23 janvier 2019

Invasion à la chinoise

Il y a des limites à faire rire de soi et d’être la proie de prédateurs voraces. Nos dépotoirs débordent d’objets non durables, non réparables, non retournables, donc jetables. Notre système de récupération est quasi nul. Les manufacturiers nous ont précipités dans un gouffre maintenant devenu un Himalaya d’ordures. Nous ne savions pas d’où ça venait ni où ça allait... Maintenant, nous le savons. Alors, c’est à nous de faire des choix plus intelligents que nos téléphones.

D’ici à 2022, la Chine veut déployer sa propre station spatiale habitée dans l’espace. Parallèlement elle entend devenir maître du monde d’ici 2049. «Dans un film de propagande, Xi Jinping dévoile la première étape de sa stratégie de contrôle de l’économie mondiale consistant à construire de nouvelles routes de la soie. La Chine a investit mille milliards de dollars pour construire des chemins de fer, des ports, des voies maritimes, d’abord vers l’Asie, puis vers l’Europe, le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Amérique latine.» (Le monde selon Xi Jinping, ARTE)

Il y a aussi une «route de la soie» au Canada. Nous sommes dans la mire de la Chine depuis longtemps. Nous avons (par naïveté ou sous la menace?) déroulé le tapis rouge. Ce partenaire commercial, convoite un large éventail de secteurs : industrie pétrolière et gazière de l’Alberta, industrie minière, construction (infrastructures, ports oléoducs...), industrie agroalimentaire (élevage, terres arables...) et pêcheries.
   Nous pourrions faire face à un scénario similaire à celui de l’Afrique : En 2009, la population chinoise en Afrique tournait autour de 580 000 à 820 000 individus. Aujourd’hui, ce nombre approcherait le million (ou même plus), bien que les chiffres exacts soient pratiquement impossibles à vérifier en raison de la mobilité des migrants chinois, des frontières très poreuses, des niveaux élevés de corruption au sein des agences gouvernementales africaines, et des inefficacités au sein des organismes chargés de l’immigration et du contrôle aux frontières. En termes de liens économiques, les chiffres du commerce entre l’Afrique et la Chine sont éblouissants en ce qui concerne à la fois le taux de croissance rapide ainsi que leur effectif total, estimé aujourd’hui à plus de 120 milliards de dollars. Où de nombreux investisseurs occidentaux voient un risque, les Chinois voient l’occasion – une perspective qui a conduit à une croissance phénoménale du nombre de Chinois en Afrique.  
   Pour nourrir 1 milliard et demi d’habitants, soit 23,28 pour cent de la population mondiale, la Chine ne possède que 7 pour cent des terres cultivables de la planète. Elle est donc très préoccupée de sa sécurité alimentaire. Sa solution : l’acquisition de terres agricoles en dehors de son territoire : 2,1 millions d’hectares, dont 100 000 hectares rien qu’en Russie. Ce qui place la Chine au rang de premier acquéreur mondial.
   En 2016, les investissements chinois aux États-Unis atteignaient 45,6 milliards... 

Mise à jour 24.01.2019 – Un bon exemple de mainmise chinoise. Ricardo Peñafiel, professeur associé à l’UQAM, commentait la validation ou non du président par intérim vénézuélien autoprovlamé; certains pays l’appuient d’autres pas : «La Turquie, la Chine et la Russie sont solidaires de Maduro. La Russie a toujours été proche du Venezuela parce qu’elle lui vend des armes; c’est commercial. La Chine est encore plus intéressante là-dessus parce qu’elle est actuellement le banquier du Venezuela et qu’elle se fait payer en pétrole. Donc, il y a une sorte de dépendance incroyable qui se fait, c’est comme s’il y avait un pipeline direct. Le Venezuela ne touche pratiquement pas un sou du pétrole qu’elle produit parce qu’il s’en va direct en Chine pour payer les frais de la dette.» (Midi info Radio-Canada Première, 24.01.2019).
   Ce qui est tout à fait conforme à la stratégie chinoise d’appropriation qui consiste à prêter de l’argent à un taux usuraire, en particulier aux pays pauvres, prétendument pour les aider à exploiter leurs ressources et à construire des infrastructures commerciales. Sachant que les pays ne pourront pas rembourser, en échange du rééchelonnement de la dette, la Chine exige le contrôle absolu de l’exploitation et des ressources pour une période pouvant aller jusqu’à 99 ans; pertes d’emplois et de revenus pour ledit pays. Et voilà, le tour est joué. 

