1 octobre 2011

Religions 4

Quand j’étais jeune, les religions les plus répandues partout au Canada étaient le catholicisme, le protestantisme et le judaïsme. L’arrivée d’immigrants de toutes races, couleurs et confessions a peu à peu modifié le paysage. Il fallait nous familiariser à de nouveaux codes vestimentaires et religieux.

Tandis que j’observais cette transformation socioculturelle, je me demandais bien quelle influence aurait cet amalgame cosmopolite sur notre propre culture, et surtout comment toutes ces religions allaient coexister hors des quartiers-ghettos des grandes villes. Les frictions étaient quasi inévitables puisque des minorités jadis invisibles devenaient soudain très visibles.

J’avais déjà étudié en dilettante les religions traditionnelles ainsi que d’autres moins répandues. Une sorte de magasinage, non pas pour acheter, mais plutôt pour comparer, puisque je ne suis membre d’aucune religion ou secte. En réalité, je voulais mieux connaître les rituels (objets de tant de querelles!) et les codes d’éthique que certains croyants défendent bec et ongles même au prix de leur vie.

Début 2000, j’ai eu envie de creuser. J’ai relu des extraits du Talmud – je pense que la version était kasher… Je me suis fait un devoir de lire tous les sourates coraniques, vu le nombre croissant d’immigrants arabes qui arrivaient au pays; j’ignore si la version est halal… – Le Coran Tomes I et II, une traduction intégrale publiée chez Payot. Puis, j’ai révisé des passages de la Bhagavad-Gita. Le taoïsme, le bouddhisme, la mythologie, le chamanisme, la métaphysique et bien d’autres systèmes de croyance ont aussi passé dans la moulinette.

Overdose de préceptes et d’incroyables contraintes et superstitions auxquelles se soumettent les croyants pour plaire à un Dieu ou à des déités dont les propriétés varient passablement d’une confession à l’autre.

Le moins qu’on puisse dire c’est que certaines religions sont «combatives» étant donné leur forte propension au prosélytisme et au contrôle, alors que d’autres sont pacifiques et libérales. D’autres s’apparentent davantage à une éthique de vie.

Même si toutes les religions et les sectes prêchent l’amour, celui-ci brille souvent par son absence – comme dans l’aphorisme «ce que tu fais parle plus fort que ce que tu dis»… Entre la théorie et la vraie vie, il y a parfois des années-lumière. 

La Voie du Milieu

Selon le Dictionnaire de la sagesse orientale, Éd. Robert Laffont : «Il s’agit ici, d’une des nombreuses applications du concept fondamental de la Voie du Milieu, très vaste d’ailleurs. Le Bouddha historique enseignait le rejet des extrêmes, que ce soit par exemple l’abandon total aux plaisirs des sens ou l’ascèse excessive et l’autocastration.»

Le bouddhisme préconise l’éveil par la maîtrise du désir égotique et de l’illusion, causes de la souffrance. La réalisation consiste à briser le cycle des incarnations successives. Le bouddhisme propose un code d’éthique pouvant aider à prendre conscience de ses pensées, de ses paroles et de ses actes et de leurs conséquences sur soi et l’entourage; et ce faisant, à devenir responsable.

***

Principaux points de doctrine et préceptes 

Les quatre nobles vérités 
- La vérité de la souffrance : toute vie implique la souffrance, l’insatisfaction
- La vérité de l’origine de la souffrance : elle repose dans le désir, les attachements
- La vérité de la cessation de la souffrance : la fin de la souffrance est possible
- La vérité du chemin : le chemin menant à la fin de la souffrance est la voie médiane, qui suit le noble sentier octuple.

Le noble sentier octuple 
- La compréhension juste
- La pensée juste
- La parole juste
- L’action juste
- Le mode de vie juste
- L’effort juste
- L’attention juste
- La concentration juste

Les dix préceptes – dans leur formulation positive les 6e et 7e préceptes sont regroupés :
- Avec des actions bienveillantes, je purifie mon corps
- Avec une générosité sans réserve, je purifie mon corps
- Avec calme, simplicité et contentement, je purifie mon corps
- Avec une communication véritable, je purifie ma parole
- Avec des paroles utiles et harmonieuses, je purifie ma parole
- Avec des mots bienveillants et gracieux, je purifie ma parole
- Abandonnant la convoitise pour la tranquillité, je purifie mon esprit
- Changeant la haine en compassion, je purifie mon esprit
- Transformant l’ignorance en sagesse, je purifie mon esprit

Les quatre incommensurables (à cultiver à l’aide de la méditation et autres pratiques)  
- La bienveillance universelle
- La compassion (découlant de la bienveillance)
- La joie empathique (capacité de se réjouir du bonheur d’autrui)
- L’équanimité, la paix de l’esprit (acquise par la pratique des valeurs précédentes)

(Source : Wikipédia)

***
Roscoe et Surya : solidaires pour la vie...

À propos d’éthique…  

Extrait de l’ouvrage d’Albert Schweitzer, Les grands penseurs de l’Inde, Payot, 1956.

