils l’ont décrit en détail. Cela s’appelle la 4e Révolution industrielle.

...Dans ce monde d’écrans, de propagande techno-fantaisiste, où les seules pensées disponibles sur le marché sont des illusions d’entreprises produites en masse, on nous présente un enfant dont le message est : «Je veux que vous paniquiez», et nous nous exécutons.
   Même si le discours de Greta était adressé aux délégués industriels présents au Forum économique mondial de Davos, et même si son intention était d’en appeler à mettre un terme à l’avarice entrepreneuriale et à la croissance économique (ce qu’elle fit en Pologne, quelques semaines auparavant, avant que ses «conseillers» ne se mettent à plus sérieusement cadrer ses discours), la vidéo de son discours a été promue par le Forum économique afin de promouvoir un sentiment de peur et d’urgence, qui leur sert à promouvoir leurs plans basés sur le marché, l’industrie et la technologie en guise de solution aux problèmes environnementaux. Encore une fois, la résistance est cooptée et transformée en profits.

Partie 1 : Zéro émission nette
Partie II : Solutions et tactiques promues
Partie III : La 4e Révolution industrielle

Illustration : Mario Sanchez Nevado, Betrayal (trahison). Via Wrong Kind of Green.

Pessimiste, mais lucide :

Le mythe de la croissance verte
La démocratie peut-elle survivre sans le carbone? Nous ne le saurons pas.

Simon Kuper
FT Magazine / Opinion / Octobre 2019

Voici l'histoire sur le climat que nous, libéraux, aimons nous raconter : une fois que nous nous serons débarrassés des politiciens dinosaures comme Trump, nous nous attaquerons au lobby des combustibles fossiles et aux entreprises cupides, et nous voterons pour «green new deal».
   Il financera des industries propres et à croissance rapide : panneaux solaire, éoliennes, véhicules électriques, vêtements durables. Tout le monde y gagnera : nous pourrons rendre nos sociétés plus vertes et continuer à consommer. Cette histoire s'appelle «croissance verte».
   Malheureusement, la croissance verte n'existe probablement pas – du moins pas pour les deux prochaines décennies, au cours desquelles nous devrons réduire la plupart de nos émissions de carbone pour que la planète reste habitable. Notre génération doit choisir : être verte ou avoir de la croissance, car nous ne pouvons pas avoir les deux à la fois.
   Commençons par l'essentiel. Nous devons réduire de près de la moitié les émissions mondiales actuelles de carbone d'ici 2030 pour avoir une chance de limiter la hausse des températures de la planète à 1,5°C, déclare le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat.
   De nombreux climatologues estiment que les estimations rétrospectives et consensuelles du GIEC sont trop optimistes, mais acceptons ce chiffre pour l’instant. Il faudrait un revirement de situation. Les émissions mondiales continuent d'augmenter, elles ont atteint un record l'année dernière. Parallèlement, la population mondiale augmente.
   Nous devons donc réduire les émissions tout en nourrissant et en ravitaillant davantage de personnes. Mais ces personnes s'enrichissent également : le revenu mondial par habitant augmente généralement d'environ 2 % par an.
   Et lorsque les gens ont de l'argent, ils le convertissent en émissions. C'est ça, la richesse.
   Pour parvenir à une croissance verte, il faudrait que nous émettions radicalement moins de carbone par unité de produit intérieur brut. La quantité de carbone nécessaire pour produire un dollar de PIB a récemment diminué d'environ 0,4 % par an.
   Mais pour maintenir la hausse des températures à des niveaux sécuritaires, l'intensité en carbone de l'économie mondiale doit diminuer au moins dix fois plus vite, estime le groupe de réflexion REN21 (Renewable Energy Policy Network for the 21st Century).
   Les verts diront : «Ne vous inquiétez pas, les énergies renouvelables sont en train de décoller». Et il est vrai que les énergies renouvelables modernes représentent aujourd'hui plus de 10 % de la consommation totale d'énergie, selon le REN21. D'ici 2050, ce chiffre pourrait atteindre environ 30 %.
   Mais le GIEC estime que nous devrons doubler ce pourcentage d'ici là. Et les investissements mondiaux dans les projets d'énergie propre sont tombés à leur plus bas niveau en six ans au cours du premier semestre 2019, selon Bloomberg New Energy Finance.
   Les verts sont les premiers à souligner la transformation des économies européennes au cours des dernières décennies : augmentation du PIB, baisse des émissions. Mais c'est surtout parce que les pays ont délocalisé leurs émissions : une grande partie de leurs produits sont désormais fabriqués en Asie.
   De plus, l'aviation et le transport maritime ne sont pas pris en compte dans les budgets carbone nationaux. Si l'on tient compte des émissions liées aux biens importés, les émissions de carbone de l'UE sont supérieures d'environ 19 % aux chiffres officiels de l'Union, estime le Global Carbon Project, un réseau de scientifiques. Pour de nombreuses grandes villes, l'écart est d'environ 60 %.
   La triste vérité est que le passage d'une croissance sale à une croissance verte prendra beaucoup plus de temps que nous n'en avons. L'infrastructure que nous utiliserons au cours des prochaines décennies cruciales a déjà été en grande partie construite, et elle n'est pas verte. La plupart des avions et des porte-conteneurs actuels seront encore utilisés d'ici 2040. Il n'y a pas encore d'alternatives vertes, ni assez de hamburgers végétaliens ou de vêtements durables.
   En 2040 aussi, la plupart des gens vivront dans les mêmes rues qu'aujourd'hui, et continueront à conduire des voitures. Les véhicules électriques ne nous sauveront pas : leurs émissions sur toute leur durée de vie sont inacceptables. (Extraire du lithium, fabriquer des batteries, produire/expédier des véhicules et utiliser beaucoup d'électricité n'est pas propre).
   Ou encore, imaginez le plus grand projet de nouvelles infrastructures au monde : la nouvelle route de la soie (ou la Ceinture et la Route) chinoise est un réseau d'autoroutes, de ports, de cimenteries, de centrales électriques (dont beaucoup sont alimentées au charbon) et, oui, de nombreux rails verdâtres, construits pour faire circuler les biens de consommation à travers le monde à bon rythme. C'est de la croissance, mais ce n'est pas vert.
   C'est vrai que nous devenons plus économes en carburant. Les navires, les voitures et les avions ont tous réduit leur consommation d'énergie par kilomètre.
   Mais, comme l'a souligné William Jevons en 1865, lorsque les carburants deviennent moins chers et plus efficaces, nous en utilisons davantage. Notez la hausse des ventes de voitures dans le monde, l'augmentation de la vitesse des navires et le nombre croissant de vols chaque année. Environ quatre personnes sur cinq sur terre n'ont jamais pris l'avion. Beaucoup d'entre elles ne peuvent pas attendre.
   Si la croissance verte n'existe pas, la seule façon d'empêcher une catastrophe climatique est la «décroissance» maintenant, pas en 2050 : réduire le trafic aérien, éliminer la viande et ne pas acheter de vêtements jusqu'à ce que nous ayons des alternatives vertes, interdire les voitures privées et cesser l’étalement urbain tentaculaire. Une longue dépression économique pourrait suffire à maintenir la planète habitable. Il faudrait aussi détourner l'argent de la consommation pour construire des infrastructures vertes. C'est essentiellement l'argument de Greta Thunberg.
   Mais cela nous plongerait dans un monde nouveau. La croissance économique, la démocratie et le CO2 ont toujours été entremêlés. La croissance et la démocratie existaient à peine avant que le charbon ne propulse la révolution industrielle. La démocratie peut-elle survivre sans le carbone?
   Nous ne le saurons pas. Aucun électorat ne votera pour détruire son propre mode de vie. Nous ne pouvons pas blâmer les mauvais politiciens ni les mauvaises entreprises. C'est de nous dont il s’agit : nous choisirons toujours la croissance plutôt que le climat.

