15 août 2021

Qui veut des élections fédérales, deux ans avant le temps?

«Quoi de plus insensé que de flatter le peuple pour une candidature, d'acheter ses suffrages, de pourchasser l'applaudissement de tant de fous, de se complaire à être acclamé, de se faire porter en triomphe comme une idole ou de se voir en statue d'airain sur le forum?» ~ Érasme (Éloge de la folie, Éd. Garnier-Flammarion #36)

Le pouvoir corrompt même les plus vertueux.

Quand j’entends François Legault et Justin Trudeau parler d’environnement, mes petites cellules grises font des backflips! La théorie de nos cancres politiques veut qu’on obtienne des énergies propres en créant plus d’énergie sales. C’est d’une logique incontestable. Le ministre des Ressources naturelles, Seamus O’Regan, a encore répété ce genre d’ineptie : «maintenir la compétitivité» de l’industrie [pétrolière] constitue «un élément important de notre avenir fondé sur la croissance propre». Si ce n’était pas épeurant, ce serait drôle!

Selon le dernier rapport du GIEC «À défaut de réduire substantiellement – et rapidement – les émissions mondiales de gaz à effet de serre, le réchauffement climatique déjà provoqué par l’activité humaine risque d’atteindre des niveaux catastrophiques d’ici 20 ans, prévient le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dans son rapport. Un document qui démontre la nécessité de mettre un terme aux nouveaux projets d’énergies fossiles, selon l’ONU.

Alors, que font  nos cancres canadiens? Ils accordent des permis d’exploitation de carburants fossiles en milieu marin au large de Terre-Neuve-Labrador et dans le Bas-Saint-Laurent, valides pour 30 ans (1). Ils sont bouchés ou quoi!

Réaction d’Yves-François Blanchet : Le leader bloquiste considère que le déclenchement d’une campagne électorale en plein été et en pleine pandémie relève de l’irresponsabilité. Il explique cette décision par l’appât du gain du chef libéral. Il a dit croire que l’«ambition personnelle» de Justin Trudeau et la recherche d'une majorité parlementaire l'avaient finalement emporté. «J'aurais aimé que la campagne ne porte pas sur la pandémie en cours», a admis M. Blanchet. Il a confié qu'il aurait aimé discuter notamment des conditions de vie des aînés, de la prévention d'autres pandémies, de la relance de la recherche pharmaceutique, de la protection du modèle agricole québécois, de la réduction de la production pétrolière au Canada et du réchauffement climatique.  Cependant, il s'engage à aborder le thème de la transition énergétique. «J’ai aussi le désir qu’on ait la vraie discussion sur un modèle économique d’avenir qui nous permette de sortir de l’économie du pétrole, qui nous permette d’arrêter d’engouffrer des milliards et des milliards de dollars – plus de six milliards de dollars par année au cours des quatre dernières années – dans le pétrole de l’Ouest canadien pour aller davantage vers les énergies propres», a-t-il soutenu. (ICI Radio-Canada Info, 15.08.2021)

Ce midi, au point de presse, Trudeau n’a pas cessé de répéter que le but des élections était de donner aux Canadiens l’occasion de choisir. Beaucoup de gens y voient cependant l’enfant gâté qui veut une majorité. Le premier ministre a évoqué pour une première fois une justification pour lancer une campagne électorale, en présentant la situation comme un choix que doivent faire les électeurs pour la pandémie et ses suites. «Les décisions que prend votre gouvernement maintenant vont définir l’avenir dans lequel vos enfants et vos petits enfants vont grandir», a-t-il argumenté, avant d’évoquer la récente annonce du fédéral sur l’obligation vaccinale pour les fonctionnaires fédéraux et les passagers aériens.

«Notre parlementarisme : un régime qui flotte entre les appétits de plusieurs et l'ambition d'un seul, entre l'incohérence d'une foule et l'idée fixe d'un dictateur de passage. Notre suffrage universel : un mode d'élection où la voix de quelques chefs de files, qui peuvent être de basse qualité, est comptée autant de fois qu'ils ont rallié d'amis, de clients intéressés, d'ignorants ou d'imbéciles.» ~ Lucien Arréat (Réflexions et maximes, Félix Alcan, 1911)

Caricature : Pascal / Le Devoir 15 août 2021

En tout cas Justin Trudeau a trouvé un rôle pour combler son désir d’être comédien : politicien. C’est peut-être celui qui a le mieux joué son personnage avec en prime, des costumes de scène plus ou moins heureux. Mais, après tout ce n’est que du théâtre.

