Hommage à la Catalogne (1)
Raphaël Canet - Professeur de sociologie au cégep
du Vieux Montréal
Le Devoir |
4 octobre 2017
En 1938, le Britannique George Orwell publiait
sous le titre Hommage à la Catalogne le récit de son
engagement aux côtés des républicains qui combattaient les forces franquistes
durant la guerre civile espagnole. [...]
Dimanche,
nous avons assisté en Catalogne à des scènes de violence que tous les
démocrates du monde entier ne peuvent tout simplement pas accepter. Envoyer les
forces de l’ordre matraquer des électeurs et voler des urnes n’a rien de
légitime dans un régime démocratique. Se cacher derrière la règle procédurale
pour interdire la tenue d’une consultation populaire, c’est nier le pouvoir du
peuple, le demos cratos. Le 1er octobre 2017, en Catalogne, le gouvernement espagnol
a bafoué violemment la démocratie et la liberté du peuple catalan de s’exprimer
sur son devenir.
Devant
cet usage illégitime de la violence étatique en Catalogne, la communauté
internationale s’est murée dans un silence assourdissant, justifiant son
indifférence et son inaction par le principe de non-ingérence dans les affaires
internes d’un pays. Il aurait été cependant relativement facile de dénoncer
fermement la violence et le déni de démocratie de la part de l’État espagnol
sans pour autant prendre parti sur la question de l’indépendance de la
Catalogne.
Ce qui
est dangereusement remis en cause ici, c’est la capacité d’un peuple à
s’exprimer collectivement sur une question qu’il juge fondamentale. Nous ne
pouvons pas être démocrates à moitié, ou juste lorsque les décisions prises
vont dans le sens de nos intérêts. On est démocrate ou on ne l’est pas. On
accepte le principe de confrontation pacifique des opinions, des visions et des
aspirations par le dialogue et l’échange d’arguments ou bien on le refuse, on
bâillonne et criminalise la dissidence et on impose son point de vue par la
force. La ligne est relativement claire, et l’ignorer ou regarder ailleurs
lorsqu’elle est franchie peut s’avérer lourd de conséquences.
Article intégral :
Madrid
demande un mandat d'arrêt européen contre Carles Puigdemont
Gaël BRANCHEREAU, Laurence BOUTREUX
Agence France-Presse | Madrid, Barcelone
Publié le 02 novembre 2017
Le parquet espagnol a demandé jeudi l'émission
d'un mandat d'arrêt européen contre le président catalan destitué Carles
Puigdemont et quatre de ses «ministres», après leur refus de comparaître devant
une juge d'instruction madrilène, a-t-on appris de source judiciaire.
La juge
doit encore décider si elle accepte de délivrer ce mandat qui s'adresserait aux
autorités belges, puisque les cinq «se trouvent ou tout au moins se sont rendus
en Belgique», selon le parquet.
Article intégral :
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«Ce n'est pas avec des tribunaux et avec de la
violence qu'on réglera le conflit catalan, mais par de la politique et du
leadership.» ~ Artur Mas,
ex-président du gouvernement catalan
Les
procureurs de la Cour de l’Audience nationale ont cependant requis une
libération sous caution pour le neuvième ministre catalan convoqué. En faveur
d’une solution négociée avec Madrid, Santi Vila a démissionné de l'exécutif
régional de Catalogne avant le vote de la déclaration unilatérale
d'indépendance, vendredi dernier. Le parquet espagnol propose qu’il retrouve sa
liberté en attendant son procès en échange d’une caution de 50 000 euros (75
000 $ CA).
Le
gouvernement espagnol accuse les prévenus d'avoir encouragé «un mouvement
d'insurrection active» au sein de la population catalane pour parvenir à la
sécession de la Catalogne.
Ces
accusations pourraient leur valoir des peines maximales de 15 et 30 ans de
prison.
Article intégral :
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(1) Le parcours du combattant
Hommage à
la Catalogne 1936-1937
George
Orwell
Traduction : Yvonne Davet
ISBN : 2264030380 Éditeur : 10-18 (14/12/1999)
Résumé :
La guerre d'Espagne à laquelle Orwell participa en
1937 marque un point décisif de la trajectoire du grand écrivain anglais.
Engagé dans les milices du Parti ouvrier d'unification marxiste (POUM), le
futur auteur de 1984 connaît la Catalogne au moment où le souffle
révolutionnaire abolit toutes les barrières de classe. La mise hors la loi du
POUM par les communistes lui fait prendre en horreur le «jeu politique» des
méthodes staliniennes qui exigeait le sacrifice de l'honneur au souci de
l'efficacité. Son témoignage au travers de pages parfois lyriques et toujours
bouleversantes a l'accent même de la vérité. À la fois reportage et réflexion,
ce livre reste, aujourd'hui comme hier, un véritable bréviaire de liberté.
Ebook en français
Homage to
Catalonia :
Si ce récit n'est pas une autobiographie, il est à
la croisée du témoignage historique et de l'essai. Orwell, comme Malraux ou
Capa, fut de ces intellectuels de gauche qui s'engagèrent spontanément dans les
troupes républicaines, et allèrent au cœur de la guerre civile espagnole. En
cela, Hommage à la Catalogne est une
pierre angulaire de l'œuvre d’Orwell : c'est la confrontation de ses idéaux au
réel. Cette expérience influence tout son parcours littéraire postérieur et la
plupart de ses romans les plus connus.
