29 juin 2011

S’arrêter

Arrêtez-vous et regardez autour de vous.
Regardez par la fenêtre sans cadre
D’une longue pause.
Laissez les images venir de l’intérieur
Plutôt que de courir après à l’extérieur.
Laissez-vous réorienter

De manière à ne plus être emporté
Par le flot des événements.
Si vous voulez voir différemment,
Vous devez regarder différemment.
Les vents, les eaux, le glacier blanc pur et le cœur de la montagne chantent quelque chose de plus grand que vos précieuses petites pensées.
~ Ji Aoi Isshi

***

La voix du pin chuchote toujours,
Pourtant, qui s’arrête pour écouter?
Car, lorsque l'esprit affairé se calme,
Le Diamant du Cœur, à l’intérieur
Reflète même le crépuscule qui tombe, v
oile l’œil et la branche,
Qui entend, mais n'écoute pas.
Si nous avançons avec courage et bonté,
Sans jamais cesser de nous émerveiller,
Nous suivons notre voie première.
Car la Voie du Sabre [kendo*] est double;
Comme la rose, nous avons des épines,
Et comme la rose, nous fleurissons.
~ Ji Aoi Isshi


Note 3 juillet : J'ignorais que le 2 juillet 2011 avait lieu le 17e Canadian National Kendo Championship en Colombie Britannique. Étrange synchronicité...
* Kendo – la Voie du Sabre, art martial dont le but est :  
De modeler l’esprit et le corps  
De cultiver le courage.
Et à travers un entraînement rigoureux  
De perfectionner l’art du kendo  
De tenir en haute estime la courtoisie et l’honneur   
De s’associer aux autres avec sincérité.
Et de toujours viser l’amélioration de soi.
Ainsi peut-on :
Aimer sa patrie et sa société;
Contribuer au développement de la culture  
Et promouvoir la paix et la prospérité pour tous.

La discipline, l’austérité et le don de soi font partie intégrante de cet art martial. La courtoisie et le respect en sont les principales valeurs. Le kendo aide également à développer la confiance en soi et la concentration. Les adeptes sérieux font d’ailleurs preuve d’une assurance tranquille peu commune.

Antidote au fanatisme

Prière à Dieu
Voltaire
Traité sur la tolérance
Chapitre XXIII

Ce n’est donc plus aux hommes que je m’adresse; c’est à toi, Dieu de tous les êtres, de tous les mondes et de tous les temps : s’il est permis à de faibles créatures perdues dans l’immensité, et imperceptibles au reste de l’univers, d’oser te demander quelque chose, à toi qui a tout donné, à toi dont les décrets sont immuables comme éternels, daigne regarder en pitié les erreurs attachées à notre nature; que ces erreurs ne fassent point nos calamités. Tu ne nous as point donné un cœur pour nous haïr, et des mains pour nous égorger; fais que nous nous aidions mutuellement à supporter le fardeau d’une vie pénible et passagère; que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants, entre tous nos usages ridicules, entre toutes nos lois imparfaites, entre toutes nos opinions insensées, entre toutes nos conditions si disproportionnées à nos yeux, et si égales devant toi; que toutes ces petites nuances qui distinguent les atomes appelés hommes ne soient pas des signaux de haine et de persécution; que ceux qui allument des cierges en plein midi pour te célébrer supporte ceux qui se contentent de la lumière de ton soleil; que ceux qui couvrent leur robe d’une toile blanche pour dire qu’il faut t’aimer ne détestent pas ceux qui disent la même chose sous un manteau de laine noire; qu’il soit égal de t’adorer dans un jargon formé d’une ancienne langue, ou dans un jargon plus nouveau; que ceux dont l’habit est teint en rouge ou en violet, qui dominent sur une petite parcelle d’un petit tas de boue de ce monde, et qui possèdent quelques fragments arrondis d’un certain métal, jouissent sans orgueil de ce qu’ils appellent grandeur et richesse, et que les autres les voient sans envie : car tu sais qu’il n’y a dans ces vanités ni de quoi envier, ni de quoi s’enorgueillir.

Puissent tous les hommes se souvenir qu’ils sont frères! Qu’ils aient en horreur la tyrannie exercée sur les âmes, comme ils ont en exécration le brigandage qui ravit par la force le fruit du travail et de l’industrie paisible! Si les fléaux de la guerre sont inévitables, ne nous haïssons pas, ne nous déchirons pas les uns les autres dans le sein de la paix, et employons l’instant de notre existence à bénir également en mille langages divers, depuis Siam jusqu'à la Californie, ta bonté qui nous a donné cet instant.

Extrait d’un commentaire :
À l’occasion de la mort de Jean Calas, Voltaire, rédige le «Traité sur la tolérance» en 1763. Cette œuvre ouvre une réflexion sur la religion et les fanatismes. Il a voulu dénoncer les fanatismes religieux, pour plaider la cause des protestants et de toutes les autres religions. Dans cet extrait, intitulé «Prière à Dieu», Voltaire remet essentiellement en cause les différentes formes d’intolérance religieuse à travers la forme d’une prière; cette prière, apparemment adressée à Dieu est, en réalité, un appel pathétique aux hommes, un appel à la tolérance et à la fraternité.

[L’affaire Calas : un jeune homme, Marc Antoine Calas, a été retrouvé pendu chez lui, et on a accusé son père, Jean Calas, un protestant, d’avoir assassiné son fils, pour l’empêcher de devenir catholique. Jean Calas a été condamné au supplice de la roue (écartèlement) et Voltaire a décidé de reprendre toute l’enquête car il était convaincu qu’il était innocent. Au bout de trois ans d’enquête, d’effort, on a réhabilité Jean Calas.] 

28 juin 2011

Pas fou...

«Il vous reste un espoir : la réincarnation.»

Ah, ce cher Jim, imbattable dans sa catégorie...

27 juin 2011

Pour en finir avec l’agonie

Saga du mourir dans la dignité (suite)

[Détails de cette triste histoire : messages des 23, 25, 27 mai et 14 juin 2011, ainsi que «Euthanasie - À qui appartient ce corps?» http://situationplanetaire.blogspot.com/2010/09/qui-appartient-ce-corps.html 

Maintenant 42 jours que ma mère est hospitalisée en attente d’être acheminée vers un CHSLD (soins de longue durée). Espérons qu’elle ne se rendra pas jusque-là…

Étant donné qu’on ne peut/veut pas aider ma mère à mourir dans la dignité, et pour en finir avec son agonie, elle refuse désormais toute nourriture. Faut le faire, à 90 ans!

Samedi matin ma mère ayant subi une crise d’angine, une infirmière lui a sauvagement flanqué une piqûre dans la fesse sans l’avertir ni la préparer! Extrêmement douloureux.

On pourrait facilement croire que le personnel médical soit largement constitué de psychopathes, c’est-à-dire, d’individus exempts d’empathie et de compassion. Et nous restons des témoins impuissants et révoltés devant cette brutalité dispensée par des robots exécutant les tâches d’un simple job. Néanmoins, je ne veux pas être injuste. Il y a également du personnel bienveillant. Mais il suffit de tomber sur quelques individus indifférents à la souffrance d'autrui pour basculer dans le jugement. Je n'y échappe pas... même si c'est temporaire.  

Toujours est-il que le 18 juin dernier, ma mère était désemparée. Elle s’était fait voler ses articles de toilette, dont sa brosse à dents, son dentifrice et ses lunettes, par sa voisine de chambre. Une femme atteinte de démence assez avancée, manifestement capable d’agressivité, j’en ai été témoin.

Je suis donc allée au poste infirmier de l’étage pour signaler le problème. L’infirmière avait l’air de s’en ficher, elle riait même, m’expliquant que cette femme était un peu fêlée mais pas vraiment dangereuse. J’ai haussé le ton pour demander qu’on remplace cette patiente par une personne tranquille. Lorsque je suis allée vendredi dernier, c’était fait. Toujours ça de gagné.

Quelqu’un me racontait qu’on avait jumelé une patiente ayant subi une chirurgie cardiaque à un patient schizophrène qui se cachait régulièrement sous son lit. Facile de récupérer en pareille condition… Quel manque de discernement (ou de gros bon sens), c’est incroyable.

Je me permets de publier la lettre d’une dame dont la mère est logée en CHSLD et qui dénonce ce mixage de patients sains d’esprit avec des déficients mentaux, puisque j’ai moi-même souvent vu pareilles aberrations.

