12 novembre 2018

Éloge de l’orgie carnivore

J’ai écouté les chefs du resto Joe Beef, David McMillan et Frédéric Morin, à Tout le monde en parle (ICI Radio-Canada). Les deux ambassadeurs de la viande, plutôt sympathiques, présentaient leur livre de recettes Joe Beef : Survivre à l’Apocalypse. Assez ironique ce titre à l’heure où le dernier rapport du GIEC suggère fortement de réduire notre consommation de viande si l’on veut éviter l’Apocalypse.
   Bonne nouvelle, McMillan a cessé de boire, ce qui a énormément réduit sa masse corporelle. C’est évident qu’on ne pourra pas compter sur la contribution de ces deux chefs pour réduire les GES de la production de viande. Néanmoins, je les encouragerais à explorer la cuisine à base de plantes en y mettant l’imagination dont ils sont capables. «On jase là», comme dirait Guy A. Lepage.

Honnêtement, vous ne trouvez pas qu’il y a trop de laitue?

À l’émission Midi info (ICI Radio-Canada Première), le tandem de journalistes Yves Boisvert / Lise Bissonnette se sont exprimés sur le Pacte pour la Transition. Bissonnette a servi un avertissement à Dominic Champagne, le comparant à un croisé de l’écologie. Elle n’a pas lâché le micro et c’est à peine si Boisvert a pu placer quelques mots. J’ai transcrit, c’est trop drôle.
– Bissonnette : Personnellement j’étais plutôt bien disposée, mais je reste un peu sur la réserve en me demandant s’il s’agit d’un jalon majeur. Je doute que les Québécois deviennent les champions du monde comme le dit M. Champagne, soit qu’on va mener la conscience écologique universelle. Sommes-nous devant un jalon majeur ou un phénomène de réseaux sociaux? Et là, je vais me faire excommunier, c’est comme le bucket challenge, et là je vais vraiment affirmer ma réserve ici, parce que la façon dont la chose se présente en partie. Je me méfie toujours depuis très longtemps en fait des appels (ou chapelles?) religieux. Y’a quelque chose qu’on voit tout le temps. Je l’ai entendu M. Champagne dire c’est moi, moi, moi, moi, je, je, je, je vais changer la face du monde, je ne suis pas comme les autres, vous ne vous occupez pas de ça, mais moi, je vais faire la différence. L’Apocalypse c’est pour demain. Y’a des péchés mortels, des péchés véniels, et si vous n’êtes pas d’accord, vous devriez vous taire parce que vous êtes d’une certaine façon excommuniés. Je caricature à peine. Et là, je trouve qu’il y a un côté dans ça qui ressemble beaucoup à ces églises où on répète la doctrine et où on vous menace de l’effondrement de la vie sur terre; le jugement dernier vous menace. Si vous n’êtes pas d’accord, vous êtes des méchants. Alors là, y’a danger. Je dis que les gens qui ont signé et qui accompagnent M. Champagne dans cette croisade devraient se demander s’il ne faut pas rajuster le tir pour qu’il soit plus collectif. 
– Boisvert : Mais c’est vrai que l’heure est grave. 
– Bissonnette : Il évoque souvent l’Apocalypse, la fin de la vie sur terre et la fin des espèces. Il a parlé de Berlin 1937 [à l’émission La soirée est encore jeune]. Les gens qui s’opposent un peu ou qui se posent des questions ou qui ne sont pas sûrs qu’il faut y aller si rapidement que ça, c’est Berlin 37. C’est du zèle religieux, vous commettez des péchés mortels, et véniels si vous achetez des choses biologiques et si vous ne diminuez pas votre consommation d’essence. Mais il y a aussi des gens qui commettent des péchés mortels, et je vous dis que ce côté croisade risque de nuire à ce mouvement qu’il veut élargir.
– Boisvert : La métaphore avec Berlin 37 a une connotation criminelle, sans accuser personne.
– Bissonnette : C’est fasciste, vous êtes un peu fasciste si vous refusez de signer, des complices des assassins.
– Boisvert : Calmons-nous! En fait, ne nous calmons pas, parce que le GIEC et l’ONU nous le disent, ce n’est pas une question d’opinion, c’est une matière factuelle. Donc, c’est important de passer le message. Il n’y a pas matière à débat sur la réalité des changements climatiques.

En réalité, Lise Bissonnette semblait s’inspirer des propos de Denise Bombardier dans le Journal de Montréal de ce matin, présentés à sa sauce et en y ajoutant beaucoup de beurre... Je ne veux pas excuser Dominic Champagne, c’est vrai qu’il arbitrait un peu sec et qu’il a pété l’ambiance de La soirée est encore jeune. Mais pour lui, arriver directement de la marche devant des humoristes qui posent des questions pour gnochon et se comportent comme des hybrides entre la fougère et le navet – on leur explique un machin un peu technique et ils s’évanouissent – faisait sans doute trop contraste.

Pourquoi tirer sur le messager? Allons-nous cracher sur un mouvement qui pourrait nous aider à nous libérer des débiles profonds qui gouvernent la terre et s’en croient les propriétaires? On regarde l’arbre sans voir l’Himalaya de merde derrière. Il y a beaucoup de gens qui sont réellement écoeurés d’ingurgiter du pétrole et du plastique, et de respirer du gaz. Aussi simple que ça. Mais, il est aussi vrai que personne ne change avant d’être prêt, pas même un millième de seconde avant.

