8 mai 2018

Forêts primaires : un littéral «chainsaw massacre»


Dans une ébauche d’article sur la déforestation, je me demandais si notre ministre de l’Environnement, Catherine McKenna, n’allait pas sacrifier sur l’autel de la croissance économique les forêts primaires de la Colombie-Britannique en les vendant au marché mondial du bois d’œuvre, comme on fait en Malaisie et en Indonésie. Après une coupe à blanc en bonne et due forme, vu le réchauffement climatique, il serait peut-être possible d’instaurer une monoculture de palmiers à huile – un business très lucratif. Cette intro se voulait sarcastique. Malheureusement, la réalité dépasse souvent la fiction :  
   La société forestière INTERFOR fournit du bois pour la construction résidentielle, commerciale et industrielle à l’échelle internationale. Elle récolte plusieurs espèces d’arbres incluant le sapin de Douglas, la pruche occidentale, le thuya rouge occidental, le pin Ponderosa, le pin tordu et le pin jaune. Elle commercialise l'épinette européenne et le pin rouge selon un accord de vente avec Ilim Timber (une compagnie russe de transformation des sciages résineux en panneaux de contreplaqué et panneaux durs. INTERFOR possède des scieries en Colombie-Britannique (C.-B.) et dans divers états américains – Washington, Oregon, Géorgie, Caroline du Sud, Arkansas. En C.-B., elle compte deux scieries (Acorn et Hammond) sur la côte, deux scieries dans la région de Kootenay (Grand Forks et Castlegar), et une scierie près de Kamloops (Adams Lake).

De lien en lien, j’ai croisé le site Common Sense Canadian. Prenez 20 minutes de votre précieux temps pour regarder le documentaire. Cette forêt, au cœur des montagnes Selkirk de la Colombie-Britannique, est unique au monde, on dit que c’est «la dernière» du genre à être encore intacte. On y trouve des arbres et des lichens dont certains datent de l’empire romain (1800 ans). Les recherches démontrent que les forêts boréales très matures absorbent plus de carbone que n’importe quel autre type de végétation. On estime que le tiers de l’eau potable de l’Amérique du Nord est fournie par la forêt boréale. Or cette forêt parcourue par la rivière Incomappleux risque la coupte à blanc car elle n’est pas officiellement protégée. Depuis quelques décennies la plupart des vallées autour ont été déboisées, et l’on bouche les trous avec une monoculture de conifères à croissance rapide.

Primeval: Enter the Incomappleux
Valhalla Wilderness
Ajoutée le 15 avr. 2018

From award-winning documentary filmmaker Damien Gillis (Fractured Land) and Valhalla Wilderness Society comes a film of breathtaking beauty, Primeval: Enter the Incomappleux. Filmed on location deep in the heart of BC's Selkirk Mountains, this 20-minute documentary is the story of the majesty, magic and endurance of one of the world's last truly intact temperate rainforests the incomparable Incomappleux. Following an expedition of conservationists, biologists and wilderness explorers, Gillis documents the nature and history of this unique place replete with 2,000-year-old trees and rare lichens along with a plan to preserve it through a new Provincial or National park, the Selkirk Mountain Caribou Park Proposal.



Valhalla’s online petition to preserve the area as a provincial park has garnered over 36 thousand signatures.

Or visit Valhalla Wilderness Society

May 2, 2018 by Common Sense Canadian in BC

J'ai vu le scandale de l'huile de palme

La folie de l’huile de palme en Indonésie : la récolte de bois précieux peut facilement représenter 50 milliards de dollars de profits pour l’industrie forestière. On remplace ces magnifiques forêts par des monocultures de palmier à huile. Une fois la forêt rasée, on vaporise un poison qui tue toute forme de vie. Ce faisant, on détruit le supermarché (nourriture) et la pharmacie (plantes médicinales) des peuples autochtones.
   Cette vidéo à été produite par la Radio Télévision Suisse (RTS). Bernard était déjà venu, il y a 17 ans. Aujourd'hui, il est de retour avec moi pour comparer et constater comment la situation à évolué.

