31 décembre 2014

BONNE FIN D’ANNÉE

(Fausse science) Comment les dinosaures sont-ils morts? Après avoir mangé tout ce qu’il y avait sur terre, ils se mirent à creuser profond pour trouver de la nourriture. Malheureusement, ils furent piégés dans les trous; voilà pourquoi nous trouvons leurs squelettes dans le sol aujourd’hui.

Au tournant du 3e millénaire, nous croyions naïvement qu’une sorte de grand éveil de conscience collectif nous propulserait sur les rives d’un monde meilleur. Les quatorze dernières années ont été catastrophiques : du barbarisme en quantité astronomique.

Espérons que nous serons suffisamment révulsés par le bilan de 2014 pour sortir du coma – dans 5 minutes ce serait ok :-)  

-- Quelquefois je me demande ce que nous sommes en train d'attendre.
   Silence.
-- Qu'il soit trop tard, Madame.
~ Alessandro Baricco (Océan Mer)

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Il y a deux voies pour le prophète : ou annoncer un avenir conforme au passé, – ou se tromper. ~ Michel Tournier (Des pas sur le sable...) 

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Quel est cet idéal vers lequel la nature s'achemine à travers le temps éternel et les formes infinies? Nous ne sommes pas le terme de son évolution. Ce n'est point pour aboutir à notre misérable humanité qu'elle a pris son élan de si loin. Ô toi qu'elle entrevoit, être futur, songe à nous qui aurons souffert et peiné pour te frayer la voie! ~ Louise Ackermann (Pensées d'une solitaire)

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À la vue d'objets de luxe exposés pour la vente, Socrate s'écriait : "Combien il y a de choses dont je n'ai pas besoin!" 

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Je ne lis jamais le journal. J'ai cessé de lire le journal il y a dix ans. Le jour où les Américains ont laissé tomber une bombe atomique sur la tête des Japonais. Après une bêtise semblable, j'ai résolu que le monde ne valait plus la peine que je m'intéresse à lui. ~ Marcel Dubé (Le temps des lilas)

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[...] en tant que sceptique, je doute de la science, comme du reste, à moins que le savant ne soit lui-même un sceptique. Or peu d'entre eux le sont. La puanteur du formol a peut-être, comme l'odeur de l'encens, le pouvoir de stimuler un esprit porté à l'idolâtrie. ~ Robertson Davies (Les anges rebelles)

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Mais je ne vois pas bien pourquoi les hommes qui croient aux électrons se considèrent comme moins crédules que les hommes qui croient aux anges.
~ George Bernard Shaw (Sainte Jeanne)

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On va à la gloire par le palais, à la fortune par le marché et à la vertu par le désert. ~ Proverbe chinois

Photographe : Rodney Smith

Quand ta maison tombe en ruine, tu la quittes.
Les vieux systèmes dysfonctionnels s’écroulent.
S’y accrocher ne fera que prolonger l’agonie.
Pourquoi renforcer le déni?
Le modèle de comportement humain articulé
sur la peur, la haine, l’appât du gain,
le vol et l’esclavage, fait frémir d’horreur.
Pourquoi copier nos terrifiants et
rétrogrades recueils d’histoire?
Rassemblons nos efforts pour créer
de nouvelles histoires articulées sur
la paix, la coopération et la liberté authentique
Maintenant!

Amusez-vous, même si ce n'est pas très rose en ce moment,
le rire est le meilleur des remèdes
   Boudabla :-)

29 décembre 2014

Prenez un taxi

«Vu que le temps des Fêtes n'est pas terminé, je voudrais partager une expérience personnelle concernant la consommation d’alcool et la conduite automobile.

Comme vous le savez peut-être, certains parmi nous sont connus pour avoir des problèmes avec les autorités de temps en temps en revenant chez eux après une ‘soirée arrosée’.

Ainsi, la semaine dernière, je fêtais avec des amis. J’avais bu des cocktails et plusieurs verres d’excellent vin. Au moment de quitter, me sentant un peu étourdi, je soupçonnais avoir dépassé la limite.

Alors j'ai fait une chose que je n'avais jamais faite auparavant : j'ai pris un taxi pour rentrer chez moi!

Évidemment, sur le chemin du retour il y avait un contrôle policier, mais comme c’était un taxi, ils ont fait signe de passer.

Je suis arrivé chez moi en toute sécurité, sans incident! 

C'était un réel soulagement et une surprise...
parce que je n'avais jamais conduit de taxi de ma vie.

Maintenant, je ne sais même pas où j’ai pris le taxi – il est dans mon garage et je ne sais pas quoi faire avec!»

~ R. Lamèche

Bon ça se veut drôle, mais en réalité c’est dramatique.

Le conducteur de la moto, Alain Morneau, 38 ans, de Québec, avait été arrêté et reconnu coupable à trois reprises** de conduite avec les facultés affaiblies au cours de sa vie. Photo : Erick Labbé, Le Soleil

Partys du Nouvel An : si vous dépassez la mesure, appelez un service de taxi ou un organisme comme Nez Rouge ou trouvez-vous un conducteur sobre. L’alcool, en éliminant les inhibitions, procure un sentiment de fausse confiance/puissance, de sorte que les gens se croient invincibles. Si vos invités en état d’ébriété insistent pour prendre le volant, subtilisez leurs porte-clés ou séquestrez-les s’ils s’entêtent; ils vous en remercieront une fois dégrisés.

Deux exemples à ne pas suivre

Allumez! : les années 50-60 où les gens buvaient même en conduisant leur voiture sont révolues.

1. Le 19 juillet dernier, le chanteur Claude Dubois a été arrêté à Québec avec un taux d'alcoolémie près de deux fois supérieure à la limite permise. Ses deux enfants étaient à bord du véhicule. Le chanteur de 67 ans en sera à sa troisième condamnation** pour conduite avec les facultés affaiblies. 
   Le chanteur plaidera coupable à une accusation de conduite avec les facultés affaiblies. La poursuite et la défense en sont venues à une entente. Son dossier sera inscrit au rôle du palais de justice de St-Jérôme et il devra se présenter pour enregistrer son plaidoyer. Si le juge accepte l'entente, Dubois devra purger 90 jours de prison et il n'aura pas le droit de conduire pendant trois ans. (Huffington Post)

Après 3 condamnations pour conduite en état d’ébriété, à mon avis le conducteur devrait perdre son permis à vie, car c’est un acte de négligence criminelle qu’on pourrait même dire intentionnelle après autant de récidives. De l’inconscience pure : être inconscient, c’est tout simplement ne pas savoir – réaliser – ce qu’on fait, c’est-à-dire être incapable d’évaluer la portée de ses actes. Avons-nous une justice à deux vitesses? Si Claude Dubois était un Monsieur-tout-le-monde, écoperait-il d’une sentence différente?

