~ Alexandra David-Néel
«La
responsabilité du choix, c’est aussi oser décider de quel côté on se situe dans
une société injuste, traversée de conflits et marquée par l’indignité. C’est
pourquoi nous sommes tous des êtres politiques, que nous le voulions ou non.
Nous vivons dans une dimension politique fondamentale. Par le fait même
d’exister, nous passons un contrat avec tous nos contemporains, mais aussi avec
les générations futures.
Qu’est-ce qui conditionne nos décisions?
Qu’est-ce qui oriente les choix que nous faisons, les idées qui sont les
nôtres, ce que nous trouvons par exemple inadmissible? Que choisissons-nous de
défendre, et que choisissons-nous de rejeter?
Avoir la possibilité de choisir ce à quoi
on consacre son existence est un grand privilège. Pour la très grande majorité
des habitants de la planète, la vie est fondamentalement une affaire de survie,
dans des conditions dramatiques. [...] Au cours des millénaires, très rares
sont ceux qui ont pu se consacrer à autre chose qu’à la survie. [...]
Les révoltes et les révolutions ont toujours
eu le même enjeu. Lorsqu’on ne peut survivre alors qu’on s’échine au travail
jusqu’au bout de ses forces, il ne reste pas d’autres solution que de se révolter.
C’est après le passage à la révolte que la question du «droit à autre chose»
s’affirme et se précise.
[...]
Ceux qui vivent dans les marges extrêmes
d’une société n’on aucun choix.
Se coucher dans la rue pour mourir n’est pas
un choix. Se laisser mourir de faim n’est pas un choix. Nous avons aujourd’hui
tous les moyens nécessaires pour éradiquer la misère absolue et hisser
l’ensemble des êtres humains vivants au-dessus du seuil de malnutrition. Nous
choisissons de ne pas le faire. C’est un choix que je ne peux considérer
autrement que comme un acte criminel. Mais il n’existe pas de tribunal habilité
à poursuivre, à l’échelle globale, les criminels responsables du fait que la
faim et la misère ne sont pas combattues à l’aide de toutes les ressources
disponibles. Et qui nous entraînent tous à être complices et à avoir notre part
de responsabilité dans ce choix. »
~ Henning
Mankell (SABLE MOUVANT, Éditions du Seuil, septembre 2015)
UN RACISME
APPAREMMENT INCURABLE
Il est
enraciné depuis si longtemps...
Il aurait été
vain que des témoins appellent des policiers pour stopper l’agonie par asphyxie
de 8 minutes de George Floyd par un des leurs avec la complicité de trois de
ses collègues. On aurait cru qu’il s’agissait d’un meurtre en direct comme on
en voit paraît-il sur le dark web. «Vas-tu
appeler des policiers à ton secours s’ils sont tes ennemis?», résumait un
manifestant afro-américain. La jeune femme qui a filmé le meurtre a publié une
vidéo où elle témoigne en pleurant à chaudes larmes de son sentiment de totale
impuissance à pouvoir l’empêcher; néanmoins le fait de l’avoir diffusée a fait
réfléchir le monde entier.
Homicide involontaire,
franchement... Derek Chauvin savait ce qu’il faisait; et c’est en voyant
l’arrestation filmée par un autre témoin qu’on l’a bien compris.
Le professeur
de droit à l’Université de Montréal Hugues Parent ne veut pas spéculer dans le
cas du policier Derek Chauvin, n’étant pas un expert du droit criminel
américain, mais il entrevoit déjà la question qui surgira. «La question
qui se posera est celle-ci : la
technique utilisée pour maîtriser le suspect est-elle enseignée et autorisée?
La maintenir aussi longtemps peut-elle la rendre illégale? Considérant que
George Floyd était neutralisé, le policier peut-il invoquer qu’il craignait
pour sa vie?»
La réponse du
magazine de satire sociale et politique THE
ONION :
News in brief 5/26/20
Minneapolis
Police Now Requiring Officers To Undergo Ergonomics Training To Better Protect
Knees
MINNEAPOLIS – Apologizing for a lack of oversight
following the death of George Floyd after police officer Derek Chauvin pinned
him to the ground, Minneapolis Police Department officials announced Tuesday
that they are now requiring all officers to undergo ergonomics training to
better protect their knees. “After reviewing video of the incident, we are
disturbed by the officer repeatedly placing excessive stress on the knee joint,
and will immediately implement stretching protocols to ensure this never
happens again,” said a spokesperson for the Minneapolis police, noting that the
officer’s actions were completely antithetical to the department’s standards
for long-term joint health. “Frankly, the officer could have done permanent
damage to his ACL while crushing a suspect’s windpipe like that. If our
officers are going to be out in the field kneeing people in the neck over and
over again, that’s a repeat-use injury just waiting to happen, and we must
address it. We need to ensure all of our officers know how to act in a more
dangerous situation where they may be required to lift with their backs.” The
Minneapolis Police Department added that normally they would place the involved
officer on desk duty, but in this case they didn’t want to risk causing further
damage to his knees.
Mort de George Floyd : que signifient
les accusations contre Derek Chauvin?
