26 juin 2020

Des touristes comme des bulldozers

La pandémie est une crise humanitaire, non pas une crise économique qui en est une conséquence.

Parmi les avantages du confinement :
– importante réduction de la pollution atmosphérique (smog) et sonore (bruit – construction, transport routier/aérien, etc.)
feux d’artifice polluants interdits (1)
absence de touristes (2)

Dommage, les touristes ont déjà commencé à ravager certains lieux de villégiature de prédilection.

Une cohorte de touristes dépourvus de conscience, de savoir-vivre et de respect ont laissé des ordures dans les rues de Rawdon, sur les trottoirs, les terrains privés, les tables à pique-nique, dans l’eau et la forêt du parc des Cascades. Je comprends les régions qui souhaitent fermer la porte aux abrutis qui souillent leurs territoires.

Pourquoi s’asseoir dans l’eau sur une roche à Rawdon pour texter quand on peut le faire chez soi dans son bain...?

 

 
Photos : vidéo Instagram Marie Soleil Brière 

Aux grands maux les grands remèdes. Envahie durant la fin de semaine par des centaines de visiteurs plus ou moins respectueux voulant profiter des berges de ses bucoliques cascades, la municipalité de Rawdon, dans Lanaudière, a décidé, lundi, que l’accès à ses parcs serait réservé à ses résidants, au moins pour une semaine.
   C’est que la fin de semaine [20-21 juin] a été pénible. Le site du parc des Cascades a été littéralement envahi par des visiteurs. Les mesures sanitaires en ces temps de COVID-19 étaient impossibles à respecter, comme en témoignent de nombreuses photos publiées sur les réseaux sociaux. La police a dû être appelée en renfort, dimanche, pour gérer la circulation hors du commun, et le manque de civisme de nombreux visiteurs éphémères a été dénoncé de toutes parts.

Audrey Ruel-Manseau / La Presse 22 juin 2020

Y’a de quoi devenir touristophobe – un scénario similaire s’est déroulé au parc national du Mont-Saint-Bruno en fin de semaine.

«L’homme descend du singe, non pas du sage.» ~ Boucar Diouf

On a demandé au caricaturiste Serge Chapleau s’il était optimiste ou pessimiste. Réponse : «Très optimiste, car je suis témoin en permanence de la bêtise humaine.»

Rétrospective Chapleau  – Profession : Caricaturiste, au Musée McCord, jusqu’au 7 mars 2021 

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(1) Le feu d’artifice, ce sont 15 minutes de féérie pour 50 à 70 bombes... Réaliser une telle manifestation nécessite une préparation extrêmement précise et rigoureuse car une simple petite erreur peut être mortelle pour un artificier ou un spectateur.

Le feu d’artifice : un cocktail de produits chimiques

Le souffre, le baryum, le magnésium, le chlore et le sulfure constituent les éléments principaux entrant dans la fabrication des pièces pyrotechniques.
   Les projectiles sont nombreux, mais la plus courante est la bombe. Sphérique ou cylindrique, elle est constituée d’une chasse pour la charge explosive, d’une espolette pour le retardement et la prise d’altitude, et d’une sphère d’éclatement pour la composition pyrotechnique.
   Placée dans un mortier, la bombe est propulsée dans l’air grâce à de la poudre noire. Mélange de souffre (10%), de charbon (15%) et de salpêtre (75%), cette poudre, originaire de Chine, permet la propulsion, la couleur, le bruit, l’allumage de la bombe, la propagation et le retardement. Elle permet aussi la combustion, faisant souffrir l’environnement.
   En explosant, la bombe libère des millions de particules de poussières très fines et du gaz qui peuvent se rabattre sur les spectateurs en raison du vent où se maintenir dans l’atmosphère quelques jours puis se déposer dans l’environnement (forêts, champs, mer...).
   Ces particules issues de l’explosion d’un feu d’artifice, seraient 5 fois plus polluantes que celles du smog, estime une étude menée par la ville de Montréal.


(2) Autre avantage du confinement : l’horrible tourisme de masse polluant et destructeur a cessé d’exister temporairement.
   L’industrie touristique a graduellement implanté le tourisme dans tous les pays du monde comme étant une source de revenus indispensable pour les «locaux». Pas un seul centimètre de plage, de parc forestier, de montagne, de ville et de village n’échappe à cette activité mercantile. Pourquoi? Parce que les revenus sont proportionnels aux immenses cruisers et autres moyens de transport qui sillonnent la planète. Si ce n’était pas extrêmement lucratif pour les promoteurs, ça n’existerait pas.

Des mégatendances touristiques à l’image de notre monde

Le tourisme serait responsable d’environ 5 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, dont près des trois quarts découlent du transport aérien (40 %) et automobile (32 %). Les événements météorologiques extrêmes frappent, quant à eux, durement les régions côtières où se concentre l’offre touristique de nombreux pays. Et puis, la «surfréquentation touristique» peut aussi infliger des dommages, tant à l’environnement qu’au tissu économique, social et culturel des communautés d’accueil. l’OCDE se demande également si, en cette ère d’hyperconnectivité technologique, mais de tensions géopolitiques et sécuritaires, le monde penchera plus vers «une citoyenneté mondiale» ou «le repli sur soi».


