26 novembre 2017

Mensonge et sarcasme

Le mensonge contient les mêmes éléments hostiles que le sarcasme. La «victime» se sent stupide, ridiculisée à ses propres yeux et aux yeux des autres, parce qu’elle n’a pas su détecter le mensonge.


Intéressant d’entendre les remarques ironiques de l’ex-premier ministre Jean Charest au congrès du PLQ.
    L’UPAC mène toujours une enquête sur le financement du Parti libéral du Québec (PLQ) sous l’ère Charest. Aucune accusation n’a été portée contre l’ex-premier ministre.
    Selon M. Charest, des informations le concernant ont été «coulées» aux journalistes, qui les auraient «montées en épingle».  «L’UPAC a beaucoup de pression [...] une pression terrible de la part des médias. Dans certains cas, j’ai vu des reportages sur des affaires ou des déplacements que j’aurais faits, que je ne connaissais pas, qui n’ont jamais été faits, en présumant et en présentant ça comme quelque chose de grave. C’est vraiment gonflé à l’hélium. On présente des affaires comme si c’était très grave.»
(ICI Radio-Canada info)

Il aurait pu ajouter : «Hé, vous ne me pognerez pas, mon père est plus fort que la police!»

«Mentons, mentons, on finira bien un jour par dire par hasard une quelconque vérité.» ~ Serge Bouchard (Le mensonge, De la fin du mâle, de l'emballage et autres lieux communs, Éd. Boréal)

Ce que je trouve le plus ardu c’est de déterminer quand un menteur pathologique dit la vérité... puisque ça lui arrive parfois.

Il me fait donc plaisir de partager ces quelques conseils du psychologue Jack Schafer, auteur, analyste comportemental, conférencier et ex-agent du FBI.
http://www.words-talk.com/

Cinq choses que les menteurs répondent souvent quand on les interroge. On ne devrait pas les ignorer.  

Détecter le mensonge à l'aide d'indices verbaux reste une tâche difficile. La meilleure méthode pour prédire une tromperie consiste à comparer ce que dit la personne à une preuve externe ou à une vérité connue. Au mieux, certaines déclarations peuvent indiquer une plus grande probabilité de supercherie, mais il n'existe pas de signal verbal unique pouvant la prédire avec exactitude.

Cependant, dans un contexte donné, certains mots ou groupes de mots peuvent signaler qu’une tromperie est susceptible de se produire. Si la conversation est importante, savoir où réside la tromperie potentielle peut certainement avantager, à la fois dans les relations d’affaires et les interactions sociales.

Les cinq énoncés suivants méritent un drapeau rouge.

1. «C'est à peu près tout.»
La locution «à peu près» (presque) signifie que l'interlocuteur pourrait en dire davantage, mais qu’il ne veut pas donner plus de détails. S’il racontait toute l'histoire, sa réponse serait «C'est tout». La personne qui veut tromper ne divulguera pas certains aspects de l’histoire. Les honnêtes gens rapportent tous les faits sans crainte des conséquences juridiques ou sociales.

2. «Vous ne pouvez pas prouver ça.»
Le mot «prouver» suggère qu'il existe des faits pouvant confirmer l'hypothèse ou l'accusation que l’interrogateur n'a pas encore réussi à découvrir. Les gens malhonnêtes savent qu’il y a des preuves. Les honnêtes gens ne pensent pas en termes de preuves : ils savent qu'il n’y a pas de preuves puisqu’ils n’ont pas fait ce dont on les accuse.

3. «Pourquoi je ferais ça?»
Répondre à une question par une question est un énorme drapeau rouge indiquant une possible tromperie. Les gens malhonnêtes sont évasifs, et lorsqu'ils sont pris au dépourvu, ils ont besoin de temps pour trouver une répartie crédible. La réponse «Pourquoi je ferais ça?» leur fait gagner du temps. Les honnêtes gens démentissent tout de suite en répondant simplement «Je n'ai pas fait ça».