Orwell
lui-même met en abyme son projet et ses motivations dans un article qu'il
publie en 1949, soit peu avant qu'il n'ait finit la rédaction de son 1984 : «Tôt dans ma vie, j'ai remarqué qu'aucun
événement n'avait jamais été relaté avec exactitude dans les journaux ; mais en
Espagne, pour la première fois, j'ai lu des articles de journaux qui n'avaient
aucun rapport avec les faits, ni même l'allure d'un mensonge ordinaire. J'ai vu
l'histoire rédigée non pas conformément à ce qui s'était réellement passé, mais
à ce qui était censé s'être passé selon les diverses “lignes de parti”. Ce
genre de choses me terrifie, parce qu'il me donne l'impression que la notion
même de vérité objective est en train de disparaître de ce monde.»
Cette
recherche de la vérité objective est donc essentielle : il s'agit pour lui de
restituer le conflit espagnol de façon aussi proche de la réalité que possible.
Ceci explique donc la précision des dates et des événements relatés dans Hommage à la Catalogne, si bien que
plusieurs chapitres trop chronologiques ou fourmillant de détails politiques
seront placés par son éditeur en annexe, pour ne pas en rendre la lecture trop
fastidieuse.
Dans un
entretien qu'il donne après la parution d'Hommage à la Catalogne, il affirme
avoir été incité à ne pas restituer la réalité de la guerre civile espagnole : «Un bon nombre de gens m'ont dit avec plus
ou moins de franchise que l'on ne doit pas dire la vérité sur ce qui se passe
en Espagne et sur le rôle joué par le parti communiste, parce que cela
susciterait dans l'opinion publique un préjugé contre le gouvernement espagnol,
en aidant ainsi Franco». Toutefois, malgré ces pressions pour qu'il
camoufle cette vérité-là, il a résisté, s'en tenant à son «opinion passée de mode et qui veut qu'à la longue, dire des mensonges
ne paie pas». Source : Wikipédia
Citations d’Orwell
«L'un des
traits les plus abominables de la guerre, c'est que toute la propagande de
guerre, les hurlements et les mensonges et la haine, tout cela est
invariablement l'oeuvre de gens qui ne se battent pas.»
«D'un côté
la C.N.T., de l'autre côté la police. Je n'ai pas un amour particulier pour ‘l’ouvrier’
idéalisé tel que se le représente l'esprit bourgeois du communiste, mais quand
je vois un véritable ouvrier en chair et en os en conflit avec son ennemi
naturel, l'agent de police, je n'ai pas besoin de me demander de quel côté je
suis.»
«L’un des
plus tristes effets de cette guerre pour moi, ce fut d’apprendre que la presse
de gauche est tout aussi fausse et malhonnête que celle de droite.»
«Idéologiquement, communisme et anarchisme sont
aux antipodes l’un de l’autre. Pour la pratique – c’est-à-dire quant à la forme
de société souhaitée – il n’y avait entre eux qu’une différence d’accent, mais
irréconciliable : les communistes mettent toujours l’accent sur le centralisme
et l’efficacité, les anarchistes sur la liberté et l’égalité.»
«Dans une armée prolétarienne, la discipline est,
par principe, obtenue par consentement volontaire. Elle est fondée sur le
loyalisme de classe, tandis que la discipline d'une armée bourgeoise de
conscrits est fondée, en dernière analyse, sur la crainte.»
«Aux yeux
du peuple espagnol, tout au moins en Catalogne et en Aragon, l’Église était
purement et simplement une entreprise d’escroquerie. Il est possible que la foi
chrétienne ait été remplacée dans une certaine mesure par l’anarchisme dont
l’influence est largement répandue et qui a incontestablement quelque chose de
religieux.»
«La vérité, c'est que toute guerre subit de mois
en mois une sorte de dégradation progressive, parce que tout simplement des
choses telles que la liberté individuelle et une presse véridique ne sont pas
compatibles avec le rendement, l'efficacité militaire.»
«Les
communistes ne se trouvaient pas à l'extrême-gauche, mais à l'extrême-droite
[...]. En réalité, ce furent les communistes, plus que tous les autres, qui
empêchèrent la révolution en Espagne. Et, un peu plus tard, quand les forces de
l'aile droite furent pleinement au pouvoir, les communistes se montrèrent
résolus à aller beaucoup plus loin que les libéraux dans la persécution des
leaders révolutionnaires.»
«C’est une absurdité de prétendre s’opposer au
fascisme au moyen de la ‘démocratie’ bourgeoise. ‘Démocratie’ bourgeoise, ce
n’est là qu’un autre nom donné au capitalisme, tout comme fascisme; se battre
contre le fascisme au nom de la ‘démocratie’ revient à se battre contre une
forme du capitalisme au nom d’une autre de ses formes, susceptible à tout
instant de se transformer en la première.»
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