10 septembre 2016

Milliardaire ou va-nu-pieds : une question de «mérite»?

Près d’un million de personnes au Québec ne mange pas à sa faim (en quantité et qualité) et le nombre d’itinérants ne cesse d’augmenter au Canada – un pays dit riche!

«Le superflu des riches devrait servir pour le nécessaire des pauvres, mais tout au contraire, le nécessaire des pauvres sert pour le superflu des riches.»
~ Jean Domat (1625-1696)

Diverses études scientifiques ont été menées sur les gens riches. On voulait savoir s’ils étaient plus heureux, vivaient en meilleure santé et plus longtemps, s’ils étaient plus intelligents, moins gentils, plus égoïstes, etc. Deux chercheurs américains, Michael Kraus et Dacher Keltner **, se sont demandé si les personnes riches se sentaient supérieures aux autres et attribuaient leur succès uniquement à leurs qualités personnelles. On s’en doute, il est bien tentant de croire que la richesse vient du travail acharné et que si les autres ne sont pas aussi riches, c’est parce qu’ils travaillent moins fort. Après avoir demandé à un groupe de participants de répondre à toutes sortes de questions concernant le rang social et la profession, Kraus et Keltner sont arrivés à la conclusion que les gens faisant partie des classes sociales les plus élevées ont réellement tendance à croire qu’ils méritent leur succès, et que ceux qui ont moins de succès le méritent, tout simplement. (Source : Actualités MSN / Société 02/09/2016)

Le mérite n’a rien à voir. Faux : les riches ont le mérite de savoir comment exploiter et profiter des classes dites inférieures. (1)


Photo : Catherine Ledner

** How the rich are different from the poor – research by Paul Piff, Michael Kraus, Jennifer Stellar, Dacher Keltner, and Robert Knight is featured in an article on social class in New York Magazine : The Money-Empathy Gap New research suggests that more money makes people act less human. Or at least less humane. (By Lisa Miller) http://nymag.com/news/features/money-brain-2012-7/

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Donner ou ne pas donner?  

Nos préjugés au sujet des mendiants sont généralement faux. Les deux raisons les plus invoquées pour refuser de donner aux itinérants sont :
1) la peur qu'ils ne soient pas réellement des sans-abri ou dans une situation difficile
2) la peur que l'argent soit utilisé pour autre chose que la nourriture, un abri ou le transport.

L'Union Square Business Improvement District, une association de 500 propriétaires fonciers du centre-ville de San Francisco, ont demandé à la firme de recherche GLS Research d’enquêter sur les mendiants en 2013. L’enquête a révélé que le mendiant typique était un homme, célibataire, inapte, d’âge moyen, appartenant à une minorité raciale, et qu’il collectait toujours moins de 25 $ par jour même s’il quêtait à tous les jours. Beaucoup de gens croient dur comme fer que l'argent donné aux mendiants leur sert à acheter de la drogue ou de l'alcool. Or selon cette recherche, 94 % des mendiants réservaient leurs maigres recettes à l’achat de nourriture.

Quelques statistiques étonnantes :
- Seulement 3 % des mendiants refuse un logement permanent qui les sortirait de la rue.
- 48 % des mendiants sont afro-américains.
- 1 mendiant sur 4 aux États-Unis a servi dans l'armée.
- Beaucoup de mendiants qui utilisent les services communautaires locaux ont au moins une maladie mentale qui peut ou non avoir été diagnostiquée en clinique.
- 36 des 50 plus grandes villes américaines ont criminalisé la mendicité.
- Jusqu'à 80 % des mendiants choisissent de dormir à l'extérieur à plein temps espérant recevoir l'argent qu’ils n’ont pas reçu dans le jour (pour s’acheter de la nourriture).

Tous les êtres humains méritent d'être reconnus

Déposer quelques pièces dans la main tendue d'un mendiant ne va pas résoudre les problèmes énumérés ci-dessus, loin de là. Mais elles pourraient contribuer à combler besoin immédiat de nourriture ou une nuit d’hébergement. [...] 
     En fin de compte, le choix de donner ou non est strictement personnel. Faites ce qui vous semble approprié. La chose la plus importante à éviter est de traiter les mendiants comme des sous-humains, ou pire encore, comme s’ils n'existaient pas. Ce sont des personnes comme vous et moi. Et, rappelons-nous qu’un cruel coup du destin peut jeter n’importe qui à la rue n’importe quand. 
     «De nombreux mendiants sont systématiquement ignorés, injuriés, harcelés, volés et attaqués. Les regarder dans les yeux et reconnaître leur statut d’humains peut être très valorisant pour eux», rapporte l'Observatoire canadien des sans-abri. 
     La prochaine fois que passerez à côté d’un mendiant, demandez-vous comment vous aimeriez que les gens réagissent si vous étiez obligé de quêter de l’argent à des inconnus pour survivre. Vous pourriez être surpris de votre réponse.