***
Publié le 25 juin 2011 à 12h31

Sans défense

Francine Lanoix
Résidante de Laval, l'auteure adresse sa lettre ouverte aux ministres de la Santé, Yves Bolduc, et des Aînés, Marguerite Blais.
La Presse

Ma famille et moi, nous désirons vous faire part d'une situation inquiétante qui nous fait craindre pour la sécurité de notre mère, placée dans un CHSLD de Laval en janvier dernier. Nous ne le nommerons pas, car nous savons que la situation est la même dans tous les autres CHSLD du réseau public.

Dans ces établissements, selon le mandat qui leur a été confié par le gouvernement du Québec, on place indifféremment les unes à côté des autres les personnes non autonomes, qu'elles soient saines d'esprit ou non, peu importe qu'elles souffrent de démence et qu'elles soient violentes et potentiellement dangereuses pour les autres.

En plaçant notre mère dans un CHSLD, nous espérions au moins atténuer ses inquiétudes et compenser un peu le traumatisme qu'elle vivait, en l'assurant qu'elle y serait en sécurité, qu'elle aurait droit à son intimité, à la paix et à la quiétude. Or, nous avons constaté que ce n'est pas le cas, à la suite d'au moins quatre incidents violents impliquant des résidants dont la chambre est à proximité de celle de ma mère.

Un homme s'est introduit dans la chambre de ma mère en son absence (les chambres ne ferment pas à clé) et mes parents l'ont trouvé en train de fouiller dans les tiroirs lorsque mon père a ramené ma mère.

Une femme s'est introduite dans la chambre pendant que ma mère et moi y étions; elle refusait de sortir et est devenue violente quand on a tenté de la chasser. Il a fallu faire intervenir le personnel.

Ma sœur a été témoin, en présence de ma mère, d'une bagarre où une résidante en a battu une autre.

Pendant que nous discutions paisiblement au balcon de la résidence, une résidante qui avait échappé à la vigilance du personnel est venue nous insulter et nous agresser verbalement. Elle aussi refusait de partir. J'ai alors appelé l'infirmière qui venait elle-même d'être agressée physiquement par cette femme en tentant de lui arracher les mains d'autour du cou d'une autre résidante qu'elle était en train d'étrangler.

Nous dénonçons vigoureusement cette situation qui est inacceptable. Ma mère et toutes les autres personnes âgées qui vivent le même sort sont sans défense. Elles sont prises en otages par le «système». Sous prétexte qu'elles sont non autonomes et donc placées en CHSLD, on bafoue leurs droits les plus élémentaires à la sécurité au moment où elles en ont le plus besoin. On leur fait courir des risques graves et on menace leur santé et leur vie.

Il y a pourtant une solution simple: le CHSLD où réside ma mère comporte plusieurs étages, chacun divisé en trois sections. Il serait facile de placer à des étages différents toutes les personnes saines d'esprit et toutes les personnes potentiellement dangereuses ou violentes.

Lorsque j'ai informé l'un des cadres du CHSLD de la situation et que je lui ai fait cette suggestion, il m'a dit qu'il n'y pouvait rien, que tel était le mandat qu'ils avaient reçu du ministère de la Santé: recevoir et placer côte à côte toutes les personnes physiquement non autonomes, sans tenir compte de leur santé mentale et des risques qu'elles font courir aux autres résidants. Il a reconnu lui-même qu'il y avait de tels risques et que ma mère n'avait d'autre choix que de s'en accommoder au péril de sa vie et de sa santé.

Qu'est-ce qu'on attend pour changer la situation? Faut-il, une fois de plus, un drame pour que les choses bougent? Faut-il que ma mère ou une autre résidante se fasse battre ou étrangler avant que le gouvernement agisse?

***
Pour conclure, une excellente parodie du système de santé, par l’humoriste Laurent Paquin – un extrait des «Parlementeries»
http://www.youtube.com/watch?v=2Qig5z7AfFQ&feature=related  

24 juin 2011

T'as faim?

«T’as faim? Mange ta main, garde l’autre pour demain!»  
Une vieille boutade de bancs d’école! 
Stupide… mais était-elle prémonitoire à notre présent? 

En réponse à la nucléo-schisto-mania et à l’infernalia agroalimentaire qui en résulte, voici un article de Pierre Rabhi. Nul besoin d’être un «bolé scientifique» pour comprendre!

Pierre Rabhi, photo de son site

J'ai un énorme contentieux avec la modernité
Par Pierre Rabhi le vendredi 14 janvier 2011, 16:33

Je ne partage pas l'idée selon laquelle l'économie de marché à sorti le monde de la précarité. Je suis témoin du contraire. Dans cette oasis du Sud algérien où j'ai grandi, j'ai vu une petite société pastorale bouleversée par l'arrivée de l'industrie houillère. Mon père, qui faisait chanter l'enclume pour entretenir les outils des cultivateurs, a dû fermer son atelier pour s'abîmer dans les entrailles de la terre. Au Nord comme au Sud, des hommes ont été consignés pour faire grossir un capital financier dont ils n'avaient que des miettes. Ils y ont perdu leur liberté, leur dignité, leurs savoir-faire. J'avais 20 ans quand j'ai réalisé que la modernité n'était qu'une vaste imposture.

Je n'ai cessé, depuis, de rechercher les moyens d'échapper au salariat, que je considère, à tort ou à raison, comme facteur d'aliénation. C'est ainsi que je suis devenu "paysan agroécologiste sans frontières". Depuis trente ans, j'enseigne en Afrique des techniques que j'ai débord expérimentées sur notre ferme ardéchoise. Je rencontre des agriculteurs pris dans le traquenard de la mondialisation. Des hommes à qui l'on a dit : "Le gouvernement compte sur vous pour produire des devises avec des denrées exportables. Vous devez cultiver plus d'arachide, de coton, de café. Il vous faut pour cela des engrais, des semences, des pesticides." Dans un premier temps, on leur distribue gratuitement. Cadeau empoisonné. Car, à l'évidence, la terre est dopée et la récolte est plus abondante. Impressionné, le paysan retourne à la coopérative. Cette fois, les produits miracles sont en vente, à prix indexé sur celui du pétrole qui a servi à produire des engrais. "Tu n'as pas d'argent? On va te les avancer et on déduira de la vente de ta récolte."

Le paysan sahélien qui cultivait un lopin familial se retrouve alors propulsé par la loi du marché dans la même arène que le gros producteur de plaines américaines ; endetté, puis insolvable. On a ainsi provoqué une misère de masse, bien au-delà de la pauvreté. Le travail que nous faisons au Burkina Faso, au Maroc, au Mali et, depuis peu, au Bénin et en Roumanie, consiste à affranchir les agriculteurs en leur transmettant des savoir-faire écologiques et en réhabilitant leurs pratiques traditionnelles.

Pendant des siècles, on a su travailler la terre sans intrants et sans la crise qui affecte aujourd'hui même les pays dits prospères. Je réfléchis à la création d'un modèle qui s'appellerait "un hectare, une famille, un habitat". Demain, on ne pourra plus assurer les retraites, les indemnités de chômage. Il faudra réapprendre à vivre avec un potager, un verger, un clapier, un poulailler, une ruche et des petits ruminants. Retrouver une performance qui ne se fonde pas sur une croissance illusoire mais sur la capacité à satisfaire ses besoins avec les moyens les plus simples.

