11 novembre 2018

Survie ou suicide?

Qui est responsable de l’écosuicide planétaire?
Personne et tout le monde.

Camus disait : «Quand nous serons tous coupables, ce sera la démocratie.»

Je salue l'initiative «Pacte pour la Transition» lancée jeudi dernier. Je suis aussi d’accord avec l’idée que l’addition des actes individuels en matière de consommation peut avoir des retombées positives à long terme. Et l’engagement n’est pas contraignant, un peu comme la COP, chacun est libre de se priver ou non de bœuf et de bacon et d’un tas de choses inutiles, dépendant de l’emprise de ces dépendances. Néanmoins, si les gestes individuels ne sont pas soutenus par des changements législatifs radicaux, c’est peine perdue sur le plan global. Par contre, la simplicité volontaire a l'avantage de nous rendre plus libres... 


J’entendais des commentateurs parler de «crédits compensatoires», qui signifient en réalité «la Nature que l’on détruit à cet endroit sera récréée et sauvée à un autre». De sorte que «je vais payer pour continuer à vivre de la même façon et ainsi me sentir moins coupable ou responsable». Un autre évoquait les gobelets à café en amidon de maïs remplaçant les gobelets en plastique sur un plateau de tournage devenu «écolo». Comme disait George Monbiot : «On ne sauvera pas la terre avec un gobelet à café «écolo» jetable. Nous devons défier les entreprises qui cherchent des moyens «plus écologiques» de nous maintenir dans le système de consommation «acheter/jeter». Personne ne s’interroge sur la quantité de terres agricoles requises pour la monoculture du maïs, reconnue pour causer l’érosion des sols et nécessiter de fortes doses de pesticides et d’engrais. Le problème ne concerne pas uniquement le plastique, mais aussi la masse de choses jetables. Le plastique est certes un fléau environnemental majeur, et les campagnes pour limiter son utilisation sont bien intentionnées et parfois efficaces. Cependant, nous ne pouvons pas faire face à notre crise environnementale en troquant une ressource surutilisée par une autre. La vraie question est : comment devrions-nous vivre?»  

À voir : «Détruisons la planète dans la joie et la bonne humeur» :

Les folles dépenses en GES des G7-8-20... :

Des milliers de tonnes de gaz à effet de serre causées par le G7

David Rémillard | Le 10 novembre 2018  

Les activités du G7 sous la présidence du Canada ont généré plus de 8600 tonnes de gaz à effet de serre (GES) en 2018. Ottawa promet d'en compenser la vaste majorité, voire la totalité.
   Selon l'inventaire réalisé par la firme WSP pour Affaires mondiales Canada, dont Radio-Canada a obtenu copie, au moins 8635 tonnes de GES ont été émises dans l’atmosphère.
   Le rapport tient compte du sommet des 8 et 9 juin à La Malbaie, incluant les activités satellites tenues à Québec. S'ajoutent les quatre rencontres ministérielles du G7 tenues cette année à Montréal, Whistler, Toronto et Halifax, ainsi que quatre réunions préparatoires en vue du Sommet.
   Sans surprise, le sommet de La Malbaie a de loin généré la plus importante quantité de GES. Plus des trois quarts (77 %) des GES sont attribuables aux activités diplomatiques, et 23 % aux mesures de sécurité. Le transport aérien a été le plus important générateur de GES, loin devant tous les autres.

Et la facture des mesures de sécurité ont coûté une méchante beurrée. Je crois qu'ils se préparaient au déclenchement d'une troisième guerre mondiale. 

Jessica Séguin, porte-parole d'Affaires mondiales Canada, confirme que le fédéral achètera des crédits compensatoires sur le marché du carbone pour les 8635 tonnes calculées. «Le processus est en cours afin d'effectuer l'achat de crédits.»
   Le fédéral s’est allié à la Coop de l’Arbre, un organisme de Charlevoix, pour mettre en place un projet de plantation de 100 000 arbres à travers le réseau des réserves de biosphère au pays.
   Ces arbres, affirme Mme Séguin, compenseront 15 000 tonnes de GES supplémentaires. «Les 16 plantations sont encadrées par une entente de suivi sur un horizon minimal de 50 ans, pour laisser le temps à l’arbre d’atteindre sa maturité et de jouer pleinement son rôle de séquestration du carbone », avance-t-elle.
   Ces 15 000 tonnes supplémentaires permettront, dit-on, de compenser les émissions non répertoriées.