19 février 2020

À l’assaut des derniers territoires intacts

Il est illégal de s’opposer aux industries pétrolières, gazières et minières qui débarquent avec leurs gros canons. Les nations autochtones essaient pourtant de protéger leurs derniers territoires relativement épargnés en bloquant l’intrusion des assaillants armés qui font le pied-de-grue devant de pathétiques barricades. À chaque fois que les élus ouvrent la bouche c’est pour dire que la solution à la crise climatique est d’installer plus de pipelines pour produire et vendre plus de gaz naturel outre-mer, notamment en Asie (1) !
   Selon un article publié dans le Guardian en janvier 2019, la GRC avait planifié un raid militarisé pour se débarrasser des militants (non armés) de la Première nation Wetʼsuwetʼen, qui conteste le passage du gazoduc Coastal GasLink sur son territoire. «Lethal overwatch is req’d» lisait-on dans un communiqué, ce qui signifie déployer des tireurs d’élite (snipers), et dans un autre communiqué, «des arrestations seront nécessaires pour stériliser le site». Cela prouve deux choses : nous sommes tous à la merci des criminels financiers qui mènent le monde et les armes ont le dernier mot. 

Documentaire et résumé de la situation :

La communauté Wet’suwet’en refuse de négocier avec les chefs de bandes autochtones et la gouvernement fédéral, si les agents de la GRC ne quittent pas leur territoire. Ce n’est pas la fin du monde que d’acquiescer, ça règlerait les blocages ferroviaires. Mais c'est trop demander au pétro sapiens.

Photo via The Star 

Il ne nous reste qu’à attendre que Mère Nature ferme elle-même les robinets brutalement puisque que nous n’avons pas tenu compte des alertes. Mauvais karma.

De l’eau et de l’air propres
Aurélie Lanctôt
Le Devoir / Chronique / 14 février 2020

(Extrait)

On ne dit pas un mot du fait que l’expansion du capitalisme repose nécessairement sur la dépossession violente et que le capitalisme opère par ailleurs main dans la main avec le colonialisme, ce dont le projet Coastal GasLink est, tiens donc, un exemple parfait.

Bien sûr, cette violence est toujours voilée – elle ne s’annonce pas directement. On nous parlera plutôt de promesses de prospérité, d’emplois, de belles occasions. Mais elle se laisse toujours voir si l’on s’attarde au discours. Dans une conférence organisée à Prince George en janvier dernier, où étaient rassemblés les patrons de Coastal GasLink et de LNG Canada, le p.-d.g. de LNG Canada, Peter Zebedee, a eu ces mots surréalistes pour parler des progrès du projet contesté par les Wet’suwet’en : «We just finished what we call our pioneering work, clearing the land.»

Nettoyer, conquérir : le choix des mots est formidable. Ils révèlent en fait l’esprit dont s’imprègne chacun de ces projets de développement. Il faut purger l’espace de ce qui l’encombre, afin de prendre, d’accaparer, d’exploiter. À grande échelle, l’accumulation privée de la richesse se réalise au fond toujours ainsi, sur le mode de la prédation. Là se révèle aussi tout le courage dont les Wet’suwet’en et tous ceux qui dressent des barricades font preuve. Ces militants mettent leur corps en jeu pour opposer résistance à cette prédation, et ils le font pour la population entière. Ils résistent pour nous tous à la liquidation de l’avenir et du vivant, car après tout, tout le monde mérite de l’eau et de l’air propres.

