15 décembre 2017

Le cri d’alarme des scientifiques quasi bâillonné

À l’émission «Dans les médias» (Télé Québec) les panelistes mentionnaient que le cri d’alarme lancé par 15 000 scientifiques au sujet de la dégradation planétaire et de l’urgence d’agir n’avait pas fait la une de nos médias traditionnels (québécois). Un document d’une importance capitale très peu médiatisé par la presse officielle en effet. Un paneliste disait que c’était peut-être parce que les gens sont las d’entendre parler de la fin du monde ou indifférents, ou parce qu’on joue à faire peur sans vraiment proposer de solutions (1). Il n’avait peut-être pas lu le document de BioScience au complet – j’ai compté au moins 13 mesures de transition concrètes qu’on peut commencer à appliquer maintenant, avec un minimum de bonne volonté bien sûr.
    Il ne faut pas compter sur la coopération des frères Koch (prononcez coke) et leurs semblables. On a découvert un vaccin contre le «bacille de Koch» à l’origine de la tuberculose. Les scientifiques devraient créer un vaccin contre la «tumeur maligne de Koch Brothers» à l’origine du cancer qui prolifère de l’Alaska à la Terre de feu.

Document original (en anglais) :

Le Devoir en a parlé deux fois, pas à la une, mais quand même...

L’humanité court à sa perte, préviennent 15 000 scientifiques à travers le monde 

La situation s'est détériorée au cours des 25 dernières années
Alexandre Shields | Le Devoir | 14 novembre 2017

Photo : Luis Tato Agence France-Presse. La déforestation, la croissance rapide de la population, la destruction des milieux et le dérèglement climatique sont des défis auxquels l’humanité n’a pas su répondre.

Crise climatique de plus en plus impossible à enrayer, croissance rapide de la population mondiale, extinction massive d’espèces et destruction généralisée des milieux naturels… Le péril auquel fait face l’humanité ne cesse de grandir, préviennent plus de 15 000 scientifiques, dans une mise en garde commune d’une ampleur sans précédent publiée lundi.
    En 1992, un groupe de 1700 scientifiques, dont plusieurs lauréats du prix Nobel, signaient un premier «avertissement» dans lequel ils détaillaient les raisons qui poussaient l’humanité vers une collision frontale avec l’ensemble du monde vivant en raison de notre «gestion de la Terre et de la vie qu’elle recèle».
    Les auteurs de cette déclaration insistaient ainsi sur les risques que représentaient le réchauffement climatique, le recours massif aux énergies fossiles, la croissance continue de la population mondiale, la déforestation et la destruction de la biodiversité des écosystèmes de la planète. Autant de phénomènes susceptibles de provoquer «de grandes misères humaines», à moins qu’un «changement profond» ne soit opéré.
    Or, depuis 25 ans, la réponse de l’humanité se résume à un échec quasi généralisé. «Non seulement l’humanité a échoué à accomplir des progrès suffisants pour résoudre ces défis environnementaux annoncés, mais il est très inquiétant de constater que la plupart d’entre eux se sont considérablement aggravés», affirment pas moins de 15 364 scientifiques provenant de 184 pays, dans un manifeste publié lundi dans la revue BioScience, mais aussi en français sur le site du journal Le Monde.
    «Dans ce document, nous avons examiné l’évolution de la situation des deux dernières décennies et évalué les réponses humaines en analysant les données officielles existantes», a expliqué à l’Agence France-Presse Thomas Newsom, professeur à l’Université Deakin en Australie, coauteur de la déclaration. Et le constat est sans équivoque : «Bientôt, il sera trop tard pour inverser cette tendance dangereuse.»
    Ce «deuxième avertissement» revient bien évidemment sur la menace «potentiellement catastrophique» que représentent les bouleversements climatiques. Un phénomène provoqué par notre dépendance aux énergies fossiles, mais aussi par la déforestation et la production agricole, dont les émissions dues à l’élevage des ruminants de boucherie.


Un rapport publié lundi par le Global Carbon Project démontre d’ailleurs que les émissions mondiales de CO2 sont reparties à la hausse en 2017, après trois années de stabilité. Ce constat est d’autant plus inquiétant que la communauté scientifique estime qu’il faudrait impérativement plafonner les émissions de gaz à effet de serre dès 2020, pour ensuite les faire décroître, afin de limiter le réchauffement à 2 °C, ce qui est l’objectif de l’Accord de Paris sur le climat.

Population croissante

Les quelque 15 000 scientifiques signataires du nouveau manifeste déplorent par ailleurs notre incapacité à «limiter adéquatement» la croissance de la population mondiale. Celle-ci a en effet connu une augmentation de plus de deux milliards de personnes depuis 25 ans, soit près de 35 %.
    «Nous mettons en péril notre avenir en refusant de modérer notre consommation matérielle intense mais géographiquement et démographiquement inégale, et de prendre conscience que la croissance démographique rapide et continue est l’un des principaux facteurs des menaces environnementales et même sociétales», écrivent les auteurs de ce texte.

Trop c’est trop. Le lapinisme humain (reproduction excessive) a en effet des conséquences désastreuses.