Article intégral :

Payer pour avoir le droit de polluer plus

Dans son ouvrage, Ce que l’argent ne saurait acheter, Les limites morales du marché, le philosophe américain Michael Sandel réfléchit sur notre société hyper mercantile. L’entreprise qui achète le droit de polluer, se dédouane-t-elle d'une faute morale envers l'environnement? Peut-on vendre un enfant à l'encan au plus offrant ou faire le commerce d'organes humains? Selon lui, la vie, l'eau et l'air ne devraient jamais être des valeurs marchandes.
   «Avec le protocole de Tokyo sur le changement climatique en particulier, les économistes ont trouvé dans le marché une méthode encore plus éloignée de tout ce qui pourrait ressembler à une mesure vexatoire. Chaque agent pollueur est tenu de rester dans les limites d'un plafonnement décidé à priori mais il peut acheter le droit de dépasser ces limites en payant un autre agent qui, lui, restera en deça de celles qui lui ont été affectées. ... C'est précisément l'avantage que les économistes attribuent au marché qui pose problème : il ne ferait pas de morale. En réalité, il recouvre un mal qui devrait être perçu comme tel (la destruction de l'environnement) par un bien (le droit de polluer) que l'on peut acheter.» ~ Jean-Pierre Dupuy (au sujet de la taxe de carbone)
   Si tous les membres de la secte «Économie marchande» et les politiciens lisaient cet ouvrage, peut-être que la manière de gouverner pourrait s’améliorer.

Ce que l'argent ne saurait acheter; Les limites morales du marché
Michael J. Sandel Traduit par Christian Cler
Préface de Jean-Pierre Dupuy
Sciences humaines (H.C.) Seuil (02/10/2014)

Article intégral :

J’ai découvert ce document crucial sur Le Partage. À lire, pour mieux comprendre ce que signifie «payer pour polluer et détruire à volonté».  http://partage-le.com/


Le commerce des écosystèmes : lorsque le «paiement pour services environnementaux» équivaut à l’autorisation de détruire

Par Jutta Kill
World Rainforest Movement 2014

Les raisons de publier un document d’information sur le PSE, ou paiement pour «services environnementaux»

Aujourd’hui, les agences de l’ONU, l’industrie, les économistes de l’écologie, un nombre croissant de consultants et d’ONG écologistes, profitent de cet espace pour nous rappeler que le maintien de fonctions telles que la filtration d’eau que remplissent les forêts et les sols, le stockage de carbone que font les sols et la végétation, la biodiversité, la pollinisation des cultures agricultures par les abeilles, etc., est crucial pour l’humanité et que ces fonctions doivent donc être conservées. La démarche qu’ils proposent part de l’idée que le seul moyen d’obtenir que la Nature soit appréciée et protégée est de rendre visible, en termes économiques, la valeur de ces fonctions que   la Nature assure gratuitement. Ils affirment que lorsque les marchés de capital, les politiciens et les grandes entreprises verront l’énorme valeur économique de ce qu’ils appellent les «services écosystémiques», il sera plus facile d'exiger d'eux qu'ils protègent  la  Nature. Certains proposent aussi d’utiliser cette valeur économique qui, apparemment, n’a pas été perçue par les gouvernements, les transnationales  et  le  capital financier, comme moyen de financer  la protection de la Nature, en payant pour  ces  «services écologiques» (PSE). Suivant  ce raisonnement, tout ce qu’il faut pour mettre fin à la destruction de l’environnement est une nature que le capital puisse percevoir.

Cependant, on  peut regarder autrement le paiement pour «services environnementaux» : le PSE fait partie d’un processus par lequel le capital financier déterminera encore  plus comment la nature est utilisée et qui contrôle l’accès aux territoires; ce processus est dénommé «financiérisation» de la nature. Dans cette optique, plutôt que de diminuer la destruction, une nature que le capital puisse percevoir est indispensable  pour  maintenir un système économique qui dépend de la nature pour survivre : d’abord on la réduit à des unités de «services écosystémiques», puis ces services deviennent un nouvel item que les marchés de capital peuvent commercialiser.

