9 mars 2012

Impact social de la créativité

J’écoutais Brice Lalonde* en interview à l’émission «Les années lumière» : http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2012/CBF/LesAnneeslumiere201203041305_1.asx )  

Photo : http://www.photo-libre.fr/
Il disait entre autres (non textuel) :
Personne ne s’occupe de la planète, des biens communs comme les océans par exemple… On ne s’inquiète que du PIB ou du PNB. Détruire la forêt fait grimper le PNB. Mais, sans abeilles, pas de pollinisation. Sans pollinisation, pas d’arbres fruitiers. Le rôle du ver de terre est primordial. Comment allons-nous comptabiliser les services rendus par les abeilles et les vers de terre? Il faut créer une nouvelle économie qui tient compte de la planète, des océans, de l’agriculture, non pas seulement des intérêts socioéconomiques nationaux et internationaux. La raison et l’intérêt commun ne guident pas la politique, et il y a des vendeurs de sable bitumineux et de charbon qui ne veulent pas lâcher le morceau. Et souvent ce sont ces intérêts contraires à la préservation de la planète qui soutiennent les gouvernements. Pourtant il existe des inventeurs très imaginatifs qui se démènent pour créer des alternatives basées sur le développement durable. Le problème c’est qu’ils ne sont pas appuyés par les diplomates ni soutenus financièrement pour développer leurs projets. 

* Écologiste de la première heure, Brice Lalonde a été ministre de l'Environnement et ambassadeur chargé des négociations climatiques en France. Il convie maintenant les gouvernements de la planète au Sommet de la Terre Rio +20 qui, en juin prochain, devra formuler les nouveaux devoirs de chacun pour assurer notre avenir. – R.C.

***

Récemment, je ressentais un urgent besoin de revenir à l’art-thérapie, et j’ai relu Le journal créatif d’Anne-Marie Jobin* pour me donner un coup d’envoi.

J’ai spontanément associé les propos de Brice Lalonde au chapitre que je venais de lire – un superbe plaidoyer en faveur de l’introspection créative qui agit positivement non seulement sur notre entourage immédiat mais aussi globalement sur notre société.

(J’ai marqué en gras certaines réflexions qui me paraissent fondamentales)

Chapitre 6
Journal créatif et communauté

Nous vivons dans une période où beaucoup s’inquiètent de l’état de nos communautés et de la planète. On m’a parfois demandé comment cet acte solitaire d’introspection par le journal créatif pouvait avoir un impact sur la collectivité, pouvait améliorer la situation sociale et la condition de la planète. En effet, on peut passer des années à explorer sa vie intérieure en vase clos, sans jamais vraiment déboucher sur la communauté. Pourtant, avec le temps et les observations que j’ai faites, j’ai acquis la certitude de la valeur sociale de pratiques telles que celle du journal.

J’ai d’abord observé l’effet de la pratique du journal créatif sur moi-même, puis sur les participants à mes ateliers. En ce qui me concerne, cette pratique m’a indéniablement menée à contribuer à ma communauté parce qu’elle m’a aidée à me centrer et à trouver comment articuler ce qui me passionne en activités concrètes qui sont graduellement devenues mon travail. Mon travail n’est donc plus seulement une façon de gagner de l’argent pour régler mes factures, mais plutôt une traduction de mes passions en activités dans la communauté. En d’autres mots, mon implication sociale s’est grandement accrue depuis que mes activités reflètent davantage ce qui me tient vraiment à cœur.

J’ai eu aussi de fréquents témoignages de participants à mes ateliers qui disaient avoir réussi à dépasser une difficulté personnelle, à mener à bien un projet, à découvrir de nouvelles passions, à s’affirmer davantage. Par exemple, une participante très timide de prime abord arrive à s’ouvrir davantage au fil des semaines et témoigne d’un changement radical dans ses relations familiales; une autre écrit un récit sur sa vie où elle révèle un grand secret douloureux qu’elle n’avait jamais partagé et en fait la lecture lors d’un évènement public devant plus de 200 personnes – elle rapporte que cette lecture a marqué un grand pas dans sa guérison personnelle.

Comment ces petites victoires personnelles ont-elles une influence positive sur la communauté? L’équation est simple : l’estime de soi mène au pouvoir personnel qui à son tour mène à l’action. En effet, quand une personne croit qu’elle a de la valeur et que sa vie a de l’importance, elle va naturellement tendre à nourrir sa vie et non pas à la détruire. Elle ne laissera personne abuser d’elle. Elle protègera ce qui a de l’importance à ses yeux et se lèvera pour défendre ses enfants et dénoncer ce qui va à l’encontre de ce en quoi elle croit. Un simple pas vers plus de respect de soi peut avoir un impact sur la communauté parce que guérir nos cœurs est un travail de base qui affecte automatiquement le tissu social. Quand nous sentons la valeur de ce que nous apportons, notre conscience personnelle s’étend tout naturellement au monde qui nous entoure.

