20 janvier 2016

Patriarcat et génocides


«Peu m’importe qu’il soit blanc, noir, jaune ou rouge. Il suffit qu’il soit un homme, il ne peut rien être de pire.» ~ Mark Twain 

On a l’impression que le monde est plus horrifiant qu’il ne l’a jamais été. C’est sans doute à cause de l’explosion démographique (plus on est de fous, plus il y a de folie) et aussi parce qu’on voit tout  en temps réel. En réalité, rien n’a changé depuis les débuts de l’histoire de l’humanité. J’ai ressemblé quelques pièces d’un vaste puzzle (des milliards de morceaux) qui semble impossible à résoudre.

L’antagonisme se retrouve dans toute la chaîne évolutive, entre espèces et à l’intérieur de chacune d’elles. La terre étant un plan d’existence basé sur la dualité, il va de soi que nous sommes confrontés aux paires d’opposés – féminin/masculin, fort/faible, beau/laid, riche/pauvre, bien-portant/malade, intelligent/idiot, bon/mauvais, supérieur/inférieur, etc. Notre façon individuelle de nous en accommoder peut faire toute la différence... La hiérarchisation fait partie du jeu. Chez l’humain, l’attribution arbitraire de valeurs sert à déterminer des prérogatives et à dominer. En outre, le pattern du bouc émissaire (souffre-douleur) renforce la hiérarchie et permet aux dominants de défouler leur agressivité; on voit cela quotidiennement. La compétition et les luttes internationales pour la suprématie sont toujours féroces et barbares.

Chez les humains les hiérarchies s’ébauchent sur des superstitions, des croyances, des idéologies et des principes spirituels, religieux, matériels, politiques et socioculturels. Le patriarcat est une structure hiérarchique qui englobe tous les règnes, auxquels on attribue une valeur supérieure décroissante. Plusieurs religions prétendent que c’est «Dieu» qui en a décidé ainsi, lui qui, bien entendu, est au-dessus de tout :
1. Hommes au-dessus des femmes
2. Femmes au-dessus des enfants
3. Humains (globalement) au-dessus des animaux
4. Animaux au-dessus de la nature
5. Nature en dessous de tout

Nous voici donc en face d’une pyramide d’autorités auxquelles chaque catégorie d’inférieurs doit se soumettre. Cet état de chose perdure parce que ce sont les hommes qui, encore aujourd’hui, désignent le rang qu’occuperont les «autres». Puisque l’homme se prend pour le roi de la création (après «Dieu»), cela lui assure le droit de vie ou de mort sur tout ce qui est «en dessous» de lui : femmes, enfants, animaux et nature.

C’est la principale cause de toutes les horreurs qui se déroulent en ce moment même sur la planète!

«L’éducation est la clé pour vaincre le terrorisme», dit Frédéric Carrier, un Québécois qui a perdu quatre membres de sa famille dans l’attentat de Ouagadougou, au Burkina Faso. «Je ne veux pas faire de politique, mais je pense que cette guerre-là, au terrorisme, que ce soit ISIS ou Al-Qaïda, il y a plusieurs moyens de les combattre. Militariser oui, je suis heureux que la coalition fasse ce qu'il faut, mais un des moyens, une des armes les plus fortes, c'était l'éducation. C'était tous des professeurs et c'est ça qu'ils allaient faire là-bas. La journée où ces jeunes-là vont arrêter de se faire endoctriner aussi jeunes et qu’ils auront une connaissance du monde, une connaissance du monde extérieur, ils diront ‘arrêtez de me conditionner, c’est fou ce que vous dites, ce n’est pas ça le bien, le mal, la morale’.» (Interview ICI Radio-Canada)
   Lors d’un autre entretien (dont j’ai perdu la trace) il disait "ce n’est pas une solution à court terme évidemment, mais à long terme elle aura son son effet". Il suggérait une éducation sans affiliation religieuse, catholique ou autre. (Non textuel)

Je suis d’accord, l’éducation est la seule arme efficace contre le terrorisme et toutes les autres formes de persécution. Enseigner le discernement et développer l’esprit critique chez les jeunes est un must, ici comme partout ailleurs.