Isabelle
Richer, chroniqueuse judiciaire
Radio-Canada
Info, 3 juin 2020
La mort de
George Floyd par suffocation embrase les États-Unis depuis plus d’une semaine
maintenant. Le congédiement du policier Derek Chauvin n’y a rien changé, ni
même son arrestation et sa mise en accusation pour meurtre.
Les accusations contre Derek Chauvin ont été
déposées en un temps record à Minneapolis. L’ex-policier a d’abord fait face,
vendredi dernier, à un chef d’homicide involontaire et à un autre de meurtre au
3e degré, une accusation qui n’existe pas en droit canadien. D’ailleurs, cette
accusation n’existe que dans trois États américains, dont le Minnesota.
Puis, mercredi après-midi, le procureur
général de l’État a annoncé qu’il ajoutait, contre Derek Chauvin, une troisième
accusation aux deux autres : un chef de meurtre au 2e degré, soit un meurtre
sans l’intention de causer la mort, mais en commettant un crime.
Il a aussi déposé des accusations de
complicité de meurtre pour les trois autres agents de police qui se trouvaient
avec lui.
Le 3e degré, proche de la négligence
criminelle
L’accusation
initiale de meurtre au 3e degré signifiait le fait de "causer la mort de
façon non intentionnelle ni préméditée, mais en présentant une indifférence
totale à l’égard de la vie d’autrui".
Cette définition ressemble de façon
frappante à la définition de la négligence criminelle dans notre système de
droit. Ici, on parle d’"insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la
vie d’autrui".
Quant à l’homicide involontaire, il
signifie, comme son nom l’indique, que la mort n’est pas voulue, mais qu'elle
n’est pas le résultat d’un accident. La définition, en droit américain, est
quasi identique à celle du meurtre au 3e degré.
Il est hasardeux d’essayer d’établir des
parallèles entre le droit américain et le droit canadien. Bien que nous soyons
voisins, notre héritage et nos pratiques se distinguent de plusieurs façons.
On y disait essentiellement que la Cour
suprême des États-Unis fait en sorte que les policiers réussissent à s’en tirer
même dans des cas de meurtre, en raison d’une immunité relative qui s’est
élargie avec le temps.
Qu’en est-il de cette immunité? De quoi
parle-t-on? Existe-t-elle ici?
Immunité relative
Cette
«immunité relative» dont on parle aux États-Unis, explique Hugues Parent,
professeur de droit à l’Université de Montréal, ne s’applique pas dans les
procès criminels. [...]
Suite :
UNE PANDÉMIE APPAREMMENT
DURABLE
Une crise dont on ne revient pas,
selon Alain Deneault
Le Devoir / 1er
juin 2020
La lutte
contre la COVID-19 nous plonge dans une crise qui bouleverse nos certitudes.
Cette crise va-t-elle modifier notre façon de vivre et notre rapport aux autres?
Le Devoir a demandé à différentes personnalités de réfléchir aux conséquences
de la pandémie dans nos vies. Cette réflexion vous est présentée en page Idées
pendant quelques semaines. Aujourd’hui : Alain
Deneault, le capitalisme et l’économie.
Entrevue avec
Alain Deneault à Desautels Le dimanche :
Regard de philosophe : «Non, tout
n’ira pas bien si on continue comme on le fait»
«Il faut
vraiment saisir cette occasion pour travailler à une régionalisation des modes
d’organisation et à une modération de notre rapport à la consommation.»
Au-delà de l’urgence sanitaire, Alain
Deneault pense que la pandémie du coronavirus, aussi douloureuse soit-elle,
doit être l’occasion pour la planète d’observer une halte salvatrice et de
repenser son modèle de production et de consommation.
Le philosophe est sans détour. Dans la
fièvre du coronavirus qui s’empare du monde, avec son lot de morts et d’effets
collatéraux, il est naturel de s’allier solidairement pour faire front commun à
la pandémie, mais il faut se garder de verser dans un optimisme béat.
Il recommande de ne pas trop se gargariser
de slogans triomphants, du genre «Tout ira bien», car, prévient-il, «non, tout
n’ira pas bien si on continue comme on l’a fait. C’est la leçon qu’il faut
tirer, il ne faut pas se fermer les yeux en disant : tenons bon et bientôt tout
continuera comme avant.»
En entrevue à l’émission Désautels le dimanche, le professeur de
philosophie à l’Université de Moncton prône une espèce de catharsis en ces
temps de crise. «C’est un moment existentiel, c’est un moment aussi
intellectuel où on peut collectivement se demander d’où on vient et où on va.
Et qu’est-ce qu’on fait, comment on s’organise et comment s’explique la crise
dans laquelle on est?»
En d’autres termes, il faudrait faire du
problème «un élément déclencheur pour penser plus largement notre rapport au
monde».
