le fleuve Saint-Laurent?
Vous pourrez mieux en juger après avoir lu Golfe 101 – de A à Z.
Avec une «stratégie maritime» prévoyant utiliser le Saint-Laurent comme «levier économique» pour augmenter le commerce international, il importe plus que jamais de connaître les impacts sociaux, environnementaux et économiques possiblement désastreux – à court, moyen et long terme. Les projets ambitieux ont peut-être une valeur en soi, mais on n'est pas obligé de les réaliser, surtout quand on est myope au point d'être irresponsable. Quoiqu’il en soit, la préservation de notre fleuve, c’est beaucoup plus qu’une lutte à finir entre «Terroristes Verts» et «Terroristes Bruns»... il s’agit de notre propre survie. Nos gouvernements vont littéralement à contre-courant!
Le rapport de la Coalition Saint-Laurent rigoureusement documenté (graphiques, cartes géo, photos, données concrètes extraites de rapports de recherche scientifique, économique, etc.) «est destiné à toute personne qui s’intéresse à l’avenir du golfe du Saint-Laurent et qui réalise son importance vitale. Il s’adresse particulièrement à tous ceux et toutes celles qui veulent comprendre la question du développement pétrolier dans le golfe afin de pouvoir mieux contribuer aux décisions qui seront prises pour son avenir.» (Golfe 101)
Selon la Coalition Saint-Laurent, le projet de loi 49 sur l'exploration pétrolière dans le golfe du Saint-Laurent, déposé jeudi (11 juin), représente un «nouveau jalon vers un État pétrolier». Déposé par le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand, il est le résultat de plus de quatre ans de négociations avec le gouvernement fédéral. Un projet de loi semblable devrait être déposé au fédéral.
«Les deux projets de loi, lorsqu'ils seront adoptés, ouvriront toute grande la porte de l'exploration pétrolière dans la partie québécoise du golfe», soutient la Coalition dans un communiqué. «Après les forages pétroliers à Anticosti ou en Gaspésie, après les projets d'oléoducs ou de port pétrolier, après les projets de fracturation hydraulique dans la vallée du Saint-Laurent, voici que l'on cherche maintenant à faire sauter les derniers obstacles aux forages en mer dans le golfe», peut-on lire. (ICI Radio-Canada Grands titres)
Golfe 101
Pétrole dans le golfe du Saint-Laurent : faits, mythes et perspectives d’avenir
Juin 2014
Coalition Saint-Laurent
Équipe de rédaction : Sylvain Archambault, Biologiste, M. Sc., Société pour la nature et les parcs (SNAP); Danielle Giroux, LL.B., M.Sc., Attention FragÎles; et Jean-Patrick Toussaint, Biologiste, Ph.D., Fondation David Suzuki
Le rapport peut être téléchargé gratuitement en français et en anglais, à l’adresse suivante : www.coalitionsaintlaurent.ca/
Avant-propos
Les enjeux liés l’exploration et à l’exploitation des hydrocarbures sont omniprésents partout autour du golfe du Saint-Laurent. Malgré l’importance et la diversité de ces enjeux, le présent document portera sur les activités pétrolières en milieu marin (offshore). En effet, la problématique marine est très différente de celle en milieu terrestre, que ce soit au niveau des techniques, des juridictions, des lois ou des impacts environnementaux. La portée limitée du présent document fait en sorte que les dossiers terrestres fort importants, tels que le pétrole de schiste d’Anticosti, les forages à Gaspé, les projets gaziers aux Îles de la Madeleine, ou encore tout autre projet strictement terrestre ailleurs autour du golfe, ne pourront y être abordés.
Sommaire (extraits)
Alors que la question des enjeux énergétiques est omniprésente sur la scène environnementale et politique canadienne, plusieurs dossiers et projets se sont hissés à l’avant-plan des discussions et des préoccupations des citoyens au cours des dernières années. Tel est le cas du projet de forage de la compagnie Corridor Resources à la structure d’Old Harry, située à seulement 80 km des îles de la Madeleine et de Terre-Neuve. Ce projet laisse entrevoir l’avènement de la filière pétrolière dans le golfe du Saint-Laurent et génère de nombreuses préoccupations auprès des communautés côtières des cinq provinces bordant le golfe.
