Très
rare que je cite les rédacteurs des évangiles, mais là, avec toutes les
allégations criminelles qui pèsent contre Trump*...
«Tu
vois la paille dans l'oeil de l'autre
mais tu ne vois pas la poutre dans ton œil. Homme au jugement perverti
[hypocrite], ôte d'abord la poutre de ton oeil, et alors tu verras clair pour
ôter la paille de l'oeil de ton frère.»
Intéressant
l’équivalent turc :
Le
serpent, ignorant sa propre sinuosité, dit au chameau que son cou est sinueux.
Je
me demande combien coûterait un mur de LEGO pour stopper les immigrants à la frontière. C’est résistant et ça permettrait à l’industrie pétrochimique d’écouler
ses surplus de plastique. Un mur pour l’éternité, en souvenir du promoteur
immobilier mégalomane.
~~~
* Pierre
Martin, professeur de science politique à l’Université de Montréal et directeur
de la Chaire d’études politiques et économiques américaines au CÉRIUM, a «constitué
un petit catalogue de scandales» ternissant l’aura de Donald Trump. (Journal de
Montréal, 19.12.2018)
Toutes
les entreprises ou organisations qui ont porté son nom au cours de la dernière
décennie sont soit sous enquête, sous le coup de poursuites civiles, ou ont
déjà donné lieu à des mises en accusation criminelles, des condamnations ou des
peines de prison. Un article récent de Garrett Graff du site Wired identifie 17
enquêtes simultanées, réparties entre cinq entités. Ci-dessous, mon résumé de
ce catalogue de scandales auxquels d'autres viennent s'ajouter à la fin. Plusieurs
de ces scandales, pris individuellement, suffiraient à mettre fin à la carrière
de tout politicien normal, mais dans le cas de Donald Trump, il semble que la
quantité invraisemblable de scandales qui l'entourent fait en sorte qu'on ne
les voit plus. Ils sont pourtant bien là...
L’enquête du procureur spécial sur
l’affaire russe, Robert Mueller
1. Ingérence russe dans l’élection de
2016. Les faits sont
suffisamment solides pour avoir mené à la mise en accusation formelle de 25
agents russes et à un plaidoyer de culpabilité de la part d’un Américain qui
les aurait aidés. L’enquête continue.
2. Wikileaks. Deux proches de Trump, Roger Stone
et Jerome Corsi, sont sous la loupe des enquêteurs et s’attendent à être mis en
accusation. Leurs déclarations passées sont truffées de faussetés et de
mensonges.
3. La filière du Moyen-Orient. Cette dimension de l’enquête est
passée sous les écrans radar mais les liens du gendre de Trump, Jared Kushner,
avec l’Arabie saoudite et Israël, entre autres, entremêlés à ses affaires
personnelles, ont sonné plusieurs alarmes dans l’équipe du procureur Mueller.
4. Paul Manafort. À lui seul, l’ex-directeur de
campagne de Trump est au cœur de suffisamment de scandales pour faire tomber
n’importe quel politicien normal. Il a été jugé coupable d’une série
d’accusations liées à une ribambelle d’activités louches. Ses liens avec le
régime pro-russe d’Ukraine et plusieurs oligarques proches de Poutine sont bien
documentés, tout comme ses efforts pour infléchir la plate-forme politique du
Parti républicain en leur faveur. L’enquête continue.
5. Le projet de Tour Trump à Moscou. Pendant toute la campagne, le
candidat Donald Trump s’est évertué à nier formellement tout lien d’affaires
avec la Russie, mais il est maintenant de plus en plus clair qu’il était
enfoncé jusqu’au cou dans un projet de tour au centre-ville de Moscou, pour
lequel des documents existent, qui portent sa signature. Comment les électeurs
auraient-ils réagi s’ils avaient connu l’ampleur des intérêts de Trump en Russie?
On ne le saura jamais. Au mieux, on peut accuser Trump d'avoir menti pendant sa
campagne électorale. Au pire, on peut spéculer qu'il est vulnérable à
l'influence de Vladimir Poutine à cause de ses intérêts financiers ou pour
d'autres raisons liées à ce projet.
6. Contacts avec des agents russes
pendant et après la campagne.