Bruno Manser Fonds http://bmf.ch/fr/news/ (1)

Les grandes compagnies de l’agrobusiness continuent à varloper d’immenses forêts et écosystèmes, à exterminer des peuples autochtones et une multitude d’espèces animales et végétales. Ces multinationales commercialisent des produits alimentaires et cosmétiques contenant de l'huile de palme dont la production est entachée de multiples infractions en Indonésie. L’huile de palme est l’un des symboles du «capitalisme agraire».

En Indonésie, l'Écosystème Leuser de l'île de Sumatra agonise  
Emma Rae Lierley | EcoWatch, 12 août 2017


Cette ancienne forêt tropicale luxuriante de 6,5 millions d'hectares, d’une biodiversité extrêmement riche, est l'une des plus importantes forêts tropicales encore debout aujourd'hui.  Malgré sa forte population et ses régions densément peuplées, l'Indonésie comporte de vastes zones sauvages qui donnent au pays une grande biodiversité même si ce patrimoine régresse à cause d'activités humaines en forte augmentation.
   Ses rivières limpides fournissent de l'eau potable à des millions de personnes et ses forêts tropicales sur la plaine et en montagne sont littéralement le dernier endroit sur Terre où l'orang-outan de Sumatra, les éléphants, les tigres, les rhinocéros et les ours maltais (chassés pour leurs organes aux supposées vertus aphrodisiaques)  coexistent encore à l'état sauvage. Globalement, nous dépendons tous de cet immense puits d’absorption de carbone qui contribue à réduire les effets du changement climatique.
   Pourtant, l'Écosystème Leuser est sauvagement et rapidement ravagé pour la production d'huile de palme et d’autres produits industriels.
   Le dernier rapport de RAN indique que les grandes entreprises internationales telles que PepsiCo, McDonald's, Nestlé, Unilever, Kellogg's, Mars et Procter & Gamble, et plusieurs autres, sont responsables du déboisement puisqu’elles s’approvisionnent en huile de palme auprès des traders de la région. (...)

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Graisse de palme Si vous lisez les étiquettes des produits, vous constaterez l’omniprésence de l’huile de palme. Par contre votre fournisseur de pizzas du coin ne vous dira pas si elles en contiennent (probabilité de 99,9 %). Cherchez l’huile de palme vous la trouverez, elle est comme «dieu» : tout partout.


Si notre cœur se sent loin de l’Indonésie et de la Malaisie, des tigres, des orangs-outangs et des forêts tropicales, nos artères sont très proches de notre pompe cardiaque.
   L’huile de palme est l’huile la moins chère mais aussi la plus toxique car c’est une graisse dite «trans» génératrice de mauvais cholestérol : elle bouche les artères, favorise l’obésité et peut par conséquent causer des maladies cardiovasculaires. La cuisson accroît les effets néfastes.
   Cette huile est présente dans 40 à 60% des produits que nous achetons. L’industrie agroalimentaire l’utilise dans la nourriture préfabriquée (chocolat, confiserie, fromage à pizza; Nestlé en met dans tous ses produits, pas seulement dans le Nutella), dans les produits de beauté, de soins corporels et d’entretien ménager.
   Alors, il faut jouer au détective. Vivre sans huile de palme – tout sur les dérivés :


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(1) Le défenseur de la forêt tropicale et de la tribu Penan à Bornéo, Bruno Manser, n’a pas réussi à faire reculer la grosse machine à bouffer des arbres à Sarawak. À mon avis, l’écoguerrier pacifique a été assassiné par les dirigeants des compagnies forestières de connivence avec le gouvernement – une pratique courante qui n’épargne pas les journalistes enquêteurs. Son journal de bord, avec ses magnifiques dessins, constitue une véritable étude anthropologique à classer au patrimoine mondial.  


