19 octobre 2019

Anxiété électorale : pour qui voter?

Notre mode de scrutin est si étriqué, injuste et stupide qu’il est compréhensible que le tiers des électeurs canadiens s’abstiennent de voter. Les autres jouent à la roulette russe.

Les abstentionnistes se font souvent dire que, s'ils ne votent pas, ils n'ont pas le droit de se plaindre. Que répondez-vous à ça?
   Francis Dupuis-Déry : «Cet argument est fallacieux, car il n'y a aucun lien entre le vote et la liberté d'expression, y compris la liberté de critiquer le gouvernement. Cela dit, je suis d'accord avec l'humoriste irrévérencieux George Carlin : Les abstentionnistes n'ont pas participé à l'élection du gouvernement et nous avons donc le droit de le critiquer, ainsi que l'électorat qui l'a élu. Les électeurs devraient pour leur part s'excuser de l'avoir élu ou d'avoir participé au cirque électoral
   Un argument qui revient souvent, c'est aussi le rappel que des gens sont morts pour le droit de vote...
   Francis Dupuis-Déry : «Oui, dans certains pays. Mais les parlementaires ont aussi fait massacrer bien des gens qui voulaient s'organiser politiquement sans chef et sans Parlement, de manière autonome et égalitaire. Les parlementaires ont aussi ordonné le massacre de milliers de civils, y compris des enfants, lors de guerres menées au nom de la démocratie.»

Article intégral : Ils refusent de voter, et voici pourquoi
Par Thomas Gerbet, 19 octobre 2019

Pour ma part, le temps et l’argent gaspillés pour cette mascarade me scandalisent. Un outrage envers les démunis, et envers la minorité intelligente.

Les Canadiens se prétendent plus intelligents que les Américains (réf. élection de Trump), nous verrons si c’est vrai mardi matin.

Voici un geste qui en dit long sur l’éthique du vertueux catholique Andrew Scheer. Cela s’ajoute à la liste des raisons pour lesquelles plusieurs n’en veulent pas comme premier ministre. Scheer répond rarement par oui ou par non. Si une chose est fausse on le dit; si elle est vraie, on ment avec aplomb comme Trump.


Scheer refuse de confirmer si le PCC a engagé une firme pour salir le parti de Bernier

Le Parti populaire du Canada a déposé une plainte auprès d'Élections Canada.
Le chef conservateur, Andrew Scheer, a refusé à de multiples reprises samedi de dire si son parti a bel et bien engagé une firme de communications politiques pour ternir l’image du Parti populaire (PPC) et de son chef, Maxime Bernier.
   Pressé par les journalistes d'expliquer les circonstances qui ont mené le Parti conservateur à faire appel aux services de l’ancien stratège libéral Warren Kinsella dans la campagne électorale, comme l'ont révélé CBC/Radio-Canada et le Globe and Mail, Andrew Scheer n’a eu qu’une seule réponse : «Notre parti ne fera pas de commentaires sur les contrats qu’on a [conclus] ou non.» Appelé à clarifier pourquoi il refusait de donner plus de détails, le chef conservateur a répété la même phrase, ajoutant qu’il s’agissait «d’un enjeu interne du parti». La veille, un porte-parole du Parti conservateur avait aussi refusé de commenter l'affaire, relayant sensiblement le même message.


“One day you'll realize that the people capable of running the country are too smart to get into politics.” ~ Jim Unger, caricaturiste 

À l’émission Enquête (jeudi 17 octobre 2019) :   

Électeurs sous surveillance
Les partis politiques utilisent nos données numériques personnelles pour nous influencer. Après des semaines de porte-à-porte et d’annonces publicitaires pour tenter d’influencer le vote, les Canadiens feront leur choix lundi. Mais derrière cette campagne sur le terrain se livre une autre bataille loin des yeux des citoyens : la guerre des données. Que savent les partis politiques à votre égard et comment utilisent-ils vos renseignements personnels pour tenter de vous influencer? Pourquoi les partis politiques ne sont-ils pas soumis à une loi pour protéger vos renseignements personnels? Sans doute avez-vous reçu la visite ou l'appel d'un candidat ou de ses représentants. Et de nos jours, c'est plus qu'une démarche de courtoisie comme le démontre le reportage de notre équipe.