Au centre de l’affaire russe, il y a cette fameuse rencontre à la Trump Tower
de New York entre l’équipe de campagne et des agents russes venus leur
colporter des révélations sur Hillary Clinton. Il faut être plutôt naïf pour
croire les explications de l’entourage de Trump au sujet de cet épisode qui
établit clairement qu’un lien entre la campagne et les activités russes pour
aider la campagne est plausible. L’enquête continue.
7. Entraves à la justice. Il faut rappeler que c’est cette
dimension qui a entraîné la démission de Richard Nixon suite à l’affaire du
Watergate. Dès les tout premiers moments de l’administration Trump, on note les
efforts de différents membres de l’administration pour détourner l’attention de
l’affaire russe. Les démarches à l’endroit de James Comey pour limiter les
enquêtes du FBI sur Michael Flynn et le congédiement de Comey en mai 2017, que
Trump a lui-même en entrevue lié à l’affaire russe, ne sont que les premiers
morceaux du casse-tête que Mueller ne manquera pas de compléter. Les documents
légaux partiellement publiés dans le cadre des poursuites contre Michael Cohen
et Paul Manafort laissent entrevoir que le procureur spécial est en train de
monter un dossier substantiel pour étayer d’éventuelles accusations d’entraves
à la justice qui impliqueraient directement Trump.
Enquêtes menées par les procureurs
fédéraux du district sud de New York (SDNY)
8. Complot pour enfreindre la loi sur
le financement des campagnes électorales. Deux plaidoyers de culpabilité ont déjà été reçus pour
des infractions à la loi électorale dans le cadre des paiements faits à des
maîtresses passées de Trump pour acheter leur silence avant l’élection. Il est
clair que Trump est impliqué dans ces affaires, mais il n’est pas certain qu’un
procès en bonne et due forme mènerait à une condamnation et il est aussi plutôt
clair que ces deux accusations ne suffiraient pas à convaincre suffisamment de
sénateurs républicains pour assurer le succès d’un procès en destitution au
Congrès. Il n’en demeure pas moins que le président Trump est présentement
considéré comme un complice potentiel à une infraction criminelle reconnue
(voir ici). La perquisition dans les bureaux de l’ex-avocat de Trump, Michael
Cohen, et la collaboration de son ex-comptable Allen Weissenberg ont aussi,
fort probablement, donné aux procureurs de New York amplement de matière pour
monter de nouvelles accusations. C’est à suivre.
9. L’inauguration. Lorsqu’un président est intronisé,
le financement des festivités qui entourent l’événement provient de fonds
privés. L’inauguration de Trump a recueilli un record de 107 millions $ à ces
fins, soit plus du double de l’inauguration de Barack Obama en janvier 2009,
même si cette dernière avait été beaucoup plus imposante. D’où venait l’argent?
Où est allé l’argent? Rien n’est clair et un article récent du Wall Street
Journal donne une idée de l’ampleur des fraudes potentielles. L’enquête se
poursuit.
10. Financement du Super-PAC de Trump. La provenance et l’utilisation des
fonds de cette entité privée qui faisait la promotion de la campagne de Trump a
soulevé beaucoup de questions et les procureurs de New York ont pris l’enquête
en charge.
11. Lobbying pour des intérêts
étrangers. En marge
des différentes enquêtes du SDNY, des activités de lobbying illégal, notamment
par l’ex-directeur de campagne Paul Manafort et son second Rick Gates, ont été
mises à jour. Ces enquêtes progressent.
Enquêtes du procureur fédéral du
District de Columbia
12. Maria Butina et la National Rifle
Association (NRA).
Maria Butina est une agente russe qui a infiltré la NRA et aurait
potentiellement participé à des transferts de fonds russes à la NRA. Incidemment,
cette organisation a fait des contributions financières à la campagne
électorale de Donald Trump bien au-delà de toutes ses participations passées
aux campagnes républicaines. Maria Butina a plaidé coupable à plusieurs
accusations et collabore étroitement à l’enquête en cours sur ces
malversations.
Procureur fédéral du district est de
la Virginie
13. Elena Alekseevna Khusyaynova. On en sait encore peu sur cette
affaire, mais cette agente russe est sous enquête pour sa participation aux
campagnes de 2016 et 2018 et elle a été mise formellement en accusation.
14. Influence de la Turquie. L’ex-conseiller à la sécurité
nationale de Trump, Michael Flynn, était étroitement lié à la Turquie, qui le
payait des centaines de milliers de dollars pour des activités de lobbying non
rapportées aux autorités alors même que Flynn faisait campagne aux côtés de
Trump. L’enquête est en cours et Flynn y collabore.