Article intégral :

Vous pouvez changer le nom de la pétrolière et du PDG à volonté, le discours sera identique.

Le PDG d'ExxonMobil est déprimé après avoir réalisé que la fin du monde pourrait survenir avant d’avoir  extrait tout le pétrole
The Onion* | 10 octobre 2018

IRVING – TX – À la suite d'un rapport des scientifiques du Groupe d'experts intergouvernemental sur l’évolution du climat qui prévoyait que la planète ne disposerait que d'une décennie pour éviter un réchauffement climatique catastrophique, Darren Woods, le PDG d'ExxonMobil, se serait senti déprimé après avoir réalisé que la fin du monde pourrait survenir avant qu'ils n’aient fini d'extraire tout le pétrole. «Quand j'ai lu le rapport, ça m’a frappé comme une tonne de briques – nous pourrions tous mourir et laisser des milliards de barils de pétrole piégés dans le sol pour toujours», a déclaré Woods, essuyant une larme et ajoutant que l'ensemble de l'industrie pétrolière avait le cœur brisé à l’idée qu'on pourrait ne pas avoir les décennies nécessaires pour extraire tout le pétrole de la planète comme on l'avait initialement projeté. «Nous avions déjà planifié la production de gaz pour les futures générations d'employés d'ExxonMobil, c'est donc très traumatisant pour moi de penser qu'ils n’auront peut-être jamais la chance de tirer profit des mêmes avantages que nous avons maintenant. Pensez-y, un jour, bientôt, nous serons tous partis et le pétrole restera toujours là sous terre, sans jamais être extrait. C'est une parodie.» Au moment d’aller sous presse, Woods a annoncé qu’ExxonMobil allait quadrupler sa production de pétrole pour tenter de tout l’extraire de la terre pendant qu'il était encore temps.

* La publication satirique The Onion (publiée depuis 1988) met le doigt sur nos paradoxes et notre crédulité sans ménagement.

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Québec permet la destruction gratuite de l'environnement au nord du 49e parallèle
Thomas Gerbet / Radio-Canada, 27 septembre 2018

Une arme contre les changements climatiques

Les milieux humides comme les tourbières sont extrêmement utiles pour capter et séquestrer le carbone, ce qui contribue à réduire de façon naturelle la présence des gaz à effet de serre dans l'atmosphère.
   Une étude de 2015, financée par le gouvernement, révélait que 95 % du carbone stocké dans les tourbières et les forêts du Québec se situe au nord du 49e parallèle.
   Les milieux humides et hydriques remplissent d'indispensables fonctions écologiques et constituent un maillon déterminant de la biodiversité du Québec.
   Selon le gouvernement du Québec lui-même, le nord du 49e parallèle «constitue l’un des derniers endroits de la planète présentant un potentiel de conservation de vastes territoires naturels» et «dispose de ressources fauniques exceptionnelles, dont des rivières à saumon mondialement reconnues».
   Le nord du 49e renferme plus de 200 000 km2 de forêts commerciales. Les grands sites d'épinettes noires sont généralement situés sur des milieux humides. Cette région compte aussi une quinzaine de mines actives et autant de projets en développement. La production hydroélectrique est une autre cause de disparition de milieux humides et hydriques.

Photo : Michelle Garneau / UQAM

«Si le règlement s'appliquait au nord du 49e, ça limiterait considérablement le potentiel de développement industriel», croit Michelle Garneau, directrice de la Chaire de recherche sur la dynamique des écosystèmes tourbeux et changements climatiques de l'Université du Québec à Montréal (UQAM). «Ce seraient des sommes astronomiques qu'il faudrait payer dans cette région.» Elle pense que c'est ce qui a guidé le gouvernement dans sa décision. La zone exemptée rappelle le territoire d'application du Plan Nord des libéraux.
   «Je ne vois pas pourquoi les mines ne paieraient pas. Pourquoi le développement du nord ne serait pas soumis aux mêmes règles?» ~ Monique Poulin, professeure au département de phytologie de l'Université Laval et spécialiste des tourbières
   «On aurait pu utiliser ces fonds-là pour renflouer certaines régions dans le sud qui ont un manque criant de milieux humides », estime Monique Poulin, professeure au département de phytologie de l'Université Laval et spécialiste des tourbières. Elle pense que le règlement «vient amoindrir la loi» et crée des disparités entre les régions et les secteurs industriels.


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(1) Pollue ta maison pour dépolluer celle de ton voisin! 

