6 juillet 2010

Inattendu

J’ai toujours eu l’effroi des choses définitives. Il y en a qui ont peur de l’instable, moi j’ai la crainte contraire. Je n’aime pas que demain ressemble à aujourd’hui et la route ne me semble captivante que si j’ignore où elle me conduit. (Alexandra David-Néel, Carnet de voyage)


La magie de l’inattendu
Par Rachel Guay, 1994

Extraits

Introduction
Grâce à la gêne et à l’irritation causées par l’intrusion d’un grain de sable dans sa coquille, l’huître sécrète une substance à reflets irisés qui enrobe l’importun de plusieurs couches de nacre, le transformant en une magnifique perle!

Ce ne sont pas les événements en eux-mêmes qui nous créent des problèmes, mais bien plutôt notre façon de les percevoir, de les aborder, de les interpréter et d’y réagir. L’interaction que nous établissons avec eux, engendre un scénario de gagnant ou de victime.

Les difficultés que nous rencontrons représentent pour nous des défis de croissance. Elles nous offrent l’opportunité d’une transformation en sollicitant notre ingéniosité et notre capacité de créer des solutions.

Si une solution réclame trop d’effort c’est peut-être qu’il en existe une meilleure beaucoup plus facile!

Le fait de s’accrocher à une première vision des choses nous empêche la plupart du temps d’en découvrir d’autres.

Comme le disait si bien le philosophe Marc Aurèle : La vie est une série de problèmes qu’on doit résoudre et de limitations qu’on doit accepter.

Il existe deux sortes de transformations : celles qui se font en suivant un long processus d’apprentissage, tels l’éducation, les études, les performances sportives et artistiques; d’autres s’opèrent de façon rapide, comme par magie, suite à des situations inattendues, provocantes, déstabilisantes, qui forcent la libération de ressources capables d’amorcer un changement instantanément.

Quelques considérations sur le déroulement normal de la vie
Réussir dans la vie consiste à franchir convenablement les étapes de son développement, c’est-à-dire, cheminer normalement à travers tous les cycles de la vie : passer de l’enfance à l’adolescence, puis à l’âge adulte. Apprendre à marcher et à parler, réussir ses études, pouvoir établir des relations satisfaisantes, créer des liens affectifs, s’épanouir sexuellement dans une relation intime et stable, s’engager socialement, procréer (si on le veut), travailler et assurer son autonomie financière, etc.

Les grandes embûches pouvant compromettre cette évolution normale sont de deux ordres : d’abord, la dimension interne de la personne, sa vision du monde, les conflits entre ses désirs et ses obligations, ses limites de choix; puis sa dimension externe, sociale et relationnelle, c’est-à-dire, son insertion dans son milieu familial, social, et ses transactions avec son entourage, notamment l’autorité, ses pairs et ses subordonnés.

Tout au long de leur vie, les individus parviennent généralement à surmonter la plupart des problèmes. Cependant il n’est pas rare qu’à une étape donnée, certains ne puissent les résoudre par eux-mêmes. C’est alors qu’ils songent à consulter un spécialiste dans le domaine qui les préoccupe.

Quand le mystère est trop impressionnant, on n’ose pas désobéir. St-Exupéry, Le Petit Prince

Les forces potentielles des événements inattendus
Que vous ayez à faire face à un problème, à un échec, que vous soyez coincé dans une situation conflictuelle ou paradoxale, qu’une surprise ou un choc vous saisissent vous êtes forcé de penser différemment. Vous découvrez alors toutes une gamme d’idées et de possibilités insoupçonnées.

La plupart des grandes découvertes, notamment dans le domaine des sciences, tirent leurs origines de l’intérêt suscité par un résultat déconcertant qui a stimulé la curiosité des chercheurs pour découvrir d’autres lois de la nature.

Un problème, c’est l’impuissance que nous éprouvons à surmonter une difficulté.

Un manque de flexibilité, une trop grande fidélité aux liens rationnels des choses apprises, la recherche exagérée de prévisibilité, peuvent nous empêcher de trouver des solutions adéquates. Les malaises se nourrissent la plupart du temps de solutions inadaptées. Il se crée alors un cercle vicieux, où malaises et solutions problématiques se renfocent mutuellement. À titre d’exemple : si, pour se sécuriser, une personne s’acharne à contrôler son partenaire, ce dernier alors essaie de s’en échapper et plus il se rend insaisissable, plus alors elle affine ses moyens de censure. La complication augmente au rythme des essais de chacun pour s’en sortir. C’est ainsi que mari et femme renforcent mutuellement leurs comportements.

Confrontés à des problèmes, les gens en général réagissent en prenant la première issue qui leur vient à l’esprit. Ils s’enferment alors dans un scénario interactif et prévisible qui ne débouche habituellement nulle part et qui les rend incapables d’idées nouvelles.

Pour comprendre l’effet magique produit par l’inattendu, disons un mot sur le fonctionnement du cerveau humain. L’hémisphère gauche est le siège de la logique, où sont consignées les choses apprises, et où se cumulent les automatismes, tout ce qui nous permet de bien fonctionner dans le monde complexe où nous vivons. Grâce à cette partie du cerveau, nous pouvons apprendre, comprendre, analyser, interpréter, déduire, communiquer, organiser et réaliser. L’hémisphère droit a pour fonction spécifique d’imaginer, de synthétiser, de créer et de réagir face aux imprévus et aux aléas de la vie de façon novatrice et constructive. Il est le siège de l’art, de l’inspiration, de l’invention et débouche sur l’action et les constructions nouvelles.

L’effet surprise d’une situation inattendue crée momentanément un état de confusion qui paralyse l’activité du cerveau gauche. Immédiatement le pouvoir novateur du cerveau droit entre en action, offrant une nouvelle perception de la réalité en même temps que de nouveaux choix d’action. C’est là que peut se produire la magie.

Connaissant ce fonctionnement, nous pouvons essayer de jouer au magicien en jonglant avec des solutions farfelues, saugrenues, insolites, absurdes et tout en nous amusant, peut-être trouverons-nous des issues heureuses à nos impasses. Commencer à en rire c’est déjà les dédramatiser, ce qui n’est pas si mal comme changement! L’attitude de jeu, l’humour et le sens de la folie sont essentiels à la pensée créatrice et au changement.

Biographie :
Rachel Guay comptait déjà quinze ans de carrière d’enseignement dans le domaine des sciences pures quand elle a décidé d’un virage vers les sciences humaines. Après cinq autres années d’études elle obtenait une maîtrise en service social concentrée sur les problématiques conjugales et familiales. Elle s’est spécialisée par la suite en psychologie individuelle, conjugale et familiale, ainsi qu’en sexothérapie. Ses orientations en psychothérapie peuvent se résumer ainsi : ses bases théoriques fondamentales tiennent principalement du cadre de référence systémique, humaniste et existentielle enrichies de l’analyse transactionnelle, de la Gestalt, de l’approche stratégique.

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