Beth Buczynski, Care2
Should You Give Money To Panhandlers? (adaptation/traduction maison) 

Make Them Visible. Les sans-abri sont-ils invisibles? Des gens ont accepté de se «déguiser» en mendiants dans leur quartier pour tester la réaction de leur proches. L’expérience d’un jour à New York a permis aux pseudo sans-abri de voir défiler devant eux des membres de la famille et des amis qui n’ont pas daigné leur accorder un seul regard. Cette vidéo a été produite à titre d’expérience avec l’idée de démontrer comment, en tant que société, nous voyons (ou non) nos voisins sans-abri. Toute expérience donne un résultat – c’est ainsi qu’est née la fondation Make Them Visible.



Dans le même ordre d’idée : Left Out. Plus de 7000 personnes dorment par terre dans les rues de Londres. L’artiste Maxwell Ruston a fabriqué un personnage en plâtre enfermé dans un sac à ordures qu’il a déposé en divers endroits de la ville pour étudier les réactions des passants. Que feriez-vous en pareille situation? «J’ai fait cette sculpture pour choquer le public, espérant éveiller une prise de conscience et plus d’empathie envers les sans-abris.» Documentaire (en anglais) : https://vimeo.com/167776522



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(1) Le clan Walton derrière l’entreprise Walmart. La fortune collective des membres du clan est évaluée à 149 milliards de dollars selon Forbes. Les revenus de Walmart en 2015 s’élevaient à l’hallucinante somme de 482 milliards de dollars. Walmart engrangerait maintenant des profits de 1,8 milliard de dollars à l’heure. De tels profits font en sorte que la compagnie est plus riche que plusieurs pays, dont l’Afrique du Sud, les Émirats arabes unis, la Norvège, la Belgique, la Suède. 
     90 % des Américains vivent à moins de 15 minutes d’un Walmart. Plus de 78 % des Américains magasinent chez Walmart (260 millions de personnes fréquentent Walmart à chaque semaine). En 2012, Walmart a ouvert entre quatre et cinq nouveaux magasins par semaine. 
     Ce n’est pas tout le monde qui veut d’un Walmart dans son patelin. En 1993, le Vermont s’est opposé à l’implantation de Walmart. Néanmoins, après vingt ans, la compagnie en ouvrait un. Mais à ce jour, il n’y a que cinq magasins sur son territoire. 
     Walmart exploite maintenant plus de 11 530 magasins dans 28 pays à travers le monde. Environ 90 % des magasins de l’entreprise fonctionnent sous un nom différent à l’international : Walmex à Mexico, Asda au Royaume-Uni, Seiyu au Japon et Best Price en Inde. En tout, Walmart exploite 72 bannières différentes à travers le monde. 
     La compagnie a plus de 2,3 millions d’employés. De ce nombre, environ 800 000 personnes travaillent à l’extérieur des États-Unis. (Source : Actualités MSN / Société)

Malheur à nous... Plus de 20 ans après l'ouverture de son premier magasin au Canada, en 1994, Walmart provoque de sérieuses secousses chez nos détaillants et supermarchés qui subissent la concurrence agressive du mastodonte américain en raison de la multiplication de ses Supercentres caractérisés par une section supermarché complète. Walmart poursuit l’expansion de son empire : «Au Canada, nous nous concentrons sur deux format : le format à escompte, auquel la plupart des gens sont habitués, et lorsque nous ajoutons l’alimentation, ça devient un Supercentre, explique Alex Roberton, porte-parole de Walmart Canada. Tous les projets que nous faisons maintenant sont des Supercentres.» Au Québec, Walmart détient 71 magasins, dont 48 Supercentres; à l’échelle nationale, il y en a 405. Une récente étude a démontré que pour chaque Supercentre Walmart par 100 000 habitants, le taux d’obésité augmentait de 2,3% et l’IMC de 0,24.

La compagnie est régulièrement accusée de sous-payer ses employés. En 2013, un magasin Walmart à Canton en Ohio a fait une collecte d’aliments auprès de ses clients – les denrées étaient destinées à ses employés qui peinaient à joindre les deux bouts. «Donnez des denrées alimentaires, s’il vous plaît, afin que nos associés [terme utilisé par l’entreprise pour désigner ses employés] puissent profiter d’un bon repas à l’Action de grâce», pouvait-on lire sur la boîte réservées aux dons. (!!) 
     Plusieurs compagnies internationales comme Walmart font fabriquer leurs produits entre autres au Bangladesh. Or la sécurité des usines est totalement inadéquate, sans parler des conditions de travail. En 2012, un incendie dans une usine de vêtements a fait 112 morts. En 2013, un complexe abritant cinq usines de ce type s'est effondré, faisant 1135 victimes. Aujourd’hui, 10 septembre 2016, un incendie dans une usine de ce type a fait au moins 21 morts et plusieurs blessés. "God forgives. I don't." (Bumper sticker)  

«Les économistes ont raison, disait un homme de bourse : le capital est du travail accumulé. Seulement, comme on ne peut pas tout faire, ce sont les uns qui travaillent et les autres qui accumulent.» ~ Auguste Detoeuf (1883-1947) 
L’industriel milita pour le rapprochement entre le patronat et les syndicats ouvriers. 

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