La destruction des milieux naturels et de pans entiers des écosystèmes de la Terre signifie en outre que «nous avons déclenché un phénomène d’extinction de masse, le sixième en 540 millions d’années environ, au terme duquel de nombreuses formes de vie pourraient disparaître totalement, ou en tout cas se trouver au bord de l’extinction d’ici à la fin du siècle».

Photo : Luis Robayo Archives Agence France-Presse. Depuis 25 ans, alors que la population mondiale a augmenté de 35%, le nombre de mammifères, reptiles, amphibiens, oiseaux et poissons a baissé de 29%.

Globalement, pas moins de 60 % des populations de vertébrés auraient déjà disparu depuis 1970, selon des données publiées l’an dernier par la Société zoologique de Londres. Une autre étude publiée cette année dans Proceedings of the National Academy of Sciences a permis de confirmer des reculs majeurs chez des milliers d’espèces de mammifères, d’oiseaux, de reptiles et d’amphibiens. Ces régressions sans précédent de la biodiversité vont d’ailleurs de pair avec une perte croissante d’«habitats naturels» terrestres et marins.

Photo : Vyacheslav Oseledko Archives Agence France-Presse. Un léopard des neiges, une des nombreuses espèces décimées par le braconnage

Solutions

Au-delà de ces constats extrêmement graves, les scientifiques plaident pour la mise en oeuvre de plusieurs mesures «urgentes indispensables» pour opérer une «transition vers la durabilité».
    En plus de la nécessité de se tourner «massivement» vers les énergies renouvelables et de mettre fin aux soutiens financiers aux énergies fossiles, les auteurs insistent sur l’importance de «réduire le taux de fécondité» par une généralisation de l’accès à l’éducation et à la planification familiale. Ils mettent aussi en avant l’idée de «déterminer à long terme une taille de population humaine soutenable et scientifiquement défendable tout en s’assurant le soutien des pays et des responsables mondiaux pour atteindre cet objectif vital».
    Les scientifiques suggèrent aussi de «promouvoir une réorientation du régime alimentaire vers une nourriture d’origine essentiellement végétale» et de «réduire le gaspillage alimentaire». Ils font valoir l’urgence de protéger les milieux naturels, qu’ils soient terrestres ou marins, mais aussi de «restaurer» des écosystèmes et de mettre en place les politiques nécessaires pour préserver la biodiversité.
    «Il sera bientôt trop tard pour dévier de notre trajectoire vouée à l’échec, car le temps presse, concluent-ils. Nous devons prendre conscience, aussi bien dans nos vies quotidiennes que dans nos institutions gouvernementales, que la Terre, avec toute la vie qu’elle recèle, est notre seul foyer.»



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(1) À cette même émission il était question du marketing de soi via les réseaux sociaux. On donnait en exemple la photo des fesses gonflées à l’hélium de Kim Kardashian publiée en couverture de PAPER en 2014. Les fesses d’exhibitionnistes déséquilibré(e)s suscitent des millions de clicks en quelques heures; et cela nous donne une idée du niveau de maturité de la populace. De toute évidence, le cul l’emporte haut la main sur l’intelligence. On le constate d’ailleurs avec les allégations et dénonciations de harcèlement sexuel qui ne cessent de se multiplier.

Au chapitre des mesures de transition concrètes qui pourraient réduire le gaspillage alimentaire voyons le Super Bowl, un exemple de gloutonnerie nationale hors du commun dont les conséquences environnementales sont proportionnelles.
    Croyez-vous que les fanatiques de football nord-américains seraient capables de se priver de leur menu traditionnel en regardant leur joute? Dans un monde où le style de vie est entièrement basé sur la surconsommation et la satisfaction individuelle immédiate, cela semble utopique. Il y a des démonstrations d’égoïsme extrême qui dépassent l’entendement.
Statistiques de 2015 :
1 milliards d'ailes de poulet, soit 500 millions de poulets abattus; 28 millions de livres de croustilles au maïs et de potato chips; 53,5 millions de livres d'avocats (pour l’indispensable guacamole); 222 792 – nombre de terrains de football équivalant aux terres agricoles utilisées pour cultiver tout le maïs, les pommes de terre et les avocats; 325,5 millions de gallons de bière bus par les Américains ce jour-là – on pourrait remplir près de 500 piscines olympiques (beaucoup de bière dans les eaux usées, les poissons doivent être ivres). Près de 500 millions d'animaux abattus, non pas pour fournir des éléments nutritifs, mais simplement pour que les spectateurs d’empiffrent jusqu’à en être malades. Aux États-Unis, au lendemain du Super Bowl, entre 6 et 8 millions de personnes ne vont pas travailler à cause des excès de bouffe et d’alcool – et ce jour-là, la vente d’antiacides augmente de 18 à 23 % selon les données de l'OMS.
    Lors du Super Bowl de 2016 : 32 000 tonnes d’avocats * furent produites pour satisfaire à la demande! Cette monoculture est une réelle catastrophe pour l’environnement, les pays producteurs et la main d’œuvre – des hectares de destruction d'écosystèmes, de délocalisation de petits agriculteurs indépendants, et de terres arables bourrées de pesticides et d’hormones. Il faut 1000 litres d'eau pour produire deux avocats et demi...