Enquêtes de la ville et de l’État de
New York
15. Fraudes fiscales. Une enquête approfondie du New York
Times publiée le 2 octobre dernier braquait les projecteurs sur une multitude
de pratiques frauduleuses liées aux activités de l’organisation Trump depuis
l’époque où elle était dirigée par le père du président, Fred Trump. Les
autorités de l’État de New York se sont saisies de ces allégations et plusieurs
enquêtes sont en cours.
16. La Fondation Trump. La nouvelle est tombée hier: la
procureure générale de l’État de New York a ordonné la dissolution de la
fondation Trump, qu’elle accuse de multiples violations des lois et règlements
gouvernant les activités des fondations charitables. J’aurai l’occasion de
revenir bientôt sur les détails de cette affaire qui aura aussi des
répercussions criminelles puisque de nombreuses fraudes fiscales pourraient y être
rattachées.
17. La clause des émoluments. La constitution des États-Unis
interdit à un président en exercice de recevoir des paiements de toute nature
de la part de gouvernements étrangers. Évidemment, Donald Trump reçoit de tels
émoluments à la tonne. Une poursuite à cet effet a été déposée dans l’État de
New York et elle progresse. À lui seul, l’hôtel Trump à Washington est un
véritable aspirateur de fonds étrangers.
Ce n’est pas tout
18. Autres enquêtes. La nomenclature de Graff mentionne
aussi d’autres enquêtes de nature encore inconnue, qui sont mentionnées de
façon oblique dans les différents documents lourdement caviardés déjà publiés
dans le cadre des différentes enquêtes mentionnées ci-dessus.
19. Poursuites civiles liées au
harcèlement sexuel.
Dans le sillage de la vidéo d’Access Hollywood où Donald Trump se vantait de
multiples inconduites sexuelles, plusieurs femmes ont révélé avoir été l’objet
d’avances non sollicitées et de diverses formes de harcèlement sexuel de la
part de Donald Trump. C’est de l’histoire ancienne, mais ces affaires ne sont
pas mortes. Notamment, le cas de Summer Zervos, qui poursuit Trump au civil en
diffamation en Californie, est encore en suspens à cause de l’immunité présidentielle.
20. Trump University. Ce scandale a été balayé sous le
tapis pendant la campagne présidentielle, mais il importe de se rappeler que
Donald Trump a accepté de régler ce litige hors cour pour un montant de 25
millions, plus de la moitié des 40 millions en dommages réclamés par les
plaignants. Son «université» était vraisemblablement une combine frauduleuse de
A à Z.
21. Nomination de Matt Whittaker comme
Attorney General par intérim.
Le 19 novembre dernier, trois sénateurs démocrates ont déposé une poursuite
contre le président alléguant que cette nomination est illégale puisqu’elle
court-circuite l’ordre normal de succession et nomme à un poste majeure une
personne non confirmée par le Sénat. La cause est en examen.
22.
Engagement de travailleurs illégaux dans les propriétés de Trump. Avec
l’énergie que Trump met à combattre l’immigration illégale, on s’attendrait à
ce qu’il fasse un peu attention, mais de nombreux cas d’engagement d’immigrants
sans documents dans les propriétés de Trump ont été répertoriés. Les suites de
ces affaires ne sont pas claires.
23. Le téléphone cellulaire non
sécurisé du président.
Après avoir insisté pendant des mois pour condamner Hillary Clinton et la
vulnérabilité de ses courriels, on aurait pu s’attendre à ce que le président
Trump soit hyper attentif à la sécurité de ses propres communications.
Pourtant, son téléphone cellulaire personnel, dont il se sert abondamment,
n’est pas sécurisé et pourrait facilement avoir été l’objet de surveillance par
des agents étrangers. Les démocrates ont promis de faire enquête sur cette
affaire quand ils auront le contrôle de la Chambre des représentants.
24. Les courriels d’Ivanka. Finalement, puisque les républicains
n’ont pas hésité pendant des mois à réclamer l’emprisonnement d’Hillary Clinton
en raison de son utilisation d’un courriel privé pendant son séjour au
département d’État, je m’en voudrais de ne pas mentionner le fait que la fille
du président a utilisé un courriel privé pendant plusieurs semaines après sa nomination
comme conseillère spéciale à la Maison-Blanche.
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