Émouvante vidéo – on voit qu’elle pense et ressent ce qu’elle dit :
http://www.ted.com/talks/jane_fonda_life_s_third_act.html
Étrangement, c’est exactement le ton que je veux privilégier
dans mon prochain blog : créer, construire, à l’intérieur même de la transformation
qui fait parfois figure de démolition.
***
Transcriptions
: TED.com
Le troisième acte
de la vie
Jane Fonda, décembre
2011
Il y a eu de nombreuses révolutions au cours du
siècle dernier, mais peut-être bien aucune aussi significative que la révolution
de la longévité. Nous vivons aujourd'hui en moyenne 34 ans de plus que nos
arrière-grands-parents. Pensez à ça. C'est l'équivalent d'une seconde vie
adulte complète qui a été ajoutée à notre durée de vie. Et pourtant, en grande
partie, notre culture ne s'est toujours pas arrêtée sur ce que cela implique. Nous
vivons toujours le même paradigme de l'âge suivant le modèle d'une courbe. Voilà
la métaphore, la vieille métaphore. On nait, on culmine en milieu de vie et on
chute jusqu'à la décrépitude. (Rires)
L'âge en
tant que pathologie
Mais plusieurs personnes de nos jours -- des
philosophes, des artistes, des docteurs, des scientifiques -- perçoivent sous
un angle nouveau ce que j'appelle le troisième acte, à savoir, les trois
dernières décennies de notre vie. Ils réalisent qu'il s'agit en effet d'une
étape de développement de la vie ayant sa propre signification -- aussi
différent du milieu de la vie que l'adolescence l'est de l'enfance. Et ils se
demandent -- nous devrions d'ailleurs tous nous demander -- comment doit-on utiliser
ce temps? Comment le vivre avec succès? Quelle est la nouvelle métaphore
appropriée pour la vieillesse?
J'ai passé la dernière année à rechercher et à
écrire à ce sujet. Et j'en suis venue à la conclusion qu'une métaphore plus
appropriée pour la vieillesse est celle d'un escalier -- l'ascension de l'esprit
humain vers la sagesse, la plénitude et l'authenticité. L'âge perçu non pas en
tant que pathologie, mais bien en tant que potentiel. Et devinez quoi? Ce
potentiel n'est pas réservé à quelques chanceux. Il apparait plutôt que la
plupart des gens âgés de plus de 50 ans se sentent mieux, sont moins stressés, sont
moins hostiles, moins anxieux. On tend à voir davantage les points communs que
les différences. Certaines études avancent même qu'on est plus heureux.
Ce n'est pas ce à quoi je m'attendais, croyez-moi.
Je viens d'une longue lignée de dépressifs. Alors que j'approchais la fin de la
quarantaine, quand je me réveillais le matin, mes six premières pensées étaient
toutes négatives. Cela m'a fait peur. Je me suis dit, ô mon dieu, je vais
devenir une vieille femme grincheuse. Mais maintenant que suis au beau milieu
de mon troisième acte, je réalise que je n'ai jamais été aussi heureuse. J’éprouve
un puissant sentiment de bienêtre. Et j'ai découvert que lorsqu'on vit la
vieillesse, contrairement à quand on la contemple de l'extérieur, la peur
s'estompe. On réalise que l'on est toujours soi-même -- voire plus que jamais.
Picasso a dit : «Il faut beaucoup de temps pour devenir jeune.» (Rires)
Je ne veux pas embellir le vieillissement. Évidemment,
il n'y a pas de garantie que cela puisse être un moment d'épanouissement et de
croissance. Il y a un facteur de chance. Il y a bien sûr un facteur génétique. Un
tiers en fait est lié à la génétique. Et il y a bien peu qu'on puisse y faire. Mais
cela veut aussi dire qu'il en reste deux tiers sur lesquels on peut agir pour
mieux s'en tirer pendant le troisième acte. Nous discuterons de ce que nous
pouvons faire de ces années supplémentaires pour qu’elles soient vraiment réussies
et utilisées pour créer une différence.
Maintenant, laissez-moi vous parler de l'escalier,
ce qui peut paraître comme une métaphore douteuse considérant le fait que les ainés
peinent à gravir des escaliers. (Rires) Y compris moi-même.
Comme vous le savez peut-être, le monde entier
fonctionne selon une loi universelle : l'entropie, deuxième loi de la
thermodynamique. L'entropie implique que tout dans le monde, absolument tout, est
dans un état de déclin et de délabrement, d'où la courbe. Il n'existe qu'une seule exception à cette loi universelle, il s'agit
de l'esprit humain, lequel continue d'évoluer -- d'où l'escalier -- nous transportant
vers la plénitude, l'authenticité et la sagesse.
Voici un exemple de ce que je veux dire. Cette
ascension peut survenir même en cas de difficultés physiques extrêmes. Il y a
environ trois ans, j'ai lu un article dans le New York Times. C'était à propos
d'un homme du nom de Neil Selinger -- un
avocat retraité âgé de 57 ans. Il
avait rejoint un groupe d'écrivains du Collège Sarah Lawrence et se découvrit une
vocation d'auteur. Deux ans plus tard, il reçu un diagnostic de sclérose
latérale amyotrophique (SLA), aussi connue sous le nom de maladie de Lou
Gehrig. Il s'agit d'une maladie terrible. C'est fatal. Ça ruine le corps, mais l'esprit
reste intact. Dans cet article, M. Selinger a décrit ce qui lui arrivait ainsi,
et je cite : «Tandis que mes muscles
s'affaiblissaient, mon écriture a gagné en force. Alors que je perdais peu à
peu ma capacité de parler, j'ai trouvé ma voix. Tandis que je régressais, j'ai
grandi. Alors que je perdais tant, j'ai enfin commencé à découvrir qui
j'étais.» Pour moi, Neil Selinger est le parfait exemple de cette ascension
dans l’escalier du troisième acte.
