3 avril 2019

Si le plastique était digeste

Nous serions bien nourris car il y en a partout / dans tout... 

J'ai l'impression que beaucoup de gens ne réalisent pas à quel point la situation de la terre-mer est tragique. À tous les jours, de vois encore des sacs de plastique voler et s'accrocher aux arbres, des bouteilles et des verres de plastique rouler partout dans les stationnements, les rues et les chemins de campagne. Pourtant on tente depuis des décennies de sensibiliser et d'éduquer la population.  
   Le directeur de recherche au Centre national de recherche scientifique, en France, Jean-François Ghiglione le souligne : «La solution se trouve sur la terre ferme, et non dans la mer. Chaque année, l’humanité produit plus de 300 millions de tonnes de plastique. Et à l’heure actuelle, on estime que plus de 150 millions de tonnes se trouveraient déjà dans les océans de la planète, un chiffre qui devrait doubler d’ici 2050.»  

Ce matériau dérivé du pétrole est produit massivement depuis à peine plus de 60 ans.


«Chaque jour, 8 millions de tonnes de déchets finissent dans l'océan. 80 % de la pollution qui touche nos mers est d'origine terrestre et issue de l'activité humaine, avec des répercussions terribles sur la biodiversité et l'ensemble de notre environnement», souligne le président de Surfrider Foundation Europe, Gilles Asenjo.
   Le plastique constitue «plus de 80 %» des déchets sur la plupart des cinq sites analysés, constate l'ONG. Sur la plage de Burumendi, à Mutriku (Espagne) par exemple, 96,6 % des 5 866 déchets collectés sont du plastique et du polystyrène. À Anglet (Pyrénées-Atlantiques), sur la plage de La Barre, le plastique et le polystyrène représentent 94,5 % des 10 884 déchets collectés.

Du plancton aux baleines, les animaux des écosystèmes océaniques ont été contaminés par le plastique. On a trouvé du plastique dans 59 % des oiseaux de mer comme les albatros et les pélicans, dans 100 % des espèces de tortues marines et dans plus de 25 % des poissons échantillonnés dans les marchés de fruits de mer du monde entier. (Ocean Conservancy) 

En 2017, lors d’un ménage de plages international, 789 000 participants ont ramassé :
– 2,4 millions de mégots de cigarettes
– 1,7 million d’emballages alimentaires
– 1,6 million de bouteilles de plastique
– 1,5 million de sacs de plastique

Ainsi que de gros objets tels que :
– un toboggan au Canada
– un golf kart aux Bermudes
– des trottinettes en Norvège
– des lumières d’arbre de Noël à Curaçao
– des dentiers en Malaisie

Chaque clip a la même introduction, mais les thèmes sont différents  
Source : https://storyofstuff.org/ 
 





Le plastique menace toute vie aux Galápagos


Juste armés de gants, gardes du parc des Galápagos et bénévoles combattent un monstre créé par les humains : des tonnes de plastique que les courants marins poussent jusque dans les estomacs des animaux uniques de cet archipel de l'océan Pacifique.
   À un millier de kilomètres des côtes d'Équateur, s'est engagée une guerre inégale, mais décisive pour la protection d'un éden qui a inspiré sa théorie de l'évolution à Charles Darwin, un éco-système inédit sur la planète.
   Les déchets des grandes métropoles parviennent jusqu'aux îles, dégradés en micro-particules de plastique, une menace majeure pour les iguanes, les tortues, les poissons et les oiseaux qui n'existent nulle part ailleurs.
   Ce microplastique «en arrive à pénétrer l'organisme d'espèces dont nous nous alimentons ensuite», a expliqué en outre à l'AFP la biologiste Jennifer Suarez, experte en écosystèmes marins du Parc national des Galápagos (PNG).
   Les radiations solaires et la salinité des mers détériorent bouteilles, bouchons, emballages, filets de pêche, etc. D'abord dur comme une pierre, le plastique se désintègre, au contact des rochers et par la force de l'eau, en microparticules qu'ingère la faune.
   Chaque année, sous un soleil implacable, des «commandos» de nettoyage débarquent sur les plages et les zones rocheuses pour tenter de limiter les dégâts.