Les hommes au-dessus des femmes et des enfants

Toutes les religions traditionnelles et les sectes de moindre envergure perpétuent une forme quelconque de misogynie, particulièrement virulente chez les intégristes. Elle est également présente dans les idéologies politiques non religieuses.

Les rabbins affirmaient que les femmes étaient incapables de recevoir une instruction religieuse profonde. La tradition islamique intégriste glorifie le meurtre des femmes et accorde à la violence conjugale un statut d’acte sacré. En Inde, les épouses sont brûlées au vitriol lorsque leurs parents sont incapables d’assumer la dot mensuelle due à l’époux; il arrive aussi qu’on les assassine pour sauver l’honneur de la famille.

Certains écrivains du Nouveau Testament (Paul en l’occurrence) et plusieurs autres «saints» étaient macho à divers degrés. Les dommages causés par leur propre peur et méfiance à l’égard des femmes sont incalculables dans notre monde d’aujourd’hui. Deux exemples de grave mépris judéo-chrétien : 
   - Augustin (354-430) : «Ève, maudite à travers la maternité plutôt que d’en être bénie, fut identifiée à une forme inférieure de la matière qui attirait l’homme vers le bas de l’échelle spirituelle. Dans les excréments et l’urine de l’accouchement, tout ce qui est vil, bas, corruptible et matériel s’incarne dans la femme, la malédiction des menstruations la rapproche des bêtes.» 
   - Thomas d’Aquin (1224-1274), parlant de ce que les femmes allaient subir en donnant naissance à leur progéniture : «Si elles se fatiguent ou meurent, cela n’a pas d’importance. Laissez-les mourir en couche, c’est pour cela qu’elles existent.»

Si ce n’étaient pas les femmes qui donnent naissance, il y a longtemps qu’elles auraient disparu de la terre; peut-être que des clones de laboratoire les remplaceront dans un avenir prochain.

Cet autre exemple de misogynie religieuse se passe de commentaire : 
   L’Inquisition catholique est à l’origine d’une publication que l’on peut à bon droit qualifier d’ouvrage le plus sanguinaire de l’histoire humaine. L’encyclique Malleus Maleficarum (Le Marteau des Sorcières) était destinée à l’endoctrinement des chrétiens sur les dangers des libres penseuses, en instruisant le clergé sur la manière d’identifier ces femmes, de les torturer et de les détruire. L’Église appelait sorcières toutes les femmes érudites et mystiques, les prêtresses, les bohémiennes, les amoureuses de la nature, les herboristes, ainsi que toutes celles qui montraient un intérêt suspect pour le monde naturel. Les sages-femmes étaient également poursuivies et mises à mort pour l’utilisation hérétique de leurs connaissances à des fins de soulagement des douleurs de l’enfantement. Après tout, ces souffrances, arguait le Vatican, n’étaient que le juste châtiment d’Ève, qui en consommant le fruit de la connaissance du bien et du mal avait perpétré le péché originel. 
   En trois cents ans de chasse aux sorcières, cinq millions de femmes furent ainsi brûlées sur le bûcher par l’Église. Le monde actuel porte encore les stigmates de cette guerre sans merci. Autrefois célébrées comme un chaînon indispensable de l’éducation spirituelle, les femmes ont été définitivement bannies de tous les cultes du monde. On ne trouve pas plus de femmes rabbins que de femmes prêtres ou imams. (Da Vinci Code)

Les femmes ont subi et subissent des indignités invraisemblables au nom de la prétendue supériorité masculine. Les femmes et les filles sont du «raw material». De la marchandise. En temps de guerre ou de guérilla elles font partie du butin. Le viol collectif des femmes est valorisé et utilisé comme arme tactique. Dans plusieurs cultures, les femmes ont encore relativement le même statut que les animaux.