La lune de miel (Justin Trudeau en Chine)


Le divorce (avec menaces de représailles)

Caricature : Pascal | Le Devoir, 19.01.2019

En raison du conflit entre Ottawa et Pékin au sujet de Meng Wanzhou, la responsable des finances du géant des télécommunications Huawei, j’ai récemment recommandé le documentaire Le dragon à mille têtes (THEMA 2016) portant sur l’ascension de la Chine au rang de deuxième puissance économique mondiale.

Je poursuis donc mes classes en sinologie avec les nombreux documentaires sur la Chine produits par ARTE – les drapeaux rouges se multiplient!

----
On le constate dans cet article que ce n’est pas d’hier que la communauté internationale s’inquiète de l’intrusion numérique chinoise.

Huawei : un espion venu de Chine
Manuel Vicuña | ARTE 21, octobre 2014


Huawei, le géant chinois des télécommunications, s’est lancé à la conquête de l'Europe. Pourtant son image reste entachée par de graves soupçons de cyber-espionnage industriel. Mais l’Europe peut-elle pour autant se passer des investissements chinois?
   C'est un mastodonte encore méconnu du grand public. Le géant chinois Huawei, numéro 3 mondial des smartphones derrière Samsung et Apple, est bien déterminé à conquérir l'Europe. Le 29 septembre dernier, la France lui a ouvert les bras. Ce jour-là, le fondateur de la firme chinoise, Ren Zhengfei, est reçu à Matignon par le Premier ministre Manuel Valls. Il est venu annoncer un plan d'investissement de 1,5 milliard d'euros pour la France, avec à la clef la création de près de 2 000 emplois dans l'Hexagone. Quelques jours plus tôt, c'est en grande pompe que Huawei inaugurait à Sophia Antipolis – la technopole des Alpes maritimes – son centre de recherche et développement, avec là encore une vague de recrutements en prévision.

Lourds soupçons d'espionnage
Pourtant, Huawei n'est pas une entreprise comme les autres. Son fondateur a longtemps travaillé dans le renseignement militaire pour le compte de l'armée chinoise. Et si elle tisse sa toile partout en Europe, de l'Allemagne à la Suède, son image reste entachée de graves soupçons d'espionnage. Le risque majeur : le siphonage des données économiques des pays dans lesquels elle vend ses routeurs, des appareils par lesquels transitent l'ensemble de nos données informatiques.
   Huawei, un espion à la solde de Pékin? C'est ce que dénonçait récemment l'ex-patron de la CIA, Michael Hayden. Déjà, en 2012, le congrès américain avait demandé que le groupe soit exclu des contrats publics. Depuis, l'Australie a déclaré Huawei persona non grata sur son territoire. Quant à l'Angleterre, qui accueille un centre d'évaluation de sécurité de Huawei sur son sol, elle a décidé de redoubler de vigilance.
   En France, l'opération séduction du géant chinois semble fonctionner à plein régime. On se souvient pourtant qu'en 2012 le sénateur Jean-Marie Bockel préconisait dans son rapport sur la cyber-défense, d'interdire le déploiement et l'utilisation de routeurs Internet et autres équipements de cœur de réseau d'origine chinoise. Une proposition qui a toujours posé problème alors que SFR et Bouygues Télécom font notamment partie des clients de Huawei.

Peut-on se passer des capitaux chinois?
Châteaux, domaine viticoles, immobilier de prestige, finances, énergies, modes… Les groupes chinois sont présents dans tous les secteurs de l'économie. Les échanges entre la Chine et l'Europe s'élèveraient actuellement à 1,2 milliard d'euros par jour.  Preuve, s'il en fallait une, de ce dynamisme : la «nouvelle Route de la soie», ce projet de grande ampleur conçu par Pékin pour rapprocher la Chine de son partenaire européen et étendre les capitaux chinois sur le Vieux Continent. C'est ainsi que le port allemand de Duisbourg est devenu une destination phare pour les trains de marchandises chinois grâce à une ligne ferroviaire parmi les plus longues du monde. Les Chinois investissent de plus en plus en Allemagne. Des piliers de l'industrie lourde allemande, comme le groupe Putzmeister, ont fait l'objet de rachats spectaculaires au cours des dernières années.
   Reste que selon l'Agence française des investissements internationaux (Afii), l'Hexagone est devenu en 2012 la première destination en Europe des investissements chinois créateurs d'emplois, devant la Grande-Bretagne et l'Allemagne. Depuis, on a assisté à l'une des plus spectaculaires prises de participation chinoise dans une entreprise française : l'investissement de 800 millions d'euros que va faire Dongfeng pour entrer au capital du constructeur automobile PSA. Mais les Chinois sont aussi présents dans des secteurs moins visibles. Dans un article de Rue 89, Pierre Haski pointe des exemples d'investissements inattendus comme celui de la production laitière.