La mondialisation et les accords de libre-échange sont horrifiants et totalement dépourvus d’équité socioéconomique. Ils ne rapportent qu'aux spéculateurs boursiers et aux monopoles industriels et commerciaux qui ne conçoivent la misère humaine qu'en chiffres...  Il y a de la souffrance, de la sueur, du sang, de la maladie, de l’esclavage et de la mort dans tout ce que produisent les grandes corporations – capitalistes et communistes.

* L’avocat, or maudit du Mexique

Dans l'État du Michoacan, non seulement on brûle les forêts et on assèche les cours d'eau pour planter l'avocat, mais on tue pour l'or vert.

Un texte de Jean-Michel Leprince
Publié le mardi 10 octobre 2017 | ICI Radio-Canada Info

Comme la tomate et les piments, le Mexique a donné au monde un fruit merveilleux, l’avocat. Le nom, «aguacate» en espagnol, vient du nahuatl, la langue des anciens Mexicains. «Ahuacatl», qui veut dire, littéralement, testicule.
    L’État du Michoacan est le principal producteur et exportateur d’avocats au monde. Les États-Unis et le Canada sont d'importants consommateurs. Mais, de plus en plus, l’Europe, le Japon, la Chine en raffolent.
    Il faut dire que les vertus de l’avocat sont vantées sur toutes les tribunes. Ce fruit, particulièrement riche en bons lipides, contient beaucoup de vitamines et des substances antioxydantes. Il contribuerait à la réduction du cholestérol, à une prévention des maladies cardiovasculaires et du diabète de type 2.

Forêts brûlées et guerre de l’eau

José Luis Alvarez est propriétaire de La Cruz, une immense pépinière de pins et de sapins. Il voit la forêt qui brûle autour de sa propriété. Il voit les taches claires, de plus en plus nombreuses, où seront bientôt plantés de jeunes avocatiers de trois ans.
    Depuis cinq ans, c’est la ruée sur les bonnes terres, qui se trouvent entre 1500 et 2500 mètres d’altitude et que le gel n’atteint pas. Là où il y a des forêts. Deux récoltes par an, c’est payant.

Photo : Radio-Canada/Jean-Michel Leprince. Une portion de cette forêt a été brûlée pour faire pousser l'avocat dans l'État du Michoacan, au Mexique

L’ingénieur forestier Francisco Javier Hinojosa estime que chaque année, les 14 municipalités du centre du Michoacan perdent 1000 hectares de forêts au profit de l’avocat. Le déboisement est pourtant illégal dans cet État.
    L’avocatier nécessite beaucoup d’eau. La nappe phréatique baisse, ainsi que le niveau des lacs Zirahuen et Patzcuaro, joyaux du Michoacan et destinations touristiques de première classe. Les villages se battent pour l’eau, dit l’ingénieur. Des canalisations sont détruites; c’est une véritable guerre, souligne-t-il.
    Chaque année, pour la seule journée du Super Bowl, le Mexique exporte pour 200 millions de dollars d’avocats. Pour faire du guacamole à déguster devant les téléviseurs. Les marchands mexicains et américains d’avocats ne lésinent pas sur la pub. Une publicité pendant le Super Bowl coûte entre 5 et 12 millions de dollars. Pas étonnant que la demande augmente sans arrêt.

Qui possède les plantations illégales?

On produit de l’avocat depuis longtemps au Michoacan. Les exportateurs sont étroitement surveillés, et la plupart des agriculteurs sont raisonnables pour ce qui est des méthodes de production.
    L’utilisation des pesticides, fongicides et fertilisants est en principe contrôlée. Mais aucune règle ne s’applique aux plantations sauvages d’avocatiers. On pulvérise allégrement dans les plantations.
    Lors de notre passage, un tournage d’une opération d’arrachage d’avocatiers illégaux par le gouvernement du Michoacan a été annulé. Le programme a été suspendu en raison de «plaintes». Qui sont les propriétaires de ces plantations illégales?

Photo : Radio-Canada/Jean-Michel Leprince. Des plantations d'avocat illégales dans l'État du Michoacan

«Il y a beaucoup de cas où on ne sait pas vraiment d’où vient l’argent avec lequel ils achètent les terres et font les plantations. C’est un peu douteux, cette histoire. Ça peut venir du trafic de drogue, du kidnapping, de l’extorsion. On n’a pas de preuves de ça, mais ce qui est sûr, c’est que ce ne sont pas des gens de la région.»
~ José Luis Alvarez, pépiniériste

Tuer pour l’or vert

Le jour de notre arrivée au Mexique, sept travailleurs engagés pour arracher des plantations illégales, des cousins de la même famille, ont été battus et exécutés.
    Tout ce qu’on sait, c’est que la plantation de 200 hectares a appartenu à un narcotrafiquant notoire. Il y a plusieurs cartels au Michoacan : la Familia et les Caballeros Templarios sont en déclin, et Jalisco Nueva Generación semble prendre le dessus.

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