4. «Êtes-vous en train de m'accuser?»
En plus de répondre à une question par une question, l'accusé peut subtilement, essayer de retourner la situation en mettant l'interrogateur sur la défensive. Ces mots sous-entendent : «Comment osez-vous m'accuser? Soyez prêt à vous défendre vous-même!» Cette contre-attaque subtile pousse l'interrogateur à justifier ses accusations. Ce faisant, l'accusé gagne du temps pour contre-attaquer ou préparer une histoire crédible. La réponse simple à cette question serait : «Oui, je vous accuse, sinon je n'aurais même pas abordé le sujet». Cette réponse pare la contre-attaque et remet l'accusé sur la défensive.

5. «Je ne me souviens pas avoir fait ça.»
Pour camoufler la vérité, les gens malhonnêtes prétendent manquer de mémoire. Cette défense comprend deux pièges pour les dissimulateurs :
    En premier lieu, pour ne pas se souvenir de ce qu’on a fait, il faut d'abord qu’il existe un souvenir de l'événement. Par définition, ne pas se rappeler de quelque chose suppose que toutes les informations ont d'abord été stockées dans la mémoire. Le manque de mémoire indique que le souvenir est stocké dans le cerveau, mais que la personne ne peut pas le récupérer. Habituellement, les honnêtes gens répondent : «Je ne sais pas», car si la personne n’arrive pas à récupérer le souvenir, par conséquent elle ne sait pas ce qui est arrivé. Les honnêtes gens font tout ce qu'ils peuvent pour récupérer le souvenir d'un événement. Les gens malhonnêtes ne veulent pas se souvenir de peur de dévoiler des informations qui exposeraient la vérité.
    Le deuxième piège est similaire. Une personne ne peut pas dire, «je ne me souviens pas avoir fait ça», sans se rappeler ce qu'elle a réellement fait. Le mot «ça» suggère que la personne ne se rappelle pas avoir fait un ensemble d'actions. Pour dire «je n'ai pas fait ça», la personne doit savoir ce qu'elle a fait d’autre. Logiquement, comment une personne peut-elle dire qu'elle ne se souvient pas avoir fait une chose si elle n'a aucun souvenir de l'événement? Le mot «ça» indique qu’il y a un souvenir de l’événement.
    La réponse de l'interlocuteur  à cette manœuvre devrait être : «Vous souvenez-vous alors de ce que vous avez fait?» En général, les gens malhonnêtes s'accrochent au manque de mémoire en disant «Je ne sais pas ce que j'ai fait». Ici l'interlocuteur devrait dire : «Si vous ne savez pas ce que vous avez fait, il est donc possible que vous ayez fait exactement ce que j'ai décrit». Les gens malhonnêtes ne feront aucun effort pour récupérer le souvenir d'une action de peur de révéler la vérité. Les honnêtes gens vous diront ce dont ils se souviennent, conformément à leur alibi.

La clé pour détecter le mensonge est d'écouter attentivement ce que la personne vous dit. Les mots ne sortent pas de la bouche des gens sans raison. Ils ont un sens et sont une représentation directe de ce qu'une personne pense : les mots peuvent révéler l'imposture, et ils le font.

