12 décembre 2017

Indice Dow Jones de la survie de notre propre espèce

Évidemment à la suite de la diffusion de la vidéo du photographe Paul Nicklen «les dernières heures d’un ours polaire squelettique en quête de nourriture sur l’île de Baffin», plusieurs se sont empressés de dire que c’était un cas exceptionnel, que l’ours polaire était probablement très âgé ou malade, et même que l’espèce se portait plutôt bien – par chance qu’ils ajoutaient «pour le moment».


Or l’ours polaire est sur la liste des espèces menacées. En réalité le photographe levait un drapeau rouge, lançait un avertissement : si nous ne faisons rien pour altérer le cours des choses «maintenant», pour lutter concrètement contre les émissions de gaz à effets de serre, ces images seront de plus en plus fréquentes (1).

La nature et les animaux sont l’indice Dow Jones de notre propre survie.
Rien de mieux pour comprendre que de visiter le site du photographe http://www.paulnicklen.com/ 

Quelques  réflexions tirées de son site (traduction-maison).

«Depuis 40 ans, j'ai erré dans les régions polaires de notre monde. J'ai commencé enfant, grandissant dans une communauté inuites sur l'île de Baffin, au Canada, où j'ai appris de l'Inuit non seulement comment survivre dans notre environnement , mais aussi à découvrir et aimer l'Arctique pour tout ce qu'il a à offrir.
    Plus tard, en tant que scientifique, j'ai essayé d'utiliser les données pour promouvoir la conservation. Mais c’est seulement quand je suis devenu photographe polaire pour Sea Legacy et le magazine National Geographic que j'ai enfin trouvé une façon de transmettre l'urgence de protéger cet écosystème fragile pour le bien de toute l'humanité.
    En tant que scientifique, ce que je sais de l'Arctique est terrifiant. En ce moment, il se réchauffe deux fois plus vite que partout ailleurs sur la planète. En tant que photographe, je peux observer et documenter ces effets de première main : ces glaciers, des populations d'espèces sauvages luttant pour leur survie, et des villes touchées par la hausse du niveau de la mer.
    Et comme le paysage se modifie, en raison du changement climatique, je vois la région arctique devenir de plus en plus vulnérable. Nous devrions voir la rapide disparition des glaciers de la mer arctique pour ce que c’est : un signe imminent de changement catastrophique. Le danger d'un déversement pétrolier porterait un coup fatal à ce splendide et très important écosystème.
    Ma carrière, en tant que scientifique, photojournaliste et co-fondateur de Sea Legacy, m'a appris que simplement dire aux gens que la glace fond ne fonctionne pas. Les températures sont en hausse. Les animaux luttent, ont faim et se noient. Les niveaux d'eau immergent peu à peu les villes. Nous ne pouvons plus seulement en parler. Nous devons montrer au monde à quel point il est nécessaire et urgent de changer à l’aide d’images et d’histoires et, plus important encore, qu’il faut de puissantes actions.
    Au rythme actuel, l'Arctique sera entièrement vide de glace en 2050. C'est un message difficile à entendre mais facile à comprendre quand vous voyez les dégâts de la fonte aux pôles de notre terre. Les espèces dont la survie est sérieusement menacée, comme le morse du Pacifique, l'ours polaire, la baleine, le rorqual commun, l’eider de Steller, ainsi que les communautés autochtones dont le mode de vie dépend de l'écosystème de l'Arctique, bénéficieront grandement de nouvelles protections.»

«The Big Melt À mesure que le réchauffement se poursuit dans l'Arctique, la glace fond plus tôt à chaque année. La glace fondant, l’eau tourne au bleu foncé ou au noir. Les couleurs autres que le blanc absorbent jusqu'à 90 % de l'énergie du soleil, ce qui accélère le processus de la fonte. C'est ce qu'on appelle l'effet albédo.»