 Pierre Rabhi
***
Un de ses poèmes :
Des songes heureux pour ensemencer les siècles...
Sachez que la Création ne nous appartient pas, mais que nous sommes ses enfants.
Gardez-vous de toute arrogance car les arbres et toutes les créatures sont également enfants de la Création.
Vivez avec légèreté sans jamais outrager l’eau, le souffle ou la lumière.
Et si vous prélevez de la vie pour votre vie, ayez de la gratitude.
Lorsque vous immolez un animal, sachez que c’est la vie qui se donne à la vie et que rien ne soit dilapidé de ce don.
Sachez établir la mesure de toute chose.
Ne faites point de bruit inutile, ne tuez pas sans nécessité ou par divertissement.
Sachez que les arbres et le vent se délectent de la mélodie qu’ensemble ils enfantent, et l’oiseau, porté par le souffle, est un messager du ciel autant que la terre.
Soyez très éveillés lorsque le soleil illumine vos sentiers et lorsque la nuit vous rassemble, ayez confiance en elle, car si vous n’avez ni haine ni ennemi, elle vous conduira sans dommage, sur ses pirogues de silence, jusqu’aux rives de l’aurore.
Que le temps et l’âge ne vous accablent pas, car ils vous préparent à d’autres naissances, et dans vos jours amoindris, si votre vie fut juste, il naîtra de nouveaux songes heureux, pour ensemencer les siècles.
Pierre Rabhi, Extrait du Recours à la Terre, Terre du ciel, 1995
Son dernier livre :
Terre Mère, homicide volontaire?
Nouvel ouvrage de Pierre Rabhi. Entretiens avec Jacques-Olivier Durand. Editions le Navire. "De quoi manque le plus notre monde? D'humain ! ... Humain, humanisme, humanité... autant de termes qui ont la même racine qu'humus, cette vitamine indispensable à la mince couverture de terre qui, à la surface de notre planète, assure notre survie." Dans cet ouvrage, Pierre Rabhi en appelle aux consciences, particulièrement à celles des jeunes, pour que l'humain se réconcilie avec la nature. Pour que chacun cultive, là où il vit, une "oasis d'humain dans ce désert d'inhumanité".
Son site - à lire de A à Z :
http://www.pierrerabhi.org/blog/index.php?post/2011/01/14/Jai-un-enorme-contentieux-avec-la-modernite

23 juin 2011

Haïku Portugais

Fascinant le Fado.

Destin, fatalité?
Lawton McCowl disait : «Le Fado c’est la vie».
La vie dans le passé et la doléance de ce qu’on croit perdu à jamais.
Pourtant…

Quoiqu’il en soit, ce chant traditionnel poétique me fait penser au haïku de par son extrême simplicité. En réalité, c’est ce qui lui donne sa richesse et sa profondeur.

Le nostalgique Fado Menor s’interroge, entre autres, sur l’âme et la nature éphémère de nos désirs toujours exposés à la destruction (par des forces hors de notre contrôle). Le mélodrame passionnel y tient une place d’importance, de même que certaines grandes vérités.


À titre d’exemple, quelques strophes de Fado Menor (menor pour mode mineur, associé en musique à la tristesse, au chagrin, etc.)  

Le vent souffle si fort
Que je ne trouve pas de paix
Quelque chose dans mon esprit
Est prêt à s’arrêter
Peut-être que ce qu’on appelle l’âme
Croit que la vie est réelle
Peut-être que c’est ce calme
Qui fait vivre mon âme
Il souffle un vent trop violent
J’ai peur de mes pensées
Mon mystère s’approfondit
Si je me perds dans mes pensées
Le vent qui passe et oublie
La poussière qui monte et retombe
Ah que j’aimerais
Savoir ce qui s’agite en moi

***
Reviens vie que j’ai vécue
Que je puisse revoir
Cette vie perdue
Que je n’ai pas su vivre
J’aimerais tant
Revenir en arrière
Ô ce temps
Il me manque tant
Le printemps revient toujours
Mais la jeunesse ne revient jamais
Le temps passe
Nous refusons de le voir
On rit, on pleure
Mon Dieu, comme le temps passe
Disons-nous parfois
Mais en réalité
Le temps est immobile
Et nous ne faisons que passer

[Commentaire : frappant comme les trois dernières lignes résument la «réalité du temps» en très peu de mots]

Crédit de traduction française des strophes :
Josiane Bardon  
Film Fados de Carlos Saura

Je suis une inconditionnelle de ce réalisateur.
De la beauté, de la beauté et encore de la beauté…
La perfection de l’imperfection humaine.

***
Autre stance - non extraite de ce film :

Fado d’amour
Mon corps n’est qu’un bateau sans port
Quand tu n’es pas là
Ton corps n’est qu’un désert
Quand je ne le rencontre pas
Tes yeux sont mémoire de désirs
Que je ne vois plus
Mes yeux sont les larmes du Tage
Que je revois toujours

22 juin 2011

Pater noster, Mater nostra

Un retour à la catégorie fêtes «obligées», peu révélatrices de l’amour qu’on peut ressentir envers nos proches mais qui rapportent des milliards de dollars aux commerçants. Donner des gadgets ne prouve rien… (Voyez l’article «Les Fêtes», 13 décembre 2010)

Fête des pères
Fête des mères
Une cravate pour Pépé
Un parfum pour Mémé
Le tour est joué! 

«Ton père et ta mère tu honoreras» préconise un commandement de l’Église – qu’on retrouve formulé autrement dans diverses cultures.

Les enfants doivent-ils honorer des parents bourreaux?

Actuellement, la quantité de procès corrélés à la maltraitance d’enfants, allant des sévices corporels et psychologiques jusqu’aux meurtres qualifiés, montre que beaucoup de parents souffrent d’un manque de maturité tel, que leur confier la garde de leurs propres enfants devient une entreprise à haut risque.

Mark Twain disait :
«Si ce n’était de l’alcool, la terre serait beaucoup moins peuplée» et
«La familiarité fait naître le mépris – et les enfants».

On peut notamment penser au glorieux party de bureau avec son importante contribution aux naissances involontaires...

Nous touchons donc ici à la poignante misère des «enfants non désirés», car même les «désirés» sont parfois maltraités, voire, assassinés par leurs parents. (Sans parler de l’inceste entre père/fille ou mère/fils, le second n’étant pas si rare qu’on le croit semble-t-il.) Il pourrait y avoir un lien direct entre immaturité sexuelle et immaturité parentale...

Ne vaudrait-il pas mieux tuer un foetus «dans l’œuf» au lieu de tuer un enfant une fois qu’il a commencé à vivre, et mieux encore, utiliser la contraception? Je n’arrive pas à croire qu’en 2011, certaines religions «charismatiques» condamnent encore la contraception et l’avortement.

Malheureusement, il est vrai que la procréation tous azimuts fournit du bétail juvénile qui fait les belles heures de diverses industries – pédophilie et prostitution, guerre, fabrication d’objets polluants, et ainsi de suite. De la main d’œuvre à bon marché, voire, gratuite.

Quelle sorte de monde avons-nous créé pour l’amour du ciel!

***
Pour conclure cette réflexion, je vous propose un condensé du livre suivant (source : Stéphanie Martin, journal Le Soleil / Québec; 11 février 2008:

Parents toxiques: comment se libérer de leur emprise
SUSAN FORWARD



«Mes parents sont toxiques.» L’affirmation, lourde de sens, vient d’Étienne, qui a coupé les ponts avec ses parents pendant 10 ans. Sans le savoir, il empruntait l’expression de la psychothérapeute et auteure américaine Susan Forward.

«Existe-t-il un mot plus approprié pour décrire les parents qui infligent à leurs enfants des traumatismes, des abus et un dénigrement continuels?» écrit-elle dans son livre Parents toxiques, dans lequel elle identifie les divers types de parents nocifs. D’abord, ceux qui sont déficients: ils sont incapables de répondre adéquatement aux besoins physiques et émotionnels de leurs enfants et, pire, exigent de ceux-ci qu’ils prennent soin d’eux. Dans ce contexte, les rôles familiaux sont inversés et les enfants perdent leurs repères, leurs balises.

Il y a également les parents dominateurs qui exercent une autorité excessive et manipulent, car ils sont incapables de laisser l’enfant faire ses propres expériences. Leur crainte d’être abandonnés ou de n’être plus nécessaires les pousse à étouffer toute tentative d’indépendance de la part de leur progéniture. «C’est pour ton bien», répètent-ils. Les enfants, eux, se sentent impuissants, craintifs, anxieux, et recherchent désespérément l’approbation de leurs parents.

L’auteur cible aussi les parents alcooliques, violents, abuseurs et incestueux. Dans tous ces cas, la confiance de l’enfant envers l’adulte qui devrait être son protecteur est fortement ébranlée, écrit la Dre Forward. Souvent, le secret qui entoure la très pénible réalité que vivent ces enfants est malsain. Et il est fréquent qu’ils en gardent des séquelles psychologiques profondes jusqu’à l’âge adulte.

Reprendre le contrôle

Pour briser le cercle vicieux, Susan Forward encourage à se libérer des parents toxiques pour reprendre le contrôle de sa vie. Elle prend pour point de départ le fait qu’il n’est pas nécessaire de pardonner pour aller de l’avant. Le pardon inconditionnel, dit-elle, empêche les personnes d’exprimer des émotions comme la colère et le chagrin. Il n’est utile que quand les parents se sont amendés. La clé est de se soustraire au contrôle des parents toxiques.