Les lois et coutumes favorisent les hommes au détriment des femmes. En Occident, on a longtemps refusé aux femmes le droit à l’éducation et le droit de vote. Actuellement, certains pays refusent aux femmes le droit de propriété et de divorce tandis que l’homme en jouit; et l’adultère, permis à l’homme, entraîne pour la femme des sentences telles que le bannissement, la lapidation, la mort. Saviez-vous que dans la majorité des cultures de confession islamique radicale, et même modérée, les femmes ont le statut de mineures (donc d’irresponsables) jusqu’à leur mort? Et puis, le proverbe suivant en dit long sur l’estime qu’on porte aux femmes en Asie : «Dans la vie, la chose la plus triste, c’est de naître femme.» Et d’une façon c’est vrai étant donné la façon dont les hommes traitent les femmes. 
   «Partout dans le monde, des millions de femmes de toute race sont séquestrées, exclues, chassées, persécutées, mutilées, violées, battues, torturées et exécutées du fait qu'elles sont de sexe féminin. Crime «d'honneur», crime de guerre, crime conjugal, crime de la misogynie et du patriarcat, matricide, infanticide des filles, fratricide, etc. Les violences contre les femmes et les filles, dont la violence ultime, le meurtre, sont universelles. Pourquoi? À cause de la haine d'individus envers l'autre sexe, comme certains groupes ethniques sont victimes de la haine d'individus envers d'autres groupes (pas de tous les individus de l'autre sexe, évidemment, ni de tous les individus d'autres ethnies). Dans les deux cas, on agit au nom de motifs religieux, moraux, sociaux, culturels et politiques. Au nom de la Tradition. Une tradition qu'on préserve jalousement parce qu'elle donne à la domination sa légitimité. Partout dans le monde et au sein de nombreuses ethnies, des femmes et des filles sont persécutées parce qu'elles sont des femmes et des filles, comme les Juifs l'ont été parce qu'ils sont juifs, comme les Croates l'ont été parce qu'ils sont croates, comme des gens de couleur l'ont été parce qu'ils sont de peau noire, jaune ou rouge.» (Micheline Carrier, Sisyphe 2002)

«Tous les mâles sont construits avec les mêmes réseaux neuronaux qui ont poussé Gengis khãn à conquérir un empire deux fois plus grand que celui de Rome, avec les mêmes circuits qui ont motivé chaque descendant de Gengis à accumuler des centaines de femmes et encore plus de concubines, avec les mêmes instincts qui ont incité les sultans turcs à se faire envoyer par bateau des femmes ravissantes des quatre coins de leur royaume pour quelques nuits de gloire physique.» (Howard Bloom, Le Principe de Lucifer, Une expédition Scientifique dans les forces de l’Histoire! Le jardin des Livres)


Photo Noorullah Shirzada, AFP. On a juste envie de les prendre dans nos bras et de les bercer... Ça arrache le cœur.

Trafic d’enfants en hausse – En Europe et en Asie centrale, l'exploitation sexuelle intervient dans les deux tiers des cas, alors que dans le reste de l'Asie, le travail forcé est très largement majoritaire. Certaines formes de trafic, comme celui des enfants pour le combat armé ou pour la petite délinquance ou la mendicité forcée, peuvent représenter un problème significatif en certains endroits. (AFP)

Selon les données récentes de l’ONU au sujet du trafic des femmes et des enfants : 
   «Plus les filles sont jeunes, plus le prix demandé est élevé. Les enfants âgés de 1 à 9 ans – qui peuvent aussi être des garçons – sont vendus pour l'équivalent de 215 $CA. L'EI demande 160 $ pour une adolescente. Le prix diminue à 105 $ dès qu'une femme a atteint 20 ans, et les femmes de plus de 40 ans sont vendues pour 50 $. Des Irakiens mineurs sont de plus en plus souvent utilisés par le groupe islamiste pour commettre des attentats suicides, jouer le rôle d'informateurs ou servir de boucliers humains chargés de protéger des installations des bombardements L'État islamique est responsable de ‘violences sexuelles systématiques’ et notamment ‘d'enlèvement et d'asservissement sexuel d'enfants’. Les enfants des minorités ont été capturés dans beaucoup d'endroits, vendus sur des marchés avec sur eux des étiquettes portant des prix, ils ont été vendus comme esclaves.»

Les hommes ont du chemin à faire avant d’acquérir le statut d’humain.