Ce gaz naturel supposément moins polluant

L'hydrofracturation utilisée pour extraire le gaz de schiste requiert des trains d’explosions puis l’injection sous très haute pression d’un fluide de fracturation constitué d'eau, de sable et d'additifs (toxiques pour certains). Cette pratique affecte le sous-sol, les écosystèmes en surface et la santé. Les fuites de gaz fréquentes peuvent contaminer des puits. L'utilisation de produits toxiques risque de polluer les nappes phréatiques. L'eau de fracturation remonte avec des contaminants indésirables pour la santé et les écosystèmes (sels, métaux et radionucléides) pour toute personne vivant près d'une source d'extraction.
   Le gaz naturel et le pétrole brut sont souvent associés et extraits simultanément des mêmes gisements, ou encore des mêmes zones de production. Les hydrocarbures liquides proviennent du pétrole brut pour une proportion moyenne de l'ordre de 80 %; les 20 % restants, parmi les fractions les plus légères, le propane et le butane sont presque toujours liquéfiés pour en faciliter le transport.
   Pour transporter le gaz naturel des gisements vers les lieux de consommation, les gazoducs sont le moyen le plus courant. Mais une part croissante du gaz consommé est transportée sous forme liquide, à − 162 °C et à pression atmosphérique, dans des méthaniers du lieu de production vers les lieux de consommation : c'est ce que l'on appelle le GNL, ou Gaz Naturel Liquéfié.
   Cette solution qui permet de «condenser» l'énergie gazeuse sous un volume réduit exige des investissements très lourds, tant pour la liquéfaction  que pour le transport. À titre indicatif, le coût d'une usine de liquéfaction, de taille minimale de l'ordre de 45 Gthermies/an (3,5 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié) est de l'ordre de 400 à 500 millions USD et si l'on veut doubler cette capacité, il faut ajouter 85 % de plus à ce coût.
   Lors de sa liquéfaction, le gaz naturel est fractionné, si nécessaire, pour le séparer de l'éthane, du propane et du butane. À l'arrivée près des lieux de consommation, le GNL est éventuellement stocké sous forme liquide puis vaporisé dans des terminaux méthaniers. Il est alors émis sur un réseau de transport classique. Ici encore, il faut des investissements importants pour la réception, le stockage et la vaporisation

Pas étonnant qu’Énergie Saguenay GNL Québec lobbytomise le gouvernement (2). 

La fracturation hydraulique consomme de grandes quantités d'eau et utilise des additifs chimiques souvent toxiques. Le torchage et les fuites ont, en outre, des effets directs et indirects sur le climat et l'acidification des milieux.

Le gaz naturel est souvent présenté comme moins polluant que le pétrole et préférable au charbon, avec des émissions de CO2 inférieures de 40 % et pratiquement pas d'émissions de dioxyde de soufre s'il est désoufré. Mais les fuites de méthane menacent d'annuler ces avantages, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), qui estime que chaque année, les compagnies pétrolières et gazières émettent plus de 75 millions de tonnes de méthane dans l'atmosphère, et que le taux de fuite moyen atteint 1,7 % pour la chaîne du gaz.
   Le secteur gazier génère en outre des émissions de méthane (CH4) et d'autres polluants durant le forage, l'exploitation du gisement, le stockage, la compression, le transport et la distribution du gaz. Les techniques modernes de fracturation hydraulique augmentent le risque et le niveau de fuites ou de perte lors des forages et des incertitudes existent quant à la fiabilité à moyen ou long terme du colmatage des puits en fin de production, notamment en zone sismiquement active.

Risques pour le grand public

Les principaux dangers directs sont l'explosion, l'incendie. Les produits de combustion du méthane sont dangereux pour la santé (risque d'asphyxie en atmosphère confinée ou en cas de mauvaise combustion).  

inflammation : le méthane peut s'enflammer en présence d'air, d'autres oxydants et d'une source de chaleur. Sa limite inférieure d'inflammabilité est de 5 % et sa limite supérieure d'inflammabilité est de 15 %;
explosion d'un mélange air/gaz :
a) en milieu non confiné, ce gaz ne détone pas et son inflammation conduit à de faibles surpressions
b) en milieu confiné, il peut exploser (en cas d'inflammation d'un mélange air/gaz s’il y a suffisamment de gaz dans le mélange);
décompression : la libération brutale de gaz comprimé à haute-pression peut s'accompagner d'un effet local de congélation et de projections violentes d'objets (éclats métalliques, terre, pierres...);
anoxie/asphyxie :
a) en milieu libre ce gaz plus léger que l'air s'élève rapidement et se disperse sans créer de nappe gazeuse au sol ni dans l'air
b) en milieu confiné le gaz naturel est un gaz asphyxiant (par privation d'oxygène);
  intoxication : en cas de combustion incomplète en milieu confiné ou en milieu appauvri en oxygène (défaut d'air de combustion ou ventilation insuffisante), il y a production de monoxyde de carbone (toxique à de très faibles concentrations);
particules : ce gaz n'étant pas livré pur à 100 %, et les systèmes de combustion étant imparfaits, sa combustion est source de microparticules et nanoparticules dont les effets sur la santé sont encore mal appréhendés.

Risque industriel

Il concerne surtout l'amont de la filière (du puits au client final) et les gros clients industriels. Les principaux dangers du gaz naturel sont liés au fait qu'il est extrait, véhiculé et fourni sous pression, qu'il est inflammable et explosif. L’exploitation offshore ou terrestre de gaz profonds (à plus de 4 ou 5 km de profondeur), chauds (de 190 °C à plus de 200 °C), très corrosifs et sous très haute pression est source de risques nouveaux, comme l'a montré l'accident d'Elgin. La «fuite d'Elgin», survenue en mars 2012, désigne un blowout – expulsion brutale et accidentelle de gaz et de boue – suivi d'une exceptionnelle fuite de gaz et condensats de gaz naturel sur la plateforme pétrolière et gazière offshore située entre l'Écosse et le Sud de la Norvège. Total aurait mal évalué le risque d’accident. Est-il raisonnable de forer à de si grandes profondeurs en mer? Il est évident que les compagnies n’ont tiré aucune leçon de la marée noire de Deepwater Horizon en 2010 causée par la plateforme de BP dans le Golfe du Mexique. 



Total compte une vingtaine de plateformes pétrolières qui siphonnent le gisement Elgin-Franklin en mer du Nord.