Chapitre XVI; Coup d’œil rétrospectif, perspectives d’avenir  

«L’activité éthique est la seule par laquelle nous puissions entrer en relation spirituelle avec l’Esprit universel. Comment expliquer ce fait?
      Pour le comprendre, il faut partir de l’éthique complète. L’éthique incomplète, c’est-à-dire celle qui nous laisse préoccupés uniquement de notre attitude vis-à-vis des autres hommes et de la société, ne nous met pas en relation avec l’Esprit universel. Nous ne pouvons communier avec lui que dans l’éthique universaliste et illimitée qui nous oblige à nous dévouer à tous les êtres qui se trouvent dans la sphère de notre activité. C’est parce qu’elle se fait une idée trop petite et trop étroite de l’éthique que la pensée se crée des difficultés dont elle ne peut venir à bout.
      Le principe fondamental de l’éthique est le respect de la vie. Nous avons à le pratiquer vis-à-vis de nous-mêmes et des autres êtres. Vis-à-vis de nous-mêmes nous le pratiquons en cherchant à développer notre vie au plus haut degré par le perfectionnement spirituel et moral de notre moi. Vis-à-vis des autres êtres, nous le pratiquons en nous dévouant à eux pour les aider à consacrer et à améliorer leur existence et à se développer autant que cela leur est possible.
      Ce que nous appelons amour est, en son essence, le respect de la vie. Toutes les valeurs, matérielles et spirituelles, ne sont des valeurs qu’en tant qu’elles servent au maintien et au développement de la vie au plus haut degré possible.
      En ses exigences et en son extension, l’éthique est sans limite. C’est en prenant conscience de notre solidarité avec tous les êtres et en la pratiquant que nous entrons, de la seule façon possible, en communion active avec l’Être infini en lequel tous les êtres ont leur existence.
      Ce n’est pas par la connaissance du monde, mais par la connaissance de l’essence et de la portée de l’éthique que nous arrivons à donner un sens à notre vie. 

       L’éthique remonte à ce fait essentiel que notre vie est née d’une autre vie et engendre d’autres vies. Nous n’existons pas uniquement pour nous-mêmes. D’autres existences participent à la nôtre, et la nôtre de la leur. L’éthique la plus élémentaire telle qu’on la rencontre non seulement chez l’homme, mais déjà chez les animaux supérieurs, consiste dans ce fait primordial qu’un être prend conscience de la solidarité dans laquelle il se trouve avec d’autres et la met en pratique. 
      Quand notre pensée commence à s’occuper de la mystérieuse solidarité qui existe entre nous et d’autres êtres, elle se trouve obligée de s’avouer qu’elle n’arrive pas à en établir les limites. Par delà la famille, elle doit l’étendre au clan, puis à la tribu, puis au peuple et finalement à l’humanité entière. Elle ne peut même pas s’arrêter à la solidarité avec l’homme, mais est obligée de reconnaître qu’il existe un lien entre l’homme et toute créature. 

      L’éthique illimitée a en commun avec les Upanishads le principe du «tat twam asi» (Cela c’est toi). D’après le «tat twam asi» l’homme doit se retrouver lui-même dans tous les êtres. Mais le «tat twam asi» de l’éthique est une constatation qui devient principe d’action, tandis que le «tat twam asi» brahmanique se borne à exprimer la vérité toute théorique que l’âme universelle se trouve dans toutes les âmes individuelles. 

      L’éthique, c’est la reconnaissance de notre responsabilité, envers tout ce qui vit.»  

Autres

Le Respect de la vie

«Nous naviguions lentement à contre-courant, cherchant notre voie, non sans peine, parmi les bancs de sable. C'était la saison sèche. Assis sur le pont d'une des remorques, indifférent à ce qui m'entourait, je faisais effort pour saisir cette notion élémentaire et universelle de l'éthique que ne nous livre aucune philosophie. Noircissant page après page, je n'avais d'autre dessein que de fixer mon esprit sur ce problème qui toujours se dérobait. Deux jours passèrent. Au soir du troisième, alors que nous avancions dans la lumière du soleil couchant, en dispersant au passage une bande d'hippopotames, soudain m'apparurent, sans que je les eusse pressentis ou cherchés, les mots 'Respect de la vie'. La porte d’airain avait cédé. La piste était apparue à travers le fourré. Je savais maintenant que la conception du monde qui nous incline à dire oui au monde et oui à la vie, avec tous les idéaux de civilisation qu’elle porte, se trouve fondée dans la pensée. 
      La grande lacune de l'éthique jusqu'à présent est qu'elle croyait n'avoir affaire qu'à la relation de l'homme à l'égard des humains. Mais en réalité, il s'agit de son attitude à l'égard de l'Univers et de toute créature qui est à sa portée. L'homme n'est moral que lorsque la vie en soi, celle de la plante et de l'animal aussi bien que celle des humains, lui est sacrée, et qu'il s'efforce d'aider dans la mesure du possible toute vie se trouvant en détresse.» (Ma vie et ma pensée - 1931)

Albert Schweitzer (1875 -1965); médecin, théologien protestant et musicologue français; Prix Nobel de la paix 1954

***

«Albert Schweitzer reste un des rares théologiens chrétiens ayant prêché une éthique de pitié pour l'animal et plus généralement du respect de la vie, de toute vie. Beaucoup de violences bafouent l'idéal moral : chasse, corridas, élevage concentrationnaire où l'animal n'est plus un être vivant mais une matière première, abus d'une expérimentation souvent inutile ou cruelle etc. Il prend soin d'aider l'être en détresse, fut-il ver de terre égaré après la pluie sur le chemin ou l'insecte tombé à l'eau. Schweitzer va jusqu'à affirmer que pour l'homme vraiment moral toute vie est sacrée et même celle qui du seul point de vue humain paraît la plus inférieure...» (Et si l'aventure humaine devait échouer - Théodore Monod, 2000)

***
COMMENTAIRE

Ce qu'a fait Albert Schweitzer a parlé plus fort que ce qu'il a dit...

Aucun commentaire:

Publier un commentaire