16 juin 2016

Les pitbulls ne sont pas tous des chiens

Le pitbull Pétrolia a reçu le feu noir de Québec. La sauvegarde d’un écosystème aussi précieux que l’Île d’Anticosti, la plus grande île du Québec située dans golfe du Saint-Laurent, ne mérite pas une résiliation de contrat? Diable, c’est heurtant! 

Nos ministres ont plié l’échine les un(e)s après les autres. Difficile de se tenir debout quand les prédateurs attaquent simultanément de toutes parts.


Illustration : Willy Aractingy 

Le Loup et l’Agneau
Jean de la Fontaine

La raison du plus fort est toujours la meilleure
             Nous l'allons montrer tout à l'heure. 

             Un agneau se désaltérait 
             Dans le courant d'une onde pure. 
Un loup survient à jeun, qui cherchait aventure, 
         Et que la faim en ces lieux attirait.

«Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage? 
             Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
- Sire, répond l'agneau, que Votre Majesté 
             Ne se mette pas en colère; 
             Mais plutôt qu'elle considère 
             Que je me vas  désaltérant 
                     Dans le courant, 
             Plus de vingt pas au-dessous d'Elle;
Et que par conséquent, en aucune façon, 
             Je ne puis troubler sa boisson.
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé. 
- Comment l'aurais-je fait si  je n'étais pas né? 
         Reprit l'agneau; je tette encor ma mère 
             - Si ce n'est toi, c'est donc ton frère. 
         - Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens : 
             Car vous ne m'épargnez guère, 
             Vous, vos bergers et vos chiens.
On me l'a dit : il faut que je me venge.» 
 
             Là-dessus, au fond des forêts 
             Le loup l'emporte et puis le mange, 
             Sans autre forme de procès.
 
 
Anticosti : Québec donne le feu vert pour forer 
Par Martin Croteau, La Presse
 
(Québec) Le ministère de l'Environnement a délivré un certificat d'autorisation à Hydrocarbures Anticosti (1) pour la poursuite de sa campagne d'exploration du sous-sol de l'île, a confirmé l'opérateur du consortium, Pétrolia.
 
En matinée, le ministre de l'Environnement, David Heurtel, assurait que la demande de la coentreprise était toujours «sous analyse». Son bureau a refusé de commenter la décision, mercredi après-midi.
    Dans un communiqué, le ministère de l'Environnement affirme qu'il mènera un «suivi serré» des travaux sur Anticosti. «Il sera présent sur les sites mêmes de l'exploration pétrolière, et ce, à chacune des étapes importantes du projet, peut-on lire dans le communiqué. Il effectuera également des inspections de façon régulière afin d'assurer la conformité des opérations aux lois et aux règlements applicables ainsi qu'aux exigences et engagements contenus dans les autorisations.»
    La coentreprise a mené des sondages stratigraphiques l'été dernier. Elle doit maintenant mener trois forages par fracturation hydraulique pour confirmer le potentiel d'Anticosti. Elle a demandé un certificat d'autorisation en février. 
    Mais sa demande est survenue quelques semaines après que Philippe Couillard eut pris position contre le projet pétrolier sur Anticosti à la conférence de Paris sur les changements climatiques. Le premier ministre a dit refuser de s'associer au «saccage» de l'île et a maintes fois dénoncé les risques de la fracturation hydraulique.
    Depuis, l'opérateur de la coentreprise, Pétrolia, s'est plaint plusieurs fois de «l'hostilité» du gouvernement libéral (...) pour retarder le projet. Québec a notamment utilisé une procédure rarissime - le recours à un comité d'experts externes - pour analyser la demande de l'entreprise. 
    L'affrontement entre Québec et Pétrolia a culminé il y a deux semaines lorsque le PDG de l'entreprise, Alexandre Gagnon, a démissionné de son poste de porte-parole d'Hydrocarbures Anticosti. 
    Même si elle a obtenu le feu vert de Québec, Pétrolia ne procèdera pas à une campagne de fracturation hydraulique avant l'été 2017. Elle a annoncé le report d'un an de cette phase du projet en critiquant le «retard» dans le traitement de sa demande.
 
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Le pitbull TransCanada / Énergie Est obtiendra sans doute le feu noir pour envahir nos terres et polluer nos cours d’eau. «Des retombées de 9 milliards de dollars», assure Brad Wall, premier min. de la Saskatchewan.
 
Aucune retombée économique ne peut compenser le saccage d’une province... l’Alberta et la Saskatchewan en sont des exemples.
 
Si la Saskatchewan subit des pénuries d’eau en raison des changements climatiques justement, le Québec fournira-t-il de l’eau potable aux sinistrés «en vertu de la péréquation»? (2)
 
Brad Wall – un virulent  climato-sceptique... mais, il n’est pas méchant.
 