Quelles sont les informations disponibles qui nous permettent d’avoir un portrait fidèle de la situation? Quels sont les mythes qui teintent le débat? Quelles sont les lacunes soulevées? C’est avec ces questions en tête que nous avons créé ce document, dans l’optique de débroussailler la question du développement pétrolier dans le golfe du Saint-Laurent afin de pouvoir mieux contribuer aux décisions qui seront prises quant à son avenir.
D’emblée, il importe de constater que le golfe du Saint-Laurent est une petite mer intérieure semi-fermée, près de sept fois plus petite que le golfe du Mexique. On y trouve plus de 4 000 espèces dont plusieurs sont d’intérêt économique, alors que de nombreuses autres sont en péril. D’un point de vue socioéconomique, la pêche et le tourisme sont les moteurs économiques du golfe du Saint-Laurent et sont à la base même du mode de vie des communautés côtières, la pêche générant plus de 1,5 milliard de dollars annuellement et le tourisme relié au golfe, quant à lui, 0,8 milliard de dollars. Ainsi, avec toutes ces caractéristiques, le golfe du Saint-Laurent est considéré, avec la côte sud-ouest de la Colombie-Britannique, l’un des deux endroits au Canada les plus vulnérables aux marées noires, tant au niveau environnemental que socioéconomique. Plus spécifiquement, les caractéristiques physiques et océanographiques du golfe (courants, couvert de glace en hiver, eau froide, etc.) compliqueraient grandement les opérations en cas de déversement de pétrole. Contrairement à d’autres provinces ou nations exploitant les hydrocarbures, telles que dans les Grands Bancs de Terre-Neuve (dans l’Atlantique) ou dans la mer de Norvège, un déversement dans le golfe aurait de fortes chances de demeurer captif.
À ce jour, plus de 60 000 kilomètres de levés sismiques ont été réalisés et une dizaine de puits d’exploration ont été forés dans le golfe du Saint-Laurent, avec peu de résultats concluants. [...]
Alors que les permis d’exploration dans le golfe sont suspendus du côté du Québec à la suite de l’instauration d’un moratoire en 1997, on retrouve six permis d’exploration du côté terre-neuvien, dont celui de Corridor Resources pour la structure d’Old Harry qui retient davantage l’attention du public. La compagnie a jusqu’au 15 janvier 2016 pour amorcer son forage qui est actuellement en processus d’évaluation environnementale.
Or, outre l’intérêt affirmé de plusieurs provinces côtières pour le développement de la filière d’hydrocarbures dans le golfe du Saint-Laurent, force est d’admettre que la recherche d’hydrocarbures en mer présente, à chacune des phases, des risques à connaître et à considérer, que ce soit lors de levés sismiques, du forage exploratoire ou de l’exploitation. Les impacts des levés sismiques sont causés par les sons très puissants qui peuvent affecter la vie marine, notamment les mammifères marins. Ces levés sont également sources de conflits d’usage, principalement avec les pêcheurs. Les déversements accidentels, majeurs ou mineurs ainsi que les rejets autorisés (eaux de production, etc.) sont les impacts les plus couramment associés au forage et à la production. Or, selon un rapport du Commissaire à l’environnement et au développement durable, le Canada n’est pas prêt à faire face à une marée noire majeure.
[...]
Par ailleurs, de nombreuses autres étapes se doivent d’être franchies avant d’autoriser un projet d’exploration ou d’exploitation. Il est impératif d’évaluer les impacts environnementaux et socioéconomiques de l’industrie ou des projets. Pour ce faire, divers processus d’évaluation environnementale ont eu lieu ou sont présentement en cours dans le golfe du Saint-Laurent. [...] De plus, un BAPE est réclamé au Québec par de nombreux groupes, et un processus d’examen indépendant pour l’ensemble du golfe est toujours demandé par des groupes des cinq provinces du golfe. Malgré ces nombreux mécanismes, il est préoccupant d’assister depuis 10 ans à une érosion dans les processus d’évaluation environnementale qui ont été revus à la baisse par le gouvernement fédéral.
Devant ce constat, il n’est donc pas surprenant que les impacts socioéconomiques de l’exploitation pétrolière dans le golfe soient au coeur du débat. Par exemple, au Québec, plusieurs prétendent que les retombées économiques de l’exploitation du pétrole dans le golfe permettraient, entre autres, de rembourser la dette du Québec alors que les véritables retombées économiques demeurent, à l’heure actuelle, hypothétiques puisqu’il n’existe toujours aucune réserve prouvée d’hydrocarbures à Old Harry. Les impacts socioéconomiques négatifs d’une marée noire sont aussi à considérer puisqu’ils peuvent être dévastateurs pour la pêche, le tourisme, la santé humaine et les divers écosystèmes.