«Ce qui est à vendre...»
La France, elle, applaudit des deux mains. «Les investissements chinois sont les bienvenus en France, et nous sommes mobilisés pour les faciliter», s'est réjoui le chef de la diplomatie, Laurent Fabius, lors de la venue du président Xi Jinping en mars dernier. Le pays souhaite accueillir à l'avenir 50 000 étudiants chinois contre 35 000 aujourd'hui. Reste un pan de l'économie française dans lequel la Chine s'aventure encore peu. «D'une manière générale, les Chinois avancent prudemment sur les financements d'infrastructures ou les marchés publics; ils ne veulent surtout pas apparaître trop pressés, voire comme des prédateurs», analyse le spécialiste de la Chine, François Godement dans Les Échos. Pour lui : «La question est de savoir ce qui est à vendre en France (…) Ni les ports, ni les concessions d'autoroute, ni les voies ferrées. En tout cas, pas pour l'instant...»

L'Internet en Chine selon Xi Jinping - Le Topo | 9 min
ARTE Disponible du 27/11/2017 au 26/11/2020
Censure, surveillance, blocage : l’Internet, selon Xi Jinping, est au service du rayonnement de la Chine et doit rester sous le contrôle étroit du Parti communiste.

Le monde selon Xi Jinping
ARTE Disponible seulement jusqu’au 2 février 2019

Ou jusqu’au 16 février 2019 sur Youtube (posté par ARTE)

Le rouleau compresseur a tendance à déchirer la soie... 

Depuis 2012, le désormais «président à vie» Xi Jinping a concentré tous les pouvoirs sur sa personne, avec l'obsession de faire de la Chine la superpuissance du XXIe siècle.

Plongée au coeur de son «rêve chinois»  
Derrière son apparente bonhomie se cache un chef redoutable, prêt à tout pour faire de la Chine la première puissance mondiale, d'ici au centenaire de la République populaire, en 2049. En mars dernier, à l’issue de vastes purges, Xi Jinping modifie la Constitution et s’intronise «président à vie». Une concentration des pouvoirs sans précédent depuis la fin de l'ère maoïste. Né en 1953, ce fils d’un proche de Mao Zedong révoqué pour «complot antiparti» choisit à l'adolescence, en pleine tourmente de la Révolution culturelle, un exil volontaire à la campagne, comme pour racheter la déchéance paternelle. Revendiquant une fidélité aveugle au Parti, il gravira en apparatchik «plus rouge que rouge» tous les degrés du pouvoir.
   Depuis son accession au secrétariat général du Parti en 2012, puis à la présidence l'année suivante, les autocritiques d'opposants ont réapparu, par le biais de confessions télévisées. Et on met à l'essai un système de surveillance généralisée censé faire le tri entre les bons et les mauvais citoyens. Inflexible sur le plan intérieur, Xi Jinping s'est donné comme objectif de supplanter l'Occident à la tête d’un nouvel ordre mondial. Son projet des «routes de la soie» a ainsi considérablement étendu le réseau des infrastructures chinoises à l’échelle planétaire. Cet expansionnisme stratégique, jusque-là développé en silence, inquiète de plus en plus l'Europe et les États-Unis.

Impériale revanche
Dans ce portrait très documenté du leader chinois, Sophie Lepault et Romain Franklin donnent un aperçu inédit de sa politique et montrent que l'itinéraire de Xi Jinping a façonné ses choix. De Pékin à Djibouti – l'ancienne colonie française est depuis 2017 la première base militaire chinoise à l’étranger – en passant par la mer de Chine méridionale et l’Australie, les réalisateurs passent au crible les projets et les stratégies d’influence du nouvel homme fort de la planète. Nourrie d’images d’archives et de témoignages (de nombreux experts et de dissidents, mais aussi d'un haut gradé proche du pouvoir), leur enquête montre comment Xi Jinping a donné à la reconquête nationaliste de la grandeur impériale chinoise, projet nourri dès l'origine par la République populaire, une spectaculaire ampleur.
   
