5 janvier 2013

Zénie en herbe – 2


Musashi, un personnage légendaire
Les Contes des Arts Martiaux; réunis par Pascal Fauliot; Albin Michel  
 
«Dans une auberge isolée, un samouraï est installé à dîner, seul à une table. Malgré trois mouches qui tournent autour de lui, il reste d’un calme surprenant.
       Trois rōnin (guerriers vagabonds, sans maître) entrent à leur tour dans l’auberge. Ils remarquent aussitôt avec envie la magnifique paire de sabres que porte l’homme isolé. Sûrs de leur coup, trois contre un, ils s’assoient à une table voisine et mettent tout en œuvre pour provoquer le samouraï. Celui-ci reste imperturbable, comme s’il n’avait même pas remarqué la présence des trois rōnin. Loin de se décourager, les rōnin se font de plus en plus railleurs.
       Tout à coup, en trois gestes rapides, le samouraï attrape les trois mouches qui tournaient autour de lui, et ce, avec les baguettes qu’il tenait à la main. Puis, calmement, il repose les baguettes, parfaitement indifférent au trouble qu’il venait de provoquer parmi les rōnin. En effet, non seulement ceux-ci s’étaient tus, mais pris de panique ils n’avaient pas tardé à s’enfuir. Ils venaient de comprendre à temps qu’ils s’étaient attaqués à un homme d’une maîtrise redoutable. Plus tard, ils finirent par apprendre, avec effroi, que celui qui les avait si habilement découragés était le fameux maître : Miyamoto Musashi.» 
 
(Une scène du film Karate Kid s’inspirait de ce récit.)
 
Cette légende illustre un principe capital de la Voie du Samouraï :
on doit chercher à vaincre sans combattre.

Action efficace et sagesse

Tous les arts martiaux sont d’abord des techniques de défense. Quand on est dans l’action, il faut gagner. Pour le Bushi ou Samouraï, perdre c’est mourir... Mais la question est de savoir comment gagner par une action juste du point de vue de la tactique et de l’attitude. Le guerrier doit, par exemple, «faire perdre à l’adversaire son équilibre mental» ou encore «faire naître une certaine tension nerveuse en empêchant l’adversaire d’être sûr de lui». Musashi souligne même l’importance «de neutraliser l’adversaire directement, sans le laisser souffler, en évitant de croiser son regard». Il ajoute d’ailleurs : «Le plus important est de l’empêcher de pouvoir se restaurer»...

À propos de l’importance de savoir se rénover dans l’action, Musashi dit plus loin : «Lorsque, au cours d’un combat qui reste à l’état de mêlée, rien n’avance plus, abandonnez vos idées premières, rénovez-vous en tout et prenez un nouveau rythme. Ainsi découvrez le chemin de la victoire. Chaque fois que vous jugez qu’entre votre adversaire et vous tout grince, changez d’intentions immédiatement et parvenez à la victoire en recherchant d’autres moyens avantageux pour vous.»

Musashi se rapproche davantage de la figure du sage que du technicien des armes. Son enseignement vise d’abord à remporter une victoire sur soi. C’est le sens de sa maxime : «Devenez l’ennemi». Dans son action, le guerrier doit atteindre en lui-même le point où cesse la violence.

La vigilance dans l’action s’exerce par la concentration de l’attention au geste, au mouvement, au corps – ici et maintenant.

Épictète enseignait relativement la même chose :
«Attitude et caractère de l’homme ordinaire : il n’attend rien, en bien ou en mal, de soi-même, et tout des circonstances extérieures. Attitude et caractère du philosophe : il attend tout, en bien comme en mal, de soi-même. Signes distinctifs de l’homme en progrès : il ne blâme personne, ne loue personne, ne reproche rien à personne, n’accuse personne; il ne dit jamais rien qui tende à faire croire qu’il sait quelque chose ou qu’il est quelqu’un. En cas d’échec ou d’obstacle, il ne s’en prend qu’à soi-même. [...] En un mot, le seul ennemi qu’il ait à redouter, c’est lui-même.»
~ Épictète; Ce qui dépend de nous

«On peut se demander finalement si la véritable intelligence n’est pas celle qui généralise, l’intelligence non homogène, non close sur un domaine déterminé. L’intelligence suppose avant tout la libération de ce qui l’empêche de se manifester plénièrement, l’intelligence exige de sortir de toutes les prisons, des dogmes, des tabous, des coutumes, des opinions. Répétons ici qu’il n’y a pas d’intelligence réelle sans une totale ouverture de l’esprit, sans une curiosité insatiable. Il n’y a aucune intelligence qui soit bloquée sur des opinions établies une fois pour toutes. L’homme intelligent possède en lui tellement d’opinions diverses qu’il n’éprouve plus le moindre besoin de se fixer sur une opinion, quelle qu’elle soit.» 
~ Pierre Daco; Psychologie et liberté intérieure; Marabout

Source : archives de Par 4 chemins – «Le modèle du guerrier»
http://www.radio-canada.ca/par4/ind/musashi/samourai.html


*** 

Le mental

Le crâne est encombré de mécanismes, la bouche déblatère et l’atmosphère est polluée par cette fabrique d’opinions et de ratiocinations. «Pourtant, protestez-vous, l’intellect est ce qui nous distingue en tant que race humaine, il est la source de tous nos progrès et de toutes les grandes vérités!»
       Si vous croyez vraiment cela, allez dans votre chambre et fermez la porte. Mettez un magnétophone en route et exprimez franchement tout ce qui vous passe par la tête. Ne préméditez ni ne censurez rien. Ensuite, écoutez. Vous serez édifié par tout ce que votre précieux cerveau aura vomi.
       Voici comment je perçois votre tête : un amoncellement de volants, de pédales, d’objets hétéroclites ramassés à gauche à droite, un bric-à-brac qui a envahi tout votre espace vital. Ce fatras remue et grince dans votre crâne. Cela vous occupe. Rendez-vous compte du genre de pensées qui bourdonnent dans votre cerveau.
       Un de ces jours, prenez le temps de vous isoler. Inscrivez pendant une demi-heure tout ce qui vient à l’esprit. Cela vous aidera à comprendre ce que je veux dire. Ce qui se passe dans votre tête vous surprendra. Le chaos qui y règne est votre climat mental permanent. Votre cerveau est plein d’un brouillard de pensées qui vous empêchent de voir la réalité, d’atteindre la clarté spirituelle. Il faut le dissiper. Votre détermination suffira pour qu’il disparaisse. Souvenez-vous : le brouillard ne s’accroche pas à vous, c’est vous qui ne le laissez pas partir!

~ Tarot Zen; Éditions du Gange

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