Un inventaire de bazar

Des ordures de plastique de toutes sortes se mêlent et s'accumulent face aux côtes, s'infiltrent jusque dans les fissures des couches de lave volcanique pétrifiée des Galápagos.
   Gadgets sexuels, sandales, briquets, stylos, brosses à dents, bouées, mais aussi canettes en aluminium polluent les zones de repos des animaux, dont certains sont en danger d'extinction.
   Dans des parties inhabitées, comme Punta Albemarle, à l'extrême nord de l'île Isabela où est parvenue l'AFP, les nettoyeurs ramassent des déchets issus d'ailleurs, parfois de l'autre côté de la planète.
   L'archipel équatorien, qui compte environ 25 000 habitants, a restreint ces dernières années l'entrée du plastique sur son territoire et son usage.
   «Plus de 90 % des résidus que nous collectons ne proviennent pas d'activités productives aux Galápagos, mais d'Amérique du Sud, d'Amérique centrale, et même une grande quantité de déchets sont de marques asiatiques», précise Jorge Carrion, directeur du PNG.
   Ces résidus viennent «probablement de flottes de pêche originaires d'Asie qui opèrent autour de la zone économique exclusive des Galápagos», ajoute-t-il, debout sur le quai du parc à Puerto Ayora, chef-lieu de l'île Santa Cruz.
   Depuis 1996, des artisans pêcheurs nettoient aussi les îles les plus éloignées et depuis trois ans, les déchets collectés sont notés dans un registre.
   «Cela nous sert à identifier l'origine des ordures qui arrive sur les côtes non peuplées. Il a été répertorié que la plus grande quantité de marques sont péruviennes et chinoises», précise Jennifer Suarez.
   Bien qu'il n'existe encore aucune législation, l'idée est que ce recensement permette un jour de réclamer des compensations pour dégâts environnementaux.
   Au cours du premier trimestre de 2019, huit tonnes de déchets ont été ramassés, 24,23 tonnes pour toute l'année 2018 et 6,47 tonnes en 2017.

Des sacs pris pour des méduses

Les gardes font un autre inventaire, plus affligeant, des animaux affectés, tels les cormorans, qui édifient leurs nids avec des couches-culottes, ou le cadavre d'un fou à pattes rouge enfoui dans des ordures.
   Indignés, les nettoyeurs trouvent des sacs de plastique marqués de morsures de tortues marine, qui les confondent avec les méduses dont elles s'alimentent.
   «Nous jetons tant d'ordures à la mer et elles arrivent sur des côtes où il n'y a même pas de gens!», déplore Sharlyn Zuñiga, 24 ans, bénévole.
   Cette étudiante de la région amazonienne de Pastaza a découvert aux Galápagos des plages vierges, au sable blanc jonché de déchets.
   «C'est très dur! Nous ne voyons jamais que la face la plus belle des Galápagos, en photos, en cartes postales», s'indigne-t-elle.
   Bien que les vagues ne cessent de déverser des résidus, les nettoyeurs s'acharnent et défendent leur tâche, qui semble sans fin sur ces îles classés au Patrimoine naturel de l'humanité par l'UNESCO.
   En fin de mission, d'énormes sacs de déchets de plastique sont chargés à bord d'un bateau qui met le cap sur Puerto Ayora, d'où ils seront expédiés sur le continent pour y être incinérés.
   «Nous éliminons les ordures qui s'accumulent sur ces sites, évitant ainsi qu'elles continuent à se dégrader en microparticules», ajoute la biologiste Jennifer Suarez.
   «Nous devons aller plus loin que le seul ramassage des résidus. Nous devons en appeler aux consciences à l'échelle mondiale afin d'arrêter de jeter des ordures en milieu marin», estime le directeur du PNG.

Source :
Rodrigo Buendia, Paola Lopez | Agence France-Presse
Galápagos | 22 mars 2019

Pourra-t-on un jour venir à bout des «continents» de plastique des océans?

L’appétit de l’humanité pour le plastique, mais surtout sa propension à s’en débarrasser de façon négligente, a mené à la création de véritables «continents de plastique» dans les océans de la planète.
   Une telle soupe de plastique, située grosso modo entre Hawaï et la Californie, a atteint aujourd’hui une superficie de plus de 1,6 million de kilomètres carrés. Pas moins de 2000 milliards de morceaux de plastique flotteraient dans ce vortex, pour un poids dépassant les 80 000 tonnes.
   Près de la moitié de cette masse de détritus est constituée de morceaux bien visibles, donc des déchets qui risquent de se dégrader au fil du temps. Ils formeront alors des particules de microplastique qui pourraient s’immiscer dans la chaîne alimentaire et représenter un risque pour toute la vie marine.