Le journal créatif est un outil puissant de prise décision et de clarté intérieure. Pour moi il est évident que plus les individus qui composent le tissu social seront solides dans ce qu’ils sont et en contact avec la source de vie, plus ils choisiront la vie et la respecteront. Ils se traiteront donc eux-mêmes, les autres, toutes les créatures vivantes ainsi que la terre, avec plus de respect et de révérence. Ils s’impliqueront positivement dans la communauté et seront des citoyens plus créatifs, vivants et inspirants pour les autres.

J’ai choisi pour terminer de vous présenter un exemple très frappant du lien entre le processus créateur et l’action sociale. En janvier 1991, Nathalie Roggers (The Creative Connection, Science and Behavior Books, 1993), une psychothérapeute américaine, participait à un atelier de fin de semaine sur le mouvement authentique, une approche où l’on crée spontanément des mouvements selon nos impulsions intérieures. C’était le temps de la guerre du Golfe, et elle s’était sentie anxieuse et impuissante toute la semaine, pensant à la violence qui rageait à l’autre bout du monde et à l’implication politique de son pays dans ce conflit. À travers le mouvement authentique, elle sent tout l’impact des images vues au cours de la semaine sur son corps et elle tente de l’exprimer. La nuit suivante elle n’arrive pas à dormir et soudainement, elle qui n’écrit jamais de poésie, elle sent un long poème sortir d’elle-même. C’est un message contre la guerre très puissant et émotif. Elle l’écrit et le jour suivant le lit à son groupe. Tous l’encouragent à le faire lire sur les ondes et à l’envoyer aux leadeurs politiques, ce qu’elle fait dès son retour chez elle. Son poème est lu en ondes plusieurs fois et envoyé à 35 leadeurs politiques, leur demandant d’agir.

Dans cet exemple, il est clair que c’est le processus créateur, et non une décision rationnelle, qui a mené à une action sociale. Le processus créateur passe par l’expérimentation, le jeu des idées et des formes, le contact avec l’intuition et les profondeurs, avec le mystère et l’inconnu. La créativité et l’expression de soi entrainent donc une façon de penser plus indépendante et spontanée, et ainsi génèrent des citoyens moins conformistes et plus inventifs. La créativité est le contraire du conformisme et elle fait peur à beaucoup d’entre nous parce qu’elle questionne et bouscule, affirme la différence et le droit d’être soi. À l’extrême, nous voyons l’exemple des dictatures qui s’évertuent à écraser toute manifestation de pensée libre ou créative pour s’assurer un conformisme de masse qui leur permet de conserver le pouvoir. Selon moi il est urgent d’être plus créatifs et moins conformistes. Il est urgent de suivre notre cœur, nos appels, notre vie. Il est urgent de créer sa vie plutôt que de suivre des modèles, des rôles préassignés. Diriger sa quête personnelle vers le monde est nécessaire, parce que la terre a besoin de gens plus éveillés, plus créateurs, plus vivants.

Nous ne sommes pas séparés de la communauté dans laquelle nous vivons. Nous ne sommes pas séparés des plantes et des animaux avec qui nous partageons la planète. Nous avons la responsabilité d’être plus en vie et de promouvoir la vie. Ce sont nos blessures et notre ignorance qui nous mènent vers des mauvais choix pour nous, les autres ou la terre. C’est pourquoi prendre soin de soi est nécessaire. Nous sommes tous liés, interreliés. Ce qui arrive à la planète est un reflet de ce qui nous arrive individuellement. De là l’urgence de se réveiller et de donner de la grandeur à nos propres vies. Non pas une fausse grandeur basée sur nos souffrances mais fondée plutôt sur la reconnaissance de notre valeur et de notre pouvoir de contribuer positivement au monde que nous habitons.

Le nouveau journal créatif :
Ce livre est une invitation à aller à la rencontre de Soi par l'écriture, le dessin et le collage. Refonte complète du livre "Le journal créatif" paru en 2002 (50 pages de plus, avec nouvelles techniques et nouveaux exercices), il présente en détails la méthode et compte quatre grandes parties : les réflexions (bases théoriques et caractéristiques de l'outil); la pratique (ingrédients de base, voies d'accès, exploration des créations, obstacles); les techniques (écriture, dessin et collage); et de multiples exercices pratiques (histoire de vie, stress, santé, émotions, projets, sexualité, spiritualité, crises de vie, etc.). Éditions le Jour, 312 pages, 2010. Disponible chez tous les libraires, incluant en Europe.

Nouveauté à paraitre à l'automne 2012 :
Le journal créatif zen

Ateliers et formation d’animateurs :
À l’École le Jet d’Ancre, Granby QC; et également en Europe

Site :
http://annemariejobin.net/index.php

COMMENTAIRE :

De par mon expérience, je peux confirmer que ce qu’elle dit à propos du journal créatif se vérifie facilement… Si vous n’êtes pas prêt à débloquer le côté dessin, commencez par écrire trois pages de journal à chaque matin... et attendez-vous à d'étonnantes découvertes.

Vous aimerez peut-être :
http://situationplanetaire.blogspot.com/2010/12/intuition-1.html

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