Somme toute, la décision d’implanter l’industrie pétrolière dans le golfe du Saint-Laurent serait lourde de conséquences et, compte tenu des nombreuses lacunes d’ordre scientifique, technique, légal et social, l’approche de précaution s’impose. Ces lacunes, qui ont été soulevées dans divers rapports d’experts, sont résumées dans le Tableau 1 et font foi d’un encadrement inadéquat de l’industrie ainsi que d’un important manque de connaissances du golfe du Saint-Laurent qui pourraient mettre en péril les ressources renouvelables de cet écosystème déjà fragile.
L’ensemble de ces constats sous-tend ainsi la nécessité d’agir de façon responsable et donc de mettre en place un moratoire dans l’ensemble du golfe du Saint-Laurent. Seul un portrait complet des impacts sociaux, environnementaux et économiques permettrait de prendre une décision éclairée quant à l’avenir du golfe. Ce portrait doit ainsi porter sur l’ensemble du golfe qui se doit d’être étudié dans sa globalité, et non plus de façon morcelée en fonction des frontières administratives tracées par l’homme, tel que c’est le cas à l’heure actuelle. Plus que jamais, les provinces se doivent d’oeuvrer en concertation et ne peuvent prendre des décisions unilatérales qui pourraient avoir des impacts environnementaux et socioéconomiques négatifs sur les autres provinces. Dans cet effort de concertation, l’ensemble des communautés côtières des cinq provinces voisines du golfe doivent également être consultées au sujet de la décision d’ouvrir ou non le golfe à l’industrie pétrolière.
Il va sans dire que la liste des défis auxquels le golfe du Saint-Laurent fait face est imposante : zones mortes (hypoxie), changements climatiques, déclin des espèces, manque de connaissances scientifiques. Dans ce contexte, la restauration du golfe devrait être une priorité. Cette restauration passe notamment par la création d’un réseau d’aires marines protégées, un outil de bonne gestion des écosystèmes marins mondialement reconnu. Ceci est d’autant plus urgent que le Québec n’a que 1,3 % de ses milieux marins protégés, situés essentiellement dans l’estuaire du Saint-Laurent, tandis que la protection du Canada dans le golfe en est toujours à 0 % d’aires marines protégées. Rappelons que l’objectif du gouvernement du Canada est de 10 % d’ici 2020, à l’instar des objectifs mondiaux établis à Nagoya. Le Québec promet même d’y arriver en 2015, cinq ans plus tôt.
Dans un contexte mondial où les changements climatiques ne peuvent plus être ignorés, il faut, plus que jamais, miser sur une approche basée sur le développement durable et la protection de ce joyau marin qu’est le golfe du Saint-Laurent. Il nous faudra donc réfléchir à l’avenir du golfe et déterminer collectivement si nous voulons y implanter une industrie pétrolière aux multiples impacts ou miser sur sa préservation et sa restauration.
[...]
La possibilité que le Golfe du Saint-Laurent s’ouvre à l’exploration pétrolière a émergé au cours des dernières années comme l’un des dossiers chauds, non seulement au Québec, mais aussi dans les autres provinces riveraines du golfe. y-a-t-il du pétrole ou du gaz naturel sous les eaux du golfe, entre autres à Old Harry, et si oui, devrait-on l’exploiter? Le débat fait rage et se polarise selon les valeurs et les aspirations de chacun. Plusieurs s’entendent cependant sur le fait qu’une décision éclairée doit reposer sur des faits avérés et qu’une analyse rigoureuse est de mise.
De nombreux mythes teintent actuellement le débat et faussent les perceptions. et pour cause : il s’agit d’un dossier fort complexe, de juridiction provinciale et fédérale, impliquant cinq provinces, touchant à des enjeux socioéconomiques, environnementaux, légaux et techniques très vastes, souvent empreint de vives émotions, le tout déboulant dans l’actualité à un rythme effarant. L’information véhiculée étant parfois inexacte ou incomplète, nous souhaitons, par ce document, partager nos connaissances et notre expertise afin d’alimenter le débat, le tout avec un souci de rigueur.
© David Doubilet et Jennifer Hayes (via National Geographic)
À voir : L’or du golfe http://ici.tou.tv/l-or-du-golfe
Et puis, sur le plan terrestre, les pipelines creusent leurs sillons.
