6 avril 2011

Témoignage d'une française qui vit au Japon

J’ai reçu ce témoignage particulièrement touchant par email.
À partager… (Commentaire à la fin - 7 avril)

Photo: www.boston.com

«La vie ces jours-ci a Sendai  est plutôt surréaliste... Mais j'ai la chance d'être entourée d'amis qui m'aident énormément. J'ai d'ailleurs pris refuge chez eux puisque ma bicoque délabrée est maintenant totalement digne de ce nom.

Nous partageons tout : eau, aliments, ainsi qu'un chauffage d'appoint au fuel.

La nuit, nous dormons tous dans une seule pièce,  nous dînons "aux chandelles", nous partageons nos histoires. C'est très beau, très chaleureux. Le jour, nous essayons de nettoyer la boue et les débris de nos maisons.

Les gens font la queue pour s'approvisionner dès qu'un point d'eau est ouvert, ou ils restent dans leur voiture, à regarder les infos sur leur GPS.

Quand l'eau est rétablie chez un particulier, il met une pancarte devant chez lui pour que les autres puissent en profiter.

Ce qui est époustouflant, c'est qu'il n'y a ni bousculade, ni pillage ici, même si les gens laissent leur porte d'entrée grande ouverte, comme il est recommandé de le faire lors d'un séisme.
Partout l'on entend: "Oh, c'est comme dans le bon vieux temps, quand tout le monde s'entraidait! "

Les tremblements de terre continuent: La nuit dernière, nous en avons eu tous les quarts d'heure. Le hurlement des sirènes était incessant, ainsi que le vrombissement des hélicoptères au dessus de nous.

Hier soir, l'eau a été rétablie pendant quelques heures, et aujourd'hui pendant la moitié de la journée. Nous avons aussi eu droit à un peu de courant cet après-midi. Mais pas encore de gaz. Les améliorations dépendent des quartiers. Certains ont de l'eau, mais pas d'électricité et d'autres le contraire.

Personne ne s'est lavé depuis des jours. Nous sommes crasseux, mais c'est de peu d'importance.

J'aime ce sentiment nouveau, cette disparition, desquamation du superflu, de tout ce qui n'est pas essentiel. Vivre pleinement  intuitivement, instinctivement, chaleureusement et survivre, non pas en tant qu'individu, mais en tant que communauté entière...

Des univers différents se côtoient étrangement :
Ici, des demeures dévastées, mais là, une maison intacte avec ses futons et sa lessive au soleil! 

Ici, des gens font interminablement la queue pour de l'eau et des provisions, alors que d'autres promènent leur chien.

Puis aussi quelques touches de grande beauté : d'abord, la nuit silencieuse. Pas de bruit de voiture. Personne dans les rues. Mais un ciel étincelant d'étoiles.  D'habitude je n'en distingue qu'une ou deux...  Les montagnes autour de Sendai se détachent en ombre chinoise, magnifiques dans l'air frais de la nuit.

Les Japonais sont eux-mêmes magnifiques : chaque jour, je passe chez moi, comme en ce moment même où je profite du rétablissement de l'électricité pour vous envoyer ce courriel, et chaque jour, je trouve de nouvelles provisions et de l'eau sur le seuil ! Qui les a déposées ? Je n'en ai pas la moindre idée!

Des hommes âgés en chapeau vert passent de maison en maison pour vérifier que chacun va bien. Tout le monde vous demande si vous avez besoin d'aide.
Nulle part je ne vois de signe de peur. De résignation, oui. Mais ni peur ni panique!

On nous annonce cependant des répliques sismiques, voire même d'autres séismes majeurs dans les prochains mois. En effet, le sol tremble, roule, gronde.
J'ai la chance d'habiter un quartier de Sendai qui est en hauteur, un peu plus solide, et jusqu'à présent nous avons été relativement épargnés.

Hier soir, autre bienfait : le mari d'une amie m'apporte de la campagne des provisions et de l'eau.

Je viens de comprendre à travers cette expérience, qu'une étape cosmique est en train d'être franchie partout dans le monde. Et mon coeur s'ouvre de plus en plus.

Mon frère m'a demandé si je me sentais petite et insignifiante par rapport à ce qui vient d'arriver. Eh bien non ! Au lieu de cela, je sens que je fais partie de quelque chose de bien plus grand que moi. Cette «re-naissance» mondiale est dure, et pourtant magnifique!» 

COMMENTAIRE

Cette lettre est plus que touchante, elle révèle un haut niveau de «conscience» et nous montre ce que le mot «coopération» veut dire.

Co-création  

Dans la mesure où la majorité des humains ne reconnaît pas sa participation à la «création» de ce qui se passe sur terre et ignore tout de la coopération, le mot co-création reste difficile à clarifier.

Co-créer ne veut pas dire raser un site et reconstruire par-dessus. Ni créer des systèmes d’incarcération tels que les villes.

La co-création échappe à notre compréhension parce qu’elle n’a rien à voir avec le sentiment de victime et qu’elle suppose une vraie «coopération» - un autre mot à redéfinir. Si nous savions ce qu’il signifie, les nations ne passeraient pas leur temps à se faire la guerre entre elles. Nous associons ce mot à accords scellés par une poignée de main, à concessions en échange de gains et à réunions de comités infertiles. Voilà pourquoi une institution comme Les Nations Unies ne peut pas être efficace. Elles n’a pas les jetons pour négocier ni les outils nécessaires pour résoudre cette manche globale. Tant et aussi longtemps que nous nous sentirons impuissants à modifier notre réalité, que nous resterons séparés et ignorants de notre but commun, la co-création demeurera un concept alléchant, mais impraticable.

La seule façon de sortir des ornières est de retrouver notre pouvoir, individuel et collectif, afin d’ouvrir la voie à une autre façon d’interagir. Co-création et coopération s’exercent entre «égaux», et présupposent intégrité, vérité et volonté de bien-être mutuel.

1 commentaire:

  1. La catastrophe nucléaire japonaise n’est que le couronnement implacable de toute l’histoire de la révolution industrielle. Les tenants du pouvoir mondial couvrent cette catastrophe d’une chape de plomb, rien de tel pour masquer la pollution radioactive…
    La croissance à tout prix est maintenue et relègue aux oubliettes de l’histoire les questions planétaires vitales inhérentes à toute société humaine…
    Que reste-t-il aux espoirs humanistes face à cet imaginaire collectif morbide ?
    Arriverons-nous à changer le monde avec tous ces petits robots biologiques travailleurs-consommateurs qui confortent l’embrigadement dans la société de fabrication industrielle des besoins ?
    En attendant que de salvatrices « co-créations » et coopérations s’exercent entre «égaux», la production d’électricité à partir du nucléaire continue d’agresser la vie et la mort nucléaire sème à toute volée…
    La boite de pandore est ouverte, il parait qu’en son fond subsiste l’espoir !
    Y.B.

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