15 avril 2016

Quand ta maison tombe en ruine, tu la quittes.

Le fait que le gouvernement fédéral copie/colle la loi québécoise sur l’aide médicale à mourir, avec ses conditions d’admissibilité étriquées, me révolte. Encore des promesses électorales non tenues en passant. J’en ai marre de ces lois infantilisantes qui font de nous des biens et meubles (propriétés de l’état) incapables de disposer d’un corps qui ne sert plus. Faudra-t-il s’attacher un sac de plastique sur la tête ou se pendre avec une ceinture du haut d’un escalier? Ah, mais, il faudrait en avoir la capacité physique! 
     «T’es complètement déglingué, grabataire? Dommage pour toi, mais tu devras endurer jusqu’à ce que la mort naturelle survienne. C’est la loi.» C’est ça la charité? Les dogmes judéo-chrétiens comme «tu dois souffrir pour payer tes péchés» ont laissé des traces de griffes... C’est comme un tatouage, on vieillit avec, il plisse, c’est moche, mais on ne peut pas l’effacer.

Le trépas vient tout guérir;
Mais ne bougeons d’où nous sommes :  
Plutôt souffrir que mourir,
C'est la devise des hommes.  

~ Jean de La Fontaine (La Mort et le Bûcheron)

Image : «papillon», Fabienne Rivory, Projet Labokoff

Alain Gravel recevait Léa Simard ce matin. Sa mère, Louise Laplante, atteinte de sclérose en plaques, a demandé l’aide médicale à mourir. On a refusé car elle ne répondait pas à l’un des critères de la loi québécoise puisqu’elle n’avait pas reçu un diagnostic de mort imminente (fin de vie). Tout comme M. Jean Brault, elle a dû recourir à la grève de la faim pour mettre fin à ses souffrances.

Le journaliste Patrick Lagacé (La Presse) avait publié deux articles sur ce cas particulier en mars dernier.

Mourir dans l’indignité
http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/patrick-lagace/201603/26/01-4964791-mourir-dans-lindignite.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_meme_auteur_4966942_article_POS4

Mourir dans l’indignité, bis 
http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/patrick-lagace/201603/27/01-4964944-mourir-dans-lindignite-bis.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_vous_suggere_4964791_article_POS1

En complément

LE MINISTRE DE LA SANTÉ (1) 

    Tous les jours, j’entends à la radio des campagnes de dépistage, des statistiques effrayantes. Il faut que j’aille faire des examens, des analyses, des scanners. Il faut que j’en parle à mon médecin, à mon pharmacien, sinon… Sinon, quoi? Je vais mourir?
    Pour ne rien vous cacher, je m’en doutais un peu, c’est une tradition dans la famille. Mon arrière-grand-père est mort, mon grand-père est mort, mon père est mort, je crois que c’est héréditaire. 
    Actuellement, vous me proposez un dépistage du cancer colorectal. Vous m’en parlez tous les jours à la radio. J’ai, comme tout le monde, une trouille panique du cancer. Le colorectal, c’est un nouveau, je n’y pensais pas. Maintenant, grâce à vous, j’y pense. Ça me fait une nouvelle inquiétude. 
    Pour nous rassurer, vous avez choisi une voix féminine minaudante. Elle nous dit que, pris à temps, le colorectal ne tue qu’une personne sur dix. Les neuf autres pourront choisir un autre cancer, il y a l’embarras du choix. 
    Monsieur le ministre, pourquoi me conseillez-vous toujours d’aller parler à mon médecin et à mon pharmacien? Je n’ai rien à leur dire et eux, rarement une histoire amusante à me raconter. Je n’ai surtout pas envie qu’ils m’annoncent une nouvelle pas drôle. Moins je les vois, mieux je me sens. 
    Monsieur le ministre, j’ai peur que vous nous portiez la poisse. 

    Vos messages, je me les mets dans le colorectal.

LE MINISTRE DE LA SANTÉ (2) 

    Monsieur le ministre de la Santé, je viens d’apprendre grâce à un de vos messages qu’il faisait froid dehors, qu’il fallait mettre des vêtements chauds et que le mieux serait de rester à l’intérieur. 
    C’est gentil, Monsieur le ministre, de penser aux vieux, souvent ils n’ont plus leur tête et ils seraient bien capable de sortir dehors torse nu et d’attraper la mort. 
    L’été, quand il fait chaud, vous nous dites qu’il faut boire des boissons fraîches, nous mettre à l’ombre, utiliser un ventilateur, surtout quand on est vieux. C’est gentil, Monsieur le ministre, de penser aux vieux, parce que quand on est vieux, on ne pense plus et on serait bien capable de se mettre torse nu au soleil quand il fait 50 degrés. 
    Vous devriez aussi, Monsieur le ministre, prévenir les vieux quand il pleut, qu’ils ne sortent pas parce qu’ils vont être mouillés, ou alors qu’ils mettent un imperméable et prennent un parapluie, des choses auxquelles on ne penserait pas quand on est vieux. Parce que, quand on est vieux, on ne pense plus. 
    Heureusement vous pensez à nous, vous pensez pour nous. 
    Vous nous rajeunissez, grâce à vous nous nous retrouvons à l’école maternelle. 

    Pourquoi vous nous prenez pour des cons, Monsieur le ministre?

Extrait de
Ça m’agace!
Jean-Louis Fournier
Éditions Anne Carrière; 2012

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