Stopper l’hémorragie

Océanographe et chercheuse à l’Université d’Hawaï, Sarah-Jeanne Royer connaît très bien cette pollution par le plastique qui contamine le vaste océan Pacifique. Elle la voit venir s’échouer constamment sur les plages d’Hawaï, et plus particulièrement dans le secteur de Kamilo Point, dans le sud de l’île. Ce secteur, littéralement jonché de détritus, est devenu un symbole international de la pollution par le plastique.
   «On fait des opérations de nettoyage tous les mois, mais ce ne sera jamais suffisant pour éliminer tout le plastique. Pourtant, chaque fois, on ramasse des tonnes de plastique. Mais on a tellement de plastique sur nos plages. Et il y a énormément de débris d’engins de pêche. On a même retrouvé cette année un amas de filets de plusieurs tonnes», explique-t-elle.
   «C’est très séduisant de vouloir nettoyer les océans, mais il faudrait agir à la source et stopper la pollution des océans par le plastique. Il faudrait d’abord arrêter l’hémorragie. Pour cela, il faut aider les pays d’Asie à réduire leurs problèmes de gestion du plastique. Et il faudrait nettoyer leurs plages.»
   Les données scientifiques lui donnent d’ailleurs raison. Selon une étude publiée l’an dernier dans Nature Communications, les fleuves du monde déversent entre 1,15 et 2,41 millions de tonnes de plastique chaque année dans les océans, soit un rythme d’environ 50 kilos par seconde. Et 86 % de l’ensemble des détritus de plastique sont issus de cours d’eau asiatiques.

Plastique omniprésent

Directeur de recherche au Centre national de recherche scientifique, en France, Jean-François Ghiglione souligne lui aussi que «la solution se trouve sur la terre ferme, et non dans la mer». Selon lui, il importe d’abord de «réduire notre consommation de plastique», dont une bonne partie sert à fabriquer des emballages dits «à usage unique». Il faudrait aussi bonifier de façon substantielle le recyclage des produits de plastique, qui demeure relativement faible à l’échelle de planète.
   Chaque année, l’humanité produit plus de 300 millions de tonnes de plastique. Et à l’heure actuelle, on estime que plus de 150 millions de tonnes se trouveraient déjà dans les océans de la planète, un chiffre qui devrait doubler d’ici 2050.
   M. Ghiglione souligne par ailleurs que les continents de plastique, s’ils font image, ne constituent qu’une partie du problème. «Le plastique est présent partout, dans tous les océans, jusque dans les glaces de l’Arctique.» Et ce matériau est produit massivement depuis à peine plus de 60 ans.

Source :
Alexandre Shields | Le Devoir / Environnement | 8 septembre 2018

Les gaz à effets de serre proviennent aussi du plastique dans les océans

La chercheuse Sarah-Jeanne Royer au milieu de microplastiques à Kamilo Point à Hawaï, le 14 février 2018. Crédit: SOEST IPRC

Le problème de pollution par le plastique dans les océans est un phénomène bien connu. Des détritus qui flottent en pleine mer ou qui échouent sur des plages ont souvent été rapportés.
   Une chercheuse québécoise qui travaille à l’Université d’Hawaï, Sarah-Jeanne Royer, vient de mettre en lumière avec son équipe que le plastique qui pollue les océans émet aussi des gaz à effets de serre (GES).
   Le type de plastique qui se dégrade est le polyéthylène de basse densité. Il est présent dans les sacs de plastique, les emballages de sandwich ou d’autres aliments ainsi que dans les attaches qui retiennent ensemble les canettes de boissons gazeuses ou de bières.
   Sous l’effet du soleil, ces amas se dégradent en microparticules qui émettent alors des GES.
   Mme Royer a été à même de constater que 90 % de ces débris découverts sur les côtes hawaïennes sont surtout issus de l’Asie et de l’industrie de la pêche.
   Lorsque l’océanographe a voulu partager les conclusions de son étude avec des fabricants de produits plastiques, elle a essuyé une fin de non-recevoir.
   La recherche que Sarah-Jeanne Boyer a menée avec son équipe a été publiée dans la revue scientifique américaine Plos One. Elle a fait une partie de ses études à l’Université Laval à Québec. 

Source :
Maryse Jobin, avec La Presse canadienne | 6 août 2018 www.rcinet.ca  

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