30 mars 2013

Ces malheureux surdoués


Crédit illustration : Olivier Thévin

Encore une coïncidence bizarre – elles le sont toujours d’ailleurs. Hier, je relisais ce texte biographique à propos de Mill. Et voilà que tantôt je tombe sur un article où il est question de pilules pouvant réduire le QI des surdoués de sorte qu’ils se sentent moins malheureux… On peut comprendre le désarroi de ces personnes – c’est comme être interné parmi les fous d’un asile psychiatrique quand on est parfaitement sain d’esprit.

Au lieu de recourir à des pilules réductrices de QI, on devrait encourager les surdoués à s’exprimer par l’écriture (un excellent défouloir) et les inciter à séjourner dans la nature régulièrement…

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[Extrait de L’Arche de Socrate, Petit bestiaire philosophique; Normand Baillargeon; Éditions Aden]

Chapitre 13
Le cochon de John Stuart Mill

Qui est John Stuart Mill?

John Stuart Mill (1806-1873), philosophe, logicien, économiste, politologue, féministe, parlementariste, fut un enfant prodige.

Son père, James Mill (1773-1836) historien, économiste et philosophe, était un disciple du créateur de l’utilitarisme, Jeremy Bentham (1748-1832); il entreprit d’éduquer son fils selon des principes associationnistes et d’en faire un futur porte-parole de l’utilitarisme. Ce fils était heureusement un génie et les résultats de cette éducation ont été hors du commun.

À trois ans le petit John apprend le grec et il entreprend ensuite de lire plusieurs auteurs classiques : Ésope, Platon et Hérodote. À huit ans, il a entièrement lu de dernier, pendant qu’il étudie l’histoire anglaise et l’arithmétique. À dix ans il commence le latin, l’algèbre et la géométrie, ainsi que les sciences naturelles. Il a alors terminé de lire Platon.

À douze ans, il devient le tuteur des autres enfants de la famille et étudie la logique. Il commence aussi l’étude de l’économie politique. À quatorze ans, il vit en France et suit à l’université de Montpellier des cours avancés de sciences et de mathématiques.

On ne s’en étonnera pas outre mesure : à vingt ans, Mill sombrera dans une profonde dépression nerveuse, dont il ne sortira que par la lecture des mémoires de Jean-François Marmontel (1723-1850) et, peut-être surtout, de la poésie de William Wordsworth* (1770-1854). Il entretient à cette époque une importante relation épistolaire avec Auguste Comte (1798-1854), dont le positivisme exerça une influence sur sa pensée.

Plutôt que de poursuivre une carrière académique, Mill travaillera pour la Compagnie des Indes. En 1851, il épouse Harriet Taylor 1807-1858 après vingt-et-un ans de fréquentation – elle était mariée quand ils s’étaient rencontrés, d’où cette longue attente jusqu’au décès du mari. Taylor exercera une influence décisive sur les écrits féministes de Mill. John Stuart Mill est mort à Avignon, où il est enterré.

COMMENTAIRE

«En 1851, il épouse Harriet Taylor 1807-1858 après vingt-et-un ans de fréquentation – elle était mariée quand ils s’étaient rencontrés, d’où cette longue attente jusqu’au décès du mari.»

Aille-oille, 21 ans! Sans doute une autre bonne raison de déprimer. Ah, les mœurs socioculturelles et religieuses…Comme elles ont évolué un peu, on a au moins acquis la liberté de divorcer. Quand je pense au dogme catholique qui stipulait que les gens étaient mariés pour l’éternité, et donc inséparables… Il y a à peine 60 ans, beaucoup de gens y croyaient encore.

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* William Wordsworth fut un auteur marquant de la période romantique anglaise. Comme d’autres romantiques, la personnalité et la poésie de Wordsworth ont été profondément influencées par son amour de la nature, en particulier par les images et les scènes de Lake District où il a passé la majeure partie de sa vie adulte. C’était un penseur sérieux et sincère dont la gravité était tempérée par la tendresse et l’amour de la simplicité.

Les jonquilles
Les vagues dansaient, pleines d’étincelles
Mais elles dansaient plus allègrement;
Pouvais-je rester, poète auprès d’elles
Sans être gagné par leur enjouement?
L’œil fixe – ébloui – je ne songeai guère
Au riche présent qui m’était offert :

Car si je repose, absent ou songeur,
Souvent leur vision, ô béatitude!
Vient illuminer l’œil intérieur
Qui fait le bonheur de la solitude;
Et mon coeur alors, débordant, pétille
De plaisir, et danse avec les jonquilles
[…]  

The world is too much with us

The world is too much with us; late and soon,
Getting and spending, we lay waste our powers:
Little we see in Nature that is ours;
We have given our hearts away, a sordid boon!
This Sea that bares her bosom to the moon;
The winds that will be howling at all hours,
And are up-gathered now like sleeping flowers;
For this, for everything, we are out of tune,
It moves us not. – Great God! I’d rather be
A Pagan suckled in a creed outworn;
So might I, standing on this pleasant lea,
Have glimpses that would make me less forlorn;
Have sight of Proteus rising from the sea;
Or hear old Triton blow his wreathed horn.

~ William Wordsworth

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