Sans prôner une séparation complète, la Dre Forward estime qu’il faut rejeter la responsabilité sur les véritables coupables et cesser de porter le blâme de l’enfance malheureuse. Puis, quand le temps est venu, il faut en venir à la confrontation. C’est-à-dire avoir le courage d’affronter les parents et de dire la vérité. Et aussi de poser les limites des relations qu’on veut entretenir avec eux.

À partir de là, écrit-elle, l’important est de briser le cercle vicieux. L’enfant devenu parent à son tour doit protéger ses propres enfants et ne pas reproduire le schéma toxique qu’il a lui-même expérimenté.

***
COMMENTAIRE

Par ailleurs, il y aurait beaucoup à dire sur les enfants eux-mêmes devenus toxiques grâce aux médias qui ne cessent de promouvoir la violence sous toutes ses formes. Certains parents paient cher la facture d’hébergement de leurs tortionnaires... notamment avec des «Tanguy» encore plus manipulateurs que lui.

20 juin 2011

Symbolique florale 1

Il est dans la nature humaine non seulement de vivre et de se reproduire, mais aussi de chercher des réponses aux mystères de l’Univers. Nombre de ces mystères sont au-delà de toute explication, aussi l’être humain utilise-t-il le langage des symboles pour les représenter. Qu’il vive dans une société industrialisée ou dans une communauté traditionnelle ayant peu évolué depuis des millénaires, l’homme s’entoure de signes, d’images et d’idées souvent éminemment symboliques. La plupart d’entre nous ignorent généralement la signification – et souvent la présence même – de ces signes, et ainsi tout un arrière-plan culturel nous échappe-t-il.

Un signe est un objet ou une idée qui, de la manière la plus directe possible, représente ou désigne un autre objet. Un symbole est nettement lié à un signe et les deux mots sont souvent utilisés l’un pour l’autre, mais le symbole est quelque chose qui, à travers sa nature ou son apparence, reflète ou représente quelque chose de plus profond que lui.

Au fil des siècles, les symboles ont gagné en signification et en complexité, influencés par les différents contextes culturels. Cependant, les sujets de préoccupation sont restés relativement constants : fécondité de la race humaine, fertilité du sol, naissance, vie, mort. Dans le monde entier, les symboles on été reconnus pour leur aptitude à traduire et à représenter les vérités profondes.

La nature

La nature est un trésor dans lequel l’homme a puisé de nombreux symboles. Le soleil, la lune et les étoiles font partie du langage symbolique de toutes les civilisations. Les plantes et les fleurs sont riches de sens et souvent reliées à des thèmes comme l’amour ou la fertilité. Les animaux, avec leurs innombrables particularités physiques, ont inspiré dans chaque culture les associations symboliques les plus variées.


Mythes et légendes à propos des fleurs (fortement teintés de superstitions comme on peut le constater...)

De tout temps et dans chaque culture, les fleurs ont tenu une place particulière dans le cœur et la vie des individus. Dans les temps anciens, certaines fleurs étaient considérées comme les formes matérielles des dieux. Les gens les vénéraient, les employaient dans les rituels et leur attribuaient des pouvoirs magiques. Un bouton de fleur était le symbole d’une nouvelle vie, mais les fleurs elles-mêmes accompagnaient presque toujours les morts jusqu’à leur dernière demeure. Les motifs floraux décorent les lieux de culte et sont incorporés dans la bijouterie, les tissus et le mobilier. Le langage des fleurs est également une tradition fortement implantée dans chaque culture.

L’iris
Son nom vient de la déesse grecque de l’Arc-en-ciel qui transportait l’âme des femmes vers l’au-delà. Au Japon, l’iris est la fleur du printemps. Elle possède une valeur protectrice et purificatrice. Des plants d’iris étaient parfois cultivés sur le toit de chaume des maisons.

La jacinthe
Le dieu grec Apollon créa cette fleur à partir du sang de son ami Hyacinthe, qu’il avait accidentellement tué en lançant un disque. Chez les chrétiens, cette fleur est symbole de prudence.

Le myosotis
La légende raconte qu’un jeune homme se noya en voulant cueillir cette fleur pour sa bien-aimée. Le surnom de cette fleur, «ne m’oubliez pas!», rappelle ses dernières paroles. Elle est le symbole de l’amour désespéré.

La pensée
Comme son nom ,Indique, cette fleur est liée aux pensées, au souvenir et à l’amour. Placée sur les yeux d’un dormeur, les pensées forceront celui-ci à tomber amoureux de la première personne qu’il (ou elle) verra à son réveil. C’est également la fleur de la Saint-Valentin.

La violette
Une nymphe échappa à Apollon en se métamorphosant en violette. Elle est le symbole de l’humilité

Le cyclamen
Autrefois dédié à la Vierge Marie, le centre de cette fleur symbolisait son cœur ensanglanté. Employé jadis dans les philtres d’amour, il est aujourd’hui symbole de volupté.

L’orchidée
En Chine, l’orchidée est symbole de perfection et de fécondation. En Angleterre, les taches pourpres de ses pétales représentent le sang du Christ.

La passiflore
Souvent représentée dans les vitraux, cette fleur symbolise la passion du Christ. Les Espagnols pensaient qu’elle poussait au pied de la Croix, d’autres y reconnaissaient les blessures de Jésus, d’autres encore voient dans cette fleur l’appel divin à la conversion.

L’anémone
Son nom vient du grec anemos vent»). Elle est le symbole de la nature transitoire de la vie. Dans la mythologie grecque, les anémones naquirent du sang d’Adonis et représentent donc la mort. Fleur couleur de sang, elle symbolise la richesse de la vie ainsi que sa précarité.

La pivoine
Jadis, cette fleur possédait des pouvoirs magiques. Les Grecs l’employaient pour éloigner les mauvais esprits. Les Japonais l’associaient à la virilité, au bien-être matériel et à la chance. En Chine, symbole d’amour et de printemps, elle était liée au mariage et à la fécondité; on la retrouve souvent en motif dans les temples.

Le coquelicot
Cette fleur symbolise le dernier sommeil. La légende prétend que les innombrables coquelicots qui ont éclos après la bataille de Waterloo naquirent du sang des soldats au combat.

L’œillet
Dans les portraits de la Renaissance, il est symbole de fiançailles. En Chine, l’œillet est le symbole courant du mariage.

Source :
The Illustrated Book of Signs and Symbols
Dorling Kindersley limited
Recherche/édition : Emma Foa, Shirin Patel
Traduction : Jean-Jacques Schakmundès

Symbolique florale 2

Mythes et légendes à propos des fleurs


La rose

Plus que toute fleur, la rose et son symbolisme font partie intégrante de l’inconscient de l’humanité. Pour différente cultures, la rose représente la jeunesse, la pureté, la perfection et l’amour. Elle est la fleur des fiançailles, du mariage mais aussi de la mort. On la distille pour en faire des parfums, des remèdes et des philtres d’amour. En Occident, on disait qu’une rose suspendue au-dessus d’une table indiquait que tout secret devait être gardé, image qui a également inspiré la rosace centrale des plafonds victoriens. Dans le catholicisme, le rosaire était à l’origine composé de fruits d’églantier, une rose sauvage.

La rose rouge
La rose rouge, archétype de la beauté, était consacrée à Vénus. Aujourd’hui encore, on la considère comme une messagère d’amour. Dans les légendes chrétiennes, la rose rouge aurait été teintée par le sang du Christ et la Madone est parfois représentée avec une rose rouge à la main. Durant la guerre des Deux-Roses, en Angleterre (1455-1485), la rose était l’emblème de la maison Lancastre.

La rose blanche
Considérée comme la fleur de la lune, la rose blanche est symbole de charme, de virginité et d’intimité. Représentant l’eau, elle s’oppose parfois au feu de la rose rouge. Elle était l’emblème de la maison d’York durant la guerre des Deux-Roses.

La rose Tudor
La rose Tudor, avec ses pétales extérieurs rouges et ses pétales intérieurs blancs, symbolise l’union des deux maisons royales, les York et les Lancastre. Henry Tudor adopta cette rose comme emblème lorsqu’il épousa Elisabeth d’York.

La rose jaune
Symbole de l’État du Texas, aux États-Unis, la rose jaune est par ailleurs souvent associée à la jalousie et à l’infidélité. En 1759, l’ordre de la Rose d’Or fut créé par décret papal, une distinction destinée principalement aux souveraines catholiques.