Risques pour les écosystèmes

Ils peuvent s'exprimer tout au long de la filière – de l'accident de forage à la contribution du gaz naturel à l'effet de serre en passant par les séismes induits.
   Les gisements les plus accessibles étant en cours d'épuisement, les industriels gaziers doivent forer plus profondément et exploiter des gaz «non-conventionnels» souvent plus sales, c'est-à-dire plus acides, corrosifs et toxiques. Les industriels ont ainsi à traiter et gérer une quantité croissante de soufre. Ils sont de plus en plus confrontés à la présence de mercure et de sulfure de plomb et/ou de sulfure de zinc, sources de risques de colmatage par entartrage minéral dans le puits, les vannes de sécurité ou la tête de puits. On parle maintenant de «gaz ultra-acides» (Sour and Acid Gas). 40 % du gaz des réserves mondiales connues en 2005 et susceptibles d'être exploitées (plus de 2 600 billions de pieds cubes) étaient acides ou ultra-acides et riches en H2S. Dans ces réserves, plus de 350 milliards de pieds cubes contiennent plus de 10 % de H2S. Outre des risques de corrosion exacerbés pour l'infrastructure extractive, ce caractère acido-toxique est a priori source d'un risque environnemental supplémentaire en cas d'accident ou de fuites chroniques.

Info sur le gaz naturel : Wikipedia

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(2) Toujours la même fable à dormir debout. «Il est plus facile de duper les gens... que de les convaincre qu'ils ont été dupés.» ~ Mark Twain 


GNL Québec est un projet «vertueux» pour l’environnement, selon Jonatan Julien

Le ministre de l’Énergie Jonatan Julien affirme que l’usine gazière Énergie Saguenay, de GNL Québec, est un projet «vertueux» et «hyperimportant» en matière de lutte contre les changements climatiques, tout en étant «fantastique» pour le développement économique du Québec. Selon les informations inscrites au registre des lobbyistes mercredi, les entreprises GNL Québec et Gazoduq (qui doit construire le gazoduc qui alimentera l’usine Énergie Saguenay) ont actuellement un total de 25 lobbyistes inscrits. Le mandat de certains lobbyistes comprend des démarches en vue de «l’obtention de puissance hydroélectrique et l’obtention potentielle de soutien financier» du gouvernement pour la réalisation du projet.

Alexandre Shields / Le Devoir, 12 février 2020

18 février 2020

Le «viagra» asiatique au temps du coronavirus

Les Asiatiques sont obsédés par les prétendues propriétés aphrodisiaques et médicinales qu’ils attribuent aux organes et à diverses parties anatomiques des animaux. En 2006, Zhang Gongyao, un professeur d'histoire médicale à l'Université Central South du Hunan, a enflammé la Chine lorsqu'il a écrit : «La médecine traditionnelle chinoise n'a ni fondement empirique ni fondement rationnel. C'est une menace pour la biodiversité. Et elle utilise souvent des poisons et des déchets comme remèdes. Nous avons donc suffisamment de raisons pour lui dire adieu.» 

La chronique de notre ami Boucar Diouf résume les conséquences funestes de ces croyances superstitieuses. C'est comme la prière, si ça marchait on n'aurait pas besoin de signaler le 911. 

COVID-19 et libido-anxiété
Boucar Diouf, biologiste, humoriste, conteur et animateur
La Presse 15 février 2020

Ce qui se passe en Chine est aussi une crise environnementale qui nécessite des réponses bien plus globales que médicales. Quand cette catastrophique et triste épidémie autour du coronavirus de Wuhan, désormais appelé le COVID-19, sera derrière la Chine, il faudra que ce pays se pose des questions autour du commerce d’animaux sauvages sur ses marchés.
   Au cœur du problème, il y a aussi la destruction de l’habitat qui favorise le contact avec les animaux sauvages porteurs de microbes, dont des bactéries, des virus et des parasites capables de nous refiler ces maladies appelées des zoonoses. Le virus Ebola, le sida, le SRAS et probablement le COVID-19 appartiennent tous à ce groupe de maladies humaines d’origine animale. Les spécialistes de la question s’accordent désormais pour dire que les solutions durables à ces problèmes comme celui que traverse actuellement la Chine passent par des approches intégrant à la fois la santé animale et humaine, mais aussi la santé environnementale, notamment la protection de la biodiversité et de son habitat. Cette approche, mise de l’avant au début des années 2000 et dénommée One World, One Health, est certainement la médecine préventive la plus efficace que la Chine devra adopter.

Pour cela, il faut que le pays de Xi Jinping donne un solide un coup de barre dans ces marchés où on vend des animaux sauvages pour la consommation humaine.

Sinon, à la fin de cette bataille qu’elle livre contre le COVID-19, il faudra que la Chine se prépare pour une autre offensive microbienne dans un avenir pas lointain.
   Tant qu’à attaquer le problème de front, la Chine devrait aussi faire un sérieux ménage dans les départements de sa médecine traditionnelle, surtout ceux consacrés aux aphrodisiaques qui font aussi certainement partie du problème. Les pannes de libido de ce populeux pays semblent être un problème sérieux qui coûte très cher à la biodiversité planétaire. Pensez ici à la corne de rhinocéros qui, une fois réduite en poudre, agrémente des soupes ou est encapsulée et vendue à fort prix à des hommes convaincus que toute la force du pachyderme sera miraculeusement transposée dans leur zigounette.

