7 février 2021

Football ou comment abîmer son cerveau

On prétend qu’il faut être «superbolé» pour comprendre les stratégies du football américain. Néanmoins, pas besoin d’être superbolé pour comprendre les impacts négatifs d’un seul Super Bowl – notamment sur l’environnement. Au début, ce furent des magnats du pétrole qui organisèrent ce type de méga show sportif. Aujourd’hui c’est un joint-venture entre les plus grandes industries – divertissement / malbouffe / alcool; la recette est infaillible pour ramasser des milliards de dollars. Ainsi donc, des millions de fans se seront goinfrés et auront bu beaucoup de bière et autres, en regardant le show en ce 7 février.

Le colloque

Michel Beaudry / Journal de Montréal, 7 fév. 2021

Journée mondiale des ailes de poulet, des gageures dans l’inconnu et les publicités les plus regardées et commentées de la planète. Premier dimanche de février, bienvenue au Super Bowl, dont le nom a été trouvé dans les années 1960 par un magnat dont les enfants s’amusaient avec une super balle. 

   Un événement typiquement on ne peut plus américain. Du sport, une portion culturelle spectaculaire à la mi-temps, une orgie de publicités et le deuxième jour de la plus grande consommation alimentaire aux États-Unis après la Thanksgiving. Le plus grand colloque de fast-food au monde.

   Plus de 100 millions d’Américains seront devant leurs téléviseurs et on croit que plus de deux millions de personnes regardent aussi le show dans 200 pays sur le reste de la planète. Puisqu’en ces temps pandémiques les gens n’ont rien à foutre, ces chiffres pourraient gonfler.

   Le nombre que j’aimerais deviner, c’est la quantité de personnes qui regardent ce match tant attendu tout en n’y connaissant strictement rien. 

https://www.journaldemontreal.com/2021/02/07/le-colloque

En effet. Mais pendant ce temps-là, que se passe-t-il dans le crâne des joueurs? Des médecins et des chercheurs étudient les effets à moyen et long terme des fréquents chocs reçus à la tête.


Photo-Illustration: Elise Swain. Getty Images / The Intercept

J'ai revu encore une fois la vidéo Concussion Protocol. Je n'ai jamais regardé de joute de football américain de ma vie. Alors les actes de violence "consentis" qu’on voit dans le documentaire me jettent par terre. C'est comme aller au front! Ah mais, les «vrais» hommes ne craignent pas les commotions cérébrales, ça fait partie du jeu. Infiniment triste de voir ces hommes se démolir pour divertir des spectateurs avides de brutalité et de violence comme au temps de la Rome décadente. Et triste de les voir, eux qu’on dit d’une intelligence supérieure, gravement compromettre leur santé – ce sport extrêmement violent peut réduire leur espérance de vie de plusieurs années. Les millions de dollars empochés ne leur rendront pas les facultés perdues en raison de dommages cérébraux irréversibles.

   Le film est doublement renversant : les images défilent à rebours au ralenti et à la fin, en accéléré. Terrible. Un documentaire de 5 minutes 30 (sans commentaires audio) qui vous fera peut-être percevoir le football autrement...

The film the NFL doesn’t want you to see: CONCUSSION PROTOCOL by Josh Begley.  A violent ballet, made with footage of every reported concussion during the 2017-2018 NFL season.

https://theintercept.com/2018/02/01/nfl-concussion-super-bowl-protocol-football/

Intercepted Podcast Bonus: The NFL’s Violent Ballet

https://theintercept.com/2018/02/01/the-nfls-violent-ballet-concussion/

 

Football et commotions force «g» 

Force «g» : la force d’accélération moyenne nécessaire pour causer une commotion cérébrale chez un humain est de 80 à 100 «g», soit l’équivalent d’une voiture qui frappe un mur de briques à 60 km/h. Un «g» correspond à l’accélération d’un objet soumis à la gravité terrestre.

Sport de commotion serait plus adéquat que sport de contact. À chaque Super Bowl je me questionne sur le fanatisme à l’égard du football. Pour essayer de comprendre, j’ai regardé deux documentaires sur la NFL, plus un reportage de Madeleine Roy intitulé «Commotions, jeunes cerveaux en péril». Instructif, et désolant de constater l’ignorance des parents et même des intervenants et entraîneurs. Et je pense que j’ai enfin compris la propagande en faveur de ce sport : compétition et violence égalent milliards de dollars de profit.

Émission Enquête  (incluant animations et graphiques) :

http://ici.radio-canada.ca/special/enquete/commotions-cerebrales/

sur Youtube :

https://www.youtube.com/watch?v=BYxwuaDVu0Y

Les gladiateurs romains s’entretuaient au Colysée, mais les vaincus mouraient sur-le-champ. Par contre, les footballeurs meurent à petit feu à force de se faire plaquer. Les dommages ne sont pas toujours apparents immédiatement, ce qui n’empêche pas l’accumulation des coups de bélier de faire insidieusement leurs ravages. «Un coup parfait, c’est quand on est face à face, à un contre un, et qu’on l’entend l’autre faire ‘âh’. Juste un petit ‘âh’», disait le champion des douleurs et des blessures Junior Seau. Ben oui, le pauvre mec vient de recevoir un coup de bélier à l’estomac ou la tête.
   Quelle différence y a-t-il entre regarder des hommes se faire déchiqueter par des lions comme au temps de la Rome décadente, et regarder au stade ou devant son écran, des footballeurs se démolir? C’est juste le menu qui a changé : «des jeux violents, des ailes de poulet et de la bière!». «À la vie, à la mort!», et le public jouit par procuration.

Souhaitons que les joueurs aient encore une tête sur les épaules après la joute.

La question qui tue : pourquoi laissons-nous la culture de la violence avoir le dessus du pavé?

Statistiques de l’orgie alimentaire 2012 – Le gaspillage a énormément augmenté depuis 2012. Par exemple, en 2012 les Américains ont consommé 1,25 milliards d’ailes de poulet (600 millions de poulets abattus pour le Super Bowl seulement imaginez le carnage dans les abattoirs); en 2020, ce fut 1,40 milliards d'ailes. Il y a dix ans, les dépenses en festivités étaient évaluées à moins de 9 milliards de dollars; en 2020 elles totalisaient 17,2 milliards de dollars.

http://situationplanetaire.blogspot.ca/2012/02/stupefiant.html 

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