ICI Radio-Canada Info – Le premier ministre saskatchewannais n'entend pas demander à Québec de rembourser les sommes qu'il reçoit en vertu de la péréquation advenant un rejet du projet de pipeline Énergie Est de TransCanada, comme il l'avait déclaré en janvier. 
    Dans une conférence tenue avec son homologue québécois Philippe Couillard, Brad Wall a réitéré qu'il appuie sans réserve la construction de ce pipeline, mais que les questions que les Québécois se posent à ce sujet sont légitimes. 
    «Je vais dire cela – et je ne l'ai probablement pas dit assez clairement, je ne l'ai certainement pas dit ici : ce projet est composé aux deux tiers de la conversion d'un pipeline existant, et au tiers d'une nouvelle construction. Mais un fait demeure : la nouvelle construction est presque exclusivement dans cette province», a déclaré M. Wall. «Cela change la donne. Les Québécois vont, à juste titre, avoir des questions différentes que les autres Canadiens », a-t-il poursuivi. «Il revient au promoteur [...] de se soumettre au processus de consultation, et de s'assurer de répondre à ces questions particulières, et uniques à certains égards, parce que la construction est ici.»
 
Rappel : En janvier, Brad Wall avait fait les manchettes en déclarant sur Twitter que les maires de la région de Montréal qui s'opposent au passage du pipeline devraient rembourser leur part de la péréquation, ce qui lui avait valu des accusations de «Quebec bashing». 
    Lorsqu'on lui a demandé jeudi s'il entendait aller de l'avant à ce sujet, il a simplement répondu «Non», sourire en coin. 
    M. Couillard a pour sa part affirmé qu'il avait informé M. Wall des sept conditions que son gouvernement a imposées à TransCanada pour qu'il autorise le projet, et de la démarche qui a été convenue pour la suite des audiences du BAPE. 
    Le chef du gouvernement a par ailleurs déclaré que la décision du chef de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, de s'opposer au projet Énergie Est constitue un élément «très significatif», qui est «important dans l'histoire de ce projet» et qu'il convient de ne «pas minimiser». 
    D'une part, il est «obligatoire» de consulter les Premières Nations pour ce projet, a-t-il précisé. D'autre part, le Canada vient d'appuyer la Déclaration de l'ONU sur les droits des peuples autochtones, qui reconnaît «la notion de consentement libre et éclairé» des peuples autochtones pour des projets de développement. M. Wall a dit être au courant de cette déclaration, mais s'est borné à dire qu'il faut «reconnaître l'importance» de respecter les Premières Nations dans le processus d'évaluation en cours.
 
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ICI Radio-Canada Info – La construction du pipeline Énergie Est menacerait l'approvisionnement en eau potable de plus de 5 millions de Canadiens qui vivent dans des «zones à risque». C'est la conclusion d'un rapport publié par plusieurs groupes, dont Greenpeace et Équiterre. 
    Les auteurs de l'étude soutiennent que près de 3000 plans d'eau dans plus de 24 régions municipales pourraient être directement affectés par un déversement. Selon eux, une simple fuite pourrait «contaminer les sources d'eau potable pendant des années». 
    Le rapport affirme qu'au total, 5,1 millions de Canadiens vivraient dans des zones menacées par un éventuel déversement, dont 3,2 millions au Québec, un million en Ontario, 676 613 au Manitoba et 130 679 au Nouveau-Brunswick. 
    Près de 2,9 millions de résidents seraient dans des zones à risque situées dans la grande région de Montréal, où le fleuve St-Laurent, les rivières des Prairies, des Mille-Îles et la rivière L'Assomption, entre autres, sont menacés. 
    Un danger pour les écosystèmes – Le projet d'oléoduc Énergie Est de 4600 kilomètres vise à acheminer quotidiennement 1,1 million de barils de pétrole des sables bitumineux albertains jusqu'à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick. 
    Les auteurs rappellent que le bitume dilué que transporterait l'oléoduc pourrait causer d'importants dommages environnementaux en cas de déversement.
 
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(1) Hydrocarbures Anticosti est une société en commandite créée dans le but de réaliser des travaux exploratoires sur l'île d'Anticosti. Ressources Québec, une filiale d'Investissement Québec, en est propriétaire à 35 %, tandis que Pétrolia, Maurel & Prom et Corridor Resources possèdent chacune 21,67 % des parts.
 
(2) Dans un tweet, Brad Wall invitait les Québécois à rembourser poliment leur part des 10 milliards de dollars en péréquation qu'ils reçoivent des provinces de l'Ouest. Il avait ajouté dans une publication Facebook qu'il s'agit d'un «jour triste» quand une province qui tire part de sa position dans le pays se montre aussi «bornée» à rejeter un projet avantageux pour l'ensemble du Canada. Il ajoutait que le transport du pétrole par pipelines est plus sécuritaire et plus respectueux de l'environnement que le transport par voie ferroviaire. [Le disque rayé préféré des pro-pétrole.]

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