Les pétales
À l’époque romaine, les pétales de rose étaient un bien recherché. Les dames les étalaient sur leur visage dans l’espoir de retarder l’apparition des rides. Lors de banquets, les convives en plongeaient dans leur vin pour éviter l’ivresse, et les armées victorieuses rentraient chez elles par des rues jonchées de pétales de roses.

La rosace
La rosace, par sa composition, associe le symbolisme de la rose à celui de la roue. Elle représente à la fois l’aspiration à la plénitude et à l’harmonie et la réalisation de ces sentiments. Les rosaces, qui apparurent en France avec l’art gothique, sont des structures symboles d’éternité. Elles ont été comparées aux mandalas, supports de la méditation en Orient, dans lesquels les innombrables lignes qui mènent à leur centre représentent les voies de l’illumination.


Le lotus

Le lotus est l’un des plus anciens symboles, notamment en Asie. Sa longue tige symbolise le cordon ombilical qui relie l’homme à ses origines, et sa fleur harmonieuse la pureté à laquelle aspire l’âme humaine. Le lotus aux mille pétales représente le soleil émergeant du cosmos. Dans la mythologie hindoue, le dieu Brahma naît d’une fleur de lotus qui avait poussé sur le nombril de Vishnu dormant à la surface de l’eau. Il symbolise le soleil et le cycle naissance-renaissance, car ses pétales s’ouvrent à l’aube et se referment au crépuscule.

La fleur de la perfection
Le lotus est une fleur immaculée qui pousse au milieu des marécages. Ses pétales s’ouvrent et se referment avec le jour. Son imagerie est un symbole puissant en Orient.

Dieux He-He
En Chine, le lotus représente la pureté, la perfection et la grâce spirituelle associées à l’abondance de l’été. Les deux He-He – jumeaux de prospérité – portent chacun un lotus dans une jarre. Les He-He eux-mêmes symbolisent la concorde et l’harmonie conjugale.

La première fleur d’Égypte
Souvent employée en décoration, le lotus incarne le pouvoir royal. Il fut associé aux dieux Nefertoum et Rê, ce dernier souvent représenté enfant dormant sur un lotus. Les chapiteaux des colonnes égyptiennes présentent des motifs à lotus, soit en bouton, soit en fleur.

Un symbole de fécondité
Le lotus est souvent associé, notamment en Inde, à la déesse mère.

Un joyau sur un lotus
Dans la cosmologie bouddhiste, le lotus symbolise la pureté et les eaux primales d’où est sortie toute vie. Sa beauté, née de la vase et de l’eau, l’associe aux aspirations et aux potentialités humaines. Çakyamuni, un avatar du Bouddha, est souvent représenté trônant sur un lotus qui indique la vérité de sa nature. Dans l’imagerie bouddhique, le lotus aux mille pétales soutient le Bouddha; une icône de l’illumination.

Source :
The illustrated Book of Signs and Symbols
Dorling Kindersley limited
Édition : Emma Foa, Shirin Patel
Traduction : Jean-Jacques Schakmundès

Symbolique florale 3

Mythes et légendes à propos des fleurs


Le narcisse
On disait autrefois que la douce et entêtante odeur du narcisse rendait fou. Le narcissisme est synonyme de vanité et la fleur symbolise ses dangers. Dans la Bible, le narcisse symbolise le printemps et donc l’amour humain ou divin. En Chine, sa floraison lors du nouvel an annonce beaucoup de bonheur.

Le mythe grec de Narcisse
Dans la mythologie, le jeune Narcisse repoussa les avances de la belle nymphe Écho, qui ne savait que répéter les derniers mots entendus. Pour punition, les dieux décrétèrent qu’il tomberait amoureux de sa propre image. Lorsque Narcisse se mira dans l’eau de la fontaine, il fut incapable de se détourner de son reflet, se languit et mourut. Il fut alors changé en une fleur qui prit son nom et il pousse sur les terrains humides.

Le lis
Le lis blanc est le symbole, en Occident, de la pureté et de la perfection. Il est aussi symbole de paix et d’innocence. Le lis serait né du lait de la déesse Junon. Pour les juifs, il est le symbole du peuple élu et, pour les chrétiens, celui de l’abandon en la providence divine. La fleur de lis était l’emblème de la monarchie française.

Le lis et la chrétienté
Dans le Nouveau Testament, Jésus parle du lis comme symbole de pureté et d’abandon en la providence divine. La blancheur du lis étant signe de pureté, aussi l’a-t-on souvent associé à la Vierge Marie. On le représente généralement dans les peintures de l’Annonciation, soit dans les mains de l’ange Gabriel, soit dans un vase. Le lis est la fleur de Pâques et on le voit souvent associé au glaive dans les représentations du Jugement dernier, symbolisant l’antagonisme entre l’innocence et la culpabilité Le lis est lié à l’idée de chasteté et se trouve être l’emblème d’un certain nombre de saints : Joseph, Catherine de Sienne, François d’Assise, Thomas d’Aquin et François Xavier.

Le jasmin
Cette fleur particulièrement parfumée est très appréciée en Inde. Elle est symbole d’amour et se retrouve dans les guirlandes nuptiales. En Chine, le jasmin est emblème de beauté.

La primevère
La primevère annonce le printemps et la fin de l’hiver. Elle est associée à la pureté et à la jeunesse. Dans le folklore germanique, celui qui la porte trouvera un trésor caché.

Le muguet
Il est la fleur d’Ostara, déesse nordique du printemps. Dans toute l’Europe, il représente le printemps et la vie nouvelle. En certains endroits, il se vend traditionnellement dans les rues lors de la fête du Travail, le 1er mai. Il représente l’espoir et la fin des peines.

Le magnolia
Cette fleur est, en Chine, symbole de beauté féminine et de gentillesse. Elle était la propriété exclusive de l’empereur de Chine et le don d’un plant de magnolia était considéré comme une distinction particulièrement remarquable. Le magnolia est également associé à une héroïne de l’opéra chinois qui porte le nom même de la plante : Mu-Lan. Mu-Lan se déguisa en homme pour combattre sous la bannière de son père.

La marguerite
Cette fleur, qui représente l’innocence, est souvent un des attributs de la Vierge. Elle est également l’emblème floral de la déesse mère germanique Freya.

Le chèvrefeuille
Offert entre fiancés, en France, le chèvrefeuille symbolise leur union et représente l’amour généreux. Il fut utilisé dans les philtres et charmes divers.

Le crocus
On croyait jadis qu’une guirlande de crocus protégeait de l’ivresse. Le crocus, communément appelé safran, était hautement prisé dans les temps médiévaux à cause de ses propriétés tinctoriales. Son jaune vif est symbole de lumière.

Le tournesol
Dans la mythologie grecque, Clytie se métamorphosa en tournesol, cette fleur qui est toujours tournée vers le soleil, parce qu’elle vouait un amour fou à Apollon, le dieu du soleil. Les écologistes anglo-saxons ont adopté le tournesol comme symbole car il absorbe les substances polluantes aériennes.

L’œillet d’Inde
En Chine, l’œillet d’Inde «fleur de dix mille ans», est symbole de longévité. Les mexicains disent qu’il est teinté du sang des Aztèques massacrés par les Espagnols en quête de l’or des Indiens.

Le chrysanthème
En Chine et au Japon, le chrysanthème est l’emblème de l’automne, de la longévité, de l’érudition et de la félicité. Les Japonais l’ont adopté comme emblème national et comme sceau de la famille impériale.

Source :
The illustrated Book of Signs and Symbols
Dorling Kindersley limited
Édition : Emma Foa, Shirin Patel
Traduction : Jean-Jacques Schakmundès

17 juin 2011

Le feu

Étrange. Juste avant que des incendies ne fassent rage dans les provinces de l’ouest en mai dernier, je relisais des passages du roman «Rue Deschambault» de Gabrielle Roy.

Une poignante description qui nous montre une fois de plus que nous n’avons en définitive aucun pouvoir sur les éléments lorsqu’ils se déchaînent.