2. Le 28 déc. 2014 – La chanteuse Marjo a été interceptée par les policiers à Laval, après avoir commis un délit de fuite avec les facultés affaiblies par l'alcool. La porte-parole de la Sûreté du Québec a expliqué que la conductrice est entrée en collision avec une voiture qui circulait devant elle, sur l’autoroute 15 Nord, le jeudi 25 décembre vers 15h15. À la suite de l'impact, l'automobiliste fautive a poursuivi sa route sans s’arrêter. Les policiers l'ont arrêtée quelques minutes plus tard. Personne n'a été blessé. La rockeuse québécoise de 61 ans a été conduite à un poste de police pour être soumise à un alcootest, qu'elle a échoué. Elle a été libérée sous promesse de comparaître. Marjolaine Morin, de son vrai nom, devrait faire face à des accusations de conduite avec les capacités affaiblies et de délit de fuite. (Nouvelles hebdo)

DÉLIT DE FUITE Cette infraction peut entraîner l'emprisonnement pour une durée maximale de cinq ans lorsqu'il s'agit d'un accident n'impliquant aucune blessure physique. La peine varie selon les circonstances. Le juge prononcera une interdiction de conduire, partout au Canada, pour une période maximale de 3 ans. Le juge confisquera le permis et le remettra à la S.A.A.Q. qui, à son tour, le révoquera pour une période obligatoire et minimale de 12 mois dans le cas d'une première suspension, de 36 ou 60 mois selon qu'il existe deux ou plusieurs suspensions à votre dossier au cours des dix années précédentes. Dans tous les cas, la période ne sera pas inférieure à celle que le juge imposera.

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Que dit le Code criminel au sujet de la conduite en état d’ébriété? 

À lire : Conduite avec facultés affaiblies et implications, par Me Boudreau :
http://avocatcriminel.net/2011/09/08/conduite-avec-facultes-affaiblies/

[Extrait]

La conduite avec les facultés affaiblies est une infraction grave. Les conséquences de ce geste sont multiples : amende, perte du permis de conduire, interdiction de conduire, casier judiciaire et même parfois emprisonnement. Peu importe ce que vous avez consommé, drogue ou alcool, si vous n’êtes pas en état de conduire, non seulement vous augmentez le risque d’accident, mais vous risquez de faire face à une accusation criminelle.

Quelles sont les infractions en matière d'alcool et/ou de drogues au volant?

Le Code criminel prévoit deux infractions qui traitent d’alcool et/ou de drogues au volant. 
   Il y a d’abord l’infraction de conduite d’un véhicule avec un taux d’alcool dans le sang supérieur à 80 mg/100 ml de sang. Un conducteur est coupable de cette infraction dès qu’il dépasse ce seuil, même si l’alcool n’affecte en rien sa manière de conduire. (Pour en savoir plus sur cette infraction, consultez notre capsule L’alcool au volant
   Ensuite, il y a l’infraction de conduite avec les facultés affaiblies par l’alcool, une drogue ou une combinaison des deux. 
   Il ne s’agit pas de savoir si un conducteur a consommé beaucoup d’alcool ou de drogues. Il s’agit de déterminer si sa capacité de conduire est diminuée par sa consommation. 
   Ces infractions sont distinctes, mais toutes deux s’appliquent tant à la conduite d’une voiture qu’à la conduite d’un bateau, d’un train, d’une motocyclette ou d’un avion. En pratique, il arrive fréquemment qu’une personne soit accusée à la fois des deux infractions. Le juge ne peut alors condamner la personne que pour une seule des deux.
   Pour les nouveaux conducteurs, le Code de la sécurité routière crée des exigences supplémentaires en matière d’alcool au volant.

Quelles sont les sanctions à une infraction de conduite d’un véhicule à moteur avec facultés affaiblies?

Le Code criminel prévoit les mêmes peines pour toutes les infractions suivantes : conduite d’un véhicule à moteur avec facultés affaiblies, conduite avec taux d’alcool plus élevé que la limite permise et refus de fournir un échantillon de sang ou d’haleine. En cas de condamnation, les circonstances entourant votre conduite, votre interception ou votre refus, vos antécédents et, le cas échéant, le taux d’alcool enregistré sont pris en compte par le juge dans le processus de détermination de la peine.

Les peines minimales prévues au Code criminel

Première infraction : une amende minimale de 1000 $ et une ordonnance d’interdiction de conduire d’une durée de 1 an à 3 ans, en plus de la période d’emprisonnement à laquelle vous pouvez être condamné.

Seconde infraction : un emprisonnement minimal de 30 jours et une période d’interdiction de conduire d’une durée de 2 ans à 5 ans.

** Pour chaque infraction subséquente : un emprisonnement minimal de 120 jours et une période d’interdiction de conduire d’au moins 3 ans.

La peine d’emprisonnement maximale pour toutes ces infractions est de 5 ans. (...)

Suspension de permis

Pour une première condamnation, la suspension dure 1 an.

Dès la deuxième condamnation au cours des 10 années suivantes, la suspension est d’une durée de 3 ans.

** Pour les condamnations suivantes à l’intérieur des 10 ans, la suspension est de 5 ans. Dans tout ces cas, la suspension dure au moins aussi longtemps que l’interdiction de conduire prononcée par le juge.  

23 décembre 2014

2014 : à notre image...

Beaucoup de gaspillage et d’excès pendant les Fêtes dans les pays dits riches où cependant beaucoup de gens crèvent quand même de faim. On en fait trop – trop de cadeaux, trop d’alcool, et trop de bouffe dont on jette les restants aux ordures (1).

Un excellent film d’animation, sans paroles mais très parlant : 
The Hoarder, par Evelyn Lambart
«... The Hoarder raconte l’histoire d’un oiseau gourmand aux prises avec un grave problème de cupidité. ... Le film nous rappelle que le partage est bon et que l’avarice peut engloutir la lumière du monde  ̶  littéralement.»
~ Carolyne Weldon, rédactrice Web et blogueuse ONF.ca

Tout à fait à l'image de notre monde actuel - prédation, prédation, prédation, même si nous avons tout ce qu'il nous faut et plus. 



Le partage

Si l’on ne trouve personne à qui donner dans son entourage, il existe des organismes intègres. 
   Je pense notamment à la Fondation du Dr Gilles Julien : http://fondationdrjulien.org/ 
Vous pouvez donner jusqu’au 15 janvier, cependant, attention aux fraudeurs :
«Nous avons été informés que des gens effectuent du porte-à-porte frauduleusement dans divers quartiers de Montréal. Merci de signaler ces personnes aux autorités policières (911), car ce sont des fraudeurs. La Fondation du Dr Julien ne collecte jamais dans les rues OU aux portes, sauf lors de la Guignolée du Dr Julien (qui a eu lieu le samedi 13 décembre dernier). Soyez vigilants!»
   Pour toute question: Julie Sauvageau (agente au financement) jsauvageau@pediatriesociale.org  ou 514-527-3777 poste 268.