Dans le même ordre d’idée :
The Great Hack | Erin Barnett, Karim Amer, Pedro Kos 2019 | 1:53:07 (En anglais)  
The Great Hack est un compte-rendu d’anciens employés de la société Cambridge Analytica qui a utilisé d'énormes quantités de données personnelles extraites de portails tels que Facebook pour manipuler les élections en Inde, au Kenya, à Malte, au Mexique, au Royaume-Uni et aux États-Unis (élection de Donald Trump) au cours de la dernière décennie. Ce documentaire révèle les stratégies frauduleuses de l’entreprise qui existe  toujours mais sous la bannière Emerdata Limited dans le même bureau de Londres.

Anti-avortement 2.0
La nouvelle génération de militants anti-avortement a vraiment compris comment parler aux jeunes. À la grandeur du pays, une nouvelle génération de militants anti-avortement monte aux barricades. Ils sont plus éduqués, mieux outillés et surtout plus stratégiques que leurs prédécesseurs. Ils ne réclament pas la re-criminalisation totale et immédiate de l’avortement. Ils veulent l’éliminer petit à petit, une bouchée à la fois. Le recul de l’avortement dans plusieurs pays d’Europe et aux États-Unis les galvanise. Nous sommes allées à la rencontre de ces militants qui font le pari que les Canadiens sont beaucoup moins pro-choix qu’on ne le pense.

ou

Péril en la demeure : le fanatisme religieux conservateur
Nous n’avons aucune assurance tous risques contre le tsunami chrétien évangélique nord-américain qui traverse notre poreuse frontière, particulièrement dans les provinces de l’Ouest et les Maritimes. Andrew Scheer incarne ces idéologies d’extrême droite. Personne ne croyait que Donald Trump allait emménager à la Maison-Blanche. Et pourtant...


Les fanatiques de RightNow et We Need a Law réveillent la guerrière virtuelle en moi. Prenons le cas d’une fille de 14 ans violée par son père incestueux ou par le pédophile d’à côté, eh bien elle pourrait ne pas avoir droit à l’avortement. En Alabama les interruptions de grossesse ont été presque totalement interdites. En Arkansas, les géniteurs, incluant les violeurs, doivent donner leur permission; s’ils refusent ils peuvent même obtenir la garde de l’enfant. Quelle indécence! Ce coup de poignard asséné aux femmes par le féroce bastion républicain de mâles blancs, chrétiens et misogynes, ne fait que mettre la vie des femmes en péril, car l’interdiction favorisera les avortements clandestins et les auto-avortements.
   Au Canada, l’avortement pour des raisons thérapeutiques fut légalisé en 1969, puis il fut décriminalisé en 1988, et au Québec, il devint accessible gratuitement via le système de santé en 2006. Auparavant, les femmes utilisaient des aiguilles à tricoter ou des cintres, ingéraient des drogues et des produits toxiques pour s’auto-avorter ou allaient voir des charlatans (des bouchers). Quelle que soit la méthode, dans les années 60 l’avortement était la principale cause d’hospitalisation chez les femmes – hémorragies, blessures, empoisonnements, graves infections, etc. En 1962 on a répertorié 57 000 hospitalisations pour cette raison; plusieurs femmes ont même perdu la vie.