[Albédo NDLR : La quantité de rayonnement solaire réfléchi par la surface terrestre est appelée albédo ou facteur de réflexion, habituellement exprimé en pourcentage. Plus le rayonnement absorbé par la surface est important et moins il est réfléchi, plus la surface chauffe. Les objets noirs, tels que l'asphalte de nos routes ou un T-shirt noir, ont une valeur albédo faible et absorbent donc une grosse partie des rayons du soleil et se réchauffent fortement. Les objets blancs ont un albédo élevé et réfléchissent les rayons du soleil beaucoup plus fortement, de sorte qu'ils se réchauffent moins rapidement. Étant donné que les grandes surfaces du globe réfléchissent la lumière (eau, calottes glaciaires, nuage), la Terre a un albédo relativement important de 30 à 35%. À titre de comparaison, la lune, par sa surface de roches volcaniques, a un albédo de 7%. L'intervention de l'homme (par exemple, la déforestation à grande échelle) modifie l'albédo de la planète.]

«Les conséquences sur l'Arctique Il y a des endroits dans l'Arctique où la glace a pratiquement disparu pendant les mois d'été. Nous avons trouvé lors d’une expédition plusieurs ours qui avaient succombé à la pénurie de nourriture et la faim. C’est uniquement en changeant notre empreinte de carbone sur cette grande terre, que nous pourrons sauver les ours.»

«Nordauslandet,  Svalbard, Norvège «De grandes chutes d'eau se déversent du cap de glace Nordaustlandet. L'Arctique se réchauffe deux fois plus vite que partout ailleurs sur terre. Cette région normalement couverte de glace toute l'année pourrait devenir complètement libre de glace pendant les mois d'été d’ici dix à vingt ans.»

«La déforestation, la fonte des glaciers et les autres impacts induits par l'homme sur ces écosystèmes aboutiront à la disparition de l'ours. Pendant vingt-mille ans les humains ont co-évolué et cohabité harmonieusement avec les ours. Les ours ont été nos compagnons sauvages les plus constants puisqu'ils partagent les mêmes habitats que nous. C’est seulement au cours des cent dernières années que nous avons déclaré la guerre à l'ours avec l’introduction des armes à feu. Pour trouver un moyen qui permette aux gens et aux ours de coexister en harmonie nous devons rendre explicite que notre destin est fondamentalement relié au destin du monde naturel et des créatures comme les ours.
    Nous avons besoin d'histoires qui nous connectent à nos émotions et nous aident à adopter une identité collective orientée vers l'espoir et la responsabilité. Nous avons besoin d'une histoire dans laquelle nous sommes à la fois des spectateurs et des intervenants clés. C'est l'histoire que j'essaie de raconter; une histoire dans laquelle nous sommes tous responsables des écosystèmes naturels dont nous dépendons et des créatures qui y vivent. J'espère qu'à travers mes images, nous allons commencer à nous rendre compte que les problèmes des ours sont identiques à ceux des gens.
    Quand les ours sont à court d'habitat, cela signifie simplement que nous sommes à court d'habitat. Tandis que les dernières régions sauvages de notre planète, les endroits où les ours se promènent, continuent à disparaître, ainsi en va-t-il du potentiel pour l'homme de profiter des services de l'écosystème que fournit la nature sauvage.
    L'eau que nous buvons, la nourriture que nous mangeons, les fibres dont nous nous vêtons, les carburants qui nous procurent chaleur et fraîcheur et les médicaments qui restaurent notre santé proviennent tous d’un enchevêtrement complexe du vivant. Les arts, les cultures et les religions les loisirs et l’esthétique, aussi – s’inspirent de la nature. Pour moi, les ours sont la représentation vivante de ces écosystèmes et leur sort est lié au nôtre. J'ai eu le privilège de parcourir dans de nombreux sentiers en compagnie de ces magnifiques animaux. Je n'ai pas de relation d'amitié spéciale ou spirituelle avec eux, mais je serai à jamais reconnaissant aux ours qui ont toléré ma présence, m'ont permis de les photographier, et de partager avec moi une petite partie de leur monde.»