Le présent bulletin vient s’ajouter aux numéros 175 [1] (février  2012)  et  181
[2] (août 2012) sur La financiérisation de la nature et le paiement pour services  écologiques.  Ces bulletins portaient sur le développement de la notion de «paiement  pour  services de l’environnement» et sur le rôle et le contenu de certaines études  importantes souvent citées par les défenseurs de cette idée, comme l’Évaluation des écosystèmes pour le millénaire (EM) et l’Économie des écosystèmes et de la biodiversité (TEEB). Ces deux rapports en particulier ont été essentiels à la diffusion du concept de PSE ces dernières années, en contribuant à créer l’espace politique nécessaire pour le faire avancer au plan international. Beaucoup de nouvelles tendances  et de développements sont apparus depuis que le WRM a publié ces deux bulletins, et une nouvelle forme du PSE se fait jour : les gouvernements ont commencé à élaborer des «comptabilités du capital naturel»;  le Brésil a changé son Code forestier   pour  permettre le commerce de «crédits de restauration des forêts»; la Commission européenne, le Royaume-Uni et plusieurs autres pays européens étudient des modifications de leur législation environnementale pour créer un marché de crédits de  compensation de biodiversité; l’État brésilien d’Acre a adopté toute une loi dénommée «Système d’incitations pour services environnementaux» (SISA) et, avec le soutien financier du gouvernement allemand, il est en train de créer des institutions,  des  réglementations  et des commissions pour appliquer cette loi SISA, en commençant par l’infrastructure nécessaire  à la  commercialisation de la capacité des forêts à stocker du    carbone, le programme ISA-Carbono. Autrement dit, des gouvernements, de grandes entreprises et le secteur financier, qui ne se sont jamais distingués par leur défense de la nature, ont l’air de s’intéresser beaucoup au PSE.

Nous avons donc pensé qu’il était temps de reprendre cette question, de regarder la  notion  de  «paiement  pour  services  environnementaux» telle qu’elle se présente à l’heure actuelle, d’examiner les arguments de ceux qui affirment que la seule manière  de sauver la nature est de lui apposer un  prix, de montrer quels  sont les protagonistes  et ce qui les pousse à s’intéresser au PSE. Surtout, ce document aspire à documenter comment cette nouvelle version de la théorie du PSE se comporte sur le terrain, dans les territoires dont les communautés forestières dépendent pour leurs moyens d’existence et leur mode de vie.


Introduction

«Il faut mettre fin à l’invisibilité économique de la nature», [3] écrit dans son blog Pavan  Sukhdev, auteur de l’étude TEEB. Beaucoup d’économistes, d’entreprises et d’ONG de conservation se font l’écho de cette déclaration. La valeur de la nature n’est pas visible, affirment-ils; c’est pourquoi les fonctions que la nature accomplit – la filtration d’eau dans les forêts et les sols, le stockage de carbone dans les sols et la végétation, la biodiversité, la pollinisation des cultures par les abeilles, etc. – sont sacrifiées sans cesse pour réaliser les bénéfices économiques visibles que l’on peut obtenir en la détruisant. «[S]i au moins nous avions  les  outils  nécessaires  pour  mesurer  ces  valeurs et les intégrer aux décisions des entreprises», écrit le World Business Council for Sustainable Development, un groupe industriel de pression très influent auprès de l’ONU, dans son Guide pour l’évaluation des écosystèmes par les entreprises. [4] Des agences de l’ONU, des transnationales, des ONG de conservation et des économistes de l’écologie affirment que le seul moyen de faire en sorte que la nature soit appréciée et protégée est de rendre visible, en termes économiques, la valeur de ce qu’ils appellent «services écosystémiques», c’est-à-dire les fonctions et les processus que le nature fournit à l’humanité. Ils affirment que lorsque les marchés de capitaux, les politiciens et les transnationales verront l’énorme valeur économique de ces «services  écosystémiques», il sera plus facile d’exiger que la nature soit protégée. Les économistes  ont  avancé  quelques  estimations  de  la  valeur  économique  des  «services écosystémiques», et beaucoup d’initiatives, de programmes et de subventions d’aide à la recherche et au développement sont mis en place pour se préparer à la commercialisation future de ces «services».

Dès que les premiers programmes de PSE ont été formulés, les défenseurs du paiement pour «services écologiques» ont affirmé que les communautés tributaires des forêts et les peuples des forêts en seraient les principaux  bénéficiaires.  Mais le sont-ils vraiment? Même les premiers programmes ont eu tendance à bénéficier surtout aux membres les plus fortunés de la communauté. Ils ont montré aussi que la valeur intrinsèque de la Nature tend à être évaluée à la baisse lorsque les valeurs financières des plans de PSE sont introduites. Des exemples concrets suggèrent que ces tendances  se renforceront lorsque le PSE deviendra un marché de «services écosystémiques». Certains Quand le «paiement pour services environnementaux » équivaut à l’autorisation de détruire WRM 2014 proposent aussi d’utiliser cette évaluation économique pour financer la conservation de la nature, en payant pour ces services.