Bruno Manser fut déclaré persona non grata en Malaisie et contraint à quitter le pays. Une récompense de 50 000 dollars américains fut offerte pour sa capture.
   Manser a été accusé par le gouvernement d'organiser de nombreux barrages sur des routes servant au transport du bois de coupe (en l'absence de preuves). Il a néanmoins obtenu des effets positifs en protestant à Tokyo et en Europe contre le caractère inhumain de l'industrie de coupe de bois tropical.
   Son dernier signe de vie est une lettre envoyée le 22 mai 2000 à sa compagne depuis le village de Bario, dans les Monts Kelabit de la région du Sarawak.
   Les expéditions à sa recherche s'avérant infructueuses, la cour civile de Basel a décrété le 10 mars 2005 que monsieur Manser devait être considéré comme décédé. L'impopularité de Manser auprès du gouvernement de Sarawak et des compagnies d'exploitation forestière commerciale telle que Samling Pliwood, connues pour leur intimidations et la violence comme méthodes pour effrayer Manser, ont fait naître des soupçons quant aux circonstances de sa possible mort, bien que rien n'aie encore été prouvé.

Le documentaire biographique sur Manser nous apprend que l’homme, déjà en bas âge, était fortement attiré par la vie sauvage, qu’il rêvait d’immersion en milieux autochtones. Il y a des êtres qui semblent naître avec une  mission bien déterminée.

«Il avait disparu dans la forêt tropicale de Bornéo pendant six ans, renonçant au moindre contact avec le monde moderne pour vivre en chasseur-cueilleur parmi le peuple nomade Penan. La vision d’un monde sans avarice du berger suisse s’était effondrée face à la déforestation la plus virulente du globe. Ce combattant réservé avait aidé les Penans à barrer les routes des exploitants forestiers, électrifiant le mouvement écologiste international et stupéfiant le gouvernement malais, qui offrit une récompense pour sa capture et le pourchassa avec sa police et ses commandos militaires. Deux fois arrêté et deux fois échappé, il avait été protégé par les Penans, qui lui permirent d’éviter d’être capturé pendant trois ans. Dénigré en Malaisie comme un vulgaire Tarzan des temps modernes, il devint un catalyseur pour toutes les forces rassemblées dans le combat pour sauver la forêt tropicale la plus menacée du monde. [...]
   Hélas, à l’époque où Bruno Manser a disparu dans des conditions non élucidées, en l’an 2000, les bruits de la forêt avaient été remplacés par ceux des machines. Dans les années 1980, alors que le destin de la forêt amazonienne monopolisait l’attention, le Brésil produisait moins de 3 % des exportations de bois tropicaux. La Malaisie, elle, en produisait presque 60 %, en majorité à partir du Sarawak et du territoire des Penans.
En 1993, quelques trente compagnies forestières, dont certaines équipées de mille deux cents bulldozers, opéraient sur le seul bassin de drainage du fleuve Baram. Elles défrichaient plus de quatre cent mille hectares de forêt appartenant traditionnellement aux Penans et à leurs proches voisins. Le gouvernement avait officiellement autorisé l’abattage des arbres sur 70 % des terres des Penans, et les activités illégales menaçaient une grande partie du reste. [...]
   En l’espace d’une seule génération, le monde des Penans bascula. Des femmes qui avaient été élevées dans la forêt se retrouvèrent domestiques ou prostituées dans les camps forestiers qui encombraient les rivières de débris et de vase, rendant la pêche impossible. Des enfants qui n’avaient jamais connu les maladies de la civilisation succombèrent à la rougeole et à la grippe dans les lotissements du gouvernement. Les Penans choisirent de résister en bloquant les routes forestières avec des barricades de rotin. Sarbacanes contre bulldozers : c’était un geste courageux, mais don-quichottesque, car ils n’avaient aucune chance face au pouvoir malais. [...]
   Bruno Manser a exposé au grand jour comment les bases de l’existence d’une des cultures nomades les plus extraordinaires au monde ont été détruites. Ces nomades étaient ses amis. Il retourna à Bornéo en 2000 pour tourner un film. Une fois le tournage terminé, Bruno s’est rendu seul dans la forêt, comme il avait l’habitude de le faire lorsqu’il vivait avec les Penans. Il n’a plus donné signe de vie depuis le 25 mai. Des recherches menées par les Penans n’ont pas révélé la moindre trace, ni aucun indice de ce qui lui est arrivé. Il est peut-être mort de causes naturelles, ou d’un accident, en se noyant dans une rivière, en tombant d’un arbre, ou en chutant du haut d’une falaise. Bruno adorait grimper. Certains pensent qu’il a été assassiné.
   L’histoire de Bruno mérite d’être racontée, car dans une civilisation gangrénée par l’avarice, dont l’économie mondialisée se fonde sur le viol de la nature, sa vie et son message détonnent et apparaissent comme des symboles de la géographie de l’espoir. Il a lutté pour un nouveau rêve de la Terre, et il nous revient d’honorer sa mémoire en œuvrant pour que ce rêve devienne réalité.»
~ Wade Davis, Vancouver, Canada, août 2015