Un droit assiégé
Agnès Gruda
La Presse, 13 juillet 2019

Si notre époque nous enseigne quelque chose, c’est qu’il ne faut tenir aucun droit pour acquis.
   Prenez le droit à l’avortement. Aux États-Unis, la question semblait réglée depuis le fameux jugement Roe c. Wade qui a légalisé l’avortement. C’était en 1973 et la question semblait tranchée une fois pour toutes.
   Et pourtant, 46 ans plus tard, le droit pour une femme de mettre un terme à une grossesse non désirée est attaqué de toutes parts. Et cette offensive s’accélère à la vitesse grand V. Depuis le début de l’année, 14 États ont voté des lois limitant l’accès à l’avortement, contre 3 États qui ont adopté des législations protégeant ce droit. Le cas le plus connu est celui de l’Alabama, qui a adopté en mai dernier la loi anti-avortement la plus restrictive aux États-Unis, interdisant la quasi-totalité des interruptions de grossesse, incluant les cas de viol et d’inceste.
   Selon l’institut Guttmacher, qui compile des statistiques sur le contrôle des naissances aux États-Unis, seuls 4 États sur 50 protègent véritablement le droit à l’avortement. Les autres ont introduit toutes sortes de limites légales et administratives qui ont pour effet de rogner l’accès à ce service médical. Contournant ainsi la décision Roe c. Wade dont la pérennité n’est plus assurée, depuis que le président Donald Trump a nommé deux juges conservateurs à la Cour suprême.
   Toute la stratégie des militants anti-avortement passe par une série de grignotages visant, comme cible ultime, le renversement de cet arrêt historique.
   Ailleurs dans le monde, le droit à l’avortement connaît aussi d’importants reculs. Il y a deux ans, le Conseil de l’Europe a tiré la sonnette d’alarme en dénonçant une série de «restrictions rétrogrades» qui font reculer le droit des femmes en matière d’avortement, mais aussi de contraception. Au banc des accusés : la Russie, la Pologne, la Slovaquie, Malte, la Géorgie, l’Arménie et quelques autres.
   Le Canada a légalisé [décriminalisé] l’avortement il y a trois décennies. Les tentatives pour limiter ce droit se sont toutes, depuis, heurtées à un mur. Mais ce n’est pas faute d’essayer. Le discours anti-choix existe bel et bien chez nous aussi, se fraie un chemin et poursuit inlassablement sa quête de légitimation. Notamment chez les conservateurs.
   La ministre de l’Éducation de l’Alberta, Adriana Lagrange, est l’ancienne présidente du mouvement «pro-vie» de Red Deer. Un député conservateur de l’Ontario, Sam Oosterhoff, a participé en mai dernier à la traditionnelle manifestation annuelle de ce mouvement, et y a annoncé son désir de voir l’avortement devenir «impensable» encore de son vivant...
   L’homme est dans la jeune vingtaine, ça nous laisse du temps. N’empêche : le mouvement progresse au sein du Parti conservateur canadien. Selon un décompte de la Coalition pour le droit à l’avortement, 85 % des députés conservateurs qui siègent actuellement aux Communes sont des anti-choix. Pas 40, pas 60, mais 85 %. La très vaste majorité.
   Le discours anti-avortement, faussement revêtu de son étiquette «pro-vie», est de plus en plus décomplexé et son accessibilité sociale augmente, constate la porte-parole francophone de cette coalition, Marianne Labrecque. Elle cite les groupes qui militent pour forcer les jeunes femmes mineures à exiger le consentement parental pour pouvoir mettre un terme à une grossesse. La multiplication d’organismes qui se présentent comme des groupes d’aide aux femmes enceintes, mais qui, en réalité, militent contre le libre-choix. Les nombreux projets de loi privés visant à «donner des droits au fœtus». Ou encore la démarche judiciaire lancée, au Québec, par la Dre Roselyne Lebel pour contester les dispositions légales interdisant aux groupes anti-choix de s’approcher à moins de 50 mètres d’une clinique qui offre des services d’interruption de grossesse. À l’échelle canadienne, un groupe très organisé, RightNow, milite pour faire élire des députés anti-choix au prochain scrutin fédéral, cet automne.
Suite :

