Il y a deux semaines j’apprenais qu’une de mes
amies avait retrouvé son fils après vingt ans de silence. Au même moment, Tout.tv
rediffusait la série «Aveux» – un psychodrame particulièrement bien réussi illustrant
les conséquences de la fuite et des non-dits... Il va sans dire qu’en faisant
le parallèle avec l’histoire de mon amie, j’ai revu la série d'un tout autre
oeil et cela m'a inspiré cet article.
Synopsis
Aveux (Radio-Canada)
Aveux, c’est l’histoire de Carl Laplante qui, par amour, a choisi le silence
à la suite d’un drame qui a remis en question toute sa vie. Pour survivre, il a
attendu d’avoir ses 18 ans et a quitté famille et amis, sans leur donner de
nouvelles par la suite. C’était il y a 15 ans. Maintenant, il s’appelle Simon,
il s’est inventé un nouveau passé et a rencontré Brigitte avec qui il partage
sa vie depuis huit ans. À 33 ans, malgré l’imposture, Simon semble avoir trouvé
une certaine paix grâce aux liens profonds qu’il a tissés avec ses nouveaux
amis, ses collègues de travail et sa belle-famille. Le hasard fait que Simon
Laplante est obligé bien malgré lui de renouer avec tous les acteurs et
l’horreur de son passé. Aveux est aussi une histoire de couples, de solitudes,
de chassés-croisés dont les maillons finiront par s’imbriquer les uns dans les
autres avec en toile de fond, la reconstitution, au fil de l’histoire, de ce
fameux soir du 15 octobre 1990. Que s’est-il passé? Quel est le lien de Carl
(Simon) avec ce terrible drame qui a semé la consternation dans la famille?
Peut-on refaire sa vie après avoir joué même malgré soi un rôle de premier plan
dans un drame sans nom? Peut-on survivre après avoir été profondément blessé?
Peut-on construire sa vie sur un mensonge même salvateur?
[La
série Aveux, produite par André Dupuy
de Productions Pixcom, écrite par Serge Boucher et réalisée par Claude
Desrosiers, a reçu le prix de la Meilleure réalisation lors de la 11e édition du
Festival de la fiction TV, en septembre 2009 (La Rochelle).]
***
Revenons à mon amie. Pendant toutes ces années
d’espoir et d’attentes elle a multiplié les tentatives de retrouvaille en vain.
Son fils ne répondait jamais. Aucun moyen de s’expliquer, non pas de se
justifier, mais simplement d’aller au cœur des choses ayant causé la coupure. Des
intermédiaires bienveillants lui donnaient des nouvelles de temps en temps; au
moins elle savait qu’il était toujours vivant.
Dans
la série Aveux, le drame s’ébauche
sur une expérience traumatisante vécue par le jeune homme, et qu’il tiendra secrète
pour ménager son entourage; et peut-être aussi par sentiment de honte, de
peur du jugement et du rejet, et ainsi de suite. Comme le disait Aurélien
Scholl, «le moment le plus favorable pour la répression d’un abus, c’est le
jour où on le découvre» … ou qu’on le vit. C’est ce que Carl (Simon) avait omis
de faire.
Espérer
protéger les gens (ou
soi-même) de la souffrance par
les non-dits, la fuite ou le mensonge, produit l’effet contraire. J’entends
encore mon amie : «J’ai besoin de savoir pourquoi il me fuit. Si je connaissais
la vraie raison de son mutisme et ce qu’il me reproche, je cesserais de me
questionner et je lâcherais prise. Mais, comme je ne sais rien, les questions
tournent en boucle dans ma tête... pourquoi cette volteface subite sans préavis
ni explications?»
Réflexions
extraites d’Aveux :
-
Combien de choses nous échappent. Si seulement on pouvait être dans la
tête de ceux qu’on aime.
-
Qu’est-ce qui te ronge par en-dedans? Dis-le.
- Si
la confiance est la base d’une relation… il faut arrêter de faire semblant
qu’il y a des choses qui n’existent pas.
Les
gens qui érigent un mur de silence ignorent probablement tout des ravages qu’ils
causent. À mon avis, il n’y a rien de plus cruel que de laisser les personnes avec
qui nous avons un lien affectif important dans le doute et l’incompréhension; et
en réalité, cette remarque est valide pour tout type de relations sociales. [Exemple : Le malentendu invisible (en milieu de travail) par
Jean Garneau, psychologue http://www.redpsy.com/infopsy/conflit-qr.html
]
Heureusement, l’histoire de mon amie finit bien. Le fils et la mère se sont revus – il a maintenant 43 ans.