Pourtant, toutes les études scientifiques sur le sujet ne trouvent absolument rien dans ces cornes qui puisse significativement donner du corps au corps caverneux. Depuis 1970, 90 % des populations de rhinocéros de la planète ont disparu, en grande partie à cause de ces pratiques absurdes qui enrichissent des criminels barbares empochant des dizaines de milliers de dollars pour chaque corne vendue sur le marché noir. La corne de rhinocéros est constituée principalement d’une protéine fibreuse appelée la kératine. Celle-ci abonde dans tous les phanères, dont les ongles, les cornes des ongulés, les sabots, les cheveux, les carapaces de tortue ainsi que les plumes et les becs d’oiseau. Autrement dit, si la kératine avait la capacité de lever le bambou, tous les anxieux de la terre qui se rongent les ongles à longueur de journée devraient toujours avoir la pine debout!
   Le cas des hippocampes est aussi préoccupant que celui des rhinocéros. Même si ce petit cheval de mer figure sur la liste de la Convention internationale sur le commerce d’espèces sauvages menacées d’extinction (CITES), le massacre des hippocampes continue impunément en Chine où des quantités astronomiques de ces poissons atypiques sont, encore une fois, déshydratées, réduites en poudre ou transformées en gélules. L’organisme Save Our Seahorses estime à 150 millions le nombre d’hippocampes qui sont capturés annuellement et mis en grande partie au service de la libido-anxiété du continent asiatique.

Et que dire des tigres qui sont braconnés pour leur os, mais surtout pour leur pénis qui, lorsque consommé avec les testicules, est censé remettre au garde-à-vous des petits soldats de l’empire du Milieu.

Pour cette espèce, c’est au moins 97 % de sa population qui a été massacrée au XXe siècle.
   Cornes de rhinocéros, pénis et testicules de tigre, pénis de yak, ailerons de requin, pénis de phoque, vésicules biliaires d’ours… nombreux sont ces produits de contrebande censés régler la débandade et des pannes de libido mâles. Malheureusement, ces croyances solidement ancrées ont des conséquences dramatiques.
   Dans leur désir de comprendre l’explosion du COVID-19, des scientifiques chinois ont déjà, à tort ou à raison, montré du doigt les pangolins comme réservoir potentiel du virus de Wuhan. Ce qui voudrait dire que la Chine n’a pas vraiment tiré une leçon durable de la crise du SRAS de 2003 qui l’avait amenée à bannir les civettes des marchés et à en abattre au moins 10 000. Même si la piste du pangolin est contestée, le simple fait qu’on suspecte ce petit mammifère des régions chaudes d’Afrique et d’Asie du Sud-Est en dit long sur un problème que la Chine ne peut plus ignorer.

Que font ces animaux sauvages déjà inscrits sur la liste des espèces menacées de disparition dans un marché chinois?

Pour trouver la réponse, il faut encore penser aphrodisiaque. Le pangolin, cet animal qui ressemble à un artichaut vivant, a aussi la malchance de faire partie de ces stimulus à quatre pattes dont une certaine croyance chinoise considère les écailles sur le corps porteuses de vertus curatives et aphrodisiaques. Or, quand la médecine chinoise soupçonne un animal porteur d’une force sexuelle transférable à l’humain, cette créature peut tout de suite aller s’inscrire sur la liste des espèces en voie en disparition.

Photo : Binsar Bakkara. Le pangolin est le mammifère le plus braconné au monde – une certaine croyance chinoise considère les écailles sur son corps porteuses de vertus curatives et aphrodisiaques.

Ainsi, en novembre 2019, l’ONG WildAid a révélé que près de 100 000 pangolins sont victimes chaque année d’un trafic illégal. Ce qui en fait le mammifère le plus braconné au monde. Le même organisme a rapporté que les saisies illégales de cette espèce sur la planète sont passées de 21 kg en 2011 à plus de 68 tonnes en 2019. Malgré le fait que la CITES leur accorde un haut degré de protection depuis 2016, les pangolins africains sont encore massivement embarqués pour l’Asie à partir d’un réseau de trafiquants solidement installé en Afrique du Sud. Tout ça en grande partie pour l’industrie de la béquille pénienne.
   Pour une solution globale et durable, je pense que la Chine devrait investir massivement dans des programmes de sexologie et de psychologie plutôt que de rester éternellement complice d’activités criminelles au service de croyances et de pratiques rétrogrades et à l’efficacité douteuse. Comment le gouvernement de Xi Jinping, disposant d’un système de surveillance si sophistiqué qu’il arrive à voir un citoyen se décrotter le nez dans sa voiture à un feu rouge, peut-il ignorer les drames écologiques qui se jouent dans ses marchés?

Source :

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En complément 

Le commerce illégal d’espèces sauvages ou l’apocalypse de la biodiversité
Rédactrice : Leslie Anthony / Photographe : Peter Power
Canadian Geographic, 2 décembre 2017

Wildlife trade © Peter Power. L'éléphant réduit à un tabouret et à une insignifiante sculpture en ivoire...  

Le commerce illégal d'espèces sauvages, dont le chiffre d'affaires annuel est estimé à 175 milliards de dollars, est la quatrième plus grande entreprise criminelle du monde. Elle va radicalement altérer le règne animal. 

Wildlife trade © Peter Power. Entrepôt de pièces à conviction de la Direction de l'application de la loi sur la faune d'Environnement Canada.