Le  PSE devient de plus en plus un «paiement qui autorise à détruire». Afin de mettre en place ces paiements qui donnent la permission de détruire, la Nature, dans toute sa  complexité, ses interconnexions, sa diversité et son caractère unique, est présentée en unités de «services écosystémiques» à un point tel que cela dépasse largement la marchandisation nécessaire aux programmes PSE précédents. Des certificats (souvent dénommés «crédits de compensation»), utilisés pour garantir que le «service» en question est protégé quelque part, peuvent être achetés par des entreprises, en  échange du permis de détruire un morceau «équivalent» de Nature situé ailleurs. Une  entreprise minière ne pourrait obtenir un permis pour élargir sa  mine dans une zone  protégée où l’extraction est interdite par la loi qu’en achetant des «compensations de biodiversité», de manière à sauver davantage de biodiversité à un autre endroit, pour  compenser celle du parc national que le nouvelle mine va détruire; un aménagement urbain ne peut avoir lieu dans la ceinture verte d’une ville, où il est interdit, à moins que la société immobilière n’achète des «compensations  de  biodiversité»; un éleveur ou  une entreprise forestière peuvent ne pas être obligés de restaurer la forêt qu’ils ont éliminée s’ils achètent à la Bourse des «crédits de restauration forestière». Une fois emballée en unités de «services écosystémiques» comparables entre eux, la Nature peut aussi être commercialisée comme un  actif  financier.  Ainsi, le «service écologique» est ouvert à la spéculation, et la Nature, unique et interconnectée, est  divisée en unités de «services» séparés qui  peuvent être comparés entre eux, mélangés et différenciés, achetés et vendus, parce que chacun est considéré comme un équivalent et un substitut approprié de l’autre. Cette abstraction a transformé la Nature incontrôlable, toujours changeante et interconnectée en unités linéaires, mesurables et comparables de «services écosystémiques».

L’abstraction permet aussi aux négociants en certificats de «services écosystémiques» de faire semblant que les unités existent indépendamment de leur entourage, qu’il n’y a aucune interaction entre elles et les cultures, les pratiques sociales et l’utilisation de la terre qui ont évolué avec cette partie de la Nature devenue un simple «service écosystémique» et qui dépendent d’elle. Par conséquent, le concept de PSE et, en particulier, le commerce des «services écosystémiques», impliquent que la dimension environnementale de la destruction peut être séparée de la dimension sociale. Les  plans de compensation qui  incluent  la permission de détruire pourvu que le «service écologique» soit remplacé ailleurs acceptent volontiers la destruction non compensée et impossible à compenser des rapports sociaux, de la culture et des pratiques sociales liées à la Nature. En cours de route, les lois sont modifiées de manière à remplacer l’obligation d’éviter toute perte de biodiversité par l’obligation, bien plus faible, d’éviter toute «perte nette» de biodiversité. Là où  la règle était d’éviter toute perte, les nouvelles  lois permettront la destruction à un endroit pourvu que le promoteur puisse montrer qu’il n’y aura aucune perte nette parce que, apparemment, la Nature que l’on détruit à cet endroit sera récréée et sauvée à un autre.

4 WBCSD Guide to Corporate Ecosystem Valuation. Page 12, en anglais.

Table des matières
Les raisons de publier un document d’information sur le PSE, ou paiement pour «services environnementaux»

Introduction
Du «paiement pour services environnementaux» au «commerce des services écosystémiques
- Des types différents du PSE
- ENCADRÉ : Qu’est-ce qu’on échange dans les marchés des «services écosystémiques»?
- Du simple échange à des transactions financières complexes
- ENCADRÉ : Les projets de compensation et la prétention de savoir ce qui se serait
passé
- Pour repérer les différences

Pourquoi ces différences sont importantes

Les principaux promoteurs du PSE
- Les institutions multilatérales
- Les sociétés multinationales
- ENCADRÉ : Des compagnies minières essaient des plans de PSE compensatoires
- Les ONG écologistes
- Les fonds d’investissement spécialisés, les créateurs de marchés et les systèmes de certification
- Les universités et les cabinets de consultants

Sur les traces des échecs du PSE
- Le PSE compensatoire de biodiversité avance vite malgré la série d’échecs constatés
- Pourquoi le commerce des services environnementaux augmentera les injustices écologiques et socio-économiques
- Les droits des communautés au territoire – de l’accès à l’utilisation – deviennent encore plus précaires
- Les contrats de compensation mettent en grave danger le mode de vie traditionnel des communautés

Les avantages de la destruction
- Le commerce des services écosystémiques a besoin que la destruction continue parce que, sans elle, il n’y aurait rien à «compenser».
- Droits de la nature vs permis de destruction
- Le PSE est un moyen de dépolitiser la lutte pour un modèle différent d’économie et de développement

Se mobiliser pour dire NON au commerce des services écologiques

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