Le plus insidieux des Pros

Catherine Éthier / Opinions (La bise)   
Montréal Métro 11 octobre 2019

Virevents et pieds pointés. Au moment où j’écris ces menues lignes, le dernier débat des chefs n’a pas encore eu lieu. Bon, s’imaginer six paninis hurler en même temps pendant deux heures en espérant avoir transmis à l’électorat leur sentiment transi à l’égard du fait que leur adversaire est juste un «gnéseux» n’est pas pure réjouissance.
   Des gens qui hurlent en même temps. Voilà outil qui aide à planter sa graine du 21. Heureusement, HEUREUSEMENT, parfois, certaines bouches s’expriment en un rare solo et nous éclairent sur le nectar d’un candidat.
   J’aimerais m’attarder à M. Scheer, panini conservateur. Lors du dernier face-à-face à TVA, ce bon bougre de monsieur a révélé au monde son exquise capacité à maintenir sourire chérubin qu’importe ce qui sort de sa petite bouche en cœur.

Tout sourire, quels que soient ses états d'âme...

Au-delà de son faciès pur bonheur 24/7, c’est un des souffles ravis qui s’est échappé, de peine et de misère, de la petite bouche de M. Scheer qui m’intéresse, ce souffle discret où il affirma du bout des lèvres avoir toujours été «personnellement pro-vie», parce qu’alléguer être anti-avortement, c’est moins broadcast.
   La jolie nuance.
   Une nuance qui semble tout changer. La force d’un chapelet de mots en habit de Pâques qui espère, dans sa robe à frills, qu’on opinera du canotier en célébrant tout cet espoir et cette pureté baignée de lumière pour le bien commun. Pro-vie.
   Andrew Scheer n’est pas pro-vie. Personne n’est pro-vie. Andrew Scheer est pro-accouchement. Pro-«t’as quelque chose dans le bide? C’est à nous».
   La réflexion s’arrête là.
   Tant que l’enfant conçu sous les cieux de bébé Jésus est arraché du ventre d’une femme par des forceps, tout va.
   Andrew est pro-naissance.
   La vie de l’enfant non désiré, pour des raisons qui appartiennent à chacune, des raisons tragiques, de santé mentale, de trop-plein, de trop-tôt ou de survie personnelle, TOUTES des raisons valides, cette vie, la vie dont il devrait être question, Andrew s’en sacre bien.
   Ce qui arrivera à cet enfant, à cette femme, à cette famille s’il en est une, ça ne taraude pas son sommeil lové dans un oreiller de plumes d’oie aux longs cils.
   La vie brisée d’une femme et son enfant non désiré pour, j’insiste parce que les 40 dernières années ne semblent pas avoir fait vibrer son tympan comme il se doit, DES RAISONS QUI LUI APPARTIENNENT ne sont plus de son ressort une fois le petit wrappé dans un drap de «flanalette» à la pouponnière.
   «Good job», dirait-il, sans daigner croiser le regard de celle qu’on aura forcée à mettre un enfant au monde contre son gré.
   Le mouvement anti-avortement fait du chemin aux États-Unis.
   Il en fait aussi, tout doucement, dans ses chaussures de velours pourpre, au Canada.
   Au Québec. Des groupes anti-avortement comme RightNow s’échinent, au moment où j’écris ces lignes, à faire élire des députés conservateurs «pro-vie», entsoure de la couverte, faisant assidûment résonner leur discours de porte en porte jusque dans les agoras d’écoles secondaires, nombreuses, très enthousiastes.
   Ça se passe en ce moment. Nous ne sommes pas à l’abri. Et c’est chose démesurément terrifiante. L’avortement est un droit de la femme non négociable.

Mon utérus. Ta gueule.

La bise.


Programme Rad Élections 2019

Accès à l'avortement au Canada
Par Marie-Eve Maheu, 25 sept. 2019
Photo : Radio-Canada/Frédéric Lacelle auteur de l'image d'entête

Aucun parti fédéral ne veut rouvrir le débat sur l'avortement. Mais en coulisses, des militants anti-avortement s'organisent pour faire élire des députés qui vont défendre leurs valeurs au Parlement. Marie-Ève Maheu s'intéresse à la stratégie politique de ce mouvement qui se rajeunit et qui s'organise au Canada.

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