Commentaires d’internautes :
– Le changement climatique ne peut pas faire l’objet d’une série webtélé en continu parce qu'elle sera stoppée par... le changement climatique.
– Allons-nous prendre des mesures audacieuses et historiques pour prévenir les changements climatiques catastrophiques, ou continuer à ignorer le problème le plus important de la civilisation?

On ne peut pas marcher en regardant les étoiles quand on a une roche dans son soulier.


Manger moins de viande pour lutter contre les changements climatiques?

Alexandre Shields
Le Devoir | 11 octobre 2018 | Environnement

La lutte contre les changements climatiques passe inévitablement par un changement majeur de notre régime alimentaire. Cela implique surtout de réduire substantiellement notre consommation de viande, conclut une nouvelle étude publiée mercredi dans le magazine scientifique Nature (en anglais).

Selon les constats de cette étude qui analyse la croissance de la demande alimentaire dans un contexte d’augmentation de la population mondiale, le passage à une diète «flexitarienne» serait nécessaire afin notamment de réduire les importantes émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à la production de viande.

En clair, les chercheurs suggèrent un virage vers un régime quotidien davantage «à base de plantes». En moyenne, les habitants de planète devraient ainsi réduire de près de 75 % leur consommation de viande rouge. Pour les Canadiens, ce recul serait davantage de l’ordre de 85 %, en tenant pour acquis un passage à un seul repas à base de viande par semaine.

L’étude évoque aussi le besoin de réduire notre consommation de viande blanche (comme le poulet) et de produits laitiers. Mais les chercheurs précisent qu’il faut en contrepartie ajouter au menu davantage de légumes, de noix et de végétaux.

Production en hausse

La production mondiale de viande a été multipliée par quatre depuis cinquante ans, passant de 75 millions de tonnes à plus de 300 millions de tonnes. Résultat : un citoyen issu d’un pays industrialisé consomme aujourd’hui 76 kg de viande par année (167 lb), contre 43 kg en moyenne dans le monde.

Les émissions de GES du secteur agricole dépassent quant à elles les 5,5 milliards de tonnes à l’échelle planétaire (huit fois les émissions totales du Canada).

Si la trajectoire actuelle se maintient, les émissions devraient augmenter de plus de 30 % d’ici 2050, alors que le plus récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) plaide pour des émissions mondiales de CO2 de «zéro» d’ici trente ans.

En matière de réduction d’émissions de GES, le fait de diminuer l’apport de produits d’origine animale serait donc d’autant bénéfique pour le climat que cette production est responsable à elle seule de 72 à 78 % de toutes les émissions de GES du secteur agricole mondial, selon les données présentées dans l’étude.

À titre d’exemple, la production d’un seul kilogramme de boeuf génère 32,5 kg de CO2. Pour l’agneau, on évalue le bilan à 33 kg par kilogramme produit, et à 2,9 kg pour le porc. A contrario, le bilan est de 0,1 kg pour le soya, 0,06 kg en moyenne pour les légumes, 0,7 kg pour les noix et 1,18 pour le riz.

Déforestation

En plus des émissions de GES, les produits d’origine animale monopolisent d’importantes superficies de terres cultivables, pour une moyenne de quatre à six mètres carrés pour chaque kilogramme de boeuf, de poulet, d’agneau ou de porc. Or, les nouvelles terres agricoles sont bien rendues disponibles en recourant à la déforestation. En Amazonie, par exemple, près de 75 % des vastes régions naturelles perdues l’ont été au profit de la production de viande ou des céréales nécessaires pour nourrir les animaux.

Qui plus est, ces terres agricoles risquent de reculer, voire de devenir impropres à l’agriculture dans plusieurs régions du monde, en raison des bouleversements climatiques, selon ce qui se dégage du plus récent rapport du GIEC. Le rapport souligne d’ailleurs le besoin de revoir notre diète, afin de se tourner collectivement vers un régime alimentaire moins «intensif» du point de vue d’utilisation de ressources et d’énergie.

Il faut dire que la population mondiale pourrait atteindre neuf milliards d’individus en 2050, et continuer de croître par la suite. Une situation qui, sans changement, ferait grimper l’ensemble des impacts environnementaux du «système agricole» de 50 à 90 %. Selon Marco Springmann, chercheur à l’Université Oxford et superviseur de l’étude publiée dans Nature, il est donc urgent de changer nos pratiques agricoles et notre régime alimentaire.

«Nourrir une population mondiale de 10 milliards de personnes est possible, mais seulement si nous modifions la façon dont nous produisons la nourriture et la façon dont nous la consommons», précise pour sa part le professeur Johan Rockström, chercheur au Potsdam Institute for Climate Impact Research, coauteur de l’étude, cité dans le quotidien The Guardian.

Tant cette nouvelle étude que l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture plaident par ailleurs pour une réduction du gaspillage alimentaire. À l’heure actuelle, 30 % de toute la production planétaire se retrouve à la poubelle. La FAO estime qu’en éliminant ce gaspillage, qui équivaut à 1,3 milliard de tonnes chaque année, il serait possible de régler une partie des problèmes de faim dans le monde.

Avant je pouvais éliminer les suggestions à la fin des vidéos, mais l'option n'existe plus. Dommage, on peut se retrouver avec toutes sortes de choses sans rapport, voire, carrément stupides. Désolée. 

The Animal Holocaust depicted through Art.
Artist: Jo Frederiks

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