Elle est soulagée et heureuse et m'a envoyée des photos. Une nouvelle relation s’amorce
sur la pointe des pieds... Leur scénario est loin d’être aussi dramatique que
dans Aveux – il n’y a pas eu de morts,
et la rupture était due à une accumulation de drames d’adolescence non résolus
parce que non dits au moment opportun.
***
Il
m’est arrivé de vivre du rejet en amitié en raison de suppositions sans
fondement. À partir d’une phrase anodine, la personne avait imaginé que …, sans vérifier avec moi si
cette présomption avait une quelconque réalité (ceci tend à prouver que souvent nous ne sommes pas
responsables de ce que les autres pensent de nous).
Donc,
voyant qu’elle se distanciait, et sachant intuitivement que quelque chose
clochait, j’ai vérifié. Elle a nié et m’a laissée sans nouvelles pendant deux
ans. Puis, un beau jour, elle m’a rappelée pour s’excuser, après que certains
évènements lui aient fait réaliser sa méprise.
D’où
l’importance d’aller au fond des choses ou de vérifier si l’on a bien compris
ce que l’autre a dit, sur-le-champ – si la personne est prête à coopérer, bien
sûr. Tout dépend aussi de la considération qu’on porte à la personne et du
degré d’amour-propre en jeu.
«T’excuser ou t’expliquer ne signifie pas toujours que tu as tort et que l’autre a raison. Cela signifie simplement que tu accordes plus d’importance à la relation qu’à ton égo.» (Auteur inconnu)
Quoiqu’il en soit, il est toujours possible, par une conversation non-violente, de résoudre des conflits émotionnels. C'est une excellente méthode pour éviter de faire souffrir inutilement autrui ... un bonus pour ceux qui pratiquent la philosophie de vie bouddhique!
En conclusion, je reste persuadée, tout comme Sam Harris et son professeur Ronald A. Howard, qu’il vaut mieux dire la vérité. Il y aurait surement moins de détresse, de suicides et d’agressions, car les non-dits et les mensonges entrainent plus de souffrance qu’une «dure vérité» exprimée avec délicatesse ou compassion. http://situationplanetaire.blogspot.ca/2012/05/est-ce-mal-de-mentir.html
«T’excuser ou t’expliquer ne signifie pas toujours que tu as tort et que l’autre a raison. Cela signifie simplement que tu accordes plus d’importance à la relation qu’à ton égo.» (Auteur inconnu)
Quoiqu’il en soit, il est toujours possible, par une conversation non-violente, de résoudre des conflits émotionnels. C'est une excellente méthode pour éviter de faire souffrir inutilement autrui ... un bonus pour ceux qui pratiquent la philosophie de vie bouddhique!
En conclusion, je reste persuadée, tout comme Sam Harris et son professeur Ronald A. Howard, qu’il vaut mieux dire la vérité. Il y aurait surement moins de détresse, de suicides et d’agressions, car les non-dits et les mensonges entrainent plus de souffrance qu’une «dure vérité» exprimée avec délicatesse ou compassion. http://situationplanetaire.blogspot.ca/2012/05/est-ce-mal-de-mentir.html
En terminant, un poème inspiré par la douleur d'un père devant son fils victime de la drogue (source : www.redpsy.com )
Le mur
Il
est là devant moi
Silencieux,
lointain
Si
proche et si loin
Il y
a ce mur qui me coupe de lui
C’est
dur. J’ai mal.
C’est
dur
Si
loin et si proche
Il y
a la méfiance, il y a les souvenirs mauvais
Il y
a le désir, il y a la peur de la blessure
Les
silences qui nous emmurent
Ensemble
et si seuls
Devant,
je resterai devant
Malgré
les repoussements
Patient;
je serai patient
Malgré
les vents contraires
Malgré
la méfiance
Je
serai fort et aimant
Plus
fort que le mur
J’ai
l’espoir de retrouvailles
Je
vaincrai le mur,
Si
je fléchis je me redresserai
Je
verrai son écroulement pierre par pierre
Tous
les empires ont connu l’effondrement
Il y
a ce mur qui me coupe de toi
C’est
dur
Je
suis là devant, tenace
Je
serai là lorsque le mur ne tiendra plus
Je
serai ton père… à jamais
Jean-Marc
Beaudoin
***
COMMENTAIRE
Personne ne peut rafistoler notre vie à notre place. Changer d'attitude est un acte de courage personnel, comme le dit Jane Fonda dans l'article du 2 juin, "Le troisième acte".