22 décembre 2012

Vive la communication!

Selon une recherche, il semble que les gens textent pendant le sommeil sans s’en rendre compte – un réflexe?! On leur conseille de remiser le téléphone hors de la chambre.
 
Depuis quelques semaines, je prends le temps de lire des vrais livres – vrais, c’est-à-dire en trois dimensions. Quelques chapitres de différents auteurs à chaque jour. Avant de m’endormir, je choisis deux ou trois mots du dictionnaire de Bernard Pivot que je savoure comme un  vieux porto – à doses homéopathiques pour étirer le plaisir!
 
La «tablette électronique» ne m’attire pas – d’autant plus que tous les téléchargements peuvent disparaitre d’un coup sans crier gare. À moins de passer au feu, mes livres préférés resteront dans ma biblio tant que je vivrai. Parlant de feu, cela me fait penser au roman Fahrenheit 451 : le livre est l’ennemi du bonheur, il favorise un comportement asocial, et il vaut mieux les bruler, privilégier le divertissement (sports, émissions de télé, etc.) pour ne pas déranger la tranquillité d’esprit des masses, heureuses dans leur ignorance. À mon avis le téléphone intelligent et ses bidules connexes favorisent tout autant les comportements asociaux.
 
Bref, l’autre soir, parmi les mots de Pivot, j’ai choisi au hasard «Impatience»*.
 
Les mots de ma vie
Bernard Pivot
Albin Michel, 2011

(Extrait) 
[…]
De toutes les impatiences, la pire est celle qui relève du cœur. L’impatience amoureuse. Anxieux, nerveux, on guette le facteur qui apporterait ou n’apporterait pas la lettre tant espérée. « Tout mon sang se bouleverse pour un courrier manqué », écrivait Mme de Staël, en attente d’une lettre de Louis de Narbonne, son amant. Les yeux rivés sur le téléphone, on priait le ciel qu’il sonnât enfin. Pour annoncer quoi? Une promesse, un refus, une acceptation? Un autre coup de téléphone? Oh! le rire cruel, ou cette voix douce… Non, ne coupez pas, s’il vous plaît… Oui, non, je n’entends pas, je n’entends plus… La lenteur du courrier et les mauvaises liaisons téléphoniques ajoutaient à l’impatience de celui qui ne savait pas encore si ses tentatives, ses audaces, ses premiers mots, ses premiers gestes avaient été bien perçus et s’ils seraient la bonne introduction à une nouvelle aventure sentimentale.

Aujourd’hui, on pourrait croire qu’avec les téléphones, fixe et portable, l’ordinateur, les courriels, les textos, les fax, les blogs, les photos instantanément échangées, les couples se faisant ou se défaisant en un instant, l’impatience amoureuse a disparu. Certes, elle s’étale moins dans le temps, elle n’est plus soumise aux caprices des dames de la poste et du téléphone, mais elle est beaucoup plus violente. Sauvage. Insupportable. Les quelques minutes ou les quelques heures pendant lesquelles on attend le clic qui vous envoie vous faire foutre ou qui vous promet le ciel sont insoutenables. L’ordinateur a un cœur qui bat très vite, vous l’entendez, mais c’est le vôtre. Ne comptez pas sur l’iPhone ou sur le Mac pour qu’il arrête la mauvaise nouvelle ou pour qu’il accélère la bonne. Ce sont des monstres froids. Votre impatience, pourtant si manifeste, si douloureuse, ils s’en fichent.

Heureux amants qui s’envoient des textos comme s’ils échangeaient des balles de ping-pong. Couples séparés par la distance, par le décalage horaire, qui nouent des baisers chaque matin et chaque soir dans des courriels tendres et érotiques. Mais que l’un vienne à manquer, débute alors une frustration impatiente. Pourquoi? Comment? Quelle main jalouse intercepte vos SMS qui sont des SOS? Pourquoi la plus belle déclaration d’amour jamais envoyée sur le Net reste-t-elle sans réponse? En ai-je trop fait? Pas assez? Quel mot manque, qu’elle attendait? On se relit, dix fois, vingt fois, et l’on sent monter en soi, telle une marée, l’impatience du silence, de l’imagination torturée, du secret inaccessible, de la réponse qui ne vient pas et qui ne viendra peut-être jamais.

À propos…

Y a-t-il plus goujat que la rupture par mail? Oui, les condoléances. Y a-t-il plus goujat que la rupture et les condoléances par mail? Oui, par SMS. 

(Pages 186-188)

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J'ai publié quelques messages à propos de la conservation des livres/papier... Vous aimerez peut-être :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2011/12/lere-du-pad.html
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2010/05/qui-la-faute.html
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2011/08/conservez-vos-livres.html


COMMENTAIRE

* Étrange hasard, le lendemain j’ai reçu un pps intitulé Une prédiction d’Einstein se réalise : «Je crains le jour où la technologie remplacera les interactions humaines. Nous aurons alors créé une génération d’idiots.»

Dans la vie, qu’apprécions-nous le plus? La communication, voyons!
Au resto, au musée, à la plage, en tête-à-tête...  

 
 


Il n’est pas rare de voir des dépendants au texto utiliser simultanément plusieurs écrans à la fois (cellulaire, iPod Touch, etc.) tout en parlant sur Skype et en regardant la télé… À l'image de Dieu nous sommes partout mais pas là.

Bien des gens angoissent à l’idée de revoir la parenté aux Fêtes. Mais quand je pense aux familles élargies, je me dis que pour certains enfants ce peut être déstabilisant et peu réjouissant. Une jeune fille, disait : «Dans mon calendrier, j’ai huit repas de Noël avec les familles de mes deux parents qui se sont remariés plusieurs fois…» (!!!)

Les téléphones intelligents vont surement tinter fort durant les réceptions; c’est un bon moyen de s’évader si la tête est déjà ailleurs…


«Dans mon temps», nous allions dormir sous les manteaux de fourrure empilés sur le lit de nos grands-mères.

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