Source : Psychology Today

En complément :

~~~
La science du mensonge



Comment le cerveau prend goût au mensonge
Par Lise Loumé

Des petits mensonges aux gros bobards, il n'y a qu'un pas et une région de notre cerveau nous incite à le franchir... Cette «spirale du mensonge» a été décryptée par des chercheurs britanniques.
    Raconter des petits mensonges de temps en temps, tout le monde (ou presque) le fait et cela peut paraître anodin. Sauf que sans le savoir, un cercle vicieux s'enclenche dans notre cerveau, car plus on ment, et plus cet organe «prend goût» au mensonge! Voilà comment l'on peut passer de petits mensonges de rien du tout à des plus gros qui permettent d'enfouir les précédents… Un mécanisme cérébral fascinant mis en évidence par des chercheurs en psychologie de l'University College de Londres (Grande-Bretagne) et détaillé dans la revue Nature Neuroscience.

Les émotions négatives liées au mensonge effacées par l'amygdale

Dans cette étude, les chercheurs ont demandé à 80 volontaires (âgés de 18 à 55 ans) de se prêter à un jeu, dans lequel ils peuvent mentir pour un enrichissement personnel, ou dire la vérité. Concrètement, ils se sont vus soumettre une photo haute résolution représentant un pot en verre rempli de pièces de monnaie. Par ordinateur, ils ont aidé un partenaire à estimer le montant d'argent contenu dans le récipient. Cette personne (en fait un acteur) ne dispose pour sa part que d'une photo de médiocre qualité. Dans un premier scénario, les opérateurs ont demandé aux participants d'estimer de la façon la plus exacte possible le montant, en leur disant que cela bénéficierait à la fois à eux-mêmes et à leur partenaire (ils gagneraient tous les deux davantage d'argent). Puis les participants ont été soumis à d'autres scénarios, dans lesquels sous-estimer ou surestimer volontairement le montant contenu dans le pot pouvait présenter un intérêt pour eux, au détriment de leur partenaire, ou bien l'inverse, ou encore profiter aux deux...
    L'expérience montre que les gens mentent davantage quand c'est positif pour eux-mêmes et pour les autres, «probablement parce que cela ne les fait pas se sentir mal», relèvent les chercheurs. Mais au fil de l'exercice, la plupart des volontaires se sont mis à déformer la réalité... Pour comprendre pourquoi, les chercheurs ont scanné le cerveau des volontaires pendant tout la durée de l'expérience. Verdict : une zone du cerveau responsable de la mémoire émotionnelle, l’amygdale, s'active lors du premier mensonge, et de plus en plus au fur et à mesure que le participant ment...

Des petits mensonges qui font «boule de neige» avec le temps

En fait, au début de l'expérience, le menteur ressent un inconfort lorsqu'il déforme la vérité. Mais cette gêne s'estompe à mesure que la liste de ses mensonges s'allonge, l'amygdale du cerveau qui gère certaines de nos émotions s'étant en quelque sorte accoutumée. Et les mensonges se font de plus en plus gros... «Il y a une sorte d'adaptation émotionnelle, pointent les chercheurs. Cela peut conduire à une «pente glissante», lorsque de petits arrangements avec la vérité peuvent déclencher une escalade et devenir des mensonges importants». Un effet «boule de neige» évoqué par des «menteurs» ou tricheurs «que ce soit dans le cas d'une infidélité, d'un dopage dans le sport, de données scientifiques trafiquées ou de fraude fiscale», soulignent les scientifiques.
    «C'est la première fois que l'on montre de manière empirique qu'un comportement malhonnête s'accroît à mesure qu'il se répète», affirme dans un communiqué Neil Garret, principal auteur de l'étude. Pour lui, ces résultats confortent l'idée que l'amygdale pourrait «réagir à des actes que nous considérons mauvais ou immoraux». «Nous avons testé uniquement les comportements malhonnêtes dans cette expérience. Mais le même principe pourrait s'appliquer à d'autres processus d'escalade, comme les comportements à risque et violents», estime-t-il.


Citation du jour :

[...] je crois que si le mensonge peut servir un moment, il est nécessairement nuisible à la longue, et qu'au contraire la vérité sert nécessairement à la longue bien qu'il puisse arriver qu'elle nuise dans le moment. D'où je serai tenté de conclure que l'homme de génie qui décrie une erreur générale, ou qui accrédite une grande vérité, est toujours un être digne de notre vénération. ~ Denis Diderot (Le neveu de Rameau)

Les journalistes d'enquête et leurs sources ont de ce fait toute mon admiration car ils contribuent à révéler les actes frauduleux, loin d'être anodins, qui entachent notre système politique. On peut leur dire grand merci.

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