En pratique, ce commerce s'inscrit dans une catégorie plus large de «crimes environnementaux» connexes qui comprend la pollution, la pêche illégale et l'exploitation forestière (avec jusqu'à un tiers du papier mondial obtenu à partir de bois provenant de sources illégales, les impacts économiques s'accumulent dans des pays comme le Canada qui réglementent strictement ces secteurs). 
   Les enclaves asiatiques des grandes villes nord-américaines continueront de suivre leurs croyances traditionnelles malgré les interdictions culturelles - et légales - de l'Occident. Il y a un grand commerce de tout ce qui est utile aux médecines traditionnelles dont les clients sont majoritairement des Canadiens d'origine asiatique, dit Sheldon Jordan, faisant écho aux reportages sur ce qu'on peut trouver en faisant une tournée des marchés et apothicaires chinois à Toronto et Vancouver : toutes sorte d'animaux vivants (tortues, poissons), séchés (geckos, concombres de mer, ailerons de requins), et en poudre (morceaux de gros mammifères en voie de disparition). Avant de rencontrer les braconniers de Khe Môi, j'avais vu comment l'appétit insatiable de la Chine pour la nourriture, les aphrodisiaques et les remèdes traditionnels menaçaient de nombreuses espèces au Vietnam - et plusieurs suivront bientôt. Le traffic que j'ai observé avec les serpents et les grenouilles consommables était stupéfiant - des milliers entassés dans des sacs de jute traversaient la Chine chaque jour. Ajoutez les lézards, les tortues, les poissons, les oiseaux, les mammifèreset les invertébrés, et la même chose dans une centaine de pays, et vous avez une crise mondiale majeure. C'est là le véritable syndrome de la Chine - non pas l'effondrement nucléaire du film éponyme d'hollywood de 1979, mais une apocalypse de la biodiversité, maintenant.
   Tant que quelqu'un est prêt à payer cher, les gens désespérés continueront à tuer des gorilles pour leur couper les mains.

Article intégral en anglais :

Extraits traduits en français :

Des crimes écologiques impardonnables 

La population de la Chine était estimée à la mi-2019 à 1 441 800 000 d’individus, soit 18,7 % de la population mondiale de 7,7 milliards selon les estimations de l'Institut national d'études démographiques. Considérant la démographie de l’Extrême Orient (Chine, Corée Nord / Sud, Indonésie, Japon, Malaisie, Philippines, Taïwan, Thaïlande, Vietnam et autres), si les habitants de ces contrées continuent à exterminer des espèces animales et végétales au rythme actuel, on peut s’attendre à ce que d’ici 10 ans il ne reste presque plus rien de la biodiversité...

Les gros trafiquants s’en prennent à tout ce qui vit. Ils ne semblent pas comprendre les conséquences irréversibles de leur rapacité à court et moyen terme. Le fait que les ressources soient limitées et ne se renouvellent pas à la même vitesse qu’ils les déciment ne les dérange pas du tout. Les profits du commerce illégal des espèces sauvages sont estimés à plusieurs milliards de dollars annuellement. Ce commerce est souvent organisé par de très grands réseaux de criminels qui font aussi le trafic illicite de drogues, d'armes et de personnes.
   Malgré les efforts de conservation au cours des dernières décennies, le braconnage illégal est en augmentation dans de nombreuses régions du monde. En 2011, 23 tonnes d'ivoire illégal ont été saisies. Cela représente environ 2 500 éléphants tués pour leurs défenses.
   Le braconnage des rhinocéros en Afrique du Sud est passé de 13 rhinocéros tués en 2007 à 1175 en 2015 (sans compter ceux qui ne sont pas recensés). L’augmentation est largement attribuable à une rumeur venant de pays asiatiques qui prétend que la corne de rhinocéros guérirait le cancer.
   Les pangolins sont en effet traqués sans relâche pour leurs écailles vendues sur les marchés asiatiques pour leur pseudo vertu thérapeutique. Actuellement, ce sont les mammifères les plus braconnés dans le monde. Entre 2006 et 2015, plus de 1,12 million de pangolins ont été victimes du trafic d'animaux à l'échelle mondiale, ce qui représente plus de 120 000 pangolins tués par an. 

 