(Extrait de l’introduction de l’anthropologue canadien Wade Davis à la biographie Rainforest Hero: The Life and Death of Bruno Manser par Ruedi Suter, publiée en 2015)  

Documentaire Bruno Manser – Laki Penan, réalisé par Christopher Kühn, 2007

«“Ils ne valaient pas mieux que des chiens“, déclarait en 1835 le révérend Williams Yates, “et vous n’agissiez pas plus mal en tirant sur eux qu’en abattant un chien qui aboie après vous“. Justifiant l’utilisation du fouet, l’un des premiers colons dans l’ouest de l’Australie notait pour sa part : “Rappelons-nous qu’un natif avait un cuir et non une peau ordinaire comme les êtres humains ordinaires“. Les cadavres des Aborigènes abattus étaient suspendus aux branches des arbres et servaient d’épouvantails. “Leur destinée est d’être exterminés et le plus tôt sera le mieux“, écrivait en 1870 Anthony Trollope. En 1902 encore, un élu, King O’Mally, pouvait se lever au Parlement et déclarer froidement : ”Il n’existe aucune preuve scientifique que l’aborigène soit même un être humain”. » ~ Wade Davis, Pour ne pas disparaître (Albin Michel, 2011)
   Cette description de la manière dont les Aborigènes d’Australie étaient considérés jusqu’à il n’y pas si longtemps et sont encore considérés par certains en évoque bien d’autres. La plupart des peuples «sauvages» du continent africain (Pygmées, Sans, etc.), de l’Amérique, de l’Asie et des autres continents du globe, ont été perçus de la sorte par les dirigeants des nations dites «civilisées». Leurs cultures étaient considérées comme des sous-cultures, des arriérations.
   «Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire. Le paysan africain qui, depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès.» ~ Nicolas Sarkozy, 26 juillet 2007

Article source : Le mythe du progrès et la toxicité de la monoculture mondialisée, par Nicolas Casaux  http://partage-le.com/2018/03/9084/

«Quand un cannibale mange avec une fourchette et un couteau, est-ce un progrès?» (Stanislaw Jerzy Lec) Le carnivore blanc qui mange sa viande avec un couteau et une fourchette est aussi un cannibale.

La notion de progrès du 1 % :
They found a way, finally, that the 1% can actually eat money.  And yes, it makes them look as soulless and ridiculous, duh. 

 
This restaurant The Ainsworth in NYC serves a $1,000 gold wings developed by a friend of the Kardashians  https://www.youtube.com/watch?v=xSub4951k9g

Compléments :
Quand cesserons-nous de varloper la terre?!
Indice Dow Jones environnemental
Les droits des peuples autochtones

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