Chacun de nous naît avec un esprit, mais parfois,
il est bafoué par les épreuves de la vie, la violence, l'abus et la négligence.
Peut-être nos parents ont-ils souffert de dépression. Peut-être étaient-ils
incapables de nous aimer au-delà de nos performances en ce monde. Peut-être
souffrons-nous toujours d'une blessure psychique. Peut-être avons-nous le
sentiment de n'avoir pas tourné sur la page sur plusieurs de nos relations. Et
ainsi on peut se sentir inachevé. La tâche du troisième acte est donc peut-être
de finir de s'achever soi-même.
Pour moi, ça a commencé alors que j'approchais mon
troisième acte, à mon 60e anniversaire. Comment étais-je supposée le vivre ce
troisième acte? Qu'étais-je supposée accomplir? Et puis, j'ai réalisé que pour
savoir où aller, je devais d'abord savoir d’où je venais. Je suis donc revenue
en arrière pour étudier mes deux premiers actes, en essayant de voir qui j’étais
alors, qui j'étais vraiment -- pas ce que mes parents ou d'autres personnes me
disaient que j'étais, ou me traitaient comme j’étais. Mais qui étais-je donc?
Qui étaient mes parents – non pas en tant que parents, mais en tant que
personnes? Qui étaient mes grands-parents? Comment avaient-ils traité mes
parents? Ce genre de choses.
J'ai
découvert quelques années plus tard que les psychologues appellent ce processus
par lequel j'étais passée «faire un retour sur sa vie». Et ils disent que cela peut
donner une nouvelle signification, de la clarté et du sens à la vie d'une
personne. Vous découvrirez peut-être, comme ce fut le cas pour moi, que
plusieurs choses dont vous vous sentiez coupables, plusieurs choses que vous
pensiez de vous-mêmes, n'avaient en réalité rien à voir avec vous. Ce n'était
pas de votre faute; vous étiez correct. Et vous êtes capables de retourner en
arrière et de leur pardonner, et de vous pardonner à vous-mêmes. Vous êtes
capables de vous libérer de votre passé. Vous pouvez travailler pour changer votre
relation à votre passé.
Alors que j'écrivais sur ce sujet, je suis tombée
sur un livre intitulé «Man's Search for Meaning» par Viktor Frankl. Viktor
Frankl était un psychiatre allemand qui a passé cinq ans dans un camp de
concentration nazi. Et il a écrit, alors qu'il était dans le camp, qu’il
pouvait dire d’avance quelles personnes, si elles venaient à être libérées, se
remettraient de l’épreuve ou non. Et il a écrit ceci : «Tout ce que vous possédez dans la vie peut vous être retiré à
l'exception d'une chose, votre liberté de choisir comment vous allez réagir à
une situation. C'est cela qui détermine la qualité de la vie que nous avons
menée -- pas le fait d'avoir été riche ou pauvre, célèbre ou inconnu, en santé
ou malade. Ce qui détermine notre qualité de vie est notre façon de composer avec
ces réalités, à savoir, le sens qu'on leur donne, l'attitude réflexe à laquelle
on s’accroche, l'état d'esprit qu’on leur permet de déclencher.»
Le but
premier de ce troisième acte est-il peut-être de retourner en arrière et
d'essayer, si c'est approprié, de changer la relation au passé. La recherche en
science cognitive révèle que lorsque nous sommes capables de le faire, cela se
manifeste au niveau neurologique -- des voies neuronales se créent dans le
cerveau. Vous voyez, si vous avez, au fil du temps, réagi négativement à des
évènements ou à des personnes dans le passé, des voies neuronales ont été
créées à l’aide de signaux chimiques et électriques envoyés au cerveau. Au fil
du temps, ces voies neuronales se sont renforcées, pour devenir la norme -- et
ce, même si c'est mauvais pour nous parce que cela nous cause stress et
anxiété.
Par contre,
si l’on peut retourner arrière et modifier la relation, reconsidérer la
relation que l'on entretient avec les personnes et les évènements de notre
passé, les voies neuronales peuvent changer. Et si l'on peut maintenir les
perceptions plus positives de notre passé, cela devient la nouvelle norme. C'est
comme réinitialiser un thermostat. Ce n'est pas vivre des expériences qui nous
rend sages, c'est réfléchir à nos expériences qui nous rend sages -- et cela
nous aide à acquérir la plénitude, la sagesse et l'authenticité. Cela nous aide
à devenir ce que nous aurions pu être.
Nous les femmes, on commence notre vie intacte,
non? Je veux dire, en tant que petites filles, on s'affirme. On est empreinte
de pouvoir, d'assurance. On est maitre de notre destinée. Mais, très souvent, plusieurs,
si ce n'est la majorité d'entre nous, une fois à la puberté, on commence à
sentir le besoin de se conformer et d'être populaire. On perd ainsi la maitrise
de notre vie en nous soumettant plutôt aux autres. Mais maintenant, dans notre troisième acte, il est peut-être possible de
retourner là où tout a commencé et d'en prendre conscience pour la première
fois. Et si nous y parvenons, ce ne sera pas bénéfique que pour nous. Les
femmes âgées constituent la plus grande part démographique du monde. Si nous
pouvons retourner en arrière, nous redéfinir et atteindre la plénitude, cela va
créer un tournant culturel de par le monde, et donner un exemple aux plus
jeunes générations de sorte qu’elles puissent elles aussi reconsidérer leur
existence.
Merci
beaucoup!
***
Transcriptions multilingues disponibles sur le site de la vidéo.
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