Les génocides

Le siècle que l'on vient de quitter restera comme le siècle des génocides. Jamais dans l'Histoire de l'Humanité, ils ne furent si nombreux et ne firent tant de victimes. [...] 
   Pour la définition «officielle» du terme de génocide, il faut se reporter à la Convention 260.a des Nations Unies sur la prévention et la répression, en date du 9 décembre 1948, s'inspirant des travaux du chercheur polonais Raphaël Lemkin. S'entendent comme génocides des actes commis dans l'intention de détruire, en tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux :
- Meurtre des membres du groupe
- Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale des membres du groupe
- Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle
- Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe
- Transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe

Plus récemment est apparu le terme d'épuration ethnique. Ces nuances sémantiques recouvrent une réalité atroce : du point de vue du droit pénal international, le génocide est un crime spécifique contre l'Humanité.

L'histoire du XXème siècle a été écrite avec le sang des victimes des guerres et des génocides. [...]

Un phénomène bureaucratique – Face à ces massacres, on est souvent pétrifié d'effroi. On traite leurs auteurs de fous, de malades, on met cela sur le compte d'une explosion irrationnelle : il ne peut y avoir d'explications logiques car cela dépasse l'entendement. On a peur de perdre nous aussi notre humanité, alors on se désolidarise de ces «hommes». Ou bien encore, on avance des explications racistes : «les Allemands, ils ont ça dans leurs gènes, les Africains ce sont des sauvages...» 
   Mais à y regarder de plus près, comme l'ont fait un certain nombre de chercheurs, le génocide apparaît comme «un acte criminel prémédité, systématiquement organisé et mis en œuvre, avec pour objectif l'élimination de communautés civiles choisies selon des critères de race, de nationalité ou de religion.» Par ailleurs, il faut se garder d'analyser chaque génocide comme un cas spécifique n'ayant aucun point commun avec les autres. Il existe des constantes qui permettent de dresser une sorte de «schéma type» du génocide. 
   Ainsi, les génocides et massacres à caractère génocidaire ont tous été organisés par des Gouvernements officiels, jamais en période de vacance du pouvoir ou d'anarchie. Leur idéologie de la haine a été systématiquement propagée par l'appareil bureaucratique que tous les États modernes possèdent. En outre, la passivité de l'opinion mondiale (le cas du Rwanda est, à cet égard, frappant) a toujours facilité la mise en œuvre des politiques meurtrières de ces régimes. 
   Un climat de guerre, d'insécurité a, par ailleurs, toujours servi de toile de fond à ces tueries, comme si l'angoisse des populations était instrumentalisée. Au demeurant, les victimes étaient à chaque fois au cœur de la société concernée : un ennemi lointain ne pourrait pas servir de la même manière de catalyseur à ces peurs collectives. Un voisin, qui appartient à une autre classe, une autre religion ou à une autre ethnie, est plus inquiétant... Cet ennemi de l'intérieur a toujours été qualifié «d'ennemi du peuple», car perçu comme une menace pour l'identité nationale. Dans chaque cas, les massacres ont été précédés par une période de souffrance, de famine et de terreur, de sorte que la mort puisse être ressentie par les victimes en quelque sorte comme une délivrance, un acte «généreux». 
   Enfin, dans tous les cas, le génocide a été préparé et conduit dans un contexte de crise économique, politique et morale profonde, où la capacité de distinguer le Bien du Mal était presque totalement annihilée. 
   [...] Rien ne nous permet de dire qu'il n'y en aura plus, au contraire. Ici ou là, des ferments nauséabonds font craindre le pire. [...] Bien qu'imparfaite, ô combien, la démocratie est un rempart efficace contre les tentations génocidaires. Raison supplémentaire pour la défendre, mieux même, d'œuvrer à son développement à travers le monde mais aussi chez nous.

~ Régis Coromina [Inspiré d'articles de Ryszard Kapuscinski (Le Monde Diplomatique – Mars 2001) et Ben Kierman (Le Débat – Mars 1999)]


Sans squelette, ni cerveau, dépourvue de poumons et de sang, la méduse est un être mou sans queue ni tête, sans droite ni gauche, rangé au début de la classification zoologique, juste après les éponges. ~ Jacqueline Goy, ichtyologue passionnée des méduses.

Intéressant :
http://www.futura-sciences.com/magazines/nature/infos/dossiers/d/zoologie-dame-meduses-81/page/4/

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