Extraits

Le puits de Dunrea

Lorsque des personnages influents du Gouvernement, des chefs du bureau de Colonisation demandaient à visiter des colonies, papa toujours les emmenait à Dunrea. Et Dunrea aida sa carrière, lui valut de la considération… Les compagnies de chemins de fer dépêchèrent des photographes prendre des vues de la Rivière Perdue; et le Canadian Pacific Railway tira un grand nombre de photographies de Dunrea pour les envoyer un peu partout dans le monde, en Pologne, en Roumanie, tenter des immigrants. Car le C.P.R. faisait beaucoup d’argent à transporter des immigrants. Mon père rencontra un jour un pauvre Tchèque qui lui confia être venu au Canada rien que pour avoir vu une affiche bien tentante : une rivière, des blés dorés, des maisons comme «chez nous pourtant»… Et maintenant ce Tchèque travaillait dans une mine.
()
En ce temps-là, lui avait raconté papa [à Agnès], le feu de Prairies couvait toujours quelque part en Saskatchewan. Cette province si dépourvue d’eau de pluie, si venteuse, était vraiment la terre de feu. Tant elle était sèche, le soleil tout seul, jouant sur des pailles ou sur un tesson de bouteille, pouvait mettre la prairie en flammes! Et si un courant d’air un peu vif s’élevait alors, aussitôt le feu partait à courir comme le vent lui-même. Et le vent en cette partie du monde était déjà un fou furieux qui couchait les moissons par terre, déracinait les arbres et parfois arrachait leur toit aux bâtiments. Tout démoniaque qu’il fût, il laissait tout de même l’herbe rase au sol, quelque chose de vivant. Mais derrière le feu, il ne restait jamais que des carcasses de petits daims, de lièvres poursuivis par les flammes, rejoints par elles et qui mouraient parfois en pleine course… et longtemps ces carcasses empuantissaient l’air, car, là où le feu avait passé, même les oiseaux de proie se gardaient de venir manger les yeux des bêtes mortes. Ce spectacle était assez fréquent en bien des régions de la Saskatchewan, et le cœur avait peine à supporter une ruine si complète.

Les Petits-Ruthènes avaient toujours fait grande attention au feu; si, de temps en temps, ils devaient brûler des souches ou de mauvaises herbes, ils attendaient une journée bien calme; et, le feu ayant accompli son ouvrage, ils l’éteignaient en dispersant les braises, puis en jetant dessus de la terre fraîche. Du reste, dans leur oasis toujours humide, au murmure de la Rivière Perdue, comment auraient-ils pu vraiment craindre le feu?

Or cet été-là fut sec et brûlant. Même dans la Rivière Perdue l’eau baissa de plusieurs pieds. Et un feu s’alluma, par la seule faute du soleil probablement, à vingt milles au nord de Dunrea. Le vent poussa d’abord dans une autre direction. Mon père campait dix-huit milles plus loin, dans un territoire qu’il parcourait avec des arpenteurs. Dans la nuit il s’éveilla. Le vent avait changé. Il était plus violent et chargé d’une âcre fumée qui faisait mal aux yeux et à la gorge. Peu après arriva un messager à cheval. Il dit que le feu avançait vers Dunrea. Mon père sauta dans son break; il négligea de suivre le chemin assez plein de détours en cette partie du pays; autant qu’il le pouvait, il coupa court à travers les ronces, les petits marais asséchés; Dolly lui obéissait bien, quoiqu’elle fût blessée par la pointe aiguë des buissons. Derrière lui, comme il traversait ces savanes lugubres, mon père voyait le feu le suivre de loin et il entendait le grondement. Il pria pour la Rivière Perdue. Il espérait une autre saute du vent, qui porterait le feu ailleurs, n’importe où, sauf sur Dunrea. Ce genre de prière, convint-il, n’était peut-être pas une bonne prière. Pourquoi, en effet, prier pour ces Ruthènes plutôt que pour les pauvres fermes isolées sur la route de la Rivière Perdue? Le malheur qui frappe ceux qu’on aime, est-il plus grand, se demandait mon père, que celui qui frappe des inconnus?

Arrivant à Dunrea, il commanda aux hommes de prendre leurs chevaux, leurs charrues et de se hâter de labourer une large ceinture autour du village. Il mit d’autres hommes à creuser des tranchées. Le ciel était devenu tout rouge… et cela aidait les travaux puisqu’on y voyait comme en plein jour. Mais quel jour étrange! Quelle abominable clarté silhouettait les bêtes affolées, les hommes courant, le geste, l’attitude de chaque ombre agitée, mais sans révéler les visages, en sorte que les vivants paraissaient noirs sur l’horizon. Puis le feu prenant encore plus de force, il se divisa et vint de deux côtés à la fois sur la colonie. Papa commanda aux femmes de partir en emmenant les enfants, les vieillards. «Le moins de choses possibles, leur cria-t-il. Vite… laissez vos meubles… laissez tout…»

Mais combien il fut étonné par ces femmes qu’il avait cru si dociles! D’abord elles ne voulurent pas quitter les tranchées qu’elles creusaient, côte à côte avec les hommes. Papa courait de l’une à l’autre, en prenait même quelques-unes aux épaules et les bousculait un peu.

Oh, les femmes têtues! Dans leurs maisons, elles se mirent alors à ramasser cent objets inutiles : des matelas, des édredons, des marmites.

- Est-ce le temps de penser à cela! leur criait papa en colère.

Mais elles retournaient encore dans leur maison, l’une pour prendre sa cafetière, l’autre une tasse fine.

Les chariots, les petites voitures à deux roues, les bogheys furent remplis d’effets domestiques : là-dessus on juchait des enfants arrachés à leur sommeil, qui pleuraient, et des poules qui s’envolaient, et de jeunes cochons. Des femmes attachaient leur vache à l’arrière d’un chariot. Jamais, tant qu’il serait resté quelque chose à emporter, ces insoumises n’auraient consenti à partir. Papa courut fouetter les chevaux à l’avant de la caravane. Épouvantés, ils s’élancèrent dans la trouée au sud, entre les colonnes de feu qui peu à peu se rejoignaient.

Alors papa eut l’idée de mettre le feu aux récoltes au nord du village. Ainsi le feu irait à la rencontre du feu et peut-être s’épuiserait-il. Cette tactique avait déjà réussi en d’autres occasions. Il appela Jan Sibulesky, un des Petits-Ruthènes en qui il avait toujours eu la plus grande confiance, un homme de jugement, prompt à saisir le bon sens et le choix raisonnable.

- Vite, dit mon père à Jan Sibulesky, prenez avec vous trois ou quatre hommes et courez allumer le feu à tous les coins des champs de blé.

C’est à ce moment que les Petits-Ruthènes firent mine de ne plus comprendre papa. Jan comme les autres! Oh, les hommes têtus, cupides et fous! Dans leur pays, ils n’avaient rien possédé, ou si peu : un maigre hectare au versant aride des Carpathes pour nourrir toute une famille; et ils s’en étaient arrachés sans peine. Mais à présent qu’ils possédaient de tout : du foin, des betteraves à sucre, du blé magnifique, des granges pleines, de tout vraiment, ils ne voulaient absolument rien perdre.

- Mais si vous voulez tout garder, vous allez tout perdre, leur dit papa.

Et mon père devint comme furieux. Il gesticulait, hurlait des injures, en pensant peut-être que ces mots-là les Petits-Ruthènes les entendraient. Mais les insensés s’acharnaient à travers l’épaisse fumée à pousser encore leur charrue autour de la colonie. D’autres transportaient de l’eau de la rivière aux maisons; ils en arrosaient les murs; d’autres encore en tiraient du puits communal, au centre du village, qui était profond et presque glacé. Pensaient-ils que cette eau, si froide qu’elle faisait à l’extérieur du seau une buée, mieux que l’eau de la rivière rafraîchirait l’atmosphère? Alors papa tenta d’aller tout seul mettre le feu aux récoltes, mais les Petits-Ruthènes l’en empêchèrent; ainsi papa vit qu’ils avaient très bien compris ses ordres, qu’il était seul désormais parmi ces gens comme eux-mêmes l’étaient vis-à-vis de lui. Cette solitude dans le danger le désespéra. La chaleur augmentait. Parfois, des flammèches filaient au-dessus du village. Un grondement puissant emplissait l’air. Et tout était dans un désordre épouvantable; il n’y avait plus de maître, plus d’obéissance. Chacun s’épuisait en des efforts solitaires; quelques-uns attendaient le feu, une hache à la main. Puis le feu sauta d’un seul bond par-dessus une des tranchées; il vint s’abattre sur un toit de chaume; en un instant, cette maison fut tout illuminée à l’intérieur. Tout était perdu.

- Partez, partez cria papa aux hommes. Vous n’avez plus que le temps de vous sauver vous-mêmes. ()

Mais personne cette nuit devait lui obéir, même pas sa douce, son obéissante Dolly pour qui papa, quand il quittait Winnipeg, en route pour ses colonies, apportait des friandises, du sucre.