Début juin 2017, trois semaines après la dernière saisie massive de pangolins à Kuala Lumpur, sept autres tonnes d'écailles de pangolins en provenance du Nigeria ont été saisies à Hong Kong. Une telle quantité d'écailles signifie la mort de milliers de pangolins.
   Les Asiatiques sillonnent le monde entier pour se procurer de la bile d’ours noirs. Mauvaise nouvelle pour eux : des chercheurs ont examiné le foie et la vésicule biliaire de nombreux ours noirs déjà morts et découverts que ces organes étaient souvent atteints de cancer. L’arroseur arrosé...
   La Presse canadienne 10 juillet 2019 – Des agents ont saisi le mois dernier des dizaines de parties du corps d’ours noirs, de pilules amaigrissantes à base de plantes africaines menacées d’extinction et les carcasses de deux fourmiliers écailleux, dans le cadre d’une vaste campagne internationale ciblant braconniers et trafiquants, a indiqué mercredi Environnement et Changement climatique Canada.
   Plusieurs des accusations ont été portées contre des citoyens américains, qui ont été arrêtés alors qu’ils tentaient de faire passer clandestinement des testicules, des pattes et des os péniens d’ours noirs à la frontière après être venus au Canada pour la saison de la chasse à l’ours, au printemps.
   «La criminalité liée à la faune ne dépouille pas seulement notre environnement de ses ressources, elle a aussi des répercussions qui se traduisent par de la violence, du blanchiment d’argent et de la fraude, a fait valoir dans un communiqué Jürgen Stock, du Secrétariat général d’Interpol. Des opérations comme Thunderball sont des mesures concrètes qui ciblent les réseaux criminels transnationaux qui tirent profit de ces activités illicites.»
   La police a également mis la main sur 440 défenses d’éléphants, plus d’une demi-tonne d’objets en ivoire, 2550 mètres cubes de bois et 2600 plantes. Au total, à Singapour, ont été saisis 23 primates, 30 fauves, plus de 4300 oiseaux, près de 10 000 animaux marins dont du corail, des hippocampes, des dauphins et requins, près de 10 000 tortues et quelque 1500 autres reptiles.
   Agence France-Presse, 30 janvier 2018 – Des contrebandiers ont été arrêtés dans l'Extrême-Orient russe alors qu'ils s'apprêtaient à passer en Chine, a annoncé une organisation de protection des animaux. Les malfaiteurs ont été arrêtés ce week-end par des douaniers russes dans la région de Primorie, en Extrême-Orient russe, en possession de «plus d'une tonne de pattes d'ours (environ 870 pattes), de la graisse et des organes génitaux de grenouilles, des restes d'au moins quatre tigres de Sibérie», a annoncé dans un communiqué une ONG russe de protection du tigre de Sibérie, une espèce rare et menacée.
   À bord de trois véhicules conduits par «des citoyens russes et chinois», ont été également trouvées des dents d'ours, des queues et pénis de cerf, mais aussi un butin plus classique d'armes, de munitions et d'ambre, précise l'ONG «Centre du tigre de l'Amour».  Le tigre de Sibérie, également appelé tigre de l'Amour, est la plus grande espèce de tous les tigres. Il est menacé d'extinction avec un effectif de seulement 450 spécimens répartis en Chine, en Russie et peut-être en Corée du Nord.
   Associated Press, 20 juin 2018 – Les autorités canadiennes ont intercepté un conteneur qui cachait 18 tonnes de chair d'anguille en provenance d'Asie, dans le cadre d'une opération mondiale contre le commerce illégal de la faune et du bois.
   Environnement Canada précise que des agents dans plusieurs provinces ont intercepté des ailerons de requins et des serpents réglementés, de même que des produits commerciaux comme des valises et des sacs à main fabriqués avec des espèces en voie de disparition.
   Ces efforts s'inscrivaient dans le cadre de l'opération Thunderstorm, une enquête d'un mois menée par l'agence de police internationale Interpol.
   Le gouvernement affirme que des agents fédéraux et provinciaux ont mené des activités d'inspection de transports d'animaux vivants, de vérification de plaintes concernant la destruction de l'habitat et d'espèces sauvages, et de contrôle des chasseurs et des pêcheurs à la ligne. Ils ont aussi participé à des opérations éclair pour intercepter des passages aux frontières.
   La chair d'anguille serait celle d'une espèce ayant été désignée comme une espèce en voie de disparition et dont l'exportation a été interdite par l'Union européenne en 2010.
Les crimes contre les espèces sauvages dans le monde – comme le braconnage, la contrebande et le trafic d'animaux, de plantes et d’arbres – atteindraient actuellement plus de 200 milliards par année, ce qui place ce type de crimes au quatrième rang des crimes les plus lucratifs du monde, selon les Nations unies et Interpol.
   1400 suspects à travers le monde – En plus de la chair d'anguille interceptée au Canada, l'opération a permis la saisie de milliers d'animaux vivants et de tonnes de viande et d'ivoire, a indiqué Interpol.
   Des agents de bord qui transportaient des tortues dans leurs bagages et un chasseur qui affichait ses trophées illégaux sur les médias sociaux ont notamment été arrêtés. L'enquête a identifié quelque 1400 suspects à travers le monde, a dit Interpol.
   Les autorités ont notamment mis la main sur 43 tonnes de viande sauvage - ours, éléphant, crocodile, baleine et zèbre –, 1,3 tonne d'ivoire d'éléphant, 27 000 reptiles, près de 4000 oiseaux, 48 primates, 14 grands félins et les carcasses de sept ours, dont deux ours polaires. Plusieurs tonnes de bois ont également été saisies.
   Et puis la mafia chinoise des mers ratisse et vide les fonds marins. Tout y passe, petits et gros poissons, plancton, coraux, etc. Partout leurs bateaux de pêche sillonnent les côtes océaniques. En 2017, un navire chinois, le Fu Yan Yu Leng 999, a été saisi en zone interdite aux Galapagos avec à son bord 300 tonnes de poissons et plus de 6000 requins, notamment des requins marteaux en voie d’extinction, pêchés illégalement.

Comme par hasard, depuis l’arrestation de Meng Wanzhou, la Chine boycotte les produits canadiens qu’elle prétend contaminés. Eh bien moi, j’encourage les Canadiens à boycotter tous les aliments provenant d’Asie – d’autant plus qu’on ignore ce qu’ils contiennent. C’est simplement de l'autoprotection. 

J’éprouve une répulsion viscérale envers le non respect des droits humains qui prévaut dans la culture chinoise et asiatique en général. Il est évident qu’en Chine la populace n’étudie pas la philosophie, l’humanisme et le respect des droits de la personne. Un individu qui pense par lui-même est une menace pour un régime totalitaire. Internet est une plaie en matière de vie privée. Par contre le fait que les manifestations et la répression militaire par Pékin à Hong Kong aient été largement diffusées à travers le monde a peut-être évité un sinistre massacre comme celui de la Place Tian’anmen en 1989. Selon Alan Donald, ambassadeur du Royaume-Uni à Pékin «À 5 h 40 le 4 juin, la Place est vidée. Le matin du 5 juin, des manifestants tentent de pénétrer sur la place. Les blindés ont roulé sur les corps à de nombreuses reprises, faisant comme une ‘pâte’ avant que les restes soient ramassés au bulldozer. Restes incinérés et évacués au jet d’eau dans les égouts.»