Le bilan

"Alors, Adam – comment te débrouilles-tu
‘au sommet de la chaîne alimentaire’?" 


La paix pourrait commencer dans notre assiette : 

Cartooniste : Dan Piraro

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(1) Extrait du «Dernier texte publié par Kerouac de son vivant, cet article, repris en 1993 dans Good Blonde & others, parut d’abord sous le titre «Après moi, le déluge», en réponse à un questionnaire, dans le Chicago Tribune Magazine du 28 septembre 1969.» 

À quoi suis-je en train de penser?

J’essaie de comprendre où je me situe entre les politiciens établis et les radicaux, les flics et les voyous, les inspecteurs des impôts et les vandales. 
     Je ne suis pas un Exempté de l’Impôt, pas un Hippie-Yippie – je dois être un Bippie-au-Centre. (...) 
     Mais à présent, où dois-je me tourner? Oh, je sais, je vais me diriger vers les «échelons supérieurs» de la Société Américaine, les cheveux bien plaqués en arrière, et essayer d’oublier les équipages des navires de la Seconde Guerre mondiale qui se laissaient pousser la barbe et les cheveux jusqu’à ce que la mission soit terminée, ou l’«air débraillé» de G.I. Joe dans les terriers, ouais, l’«apparence négligée» des hommes et des femmes dans les soupes populaires des années 30, et comprendre que l’apparence fait l’homme, tout comme l’habit fait le moine, et courir à un dîner de gala politicard. Président de la Commission des Finances, Directeurs de la Santé publique, Présidents de Commissions, Directeurs Adjoints de la Planification Régionale, Directeurs des Centres de Voisinage, Présidents-directeurs des Banques, Présidents des Sous-comités de Réinsertion, Planificateurs du Plan d’Occupation des Sols, Membres des Comités d’Éthique, Entrepreneurs de la Commission des Services Publics, Directeurs de l’Administration des Autoroutes, journaleux locaux, porte-paroles, plaideurs, applaudisseurs, assistants et femmes en organdi, 2 500 dollars de nourriture et 5 000 dollars d’alcool et la part du traiteur cadeau, pour un «déjeuner», déductible d’impôts, retransmis à la télévision aux nouvelles du soir dans un spot de 15 secondes pour montrer à quel point ils savent bien faire les choses. À vos frais. 
     Ici chaque poignée de main, chaque sourire, chaque applaudissement foireux rayonne d’hypocrisie, de luxure et de concupiscence politique, un braiment de niais mélodieusement appuyé par un ronronnement neurologique horrible de vénalité accompagné par le chœur d’enclume des couvercles de poubelles cognés sur des filets mignons à peine touchés et qui ne vont même pas aux chiens, encore moins aux enfants affamés des «électeurs» absents. (...) 
     Les invités du banquet, les politicards et leur entourage souriant en robes et costumes scintillants, tous brasseurs de paperasse, ploutocrates flagrants avec pattes de derrière et pattes de devant rassemblées, nouveaux riches de la veille, seraient même encore plus fiers s’ils pouvaient obtenir des «hippies parasites et non productifs» qu’ils travaillent à la construction d’une nouvelle route et fassent la cuisine et la vaisselle à ces galas de bienfaisance de sorte que ces sales paumés puissent au moins faire quelques contributions en liquide ou, mieux, payer des impôts pour permettre aux brasseurs de paperasse de commander plus de papier et de photocopieuses avec lesquels ils pourraient, maintenant exubérants, former une commission de «planification» (pour une durée de trois ans, se consacrant à la pollution, au sexe, choisissez quoi que ce soit de bien sale) tout en s’asseyant et en admirant la vue sur leur pelouse où tous les arbres que seul Dieu peut faire ont été abattus en même temps que les nids des oiseaux.

~ Jack Kerouac, 1969

KEROUAC Sur la route et autres romans 
Éditions QUARTO GALLIMARD; 2003

En lisant ça, je ne peux m’empêcher de penser à l’ex-lieutenant-gouverneur du Québec Lise Thibault dotée d’immunité royale... ainsi qu’à certains élus désormais reconnus pour leurs coûteuses excentricités défrayées par les contribuables. Et, l’on ose nous rebattre les oreilles avec les bienfaits de l’austérité (ou de la rigueur) administrative? Aïe.

22 décembre 2014

Un chat guide et un sauveteur animalier

Parmi mes beaux contes (vrais) de Noël.
Sortez vos mouchoirs si vous aimez les animaux.

** En passant, je supplie les parents de ne pas acheter d’animaux de compagnie comme jouets de Noël à leurs enfants. Les animaux ne sont pas des objets qu’on peut abandonner au bord de la route ou jeter au dépotoir après les Fêtes. Ce sont des êtres vivants qui requièrent des soins, de l’affection et du temps; c’est une responsabilité, il faut être prêt à l’assumer, et il vaut mieux réfléchir sérieusement avant d’adopter. Voyez le libellé "Zoofriendly" à ce sujet car au Québec, nous sommes des champions en abandon animalier. Vous aimerez peut-être aussi :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2013/05/chien-qui-mord-chien-qui-sauve.html
 

Coup de foudre entre un chat errant et un chien aveugle 

Anne, la propriétaire du chien et du chat, raconte que Tervel aurait été projeté contre un mur quand il était petit par les propriétaires d’origine; le fait qu’il soit aveugle et partiellement sourd en était probablement des séquelles. 

Pudditat ne s’entendait pas avec les autres chats du voisinage et les intimidait pour les soumettre. Étrangement il s’est attaché tout de suite à Tervel, un vrai coup de foudre. Il préfère la compagnie de Tervel à celle des chats. 
   «J’ai l’impression que Pudditat savait que Tervel était aveugle et vulnérable parce qu’il s’est collé immédiatement sur lui. Tervel avait l’habitude de rester blotti dans son panier parce que quand il errait dans la maison, il se cognait partout. Mais depuis que Pudditat s’occupe de lui, il a repris confiance et sa vie est plus facile. Pudditat est devenu les yeux et les oreilles de Tervel; pour se déplacer il compte sur Pudditat et se laisse guider. Quand ils vont dehors ensembles, Pudditat ouvre la porte et prend les devants, et Tervel le suit.»

Magnifique, non?! Et puis, cette histoire contribue à démolir le mythe que les chiens et les chats sont des ennemis mortels. Quand un chien et un chat vivent sous le même toit, en général ils apprennent à s’ignorer ou deviennent copains – une amitié prudente, avec quelques réserves certes, mais ils ne se battent pas tel qu’on le dépeint dans les mauvais films pour les enfants. 
 