Paul Nicklen est un photographe, cinéaste et biologiste marin qui a documenté la beauté et le sort de notre planète depuis plus de vingt ans. En tant que photographe pour le magazine National Geographic, Nicklen capte l'imagination du public. En tant que co-fondateur de l'organisme à but non lucratif, Sea Legacy, il propose une ouverture progressive à la préservation des océans. Sa narration visuelle a inspiré des millions de personnes à se lever et à défendre les endroits menacés par le changement climatique.

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(1) Les émissions de gaz à effet de serre sont à l’origine d’un dérèglement du climat sans précédent et liées pour les trois quarts à la combustion des énergies fossiles.

La Banque Mondiale vient d’annoncer qu’à partir de 2020, elle ne financera plus l’extraction et la production d’énergies fossiles. Eh bien, dites donc, espérons qu'il ne s'agit pas d'une fake news...

Photo : 350.org

Près de 80 économistes de 20 pays appelaient à la «fin des investissements dans les énergies fossiles» dans une déclaration lancée par l’ONG 350.org, publiée avant le Sommet climat qui se déroule à Paris.

Des dirigeants politiques et d’institutions financières participent à ce Sommet climat, consacré au financement des politiques climatiques : «Nous appelons à la fin immédiate de tout investissement dans de nouveaux projets de production et d’infrastructures de combustibles fossiles, et encourageons une hausse significative du financement des énergies renouvelables. Il est temps que l’ensemble des acteurs économiques mondiaux se tourne pleinement vers des énergies renouvelables sûres, et les institutions de développement comme les investisseurs publics et privés ont la responsabilité urgente et l’obligation morale de montrer la voie», ont déclaré les signataires. 

Mais, pendant ce temps-là, nos banques privées et publiques, et même nos caisses d’épargne, continuent de financer le charbon et les parapétrolières. Je pense que c’est dans ce domaine qu’on entend les meilleurs exemples de discours paradoxal en matière de manipulation perverse :
    Le Mouvement Desjardins met fin au moratoire temporaire sur le financement des projets de pipelines et entend maintenir son soutien au projet Trans Mountain, de Kinder Morgan. L’institution dit toutefois vouloir «jouer un rôle proactif face au défi que représentent les changements climatiques», tout en poursuivant ses investissements dans les énergies fossiles. [!!!]
    Desjardins a ainsi annoncé mercredi qu’en vue de futurs investissements dans les secteurs pétroliers et gaziers, des critères seront pris en compte «afin de favoriser une finance qui respecte l’environnement et les collectivités».
    «Desjardins fait preuve d’incohérence, a fait valoir le porte-parole de Greenpeace, Patrick Bonin. En décidant de conserver le prêt de 145 millions de dollars octroyé pour le projet de pipeline de sables bitumineux de Kinder Morgan, le Mouvement Desjardins tourne le dos aux Premières Nations qui s’y opposent, en plus de faire un pied de nez à la lutte contre les changements climatiques.» (Source : Le Devoir, décembre 2017)

Commentaire d’un internaute (Jean-François Mellon, Le Devoir) :
    Le krach boursier
    Toutes les compagnies liées aux énergies fossiles, de l’exploitation au transport en passant par la mise en marché et par l’automobile, vont selon bien des experts subir un krach boursier.
    Cela se produira quand la majorité de la population mondiale, des gouvernements,  des financiers feront une vraie prise de conscience. On s'en va dans le mur à grande vitesse, il faut, quelles que soient les conséquences, arrêter l’exploitation des énergies fossiles. On n’aura pas les moyens de faire une transition, ce sera un krach pour tenter de survivre et de respirer un peu d’air pur (surtout en Chine et en Inde). Des traités coercitifs avec des dents verront le jour. Les mascarades comme l'accord de Paris ne seront plus de mise.
    La question est quand cela va-t-il arriver? Certains parlent de 2021, soit demain matin. Desjardins va se trouver avec des prêts bien mal placés.
    Saluons au Canada les peuples autochtones qui freinent tant qu’ils peuvent Trudeau et les pétrolières.



https://twitter.com/joshfoxfilm 

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