Le lobby des pipelines plus actif que jamais
Pas moins de 75 lobbyistes plaident pour les projets d’Enbridge et de TransCanada
Alexandre Shields, Le Devoir 19 juin 2015
Lorsque les projets d'Enbridge et de TransCanada seront en exploitation, 1,4 million de barils de pétrole de l’Ouest transiteront chaque jour par le Québec.
Preuve de l’engouement sans précédent envers les projets de pipelines, les efforts de lobbying liés à cette industrie sont plus significatifs que jamais au Québec. Le Devoir a recensé plus de 75 lobbyistes ayant des mandats qui incluent des démarches en faveur de ce mode de transport de pétrole. Il s’agit d’un nombre plus important qu’au plus fort du débat sur le gaz de schiste, ou encore que le lobby des partisans de l’exploitation pétrolière.
Sans surprise, TransCanada est l’entreprise la plus présente au Registre des lobbyistes, avec 18 noms inscrits. Deux de leurs mandats sont d’ailleurs directement en lien avec le projet de pipeline d’exportation Énergie Est. [...] Un autre mandat comprend des démarches dans le but d’utiliser «à des fins autres que l’agriculture» des lots en zone agricole «pour l’installation et l’exploitation d’un pipeline au Québec». [...]
En plus de ses 18 lobbyistes, TransCanada a mandaté un total de sept lobbyistes-conseils, donc rémunérés, pour plaider sa cause auprès des élus. Cinq d’entre eux ont pour mandat d’effectuer des démarches «afin qu’une orientation soit prise dans le but d’obtenir l’appui du gouvernement du Québec quant à l’acceptabilité sociale des projets de pipelines de gaz naturel et de pétrole au Québec».
D’autres démarches visent l’obtention de «certificats d’autorisation» en vue de travaux de «déboisement» et dans des «cours d’eau», mais aussi «afin d’effectuer des sondages géotechniques, des relevés sismiques et autres travaux préliminaires […]». Selon ce qu’annonçait la semaine dernière le gouvernement Couillard, Québec entend justement répondre à cette demande de TransCanada en guise de première étape de l’étude du pipeline Énergie Est qui sera menée par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement.
Une autre pétrolière albertaine, Enbridge, a huit lobbyistes inscrits au registre québécois. Leurs quatre mandats sont liés à l’inversion prochaine du flux dans le pipeline 9B et visent des municipalités ainsi que différents ministères. [...] Deux lobbyistes-conseils rémunérés ont le même mandat.
Il faut dire que contrairement au projet Énergie Est, celui d’Enbridge – qui acheminera 300 000 barils de brut au Québec chaque jour – doit se concrétiser très prochainement. Les deux raffineries du Québec, qui comptent utiliser ce pétrole canadien, ont d’ailleurs inscrit des mandats de lobbying en ce sens.
Dans le cas de la raffinerie de Valero, qui a 13 lobbyistes inscrits, un mandat évoque des démarches «effectuées auprès de détenteurs de charges publiques concernés afin de susciter une orientation favorable de la part du gouvernement du Québec» dans le dossier de l’inversion. Un lobbyiste-conseil doit en outre «expliquer les conséquences que pourrait générer une opposition de la part du gouvernement du Québec», mais aussi travailler afin «d’éviter qu’il ne s’y oppose advenant que ledit projet réponde à toutes les exigences en vigueur».
Les mandats des 16 lobbyistes de Suncor, propriétaire de la seule raffinerie située à Montréal, incluent aussi des «représentations auprès des titulaires de charges publiques afin que les orientations du gouvernement soient revues pour permettre l’inversion». Valero et Suncor ont aussi plaidé en faveur du projet d’Enbridge auprès de l’Office national de l’énergie.
Même le Conseil du patronat du Québec a inscrit un mandat en faveur de l’inversion du pipeline d’Enbridge, construit en 1975, mais aussi en «appui» à Énergie Est.
[...]
Au-delà du lobbying visant les élus de l’Assemblée nationale, le gouvernement Couillard a déjà fait part de son préjugé favorable envers les projets d’Enbridge et de TransCanada. Lorsque les deux projets seront en exploitation, 1,4 million de barils de pétrole de l’Ouest transiteront chaque jour par le Québec. Cette prévision devrait être une réalité dès 2020.
http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/443191/le-lobby-des-pipelines-s-active
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Mini cours 101 sur le lobbyisme :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2014/06/le-lobbyisme.html
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