Le témoignage d’un sauveteur que j’ai publié en anglais l’an passé (je ne me souviens pas sur quel blogue). Trop beau, en voici une traduction maison.


Je suis un sauveteur animalier

Mon travail consiste à aider des créatures de Dieu
Je suis né avec la propension de répondre à leurs besoins
Je prends soin de créatures impuissantes, indésirables, sans-abri,
   sans planifier ni sélectionner
J'ai acheté de la nourriture pour chien avec mes derniers sous
J’ai caressé des têtes minables à main nue
J'ai embrassé des vicieux et des peureux
Je suis tombé en amour des milliers de fois

Et j'ai pleuré dans la fourrure d'un corps inanimé un nombre incalculable de fois
J'ai des amis-animaux et des amis qui ont des amis-animaux
Je n'utilise pas souvent le mot "pet"

Quand je les vois abandonnés sur le bord de la route
Le coeur me fait mal
Je porterai secours à une souris des champs
Et me lierai d’amitié avec un vautour
Je ne connais aucune créature qui soit indigne de mon temps  
Je veux vivre éternellement s’il n'y a pas d’animaux au ciel
Mais je crois qu'il y en a

Pourquoi Dieu ferait-il quelque chose de si parfait et l’abandonnerait?
Certains peuvent penser que nous sommes les maîtres des animaux  
Mais les animaux se sont eux-mêmes déjà maîtrisés
C’est quelque chose que les humains n’ont même pas encore appris
J’ai mal quand je regarde ce monde de guerre et d’abus
Mais, quand un sauveteur fait la manchette ça me donne de l'espoir
   pour l'humanité

Nous sommes une armée paisible, mais déterminée  
Et nous améliorons les choses à chaque jour
Il n'y a rien de plus utile que de réchauffer un orphelin
Rien n’est plus gratifiant que de sauver une vie
Il n’y a pas de plus grande satisfaction que de les regarder s'épanouir
Il n'y a pas de plus grande joie que de voir un bébé jouer
Qui, quelques jours plus tôt, était trop faible pour manger
Par l'amour de ceux que j'ai eu le privilège de sauver
   j'ai été sauvé

Je sais réellement ce qu’est l’amour inconditionnel
Parce que je l'ai vu briller dans les yeux de tant d’animaux,
   et pour si peu
Je suis un sauveteur animalier
Mon travail n'est jamais terminé
Ma maison n’est jamais tranquille
Mon portefeuille est toujours vide
Mais mon coeur est toujours plein

(Auteur non identifié)

Original en anglais : http://www.oksaveadog.org/

21 décembre 2014

Prisonniers d’un style de vie

«Je veux poursuivre PETA et Amnistie Internationale en justice pour «cruauté et souffrance» parce qu’ils m’ont rendue consciente de la cruauté et de la souffrance qu'occasionne mon style de vie.» (Cartooniste : Dan Piraro)

Photo : Robert Skinner (Archives La Presse) 

La nausée du temps des Fêtes
Réjean Bergeron (professeur de philosophie) 
(La Presse) 

Pour le dernier cours de la session avant la période des Fêtes, mes étudiants et moi tentons d’y aller d’une interprétation de l’allégorie de la caverne de Platon.

Vous connaissez peut-être cette histoire : des prisonniers enchaînés dans une caverne depuis leur naissance s’imaginent que les ombres qui apparaissent sur le mur du fond sont le reflet de la réalité. Pourtant, ce qu’ils ignorent, c’est qu’ils sont l’objet d’une incroyable machination!

Plus haut dans la caverne se trouvent des hommes qui s’amusent, à la manière de marionnettistes, à présenter des objets au-dessus d’un muret derrière lequel ils se cachent. Étant donné qu’un feu brûle encore plus haut, ce sont les ombres de ces objets qui sont projetées sur le mur du fond et que les prisonniers prennent pourtant pour la vérité.

Ces prisonniers «nous ressemblent», nous dit Platon. Mais en quoi exactement? En fait, cette allégorie fait référence à notre réalité quotidienne. Nous sommes tous, à des degrés divers, les prisonniers d’une caverne où miroitent mensonges et illusions. Nous croyons être dans le vrai alors que notre vision du monde est construite à partir de préjugés éculés et d’opinions vulgaires. Nous croyons être libres de nos choix alors que nous sommes manipulés par des discours démagogiques et différentes formes de propagande. 

Pour illustrer mon propos, je suggère à mes étudiants de prendre comme exemple ce qui se passe lors de la période des Fêtes. Promenez-vous dans un centre commercial et regardez attentivement autour de vous.

Dans ces espaces souvent souterrains, vous croiserez des hommes de caverne nouveau genre qui se prêtent au culte de la consommation débridée.

Que voulez-vous, les manipulateurs de marionnettes leur ont fait croire que le fait de dépenser et de s’endetter allait les rendre heureux en plus de contribuer à la bonne santé de l’économie, cette nouvelle idole au pied desquelles le citoyen-consommateur aime se prosterner.

Pour ce qui est du soir du réveillon comme tel, il devient de plus en plus difficile d’évoquer «la magie de Noël présente dans le cœur des enfants». Nostalgie tout ça! Ensevelis sous des tonnes de cadeaux fades et sans saveur, bien des enfants finissent eux-mêmes par être traités comme des objets par la machination du temps des fêtes et des parents qui, par mauvaise conscience, tentent de se racheter en misant le tout pour le tout sur l’avoir au détriment de l’être.

DOUBLE DISCOURS

À ce stade-ci, ce qui me lève le cœur, c’est de voir toute cette matière utilisée pour produire ces objets qu’on appelle «cadeaux» et qui se transformeront, à l’ère de l’obsolescence programmée, en déchets toxiques pour la planète.

En fait, ce qui me donne la nausée par-dessus tout, c’est ce double discours que certains citoyens-consommateurs se racontent à eux-mêmes. Le jour, ils peuvent manifester pour la défense des bélugas et la protection de l’environnement tout en se livrant, le soir venu, à leur nouvelle religion qu’est la consommation à outrance sous prétexte que «c’est le temps des Fêtes!» Belle hypocrisie.

Conscient d’avoir été un peu excessif dans mon interprétation de l’allégorie de la caverne, j’ai conclu mon propos, sourire en coin, en informant mes étudiants que j’avais adopté la politique du zéro-cadeau pendant la période des Fêtes, même que cela faisait plus de 10 ans maintenant que je n’avais pas fait de cadeau à ma copine…

Évidemment, un fou rire se fit entendre aussitôt dans ma salle de cours, certains en profitant pour souligner mon petit côté radin. Soyez toutefois assuré que je me suis défendu en leur révélant que ma copine aussi ne faisait plus de cadeau et qu’à ce compte nous en étions quittes…

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Magasiner la conscience en paix
«Ce jupon est fabriqué à partir de coton biologique, ramassé par des esclaves travaillant en plein air.»
Marketing «bonne conscience» au temps de la Guerre de Sécession.
(Cartooniste : Dan Piraro) 

19 décembre 2014

Dépendance et consommation

Qu'est-ce que la dépendance?