Alors il leva son fouet et il en donna un coup à Dolly, à l’endroit le plus sensible, dans les yeux. Elle partit, hennissant de douleur, de reproche. Et courant, se baissant pour échapper aux flammes, papa revint au centre de Dunrea. Ses cheveux, sa barbe, ses sourcils étaient roussis. Il respirait le moins possible en tenant un mouchoir humide contre sa bouche. Il atteignit le bord du puits. Se saisissant de la corde avec laquelle on montait des seaux d’eau, papa se laissa glisser à l’intérieur profond et frais. Il descendit au ras de l’eau. Presque immédiatement le grondement des flammes l’environna. Tout autour du puits l’herbe brûlait; la corde aussi commença de brûler; papa la vit se défaire, fibre par fibre, en petites spirales de cendres. Vite, il arracha des briques; il se creusa une sorte d’enfoncement où il réussit à prendre appui. Alors il coupa la corde aussi haut qu’il put. À ce moment même, il vit une ombre au-dessus du puits, parfaitement découpée. Il fut appelé par un long hennissement. «Oh!... Dolly! cria mon père, va-t-en, va-t-en, va-t-en!» Il détacha une brique qu’il lança à la tête de Dolly. Papa dit qu’elle se pencha pour voir d’où venait la voix furieuse, le projectile. Puis elle se cabra, elle se leva à une grande hauteur, tête et crinière dressées. Papa commença de sentir une odeur de chair brûlée.

Et il raconta comment l’intérieur du puits devint brûlant, l’air à ce point irrespirable qu’il dut descendre plus bas encore. La moitié de son corps gelait devenu inerte, cependant que sur sa tête pleuvaient des étincelles de feu… et il pensa que tout était vraiment fini. Papa dit qu’il s’était cru mort parce que soudain tout lui était indifférent. C’est ce qui l’angoissa le plus, quand il y repensa plus tard : que tout, au fond du puits, fut devenu si morne, si éteint, si extraordinairement silencieux. Il n’avait pas pensé à nous; il n’éprouvait que le repos, un repos si grand qu’on ne pouvait y résister. Voilà ses propres paroles : «Ni regrets, ni espoir, ni désirs : un état de repos complet.» Au fond du puits, c’est à peine s’il arrivait à se souvenir de la vie, d’avoir vécu. Et comment avoir le goût de revenir d’une si profonde indifférence! Papa se croyant mort s’étonnait tout juste que la mort fût si sombre, glaciale, vide… et si reposante… que dans la mort il n’y eut plus d’affections possibles. Au-dedans de lui c’était le désert, comme au-dessus de sa tête c’était aussi le désert à Dunrea.
()
«... Être mort, c’est ne plus avoir de soucis, enfin!»

Et papa avait sursauté en s’entendant lui-même parler; au son de sa voix, il avait compris qu’il n’était pas mort. À cause de l’enfant au bout de la rue, il avait fait l’effort démesuré pour s’attacher avec la corde aux parois du puits. Il s’était évanoui. Les Petits-Ruthènes, le lendemain matin, le trouvèrent dans le puits.

Quand papa ouvrit les yeux sur la désolation qu’était la Rivière Perdue, il crut à l’enfer. Curieusement, ce n’était pas au brasier de la veille, aux cris, aux ordres non suivis qu’il devait rattacher l’enfer, mais à ceci : un silence épais, comme inviolable, une terre sombre, noire partout, une horrible mort.

Se dressant sur la terre cuite où on l’avait étendu, papa essaya d’encourager ses Petis-Ruthènes; puisqu’ils n’avaient perdu la vie, ils n’avaient pas perdu l’essentiel. Mais ni lui-même ni les Petits-Ruthènes ne tenaient encore beaucoup à l’essentiel. Ils dirent que c’était quand même la vie qu’ils avaient perdue, dix années du moins de leurs vies… Et papa songea à s’informer des femmes : «Étaient-elles toutes en sécurité?» - «Oui, répondirent  les Petits-Ruthènes : elles étaient en sécurité, mais pleurant sur leurs douces maisons, leur bahuts, leurs coffres pleins de beau linge…»

Papa revint parmi nous… et cependant y revint-il jamais! () Seulement, il y eut ceci de très curieux : papa devenu comme étranger à la joie, si loin d’elle qu’il ne pouvait presque plus la reconnaître sur un visage, papa néanmoins était sensible à la souffrance.

Rue Deschambault
Gabrielle Roy
Flammarion, 1956

14 juin 2011

J’émigre en Suisse!

Saga du mourir dans la dignité (suite)

Euthanasier ne signifie pas tuer des civils à bout portant sur la rue; ça, c’est du vrai dérapage, tout le monde en conviendra…

Euthanasier signifie aider un individu (qui le demande) à quitter son corps (inutilisable) parce que son état ne lui permet pas de le faire lui-même et qu'on s'arrange pour le maintenir en vie coûte que coûte. On agira par compassion, ou par «gros bon sens» si l’individu est impotent et ne peut en faire la demande consciemment. Bien sûr, il ne s’agit pas d’ôter la vie aux personnes handicapées (toutes catégories confondues) contre leur gré si elles désirent vivre en dépit de leurs maux; ça, ce serait du dérapage aussi.

Parenthèse
Quand je pense au cas de Robert Latimer, je suis consternée de voir à quel point nos lois sont arriérées et barbares, et de constater que les «pro-vie» tous azimuts contribuent, peut-être inconsciemment, à torturer des gens en raison de croyances religieuses ou socioculturelles.

Source – Radio-Canada, février 2011 :
[Robert Latimer a été condamné pour meurtre au second degré pour avoir empoisonné sa fille, Tracy, au monoxyde de carbone. Il a toujours affirmé qu’il avait agi par amour et par compassion envers sa fille. «C’était difficile, mais ce n’était pas triste», a dit l’ancien fermier de la Saskatchewan en expliquant son geste, qui, à l’époque, avait soulevé un débat au pays.
      «C’est quelque qui devait arriver, selon moi. Les opinions divergent à ce sujet», a-t-il confié à la journaliste Anne-Marie Dussault.» C’était la bonne chose à faire. Elle en avait assez. C’était fini.» Robert Latimer explique ce que sa fille, qui ne pouvait ni parler, ni marcher, ni se nourrir, a dû traverser : «C’est une torture. Tracy avait subi beaucoup d’épreuves, des opérations au dos et des tiges dans la colonne.»
      Après deux procès, des appels successifs jusqu’en  Cours suprême et des années de prison, il est toujours en colère contre le système judiciaire et ceux qui osent condamner son geste. «On m’a accordé plus d’attention qu’à Karla Homolka», déplore-t-til, constatant que l’ex-conjointe de Paul Bernardo, condamnée pour son rôle dans le viol et le meurtre de deux adolescentes ontariennes, s’en est mieux tirée que lui. Karla Homolka est libre maintenant. Moi, j’ai une peine d’emprisonnement à vie et mes déplacements sont restreints à un rayon de 50 milles.
      Même s’il assure ne pas mener une croisade pour l’euthanasie, Robert Latimer applaudit le débat sur lequel se penche le Québec avec sa Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité. «On en fera jamais assez pour clouer le bec à ceux qui brandissent leur rectitude morale et leur image, ceux qui se moquent de ce que vit une personne.»] 

Latimer a obtenu une libération conditionnelle totale en décembre 2010. Bien sûr, sa fille ne pouvait pas lui demander verbalement de la libérer. Je ne peux oublier le documentaire où l’on voit les tortures infligées par la science médicale sans conscience à cette petite fille. Une horreur. Imaginons alors ce qu’on peut faire endurer aux animaux de laboratoire déclarés sans âmes…
Fin de la parenthèse

«Quand ta maison tombe en ruines, tu la quittes.»
(Film Au-delà de nos rêves)
Ainsi, ma mère n’en finit pas de se morfondre à l’hôpital. Elle sera acheminée vers un établissement de soins prolongés puis au mouroir. Rien de moins. À 90 ans, elle ne souhaite que mourir en paix étant donné qu’elle ne fait rien d’autre que dormir sous l’effet des opiacées, qui ne soulagent même pas les douleurs d’arthrose. Et, elle répète continuellement «pourquoi prolonger la vie d’un corps qui ne sert plus à rien?». (Voyez les messages «Dans les chaussures de la déprimée» et «Prolongation indue de la vie»

J’ai décidé de m’amuser, même si la situation est loin d’être comique. Comme le disait George Bernard Shaw : «La vie ne cesse pas d’être drôle quand les gens meurent pas plus qu’elle ne cesse d’être sérieuse quand les gens rient.» Quand je vais à l’hôpital et que je m’adresse à une nouvelle infirmière, je lui annonce que j’émigre en Suisse. Aussitôt on me dit : «Ah, vous avez rencontré un Suisse qui vous invite à vivre là-bas? Chanceuse!», et blablabla. (Drôle comme les gens scénarisent selon les patterns de films romantiques américains!) Je laisse donc spéculer un moment pour finalement déclarer : «Non, je veux simplement avoir le choix de mourir dans la dignité!» Alors là, j’aimerais bien avoir une caméra cachée pour filmer la tête qu’elles font!