Depuis que j’ai vu le documentaire «Reagan, un président sur mesure», je pense qu’il s’agit d’une pratique courante encore aujourd’hui... on n’a qu’à penser à Trump.

Ralph Salerno, l’ancien chef de la police de New York, avait dit un jour que la mafia placerait un homme à la Maison-Blanche mais qu’il ne le saurait qu’au moment où elle lui présenterait l’addition.

Reagan, un président sur mesure : de l’écran à la Maison-Blanche (ARTE 2016)

Critique d’Amélie Gaudreau / Le Devoir / 30 juin 2018

Belle idée de la part de Télé-Québec de proposer pour la fête nationale des Américains non pas un énième documentaire sur leur président actuel [Donald Trump], qui fait couler beaucoup d’encre, mais plutôt un portrait particulièrement fascinant d’un autre occupant de la Maison-Blanche qui s’est d’abord fait connaître au petit (et un peu au grand) écran : l’énigmatique Ronald Reagan. Énigmatique parce qu’on s’est souvent demandé comment un acteur très moyen, pas particulièrement brillant ni charismatique et qui vote démocrate a réussi à se faire élire d’abord comme gouverneur de la Californie, puis à la présidence des États-Unis, sous la bannière républicaine.

Ce documentaire réalisé par Clara et Julia Kuperberg et produit par Arte raconte le parcours singulier de Reagan de ses débuts (peu convaincants) à Hollywood à son élection à la Maison-Blanche en 1980, un parcours duquel émane l’influence constante de gens très près de la mafia, même lorsqu’il s’est retrouvé à la tête du syndicat des acteurs… Une fois Reagan au pouvoir, toutes les enquêtes en cours visant l’organisation criminelle tentaculaire ont été mises sur la glace…

Cette enquête à la facture classique, sur un président moins propre qu’il n’y paraît, elle-même largement inspirée par une autre enquête, celle du journaliste Dan E. Moldea, qui intervient d’ailleurs à plusieurs reprises dans le documentaire, profite de riches archives télévisuelles du président-vedette qui alimentent le contraste entre son image « léchée » et ses accointances pas toujours très nobles. Elles font inévitablement penser à un autre président qui s’est d’abord fait connaître du grand public grâce à ses performances télévisuelles.

52 minutes pour comprendre la fausse «démocratie» occidentale : Derrière le lisse cow-boy hollywoodien, derrière l'icône anticommuniste autoproclamée du camp républicain se cache un personnage retors, aux relations troubles et à l'intelligence longtemps sous-estimée.

https://www.youtube.com/watch?v=gVXkzfiDLeE   

(1) Quelle bande d’inconscients, de malades, de psychopathes! La force des lobbys pétroliers (une vraie mafia) est impossible à juguler. 

Jusqu’où des fous peuvent-ils être fous?

Photo : Plate forme Deepwater Horizon BHP, 20 avril 2010 – l’enfer sur mer 

Nous avons affaire à de la pornographie environnementale. Imaginez un dégât de l’ampleur de celui de la compagnie britannique BHP Deepwater Horizon  dans le Golfe du Mexique, on est foutus. Un journaliste avait dit «c’était comme regarder le diable en pleine face». (BHP Canada compte explorer en zone critique)

Un projet de 60 forages jugé sans répercussions majeures

Alexandre Shields / Le Devoir / 14 août 2021

L’Agence d’évaluation d’impact du Canada conclut qu’un projet de forage de 60 puits pétroliers au large des côtes de Terre-Neuve «n’est pas susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants». Ce projet sera pourtant mené dans un secteur reconnu pour la richesse et la fragilité de sa biodiversité, qui comprend plusieurs espèces de mammifères marins.

L’AEIC vient de publier la version provisoire de son rapport d’évaluation environnementale du projet pétrolier et gazier de l’entreprise Equinor, qui a été évalué en vertu de la législation mise en place par les conservateurs de Stephen Harper.