What is addiction? Dr. Gabor Maté



“Passion creates, addiction consumes.”
“Not all addictions are rooted in abuse or trauma, but I do believe they can all be traced to painful experience. A hurt is at the centre of all addictive behaviours. It is present in the gambler, the Internet addict, the compulsive shopper and the workaholic. The wound may not be as deep and the ache not as excruciating, and it may even be entirely hidden—but it’s there. As we’ll see, the effects of early stress or adverse experiences directly shape both the psychology and the neurobiology of addiction in the brain.”

«La passion crée, la dépendance consume.»
«Les dépendances ne résultent pas toutes d’un abus ou d’un traumatisme, mais je crois qu'elles peuvent toutes être reliées à une expérience douloureuse. Une blessure au centre de tous les comportements de dépendance. Elle est présente chez le joueur, l'accro à Internet, l'acheteur compulsif et le bourreau de travail. La blessure peut être moins profonde et la souffrance moins insupportable, et elle peut même être entièrement masquée – mais elle est là. Comme nous le verrons, les effets du stress précoce ou les expériences néfastes façonnent directement dans le cerveau la psychologie et la neurobiologie de la dépendance.»

Notre société de consommation nous mène-t-elle au désastre?


Si vous avez une heure, c'est à voir (en anglais aussi...) :
Consumed - Is Our Consumer Culture Leading to Disaster?
https://www.youtube.com/watch?v=bOKl04TWVsU

Born to buy
“We’ve become lost in this modern landscape living to consume. Consumerism isn’t a conspiracy, it is a very much a reflection of human mind and this is why we find it so comforting. When you’ve got an emptiness inside you that is basically insatiable because you never dealt with the real cause of that emptiness and as with any addiction you keep on stuffing that emptiness full of stuff that can’t satisfy you.”

Né pour acheter
«Nous nous sommes perdus dans ce paysage contemporain du ‘vivre pour consommer’. Le consumérisme n'est pas une conspiration, c'est en très grande partie un miroir de l'esprit humain et c'est pourquoi nous le trouvons réconfortant. Si vous ressentez un vide fondamentalement insatiable en vous c’est que n'avez jamais examiné la véritable cause de ce vide et, comme pour n’importe quelle toxicomanie, vous n’arrêtez pas de remplir ce vide avec plein de choses qui ne peuvent pas vous satisfaire.»

Via : http://ioadicaeu.wordpress.com/2014/12/

17 décembre 2014

Enfin une nouvelle réjouissante!

Sentiers du littoral entre Rocher Blanc et Rimouski (Source : «Au gré du marché»)

Est-ce possible?! Espérons que nous pourrons profiter encore longtemps de ces paysages riverains. 

Pas d'exploitation du gaz de schiste au Québec

EXCLUSIF -  Il n'y aura pas d'exploitation du gaz de schiste au Québec, affirme Philippe Couillard dans une entrevue qui sera diffusée ce soir au Téléjournal. Le premier ministre du Québec réagit ainsi au rapport du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) rendu public hier. (...) 
   Le rapport du BAPE sur la fracturation hydraulique, l'exploration et l'exploitation du gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent conclut que rien ne permet d'avancer que le Québec tirerait profit des activités de cette industrie sur son territoire. 
   L'organisme estime que l'industrie ne sera pas rentable au cours des 25 premières années d'exploitation, puisque les coûts qu'elle entraînerait dépasseraient les redevances perçues par Québec. Il note aussi que la fracturation hydraulique entraîne des risques pour l'environnement et pour la sécurité publique. 
   Le BAPE souligne également que le lien de confiance entre la population québécoise et l'industrie est rompu, tout comme celui entre la population et les instances gouvernementales. 
   Le rapport soutient que l'acceptabilité sociale demeure un préalable incontournable en prévision d'une exploitation des gaz de schiste et invite le gouvernement du Québec à définir ce concept flou, qui nuit à l'atteinte de l'objectif. (...)
Source :
http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/politique/2014/12/16/001-couillard-gaz-schiste-bape.shtml

Illustration Thamzmasterpiece 

Néanmoins ce n’est qu’une petite pierre lancée contre le géant.
Il reste les pipelines d’un océan à l’autre et le Plan Nord.

J’entendais un auditeur déclarer à la radio que "les Québécois sont stupides de refuser les projets des entreprises pétrolières, et que de toute façon, il y a déjà des pipelines au fond du fleuve et des containeurs de pétrole qui le parcourent depuis longtemps".

On sait ça, les sous-sols et les fonds marins sont bourrés de polluants cachés, sans parler de la pollution de l’air, invisible (enfin, en certains pays elle très visible...) mais très présente.

Conséquemment, il faut une réduction, non pas une croissance du volume des substances polluantes, en utilisant d’autres méthodes pour produire de l’énergie. 

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Un politicien ne peut faire carrière sans mémoire, car il doit se souvenir de toutes les promesses qu'il lui faut oublier.
~ San-Antonio (Les pensées de San-Antonio)

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Notre monde civilisé n’est qu’une grande mascarade : on y rencontre des chevaliers, des moines, des soldats, des docteurs, des avocats, des prêtres, des philosophes, et que ne rencontre-t-on pas encore? Mais ils ne sont pas ce qu’ils représentent : ce sont de simples masques sous lesquels se cachent la plupart du temps des spéculateurs d’argent  (moneymakers). 

L’égoïsme,  par nature, est sans borne : l’homme n’a qu’un désir absolu, conserver son existence, s’affranchir de toute douleur, même de toute privation; ce qu’il veut, c’est la plus grande somme possible de bien être, c’est la possession de toutes les jouissances qu’il est capable d’imaginer, et qu’il s’ingénie à varier et à développer sans cesse. Tout obstacle qui se dresse entre son égoïsme et ses convoitises excite son humeur, sa colère, sa haine : c’est un ennemi qu’il faut écraser.

~ Arthur Schopenhauer

16 décembre 2014

«Elle est sale. Même propre elle est sale»

Photo: Jacques Nadeau - Le Devoir (1)

Le Mal 
Par Christian Bobin
(L’Inespérée; 1994)

Elle est sale. Même propre elle est sale. 