À suivre... 

10 juin 2011

Histoire de mésanges

Tandis que nous voyons encore des oiseaux dans notre environnement…

Une histoire de Georges Barbarin extraite de son livre Vivre avec le divin (anecdotes et poésies témoignant de son appréciation de la vie «grand V»).

Je crois utile en premier lieu de partager sa définition de «Dieu» :

Qu’importe la définition de Dieu!

Qu’importe la définition de Dieu et le nom que lui donnent les hommes!
Qu’importent la hauteur des temples et la richesse des autels!
Qu’importe les chants sacrés!
Qu’importent les dogmes et les mystères!
Si mon esprit est précisément ce dogme, ce mystère, mon cœur cet hymne et cet autel!
Car je suis moi-même le temple de Dieu
Avec ses vitraux de lumière,
Ses colonnades invisibles,
Son prêtre,
Son parvis,
Avec sa Loi,
Son Saint des Saints,
Avec sa chambre secrète,
Ses sacrifices,
Son encens,
Son calvaire,
Et son Éden.

Georges Barbarin, 1950


La mésange ambassadrice

Intro de mise en situation (fin du texte précédant l’anecdote) :  
[Dès que je sors du sentier de lumière j’entre dans le hallier de ténèbres et celles-ci me retiennent jusqu’à ce que je regagne le sentier. Il est impossible que j’aie la même mentalité dans les ténèbres que dans la lumière. Ceci règle mes rapports avec les objets et les êtres, qui m’apparaissent digne de sympathie ou d’antipathie selon l’éclairage que je projette sur eux. Ceci étoffe également ma responsabilité puisque je modifie à mon gré l’éclairage. Mais ce qui m’est possible lorsque je suis moi-même dans la lumière de l’Esprit, m’est difficile lorsque je suis moi-même dans l’obscurité.]  

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Récemment encore j’en eus le vivant témoignage. Comme les pignons de la maison donnent tous sur la campagne, la plupart de nos fenêtres sont constamment ouvertes pour inviter le soleil à entrer. Mais le soleil n’est pas seul à profiter de la permission. Des souris en profitent pour s’introduire dans les chambres et, en dernière heure, une troupe de mésanges à tête noire a élu domicile dans la nôtre avec assiduité. L’effronterie de ces délicieux animaux n’a pas de limites. Chacun d’eux volette de la glace à l’armoire, de la table de toilette au poste d’eau. C’est froufrou continuel de petites ailes, uns inspection minutieuse de tous les objets par de petits becs. On court sur la couverture du lit, on essaie de déchiqueter un bout de dentelle, on bouscule une éponge, on cherche des vers dans les vieux meubles, le tout accompagné de menus cris vifs, aussi fins que du fil de verre et de petites crottes corrosives qui ponctuent chaque phrase du discours.

J’ai fini par trouver révoltante cette familiarité et ce sans-gêne, en dépit de mon entourage qui juge tout cela charmant. La vue du paravent, transformé en juchoir et constellé d’ornementations que son décorateur n’avait pas prévues, a mis le comble à mon impatience, puis à mon irritation. J’ai fermé les fenêtres durant un temps. Dès que je les ai ouvertes, les mésanges sont revenues. Un jour j’en ai surpris une et l’ai enfermée de longues minutes, pensant ainsi l’effrayer. Rien n’y fait et, l’autre soir, alors que nous gagnions notre couche, nous aperçûmes une mésange impassible juchée sur la tringle des rideaux.

En vain les miens plaidèrent la cause du petit oiseau, promirent qu’il serait bien sage, que la nuit était avancée et qu’il gèlerait bientôt, je ne pus supporter l’idée des souillures microscopiques. La baie fut grande ouverte sous la lune et la mésange mise dehors. Ce ne fut pas sans mal, au surplus; la bestiole fit tout pour ne pas être prise et pour rester juchée près des grands «frères» humains. On dut la saisir à la main et la poser sur une branche d’où elle partit, je ne sais où, avec un cri dépité.

Vérification des pouvoirs

Durant ce temps, j’étais hors de Dieu ou, plus précisément peut-être, je n’avais pas vu Dieu dans la mésange. Les reproches qu’on me prodigua m’ouvrirent les yeux peu à peu. Qu’est-ce qu’une crotte de plus ou de moins quand on entend battre des ailes? Je compris que j’avais manqué là une de mes plus fraîches prières à Dieu.

C’est très joli d’écrire de belles phrases et d’émettre de bonnes pensées. Il est encore plus beau de les vivre, même avec les infiniment petits. Aussi j’ai complètement changé de ton en ce qui concerne les mésanges. Je ne cherche plus à compter leurs déprédations mais à additionner leurs bienfaits. Oui, j’étais indigne de cette menue confiance, de ce marivaudage emplumé. Je ne crois pas cependant que les petits oiseaux m’aient gardé rancune de mon intolérance. La preuve, c’est que les miens sont entrés dans mon cabinet avec de triomphantes clameurs.

- Regarde, papa, m’ont-ils dit en brandissant mon verre à dents décoré de perles blanches, la mésange a mis son obole dedans.

Heureusement Dieu n’est pas vindicatif et la mésange pas rancunière. Dès la nuit suivante, je retrouvai la boule de plumes dans mes rideaux.

Depuis je me considère comme très honoré et n’ose plus fermer la fenêtre de ma chambre de peur, qu’au crépuscule, le petit hôte ne puisse entrer. Le matin, au jour, j’entends s’ébrouer notre mésange qui se réveille. J’allume l’électricité, l’oiseau tourne gentiment autour de nos têtes et heurte de temps en temps les carreaux. Je me lève alors et rabats les volets de la baie. La visiteuse sort comme une flèche et se pose sur le saule le plus voisin. Je l’appelle et nous conversons, elle dans sa langue d’oiseau, moi dans mon langage d’homme.

Et c’est, à travers le Père, un duo bien franciscain.

***
COMMENTAIRE

Dans le cas de Barbarin, des moustiquaires auraient suffit. Mais aujourd’hui, la délimitation de territoires entre humains et animaux devient totalement obsolète. La vertigineuse et inconsidérée croissance de la population humaine et notre mode de vie artificiel favorisant la déforestation et la destruction systématique des écosystèmes ont déjà éliminé de grandes quantités d’animaux.

Bienvenu sur la terre des hommes!
Nous occupons tout l’espace  
De béton et d’asphalte
Sans animaux ni nature…

Dès lors, je crois qu’il faut profiter au maximum du peu de temps qu’il nous reste pour apprécier la beauté des oiseaux et leurs chants.

Cette phrase de Voltaire m’a frappée l’autre jour (message «Question de perspective; Bêtes»; 28 mai) :
«Le serin à qui tu apprends un air, le répète-t-il dans l'instant? N'emploies-tu pas un temps considérable à l'enseigner? N’as-tu pas vu qu'il se méprend et qu'il se corrige?»

Durant une période où j’habitais à la campagne, je me suis amusée à enseigner de nouvelles notes à des oiseaux – merles d’Amérique, mésanges, etc. Il suffit de s’asseoir, d’écouter, de siffler les notes et de répéter. Il y a même un merle qui a lui-même ajouté des notes! Même si je ne suis pas une réincarnation de François d’Assise, ça marchait! Et à ma grande surprise, au printemps suivant, je reconnaissais mes élèves à leur chant. Je ne sais pas ce que signifiaient les notes ajoutées au répertoire de la pariade. Ont-elles amélioré le chant de séduction? Je l’ignore. Mais tous ces petits moments additionnés les uns aux autres m’ont procurée de nombreuses heures de plaisir.

Un article fort intéressant à ce sujet «Pleins feux sur… les chants d’oiseaux» :
http://education.mrnf.gouv.qc.ca/chronique/capsule/pleins-feux-sur-les-chants-des-23.html