J’opine du bonnet (5/5) :

Tourisme : «L’enfer, c’est les autres»
Benoit Léger / Libre opinion
Le Devoir 19 juillet 2019

 
Photo: Cagkan Sayin / Getty Images. «Les touristes visitent les hauts lieux comme ils vont au Walmart, espérant combler le vide de leur être en consommant toujours davantage dans une boulimie de l’avoir», estime l'auteur.

Demandez aux gens ce qu’ils comptent faire à la retraite et une fois sur deux ils vous diront qu’ils veulent voyager. Or il semble qu’ils tiennent parole à en juger par ce que j’observe depuis que j’y suis, moi, à la retraite. Le tourisme de masse m’assomme, et de plus d’une façon.
   D’abord, il y a tous ces clients d’Airbnb qui prennent la moitié des logements de ma rue du Plateau. Dans un va-et-vient continuel de valises à roulettes, ils se relaient sans que jamais l’on voie l’ombre d’un propriétaire. Ils font la fête jusqu’aux petites heures, mettent leurs déchets à la rue n’importe quand et n’importe comment. Ils viennent d’un peu partout dans le monde pour dépenser leurs dollars chez nous pendant que nous dépensons les nôtres chez eux.
   Que viennent-ils faire ici au juste? Ils auraient pu faire la même chose à la maison. Qu’y a-t-il ici qu’ils n’ont pas déjà à Paris, à Londres ou à Tokyo? Ils se prennent en photo devant les peintures murales de notre immeuble comme s’il s’agissait des grottes de Lascaux. Ils envahissent le mont Royal comme s’ils voyaient un parc urbain pour la première fois. Ils font la queue devant les restos des guides touristiques. Et surtout, activité suprême du touriste de masse, ils font les magasins et achètent les mêmes produits «made in China» qu’ils ont chez eux.
   Ma copine et moi avons décidé cette année de fuir la ville en allant séjourner aux Îles-de-la-Madeleine. Ce havre de paix et de silence allait nous permettre de nous ressourcer. Un peu prévenus, nous avons eu la bonne idée de nous y rendre en juin plutôt qu’en juillet ou en août. Nous avons ainsi évité de justesse les hordes de vacanciers qui envahissent les lieux dès que le thermomètre dépasse un peu les vingt degrés. Déjà, le dernier week-end avant notre retour, nous avons senti la différence. Cap-aux-Meules était devenue Old Orchard.

Remplir le vide
L’avidité des voyageurs ne connaît pas de fin. Avidité comme dans remplir le vide. Avidité comme dans désirer quelque chose avec violence. Ils visitent les hauts lieux de l’humanité comme ils vont au Walmart, espérant combler le vide de leur être en consommant toujours davantage dans une boulimie de l’avoir. Tout cela est en effet très violent.
   J’ai vu aux Îles des gens faire un égoportrait devant les plus beaux paysages du monde sans jamais prendre ne serait-ce que quelques minutes pour les observer et méditer sur la mesure de l’espace et du temps. Ils cochent une liste comme s’ils étaient à l’épicerie et se pressent d’aller ensuite se faire bronzer sur la plage, armés de leur portable. Écouteurs aux oreilles, canette de bière à la bouche, le vide se comble par tous les trous.
   Il en va du tourisme comme du reste. Le plus est l’ennemi du mieux. Huit milliards de Terriens qui s’agglutinent, bougent et consomment constamment, c’est le désastre assuré. Bien sûr, même si je tente de m’y soustraire le plus possible, je participe un peu à tout ça. Le problème, c’est toujours les autres.


Y a-t-il trop de touristes sur la planète?
Yanik Dumont Baron 
ICI Radio-Canada Info 5 septembre 2019

Vous l’avez peut-être remarqué lors de vos vacances estivales : certaines destinations sont submergées de touristes. Une situation particulièrement visible en Europe, le continent le plus visité.
   «Du monde», il y en vient beaucoup à Venise. Plus de 30 millions de touristes chaque année. Soit 500 touristes pour chaque résident. L’équivalent d’un milliard de visiteurs sur l’île de Montréal en un an!
   «Riche et pauvre, tout le monde a le droit de visiter. Il suffit que les personnes se comportent décemment et qu'elles respectent la ville.»
   Justement, avec le tourisme de masse, Venise a découvert qu’ils ne sont pas tous aussi respectueux. «Certains jettent des déchets dans le canal», lance le jeune gondolier Jacomo. «D'autres s’y baignent. Venise, ce n'est pas Disneyland... on ne peut pas faire ça!»
   Il n’y a pas que Venise qui vit des jours surchargés. Lisbonne, Reykjavik, Phuket, Tokyo, des parcs nationaux d’Amérique du Nord. Un peu partout sur le globe, les destinations populaires sont prises d’assaut.
   L’an dernier, 1,4 milliard de personnes ont visité un autre pays, selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). C’est environ le cinquième de la population mondiale. Un nombre qui devrait bondir à 1,8 milliard d’ici 2030, d'après l’OMT.
   La baisse des coûts du transport aérien explique en partie cette explosion du tourisme. Plusieurs viennent de pays émergents, comme de l’Inde ou de la Chine.
   Le tourisme est maintenant une industrie mondiale qui pèse lourd : 1600 milliards de dollars américains dépensés en 2017, selon l'OMT. L’équivalent de 10 % de toute la richesse générée sur la planète.

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