Elle est couverte d’or et d’excréments, d’enfants et de casseroles. Elle règne partout. Elle est comme une reine grasse et sale qui n’aurait plus rien à gouverner, ayant tout envahi, ayant tout contaminé de sa saleté foncière. Personne ne lui résiste. Elle règne en vertu d’une attirance éternelle vers le bas, vers le noir du temps. Elle est dans les prisons comme un calmant. Elle est en permanence dans certains pavillons d’hôpitaux psychiatriques. C’est dans ces endroits qu’elle est le mieux à sa place : on ne la regarde pas, on ne l’écoute pas, on la laisse radoter dans son coin, on met devant elle ceux dont on ne sait plus quoi faire. Les jours, dans les hôpitaux comme dans les prisons, sont plus longs que des jours. Il faut bien les passer. On lui fait garder les invalides mentaux, les prisonniers et les vieillards dans les maisons de retraite. Elle a infiniment moins de dignité que ces gens-là, assommés par l’âge, blessés par la Loi ou par la nature. Elle se moque parfaitement de cette dignité qui lui manque. Elle se contente de faire son travail. Son travail, c’est salir la douleur qui lui est confiée et tout agglomérer – l’enfance et le malheur, la beauté et le rire, l’intelligence et l’argent – dans un seul bloc vitré gluant.

On appelle ça une fenêtre sur le monde. Mais c’est, plus qu’une fenêtre, le monde en son bloc, le monde dans sa lumière pouilleuse de monde, les détritus du monde versés à chaque seconde sur la moquette du salon. Bien sûr, on peut fouiller. On trouve parfois, surtout dans les petites heures de la nuit, des paroles neuves, des visages frais. Dans les décharges, on met la main sur des trésors. Mais cela ne sert à rien de trier, les poubelles arrivent trop vite, ceux qui les manient sont trop rapides. Ils font pitié, ces gens. Les journalistes de télévision font pitié avec leur manque parfait d’intelligence et de cœur – cette maladie du temps qu’ils ont, héritée du monde des affaires : parlez-moi de Dieu et de votre mère, vous avez une minutes et vingt-sept secondes pour répondre à ma question.

Un ami à vous, un philosophe, passe un jour là-dedans, dans la vitrine souillée d’images. On lui demande de venir pour parler de l’amour, et parce qu’on a peur d’une parole qui pourrait prendre son temps, peur qu’il n’arrive quelque chose, parce qu’il faut à tout prix qu’il ne se passe rien que de confus et de désespérant – c’est-à-dire moins que rien –, en raison de cette peur on invite également vingt personnes, spécialistes de ceci, expertes en cela, vingt personnes soit trois minutes la personne. La vulgarité, on dit aux enfants qu’elle est dans les mots. La vraie vulgarité de ce monde est dans le temps, dans l’incapacité de dépenser le temps autrement que comme des sous, vite, vite, aller d’une catastrophe aux chiffres du tiercé, vite glisser sur des tonnes d’argent et d’inintelligence profonde de la vie, de ce qu’est la vie dans sa magie souffrante, vite aller à l’heure suivante et que surtout rien n’arrive, aucune parole juste, aucun étonnement pur. Et votre ami, après l’émission, il s’inquiète un peu, quand même, pourquoi cette haine de la pensée, cette manie de tout hacher menu, et la réalisatrice lui fait cette réponse, magnifique : je suis d’accord avec vous mais il vaut mieux que je sois là, si d’autres étaient à ma place, ce serait pire.

Cette parole vous fait penser aux dignitaires de l’État français durant la Seconde Guerre mondiale, à cette légitimité que se donnaient les vertueux fonctionnaires du mal : il fallait bien prendre en charge la déportation des Juifs de France, cela nous a permis d’en sauver quelques-uns. Même abjection, même collaboration aux forces du monde qui ruinent le monde, même défaut absolu de bon sens : il y a des places qu’il faut laisser désertes. Il y a des actes qu’on ne peut faire sans aussitôt être défait par eux. La télévision, contrairement à ce qu’elle dit d’elle-même, ne donne aucune nouvelle du monde. La télévision, c’est le monde qui s’effondre sur le monde, une brute geignarde et avinée, incapable de donner une seule nouvelle claire, compréhensible.

La télévision c’est le monde à temps plein, à ras bord de souffrance, impossible à voir dans ces conditions, impossible à entendre. Tu es là, dans ton fauteuil ou devant ton assiette, et on te balance un cadavre suivi du but d’un footballeur, et on vous abandonne tous les trois, la nudité du mort, le rire du joueur et ta vie à toi, déjà si obscure, on vous laisse chacun à un bout du monde, séparés d’avoir été aussi brutalement mis en rapport – un mort qui n’en finit plus de mourir, un joueur qui n’en finit plus de lever les bras, et toi qui n’en finis pas de chercher le sens de tout ça, on est déjà à autre chose, dépression sur la Bretagne, accalmie sur la Corse. Alors. Alors qu’est-ce qu’il faut faire avec la vieille gorgée d’images, torchée de sous? Rien. Il ne faut rien faire. Elle est là, de plus en plus folle, malade à l’idée qu’un jour elle pourrait ne plus séduire. Elle est là et elle n’en bougera plus. Un monde sans images est désormais impensable. Il y aura toujours des jeunes gens dynamiques pour la servir, pour faire la sale besogne à ta place, à la place de tous les autres, au nom de tous les autres.

Je distrais, dit la télévision, et elle ne fait plus rire depuis longtemps. On ne peut pas faire de la culture pour tout le monde, dit la télévision, et on n’ose pas lui répondre que ce n’est pas un problème de culture mais d’intelligence, ce qui n’est pas du tout du même ordre. L’intelligence n’est pas affaire de diplômes. Elle peut aller avec mais ce n’est pas son élément premier. L’intelligence est la force, solitaire, d’extraire du chaos de sa propre vie la poignée de lumière suffisante pour éclairer un peu plus loin que soi – vers l’autre là-bas, comme nous égaré dans le noir. Je donne dans le sentiment, dit la télévision, et on n’a pas le courage de lui montrer l’abîme qu’il y a, entre le sentiment et la sensiblerie. C’est pas moi, dit la télévision à bout de course, c’est le peuple, je fais ce que veut le peuple – et il n’y a plus qu’à se taire devant l’analphabétisme grave de la télévision et de ceux qui la font.

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Article complémentaire :
http://www.mediaculture.fr/2011/03/01/medias-information-sale-temps-pour-la-complexite/

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Extrêmement désolant. J’ai envoyé mon téléviseur au recyclage, et je crois que je vais faire la même chose avec l’appareil radio. Pas plus tard que ce matin, durant une émission d’information générale, on parlait de la tuerie survenue au Pakistan. Le reporteur avait à peine dit son dernier mot, qu’on a embrayé avec la confection des bûches de Noël ou quelque chose d’aussi superficiel. Odieux. On nous prend pour des abrutis.