Le projet Bay du Nord, qui prévoit le forage d’un maximum de 60 puits pour extraire du sous-sol marin plus de 300 millions de barils de pétrole sur une période de 30 ans, serait mené dans le secteur de la passe Flamande, dans les eaux situées à l’est de Terre-Neuve-et-Labrador. La zone du projet a une superficie d’environ 4900 km2, où les profondeurs d’eau varient de 340 m à 1200 m. Il comprend une «zone de mise en valeur centrale» d’une superficie d’environ 470 km2, où les profondeurs d’eau vont de 1000 à 1200 m.

Dans son rapport, l’AEIC souligne que la zone où seront menés les forages compte une riche biodiversité. La pétrolière Equinor a notamment recensé 23 zones «spéciales» (désignées comme tel «en raison de leur écosensibilité»), dont 7 ont une intersection directe avec la zone du projet. L’une de ces zones est d’ailleurs désignée comme «zone d’importance écologique et biologique de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique». Les 16 autres zones spéciales sont situées à l’extérieur de la zone du projet et elles «croisent principalement les zones d’influence prévues pour les émissions sonores sous-marines».

Le promoteur a également déclaré, dans son étude d’impact, que «quinze espèces de mammifères marins ont été signalées dans la zone du projet», dont huit espèces de baleines, quatre de dauphins, une de marsouin et deux de phoques. Une neuvième espèce de baleine, les baleines à bec de Cuvier, a été détectée dans le cadre d’une étude de surveillance acoustique dans la zone du projet.

Or, selon l’AEIC, il est possible que les forages pétroliers prévus au cours des prochaines décennies aient des répercussions sur les mammifères marins, qui sont particulièrement sensibles à la pollution sonore sous-marine. Qui plus est, «le promoteur a déclaré que la passe Flamande est jugée comme un habitat important tout au long de l’année pour les dauphins, les cachalots et les baleines à bec communes», souligne le rapport.

Coup de pouce du fédéral

Le projet d’Equinor n’est pas le seul qui soit en développement au large de Terre-Neuve. Au début de 2021, le gouvernement Trudeau a autorisé 40 forages exploratoires dans une région maritime reconnue par l’ONU pour son importance écologique et biologique. Ces projets ont tous été évalués en vertu de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale adoptée par le gouvernement de Stephen Harper en 2012.

Equinor pourra ainsi forer dans une zone associée au très important secteur de pêche des Grands Bancs de Terre-Neuve. L’entreprise Chevron détient pour sa part les droits d’exploration dans une zone de «grande biodiversité» qui compte «de nombreuses espèces en péril». BHP Canada pourra également forer dans une zone qui constitue l’habitat de plusieurs espèces d’oiseaux marins, de poissons, de cétacés et de coraux, dont certaines sont protégées par la Loi sur les espèces en péril.

Cette décision d’Ottawa s’inscrit dans la volonté de Terre-Neuve de doubler sa production pétrolière après 2030 afin d’atteindre 235 millions de barils par année. Cet objectif passe par la réalisation d’au moins 100 nouveaux forages d’ici la fin de la décennie.

Au plus fort de la crise de la COVID-19 au printemps 2020, le gouvernement fédéral a également décrété l’abolition du processus d’évaluation environnementale jusqu’ici en vigueur pour tous les forages exploratoires menés sur un territoire de 735 000 km2 à l’est de Terre-Neuve. Le ministre des Ressources naturelles, Seamus O’Regan, a alors dit vouloir «maintenir la compétitivité» de l’industrie, jugeant que celle-ci constitue «un élément important de notre avenir fondé sur la croissance propre».

L’automne dernier, le gouvernement Trudeau a en outre offert 320 millions de dollars pour soutenir les travailleurs de l’industrie pétrolière en milieu marin. Il a alors confié le soin de formuler des «recommandations» sur les façons d’investir ces fonds publics à un comité contrôlé par des proches de l’industrie pétrolière. C’est ainsi que la pétrolière Husky, qui comptait un membre dans le comité, a reçu 41 millions de dollars en décembre afin de maintenir des emplois liés à un projet de développement au large de Terre-Neuve. Cette même entreprise est à l’origine du plus important déversement de pétrole de la province, survenu en 2018.

https://www.ledevoir.com/societe/environnement/624756/un-projet-de-60-forages-petroliers-en-mer-juge-sans-repercussions-majeures-par-le-federal   

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