Ndlr : Quelques points relevés (non textuels)
Le projet pharaonique des routes de la soie (ceinture économique) est sans équivalent dans l’histoire de l’humanité. Il a comme objectif central d’accélérer les échanges commerciaux et de vendre en un temps record toutes les marchandises chinoises pour maintenir la croissance à flot, et de grignoter peu à peu les bases de l’économie occidentale. La Chine propose aux pays les plus pauvres de leur prêter l’argent nécessaire à la construction d’infrastructures commerciales. Si les pays ne peuvent pas rembourser les investissements, par exemple pour la construction d’un port, alors, en échange du rééchelonnement de la dette, la Chine exige le contrôle absolu du port pour une période de 99 ans; ce qui encourt des pertes d’emplois et de revenus pour la population locale et le pays.
   La stratégie d’influence politique de la Chine dans les pays étrangers se fait par l’intermédiaire des milieux d’affaires et universitaires de la société civile. Les communautés chinoises vivant à l’étranger financent les campagnes électorales des candidats favorables à la Chine ou soudoient des personnalités – politiques ou civiles –  pour faire circuler des idées positives sur le régime et promouvoir les relations amicales avec la Chine. Les pays autoritaires sont d’excellents partenaires pour la Chine puisque l’état de droit est inexistant.
   Ironiquement, la Chine copie le modèle américain qu’elle a contesté à grands cris. Et, «le pouvoir est au bout du fusil», car sur les routes de la soie les alliances politico-militaires sont de règle. Bref, Xi Jinping rêve d’établir un «paradis communiste mondial».

Photo : Ricky Carioti / Washington Post. Harry Wu est décédé le 26 avril 2016 alors qu’il était en vacances au Honduras. Il a dénoncé dans le monde entier les colonies pénitentiaires chinoises par le biais de livres et de conférences. Dans une interview du Los Angeles Times en 1995 il a déclaré : «Les camps de travail sont la pierre angulaire de la dictature communiste chinoise, la machine à écraser les êtres humains physiquement, psychologiquement et spirituellement. Je veux profiter de ma vie. J'ai perdu 20 ans. Mais la culpabilité est toujours dans mon cœur. Je ne peux pas m'en débarrasser. Aujourd'hui, des millions de personnes en Chine vivent mon expérience. Si je ne parle pas pour eux, qui le fera?»

C’est ici que l’expression «main-d’œuvre jetable» prend tout son sens :

Laogaï, le goulag chinois
Documentaire THEMA ARTE 2013


THEMA a diffusé le documentaire Laogaï qui montre comment l’empire du Milieu oblige environ quatre millions de personnes à fabriquer des produits destinés au marché européen dans des camps de travail en tous points semblables aux anciens goulags soviétiques.

Laogaï, ainsi s’appellent les camps de travaux forcé en République populaire de Chine. La traduction littérale signifie «rééducation par le travail». À partir des années 1950, et d’après le modèle soviétique des goulags, Mao Zedong fait construire un très grand nombre de ces camps à travers tout le pays. Selon des ONG, il y aurait encore près de quatre millions de prisonniers. Retenus dans des conditions extrêmes, ils sont contraints de produire des biens, destinés entre autre au marché européen. Parmi les détenus, on retrouve des criminels mais souvent il s’agit de dissidents du pouvoir. Le documentaire de Hartmut Idzko «Laogaï – le goulag chinois» nous offre le témoignage traumatisant de trois anciens prisonniers : la Tibétaine Ama Adhe, l’écrivain et musicien  Liao Yiwu et Harry Wu, le fondateur de la Laogai Research Foundation.

Retrouvez dans ce dossier une interview du réalisateur et un reportage sur les méthodes brutales d’interrogatoire employées par le gouvernement chinois. Un article sur le camp 14 montre également la situation en Corée du Nord, dictature qui détient aussi un grand nombre de prisonniers dans des camps de travail.


Map of laogai in China. Marco L — own work. Based on information from Wu, Harry; Fang Lizhi; trans. Ted Slingerland (1992) Laogai - The Chinese Gulag, Westview Press

Aucun commentaire:

Publier un commentaire