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(1) Guide médias 2014
La génération branchée, blanche et grise
Le retraité québécois est rivé aux médias plus de dix heures par jour
Par Stéphane Baillargeon (Le Devoir) 

La boulimie de télévision atteint son paroxysme après la cinquantaine, et surtout après 65 ans.

«Le Québécois francophone regarde la télévision plus de 34 heures en moyenne par semaine. On répète : près de 35 heures, l’équivalent de cinq journées pleines de travail. ...»

Moyenne pour toutes les catégories d’âge je suppose.

«Les enfants, les ados et les nouveaux adultes s’avèrent les moins téléphages : entre deux et vingt-quatre ans, les jeunes passent 23 heures hebdomadaires rivés au vieil écran. ...»  

Mais, la dépendance croît avec l’âge :

«Passé l’âge de la retraite, les vieux regardent la télévision pendant un total hebdomadaire de 53,45 heures. ...» 

«Sans compter la radio – La radio, elle aussi, joue beaucoup. Il faut encore ajouter 24 heures hebdomadaires d’écoute de bande AM ou FM en moyenne pour les aînés de 65 ans et plus. ...» 

«Et il n’y a pas que ça. Les plus vieux (55 ans et plus) se révèlent plus présents sur Internet que les plus jeunes (moins de 34 ans). Ils consultent même deux fois plus les réseaux sociaux que les jeunes adultes, à hauteur de 20,5 % par rapport à 10,8 %. La véritable génération branchée est blanche et grise, un point c’est tout. ...» 

Article complet :
http://www.ledevoir.com/societe/medias/388112/la-generation-branchee-blanche-et-grise

PAR CONTRE
Les «vieux» (l'expression a un côté "p'tite Madame, p'tit Monsieur" dénigrateur) ne sont pas tous des téléphages chroniques et certains demeurent très actifs et créatifs en dépit de leur âge. L’important c’est d’être heureux dans ce qu’on choisit... si c’est la télé, qu’il en soit ainsi.

Donc, remettons les pendules à l'heure :
- Goethe a composé Faust à 82 ans…
- Le Titien peignait encore des chefs d’oeuvre à 98 ans…
- Toscanini dirigeait des orchestres à 87 ans…
- Pablo Picasso se remariait encore une fois à 80 ans...  
- Edison travaillait toujours dans son laboratoire à 83 ans…
- Benjamin Franklin a contribué à rédiger la Constitution des États-Unis à 81 ans…
- Le vénézuélien Jacinto Convit contribue à la création d’un vaccin contre le cancer à 96 ans...

13 décembre 2014

Du respect de soi à l’art de refuser

Ce dont nous avons besoin en ce moment c’est d’augmenter notre consommation.

Peut-être que plus d’amour, moins de stuff, et plus d’authenticité nous rendraient plus heureux.

Beaucoup de gens utilisent le chantage émotif durant la période des Fêtes pour extorquer des OUIs à leurs invitations. Le sujet peut sembler trivial, mais combien de frustrations et de conflits éviterions-nous si nous suivions notre intuition ou nos valeurs personnelles (profondes).

Quelques repères si vous avez de la difficulté à dire NON :

- Nous croyons que «faire ce que les autres nous demandent» nous vaudra acception, amour et récompense.

- Dire OUI quand on pense NON fait naître de la frustration, du ressentiment et une colère sournoise souvent dirigée contre soi.

- Ne soyez pas un béni-non-non systématique, mais encore moins un béni-oui-oui. Vous avez le droit de choisir, de dire NON et d’agir à votre gré sans vous sentir coupable.

- Assumez la contrariété, la mauvaise humeur, la colère et le rejet des manipulateurs –  que leurs motifs soient raisonnables, bien intentionnés ou non.

- Ne répondez pas OUI comme un automate. Si vous hésitez, vous avez le droit de prendre du temps pour réfléchir. Vous éviterez l’horrible désistement suivant le OUI impulsif. La pression fait partie des tactiques d’extorsion du consentement.

- Précéder le NON d’un je suis désolée, mais… ou c’est dommage, mais... font en sorte que l’autre utilise votre sentiment de culpabilité à son avantage pour vous faire céder. En réalité, ne pas vouloir faire quelque chose est en soi la seule et unique justification raisonnable.

- Étant donné que nous vivons dans une société de «récompenses», demandez-vous avant de dire OUI si la récompense vaut l’effort.

- Évitez le NOUI, dites un vrai NON ou un vrai OUI.

~ Extraits de : http://situationplanetaire.blogspot.ca/2011/01/noui.html

Voyez aussi : http://situationplanetaire.blogspot.ca/2013/01/lart-de-refuser.html

Quelques repères supplémentaires – ce texte fut attribué par erreur à Meryl Streep car elle l’avait cité, affirmant qu’elle vivait selon ces principes.

Je n’ai plus de patience
Par José Micard Teixeira

Je n’ai plus de patience pour certaines choses, non pas parce que suis devenu arrogant, mais tout simplement parce que je suis arrivé à un point de ma vie où je ne veux pas perdre plus de temps avec ce qui me déplaît ou me blesse.

Je n’ai aucune patience pour le cynisme, la critique excessive et les exigences de toutes natures. Je ne m’efforce plus de plaire à ceux qui ne m’aiment pas, d’aimer ceux qui ne m’aiment pas et de sourire à ceux qui ne veulent pas me sourire.

Je n’accorde plus une seule minute à ceux qui mentent ou veulent manipuler. J’ai décidé de ne pas coexister avec la prétention, l’hypocrisie, la malhonnêteté et la louange mesquine. Je ne tolère pas l’érudition sélective ni l’arrogance académique. Je ne tolère pas davantage le commérage populaire. Je déteste le conflit et les comparaisons. Je crois à un monde de contraires et c’est pourquoi j’évite les gens dont la personnalité est rigide et inflexible.

En amitié, je n’aime pas le manque de loyauté ni la trahison. Je ne m’entends pas bien avec ceux qui ne savent pas offrir un compliment ou un mot d’encouragement. Les exagérations m’ennuient, et j’ai du mal à accepter ceux qui n’aiment pas les animaux. Et par dessus tout, je n’ai aucune patience pour quiconque ne mérite pas ma patience.

11 décembre 2014

Les secrets des services

Un homme t'a confié son secret, et tu crois qu'il est honnête, juste et poli de lui confier aussi le tien. Tu es un étourdi, un sot. Souviens-toi de ce que tu as vu pratiquer si souvent. Un soldat, en habit bourgeois, va s'asseoir près d'un citoyen, et, après quelques propos, il se met à dire du mal de César. Le citoyen, gagné par cette franchise, et croyant avoir le secret du soldat pour gage de sa fidélité, lui ouvre son coeur et se plaint du prince, et le soldat, se montrant ce qu'il est, le traîne en prison. Voilà ce qui arrive tous les jours. Celui qui t'a confié son secret n'a souvent que le masque et l'habit d'un honnête homme. D'ailleurs ce n'est point confiance, c'est intempérance de langue; ce qu'il te dit à l'oreille, il le dit à tous les passants. C'est un tonneau percé, il ne gardera pas plus ton secret qu'il n'a gardé le sien propre.