Effets secondaires
Grand Corps
Malade
En ces temps confinés on s'est
posés un peu
Loin des courses effrénées on a ouvert les yeux
Sur cette époque troublée, ça fait du bien parfois
Se remettre à penser même si c'est pas par choix
Loin des courses effrénées on a ouvert les yeux
Sur cette époque troublée, ça fait du bien parfois
Se remettre à penser même si c'est pas par choix
Alors entre les cris d'enfants et le travail scolaire
Entre les masque et les gants, entre peur et colère
Voyant les dirigeants flipper dans leur confuse gestion
En ces temps confinés, on se pose des questions
Et maintenant…
Et si ce virus avait beaucoup d'autres vertus
Que celle de s'attaquer à nos poumons vulnérables
S'il essayait aussi de nous rendre la vue
Sur nos modes de vie devenus préjudiciables
Si on doit sauver nos vies en restant bien chez soi
On laisse enfin la terre
récupérer ce qu'on lui a pris
La nature fait sa loi en reprenant ses droits
Se vengeant de notre arrogance et de notre mépris
Et est-ce un hasard si ce virus immonde
N'attaque pas les plus jeunes, n'atteint pas les enfants
Il s'en prend aux adultes responsables de ce monde
Il condamne nos dérives et épargne les innocents
Ce monde des adultes est devenu si fébrile
L'ordre établi a explosé en éclats
Les terriens se rappellent qu'ils sont humains et fragiles
Et se sentent peut-être l'heure de remettre tout à plat
La nature fait sa loi en reprenant ses droits
Se vengeant de notre arrogance et de notre mépris
Et est-ce un hasard si ce virus immonde
N'attaque pas les plus jeunes, n'atteint pas les enfants
Il s'en prend aux adultes responsables de ce monde
Il condamne nos dérives et épargne les innocents
Ce monde des adultes est devenu si fébrile
L'ordre établi a explosé en éclats
Les terriens se rappellent qu'ils sont humains et fragiles
Et se sentent peut-être l'heure de remettre tout à plat
Et si ce virus avait beaucoup
d'autres pouvoirs
Que celui de s'attaquer à notre respiration
S'il essayait aussi de nous rendre la mémoire
Sur les valeurs oubliées derrière nos ambitions
On se découvre soudain semblables, solidaire
Tous dans le meme bateau pour affronter le virus
C'était un peu moins le cas pour combattre la misère
On était moins unis pour accueillir l'aquarius
Et si ce virus avait le don énorme de rappeler ce qui nous est vraiment essentiel
Les voyages, les sorties, l'argent ne sont plus la norme
Et de nos fenêtres on réapprend à regarder le ciel
On a du temps pour la famille, on ralenti le travail
Et même avec l'extérieur on renforce les liens
Que celui de s'attaquer à notre respiration
S'il essayait aussi de nous rendre la mémoire
Sur les valeurs oubliées derrière nos ambitions
On se découvre soudain semblables, solidaire
Tous dans le meme bateau pour affronter le virus
C'était un peu moins le cas pour combattre la misère
On était moins unis pour accueillir l'aquarius
Et si ce virus avait le don énorme de rappeler ce qui nous est vraiment essentiel
Les voyages, les sorties, l'argent ne sont plus la norme
Et de nos fenêtres on réapprend à regarder le ciel
On a du temps pour la famille, on ralenti le travail
Et même avec l'extérieur on renforce les liens
On réinvente nos rituels, pleins
d'idées, de trouvailles
Et chaque jour on prend des nouvelles de nos anciens
Et si ce virus nous montrait qui sont les vrais héros
Ceux qui trimaient déjà dans nos pensées lointaines
Ce n'est que maintenant qu'ils font la une des journaux
Pendant que le CAC 40 est en quarantaine
Bien avant le Corona l'hôpital suffoquait
Il toussait la misère et la saturation
Nos dirigeants découvrent qu'il y a lieu d'être inquiets
Maintenant qu'il y a la queue en réanimation
On reconnaît tout à coup ceux qui nous aident à vivre
Et chaque jour on prend des nouvelles de nos anciens
Et si ce virus nous montrait qui sont les vrais héros
Ceux qui trimaient déjà dans nos pensées lointaines
Ce n'est que maintenant qu'ils font la une des journaux
Pendant que le CAC 40 est en quarantaine
Bien avant le Corona l'hôpital suffoquait
Il toussait la misère et la saturation
Nos dirigeants découvrent qu'il y a lieu d'être inquiets
Maintenant qu'il y a la queue en réanimation
On reconnaît tout à coup ceux qui nous aident à vivre
Quand l'état asphyxie tous nos
services publics
Ceux qui nettoient les rues, qui transportent et qui livrent
On redécouvre les transparents de la république
Et maintenant…
Alors quand ce virus partira comme il est venu
Que restera-t-il de tous ses effets secondaires
Qu'est-ce qu'on aura gagné avec tout ce qu'on a perdu
Est-ce que nos morts auront eu un destin salutaire
Et maintenant…
Et maintenant…
Et maintenant…
Et maintenant…
Ceux qui nettoient les rues, qui transportent et qui livrent
On redécouvre les transparents de la république
Et maintenant…
Alors quand ce virus partira comme il est venu
Que restera-t-il de tous ses effets secondaires
Qu'est-ce qu'on aura gagné avec tout ce qu'on a perdu
Est-ce que nos morts auront eu un destin salutaire
Et maintenant…
Et maintenant…
Et maintenant…
Et maintenant…
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