~ Épictète (Entretiens)

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[...] lorsqu'on peut tout savoir, il faut savoir aussi tout taire.

Ah! qu'une prison est quelque chose d'infâme! Il y a un venin qui y salit tout. Tout s'y flétrit, même la chanson d'une fille de quinze ans! Vous y trouvez un oiseau, il a de la boue sur son aile; vous y cueillez une jolie fleur; vous la respirez : elle pue. (Le dernier jour d'un condamné)

~ Victor Hugo 

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Shame on our opponents for using the same despicable methods we ourselves have always used when necessary.
[Honte à nos opposants qui utilisent les méthodes ignobles que nous-mêmes avons toujours utilisées quand c’est nécessaire.]

In today’s world, the only way to stay sane may be to change the definition of sanity.
[Dans notre monde actuel, pour être sain d’esprit il faudrait peut-être changer la définition de santé mentale.]

~ Ashleigh Brilliant (I try to take one day at a time, but sometimes several days attack me at once; Woodbridge Press, 1998)

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La terre n’est pas cruelle, ce sont les hommes qui sont cruels.

Il est invraisemblable qu’en 2014 on espère encore extorquer des secrets ou des vérités par la torture – le prisonnier inventera n’importe quoi ou dira ce que le bourreau veut entendre juste pour faire cesser la souffrance.

Une preuve de plus que l’espèce humaine n'évolue pas (globalement s'entend).

Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. (Article 5 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée par l’assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948 à Paris)


iStockphoto.com/ Ryan Klos -- The UN's International Day in Support of Victims of Torture serves as a reminder to people that human torture is a crime.

8 décembre 2014

Dieu merci, ce n’est pas moi…


Autodéfense ou flèches? Aucune échappatoire possible contre des armes à feu...

En août dernier j’ai mentionné l’édition 2014 de Poésie, sandwichs et autres soirs qui penchent (spectacle réalisé par Loui Mauffette). À l’émission Médium large Loui Mauffette, Kathleen Fortin et Maxime Dénommée ont lu un poème de l’édition 2012 – que j’ai osé transcrire et publier dans L’art est dans tout pour les gens qui n'ont pas accès à l’Audio fil : http://ici.radio-canada.ca/emissions/medium_large/2014-2015/  

Je republie ici ce poème d’une vérité poignante en guise de transition, parce qu’après avoir revu le film Polytechnique de Denis Villeneuve  en fin de semaine, je me sens incapable de passer sans façon à des sujets triviaux. Par ailleurs, en le revoyant, je me disais que des drames aussi horrifiants font partie du quotidien des femmes, des enfants et des hommes en plusieurs pays du monde.

DIEU MERCI, CE N’EST PAS MOI
Par Evelyne de la Chenelière*

Laissez-moi vous parler d’un cœur
qui souffre d’avoir perdu Dieu
errant sans fin dans la nuit, sans espoir
Ici, à la lisière, il n’y a pas d’étoiles, 
ici, nous sommes raides, immaculés

Sans croire en Dieu parfois nous pensons 
Dieu merci, ce n’est pas moi 

Dieu merci, ce n’est pas moi
Ce n’est pas moi qui ai perdu mon enfant
dans une crevasse, une avalanche, une tuerie, une rivière
Ce n’est pas moi le corps tordu dans la voiture accidentée
Dieu merci, ah… ce n’est pas moi

Nous pensons Dieu merci, ce n’est pas moi
le sans-abri, le sans-papiers, le sans-emploi,
le sang contaminé, les dents qui tombent,
les os qui brisent à la moindre chute
ce n’est pas moi la droguée, le vieux, la folle!

Ce n’est pas moi en République centrafricaine, en Ukraine, à Gaza, 
Dieu merci, ce n’est pas moi
Ce n’est pas moi qui ai des mouches plein les yeux,
qui ai les membres arrachés, des sœurs kamikazes,
des frères pendus par les pieds, des enfants-soldats
Ce n’est pas moi!

Nous pensons Dieu merci, ce n’est pas moi
qui ai reçu une balle perdue comme une giclée de rage
Dieu merci, ce n’est pas moi qu’on voile,
qu’on excise, qu’on viole, qu’on vend
Dieu merci, ce n’est pas moi!

Ce n’est pas moi non plus
la starlette sur laquelle on éjacule et qui vieillira pourtant
Le désir des autres n’est pas un bain de jouvence
et les plus belles tomberont avec leur chair molle
Dieu merci, ce ne sera pas moi!

Ce n’est pas moi, je ne peux rien
Je ne peux rien pour les miséreux, les pauvres,
les damnés, les malades
Adressez-vous aux puissants du monde
je ne peux pas vous sauver la vie
ce n’est pas moi qui vous sauverai la vie
Pour commencer, cessez de crier, taisez-vous donc!
Ah… Dieu merci, ce n’est pas moi

Ce n’est pas moi qui appellerai, éperdu, 
la clémence, l’absolution
À l’heure de ma mort on ne dira pas de moi
«Dieu merci, il est mort»
«Dieu merci, enfin, elle est morte»
On ne souillera pas ma dépouille
on ne profanera pas ma tombe

Sans croire, nous disons
Dieu merci, ce n’est pas moi
qui brûlerai dans les flammes éternelles
de ton enfer
Dieu merci, ce n’est pas moi…

D’ailleurs nous pensons
Dieu merci, je ne mourrai pas

Après, nous replions le journal
nous fermons la télévision
nous fermons tous nos sens brûlés
et les livres d’histoire

Nous tordons nos mains
dans une prière difforme
et nous pensons
Dieu merci, ce n’est pas moi

* Evelyne de la Chenelière, comédienne et dramaturge : le film Monsieur Lazhar (écrit et réalisé par Philippe Falardeau) est une adaptation de sa pièce Bashir Lazhar.

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COMMENTAIRES

1. Je veux souligner la façon dont Denis Villeneuve a choisi de présenter le drame : avec pudeur et grand respect.

2. Des fois je suis vraiment écoeurée de la situation planétaire, et de mon blogue du même nom. Il me semble avoir couvert la plupart des questions critiques, et je ne vois pas l’utilité de continuer à répéter comme un vieux disque rayé. Alors, je songe à le recycler en 2015 : peut-être en site de recettes culinaires, de décoration, d’artisanat ou de jardinage... Je réfléchis fort.

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Pensée du jour :
«Toute notre vie, on dit autre chose que ce qu’on pense.»
~ Manesquier (Jean Rochefort), film L’homme du train